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03/10/2019 | FRANCE | N°17LY03388

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 03 octobre 2019, 17LY03388


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon :

- d'annuler la décision par laquelle l'autorité administrative a implicitement rejeté sa demande du 2 juillet 2014 tendant à la reconstitution de sa carrière et à l'attribution du grade de major, à compter du 1er février 2011 ;

- de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 130 000 euros, en réparation des préjudices subis du fait du comportement fautif de l'administration, somme assortie des intérêts au taux légal à com

pter de la réception de sa demande préalable et de la capitalisation de ces intérêts ;

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon :

- d'annuler la décision par laquelle l'autorité administrative a implicitement rejeté sa demande du 2 juillet 2014 tendant à la reconstitution de sa carrière et à l'attribution du grade de major, à compter du 1er février 2011 ;

- de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 130 000 euros, en réparation des préjudices subis du fait du comportement fautif de l'administration, somme assortie des intérêts au taux légal à compter de la réception de sa demande préalable et de la capitalisation de ces intérêts ;

- d'enjoindre à l'administration de lui attribuer le grade de major au 1er février 2011 avec effet rétroactif, de procéder à la reconstitution de sa carrière et de lui verser le différentiel de solde que l'administration fera évaluer par ses services.

Par un jugement n° 1502843 du 5 juillet 2017, le tribunal administratif de Lyon a condamné l'Etat à verser à M. C... une somme de 5 000 euros augmentée des intérêts au taux légal, à compter du 4 juillet 2014, avec capitalisation de ces intérêts (article 1), mis à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 2) et rejeté le surplus de sa demande (article 3).

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 8 septembre 2017 et 12 octobre 2018, M. C..., représenté par Me F..., avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 5 juillet 2017 en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet susmentionnée ;

3°) d'enjoindre à l'administration de lui attribuer le grade de major au 1er février 2011 avec effet rétroactif, de procéder à la reconstitution de sa carrière et de lui verser le différentiel de solde que l'administration fera évaluer par ses services ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser l'indemnité susmentionnée de 130 000 euros avec intérêts au taux légal ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'annulation prononcée par le jugement du 15 janvier 2014 devenu définitif implique que l'administration lui attribue le grade de major au 1er février 2011 avec effet rétroactif, procède à la reconstitution de sa carrière et lui verse le différentiel de solde qu'elle fera évaluer par ses services ;

- il a perdu une chance sérieuse d'être promu au grade de major et justifie des préjudices de carrière, traitement et retraite subis à ce titre ;

- il justifie de troubles dans les conditions d'existence à hauteur de 20 000 euros et d'un préjudice moral à hauteur de 20 000 euros.

Par un mémoire enregistré le 19 septembre 2018, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- les annulations prononcées par le tribunal n'impliquaient ni la reconstitution de sa carrière, ni la régularisation de sa situation ;

- les erreurs de fait commises par le tribunal et dont le requérant fait état sont sans incidence sur le bien-fondé du jugement ;

- M. C... ne justifie pas de troubles dans ses conditions d'existence à hauteur de 20 000 euros ; il en est de même pour le préjudice moral dont il fait état ;

- il n'établit pas qu'il avait une chance sérieuse d'être promu au grade de major en 2010 ou 2011.

Par un mémoire enregistré le 25 septembre 2018, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il informe la cour de ce qu'il fait siennes les écritures produites en défense par la ministre des armées.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la défense ;

- le décret n° 2008-952 du 12 septembre 2008 portant statut particulier du corps des sous-officiers de gendarmerie ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B..., présidente assesseure ;

- les conclusions de Mme D..., rapporteure publique ;

- les observations de Me F..., représentant M. C... ;

Une note en délibéré présentée par M. C... a été enregistrée le 17 septembre 2019.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., titulaire depuis le 1er septembre 2007 du grade d'adjudant-chef de gendarmerie, affecté au bureau des systèmes d'information et de communication de la région de gendarmerie de Rhône-Alpes, en tant que chef de groupe des systèmes d'information et de communication, a fait l'objet, le 19 mai 2009, d'une visite médicale périodique, à l'issue de laquelle il a été déclaré inapte général à l'exercice de ses fonctions, en raison de son refus de se soumettre à l'obligation de vaccination contre l'hépatite B. Par décision du 19 novembre 2010, le commandant de la région de gendarmerie lui a infligé une sanction disciplinaire de 30 jours d'arrêts, fondée sur un refus d'obéissance réitéré et délibéré, au motif qu'il a refusé de se soumettre à la vaccination contre l'hépatite B, inscrite au calendrier vaccinal des armées, sans avoir obtenu de dérogation. Par une décision du 28 janvier 2011 confirmée par une décision du 18 juillet 2011, un refus a été opposé à la demande de M. C... concernant l'autorisation de servir par dérogation aux normes médicales d'aptitude. Par des avis des 23 novembre 2011 et 25 juillet 2012, la commission de réforme des militaires a estimé que M. C... présentait l'aptitude physique nécessaire à l'exercice effectif des fonctions afférentes aux emplois de son grade. L'intéressé a été affecté sur un nouvel emploi à compter du 1er août 2012. Par un jugement du 15 janvier 2014 devenu définitif, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 19 novembre 2010 infligeant une sanction disciplinaire à l'encontre de M. C.... Par courrier du 2 juillet 2014, M. C... a demandé l'indemnisation des préjudices subis du fait de l'illégalité de la décision du 19 novembre 2010 ainsi que de l'illégalité du refus de l'autoriser à servir par dérogation aux normes médicales. Le requérant relève appel du jugement du 5 juillet 2017 du tribunal administratif de Lyon en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle l'autorité administrative a implicitement rejeté sa demande tendant à la reconstitution de sa carrière et à l'attribution du grade de major, à compter du 1er février 2011 et en ce qu'il a limité à 5 000 euros le montant de la condamnation qu'il a prononcée à l'encontre de l'Etat.

