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24/09/2019 | FRANCE | N°18LY04696

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 24 septembre 2019, 18LY04696


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 27 juillet 2018 par lesquelles le préfet de l'Yonne a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par une ordonnance n° 1802966 du 14 décembre 2018, le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire complémentaire, e

nregistrés le 21 décembre 2018 et le 16 janvier 2019, M. A... C..., représenté par la SCP Gadiou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 27 juillet 2018 par lesquelles le préfet de l'Yonne a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par une ordonnance n° 1802966 du 14 décembre 2018, le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 21 décembre 2018 et le 16 janvier 2019, M. A... C..., représenté par la SCP Gadiou-Chevallier, demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du 14 décembre 2018 du président du tribunal administratif de Dijon ;

2°) d'annuler les décisions du 27 juillet 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Yonne de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation.

Il soutient que :

- l'ordonnance attaquée est irrégulière faute pour le président du tribunal administratif de Dijon d'avoir motivé le recours à l'article R. 222-1 du code de justice administrative ;

- c'est à tort que le premier juge a rejeté sa demande comme irrecevable pour tardiveté ;

- sa demande de première instance était fondée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 avril 2019, le préfet de l'Yonne, représenté par Me B..., conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- c'est à bon droit que le premier juge a rejeté comme irrecevable pour tardiveté la demande de M. C... dès lors que l'intéressé n'a pas informé l'administration de son changement d'adresse ;

- les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord du 9 octobre 1987 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D..., présidente-assesseure ;

- et les observations de Me B..., représentant le préfet de l'Yonne ;

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant marocain né le 1er janvier 1983, déclare avoir vécu de nombreuses années en France puis avoir exécuté une obligation de quitter le territoire français et être de nouveau entré en France le 25 février 2015. Il indique avoir été bénéficiaire jusqu'à sa séparation avec son épouse de nationalité française d'un titre de séjour " mention vie privée et familial " puis avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour " mention salarié ". Par des décisions du 27 juillet 2018, le préfet de l'Yonne a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. C... relève appel de l'ordonnance du 14 décembre 2018 par laquelle le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté en litige du préfet de l'Yonne a été notifié par lettre recommandée à M. C..., 19 boulevard Davout, logement 8, à Auxerre. Ce pli a été retourné le 30 juillet 2018 assorti de la mention " destinataire inconnu à l'adresse ". Cette adresse était mentionnée dans le formulaire de demande de renouvellement de titre de séjour daté du 17 mai 2018. Cependant il ressort des termes d'un courrier manuscrit, produit pour la première fois en appel, que M. C... a fait part au préfet de l'Yonne de sa nouvelle situation familiale en sollicitant un titre de séjour " salarié ". Ce courrier mentionnait l'adresse située au 40 rue du Puits des Dames à Auxerre. Le préfet ne conteste avoir reçu ce courrier. C'est donc à tort que le premier juge a estimé que le requérant ne pouvait être regardé comme ayant indiqué une nouvelle adresse aux services préfectoraux et que la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif le 13 novembre 2018 était tardive et, par suite, irrecevable. Dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen d'irrégularité, M. C... est fondé à soutenir que l'ordonnance attaquée est, pour ce motif, irrégulière et doit être annulée.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Dijon.

Sur le refus de délivrance d'un titre de séjour :

4. En premier lieu, le refus de délivrance de titre de séjour opposé à M. C..., qui énonce les considérations de droit et les éléments de fait propres à sa situation personnelle qui en constituent le fondement, satisfait à l'obligation de motivation résultant des dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration en vigueur à la date de la décision en litige. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision contestée doit être écarté.

5. En deuxième lieu, M. C... n'assortit pas le moyen tiré de l'existence de plusieurs erreurs de fait qu'aurait commis le préfet des précisions de nature à permettre à la cour d'en apprécier la portée.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".

7. Si M. C... soutient qu'il entretient encore des liens avec son épouse ressortissante française, il ressort des pièces du dossier, comme il le déclare au demeurant lui-même, que la communauté de vie a cessé. Alors que la durée précise et la continuité de son séjour en France ne sont pas établies, le requérant ne démontre pas davantage la réalité d'autres charges de famille ou de liens privés et familiaux sur le territoire national. La production de bulletins de salaire de février à octobre 2018 ne suffit pas à démontrer son insertion professionnelle dans la société française. Dans ces conditions, eu égard à la durée établie et aux conditions du séjour en France de M. C..., le préfet de l'Yonne n'a pas, en prenant la décision contestée, porté une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale et n'a ainsi, pas méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas entaché sa décision d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

8. En premier lieu, il résulte de l'examen de la légalité du refus d'admission au séjour que M. C... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de ce refus à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français.

9. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

10. Pour les motifs énoncés au point 7, cette décision ne méconnaît pas les stipulations précitées.

Sur la décision accordant un délai d'éloignement de trente jours :

11. Il résulte de l'examen de la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français que M. C... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision lui accordant un délai d'éloignement de trente jours.

Sur la décision désignant le pays de destination :

12. Il résulte de l'examen de la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français que M. C... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision désignant le pays de renvoi.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à demander l'annulation des décisions du 27 juillet 2018 par lesquelles le préfet de l'Yonne a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

14. Ses conclusions, présentées devant le tribunal administratif de Dijon, à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être, dès lors, rejetées par voie de conséquence.

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 1802966 du président du tribunal administratif de Dijon du 14 décembre 2018 est annulée.

Article 2 : La demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Dijon est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 3 septembre 2019, à laquelle siégeaient :

Mme D..., présidente-assesseure, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

M. Pierre Thierry, premier conseiller,

Mme Sophie Corvellec, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 septembre 2019.

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N° 18LY04696

mg


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY04696
Date de la décision : 24/09/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur ?: Mme Virginie CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SCP GADIOU, CHEVALLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 08/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-09-24;18ly04696 ?
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