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01/10/2019 | FRANCE | N°19LY00123

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 01 octobre 2019, 19LY00123


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 10 août 2018 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1806094 du 13 décembre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 10 août 2018, a enjoint au préfet de l'

Isère de délivrer à M. C... un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 10 août 2018 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1806094 du 13 décembre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 10 août 2018, a enjoint au préfet de l'Isère de délivrer à M. C... un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" et a mis à la charge de l'État le versement à M. C... d'une somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 14 janvier 2019, le préfet de l'Isère demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 13 décembre 2018 ;

2°) de rejeter les demandes présentées par M. C... devant le tribunal administratif de Grenoble.

Il soutient que c'est à tort que le tribunal administratif a retenu le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation pour annuler la décision portant refus de titre de séjour, alors que l'intéressé ne justifie pas d'une intégration particulière sur le territoire national, est célibataire sans enfant, ne justifie pas être présent en France depuis le 4 avril 2014 ni la continuité de son séjour sur le territoire, et conserve de fortes attaches familiales dans son pays d'origine.

Par un mémoire, enregistré le 3 septembre 2019, M. C..., représenté par Me A..., conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 1 200 euros soit mise à la charge de l'Etat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que le tribunal a parfaitement apprécié sa situation dans le jugement dont le préfet relève appel, et qui devra être confirmé.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

La présidente de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme E... D..., première conseillère ;

Considérant ce qui suit :

1. Le préfet de l'Isère relève appel du jugement du 13 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 10 août 2018 refusant de délivrer un titre de séjour à M. C..., ressortissant turc né en février 2000, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé à l'expiration de ce délai.

Sur les conclusions à fin d'annulation du jugement du tribunal administratif de Grenoble :

En ce qui concerne le motif d'annulation retenu par le premier juge :

2. Il ressort des pièces du dossier que M. C..., entré en France à l'âge de quatorze ans sous couvert d'un visa délivré le 25 mars 2014 par les autorités italiennes à Istanbul et valable dix jours, s'est maintenu sur le territoire national au-delà de cette durée de validité. Après avoir provisoirement résidé chez sa tante en région parisienne, il a été pris en charge par sa soeur. L'intéressé n'a été que brièvement scolarisé à compter du mois de janvier 2017 dans une unité pédagogique pour élèves allophones arrivants. Si sa soeur a obtenu la délégation totale des droits d'autorité parentale sur l'intéressé par un jugement du Tribunal de Grande Instance de Grenoble rendu le 4 juillet 2016, M. C..., majeur depuis le 20 février 2018, célibataire et sans charge de famille, peut poursuivre sa vie privée et familiale de manière autonome et notamment dans son pays d'origine où il dispose de fortes attaches familiales. Il ne démontre pas ne pas avoir conservé de liens avec ses parents, sa soeur et son frère mineur résidant en Turquie, ayant d'ailleurs effectué deux séjours d'une quinzaine de jours au cours de l'hiver 2017 puis d'un peu plus de cinq semaines l'été suivant. Alors qu'il n'exerce aucune profession ni ne suit aucune formation à la date de la décision attaquée, les circonstances qu'il bénéficie d'une promesse d'embauche pour un poste d'employé polyvalent dans la restauration et qu'il a tissé des liens amicaux depuis son entrée sur le territoire français ne suffisent pas à établir que les décisions qui lui ont été opposées seraient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de leurs conséquences sur sa situation. Dans ces conditions, le préfet de l'Isère est fondé à soutenir que c'est à tort que tribunal administratif de Grenoble a annulé pour ce motif son arrêté du 10 août 2018.

3. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C....

Sur les autres moyens invoqués de M. C... :

En ce qui concerne la légalité du refus de délivrance d'un titre de séjour :

4. La décision portant refus de titre de séjour comporte l'ensemble des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle est fondée. Elle répond ainsi aux exigences de motivation résultant des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.

5. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 2, le refus de délivrance d'un titre de séjour ne porte pas au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et ne méconnaît pas les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.

En ce qui concerne la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

6. Lorsqu'il sollicite l'admission au séjour, l'étranger ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement. Il lui appartient, lors du dépôt de sa demande, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de cette demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. M. C..., qui ne soutient pas qu'il aurait tenté en vain de porter à la connaissance de l'administration des éléments pertinents relatifs à sa situation avant l'intervention de la mesure d'éloignement en litige, n'est pas fondé à soutenir qu'il a été privé du droit d'être entendu résultant du principe général du droit de l'Union européenne.

7. M. C... n'ayant pas démontré l'illégalité du refus de délivrance d'un titre de séjour n'est pas fondé à s'en prévaloir, par la voie de l'exception, à l'appui des conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français.

8. Pour les motifs exposés aux points 2 et 5 ci-dessus, la mesure d'éloignement ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

9. M. C... n'ayant pas démontré l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français n'est pas fondé à s'en prévaloir, par la voie de l'exception, à l'appui des conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi.

10. Il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Isère est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 10 août 2018 et lui a enjoint de délivrer à M. C... un titre de séjour.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante, la somme que M. C... demande au titre des frais non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 13 décembre 2018 est annulé.

Article 2 : La demande de M. C... devant le tribunal administratif de Grenoble et le surplus de ses conclusions en appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 10 septembre 2019 à laquelle siégeaient :

Mme F... G..., présidente de chambre,

M. Thierry Besse, président-assesseur,

Mme E... D..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 1er octobre 2019.

2

N° 19LY00123

md


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19LY00123
Date de la décision : 01/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme MARGINEAN-FAURE
Rapporteur ?: Mme Bénédicte LORDONNE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : MARCEL

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-10-01;19ly00123 ?
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