Sur la légalité du refus opposé à la demande de reconstitution de carrière :

2. Les décisions administratives ne peuvent légalement disposer que pour l'avenir. S'agissant des décisions relatives à la carrière des fonctionnaires ou des militaires, l'administration ne peut, en dérogation à cette règle générale, leur conférer une portée rétroactive que dans la mesure nécessaire pour assurer la continuité de la carrière de l'agent intéressé ou procéder à la régularisation de sa situation.

3. Contrairement à ce que soutient le requérant, le jugement précité du tribunal administratif du 15 janvier 2014 qui a annulé la sanction disciplinaire prise à son encontre n'implique ni qu'il soit nommé rétroactivement au 1er février 2011, dans le grade de major, ni que sa carrière soit reconstituée ou que sa situation soit régularisée en ce sens. Par suite, M. C... n'est ni fondé à demander l'annulation de la décision implicite de rejet de sa demande de reconstitution de carrière, ni, par voie de conséquence, à ce qu'il soit enjoint à l'administration de reconstituer sa carrière dans de telles conditions.

Sur les conclusions indemnitaires :

4. En premier lieu, ainsi que l'ont constaté les premiers juges, en refusant d'autoriser M. C... à reprendre ses fonctions, alors qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des avis rendus par la commission de réforme des militaires qu'il justifiait de l'aptitude physique nécessaire à l'exercice effectif des fonctions afférentes aux emplois de son grade, l'administration a commis une illégalité de nature à engager la responsabilité de l'Etat. De même, il ressort des pièces du dossier que le 19 novembre 2010, M. C... a fait l'objet d'une sanction disciplinaire qui a été annulée par le tribunal administratif de Lyon le 15 janvier 2014 au motif que les faits reprochés ne pouvaient être qualifiés de fautifs. Ainsi, cette illégalité fautive est également de nature à engager la responsabilité de l'Etat. Ces fautes ont été à l'origine pour l'intéressé d'un préjudice moral et de troubles dans ses conditions d'existence dont les premiers juges n'ont pas fait une appréciation insuffisante en lui allouant une indemnité d'un montant de 5 000 euros, mise à la charge de l'Etat.

5. En second lieu, si M. C... qui était titulaire du grade d'adjudant-chef, avait vocation à une promotion au grade de major dès lors qu'il remplissait les conditions pour figurer au tableau d'avancement, il ne disposait toutefois d'aucun droit à obtenir un tel avancement. Pour établir qu'il justifiait d'une chance sérieuse d'être promu dès 2011 au grade de major, M. C... produit ses fiches de notation ainsi que des fiches de renseignements mentionnant qu'il peut prétendre à devenir major, voire officier. Toutefois, en se bornant à produire ces documents, M. C... qui n'apporte aucun élément permettant de comparer ses mérites avec ceux des agents se trouvant dans une situation identique ne justifie pas d'une chance sérieuse de bénéficier de l'avancement dont il se prévaut. Par suite, M. C... n'est pas fondé à réclamer l'indemnisation des préjudices de carrière, de rémunération et de retraite qu'il prétend avoir subis en conséquence de la perte de chance sérieuse d'obtenir un avancement au grade de major.

6. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon n'a pas fait droit à l'intégralité des conclusions de sa demande. Par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., au ministre de l'intérieur et à la ministre des armées.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2019 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme B..., présidente assesseure,

Mme H..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 3 octobre 2019.

2

N° 17LY03388


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 17LY03388
Date de la décision : 03/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Cessation de fonctions - Licenciement - Auxiliaires - agents contractuels et temporaires.

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : VEDESI - SCP SCHMIDT VERGNON PELISSIER THIERRY EARD-AMINTHAS et TISSOT

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-10-03;17ly03388 ?
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