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02/07/2019 | FRANCE | N°18LY04409

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 02 juillet 2019, 18LY04409


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme E...A...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 26 juin 2018 par lequel le préfet de l'Yonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée d'office.

Par un jugement n° 1801903 du 30 octobre 2018, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête en

registrée le 7 décembre 2018, Mme E... A..., représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) d'a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme E...A...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 26 juin 2018 par lequel le préfet de l'Yonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée d'office.

Par un jugement n° 1801903 du 30 octobre 2018, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 7 décembre 2018, Mme E... A..., représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 30 octobre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Yonne du 26 juin 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Yonne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" dans le délai de quinze jours ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans le délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le refus de séjour est entaché d'un vice de procédure au regard de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que la commission du titre de séjour n'a pas été consultée ;

- en l'absence de fraude, le refus de séjour méconnaît les 6° et 7° de l'article L. 313-11 ainsi que l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'intérêt supérieur de son enfant garanti par l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'illégalité du refus de titre de séjour entache d'illégalité l'obligation de quitter le territoire français ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît le 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et procède d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- c'est à tort que la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire supérieur à trente jours vise le I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et ce refus est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 avril 2019, le préfet de l'Yonne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

La clôture de l'instruction a été fixée au 15 mai 2019 par une ordonnance du 29 avril précédent.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Antoine Gille, président-assesseur ;

- et les observations de Me D... pour Mme A..., ainsi que celles de Me C... pour le préfet de l'Yonne ;

Considérant ce qui suit :

1. MmeA..., ressortissante ivoirienne née en 1990, est entrée au mois d'avril 2017 en France où elle a donné naissance à sa fille Nguettia le 11 juillet suivant. Par arrêté du 26 juin 2018, le préfet de l'Yonne a rejeté la demande de titre de séjour formée par MmeA..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixé le pays à destination duquel cette mesure d'éloignement pourrait être exécutée d'office. Mme A...relève appel du jugement du 30 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur la légalité de l'arrêté du préfet de l'Yonne du 26 juin 2018 :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ; (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

3. Pour demander l'annulation de l'arrêté du 26 juin 2018 en ce qu'il porte refus de titre de séjour, Mme A... fait valoir la présence en France de deux de ses soeurs et d'une cousine, et expose à titre principal que sa fille a été reconnue par un ressortissant français et que cette reconnaissance par M. B..., qui a désormais informé sa compagne de leur relation et de sa paternité, ne s'inscrit pas dans une démarche frauduleuse. Toutefois, eu égard aux conditions dans lesquelles la requérante expose avoir rencontré M. B... lors d'un précédent séjour en France et alors qu'il est constant que les intéressés n'ont entretenu aucune relation durable, les attestations peu circonstanciées et photographies produites ne suffisent pas en l'espèce pour considérer que, contrairement à ce qu'ont retenu l'autorité préfectorale et les premiers juges au vu des éléments qui leur étaient soumis, la reconnaissance anticipée de l'enfant Nguettia par M. B... au début du mois de mai 2017 n'a pas été souscrite dans le but de faciliter l'obtention par la requérante d'un titre de séjour en qualité de mère d'un enfant français. Eu égard à la brièveté et aux conditions du séjour en France de la requérante, celle-ci n'est pas davantage fondée à soutenir que le refus de titre de séjour qu'elle conteste porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Ce refus ne méconnaît pas ainsi les dispositions et stipulations citées au point 2.

4. Compte tenu de la situation de la requérante telle qu'elle vient d'être exposée, ce refus ne peut davantage être regardé comme portant à l'intérêt supérieur de l'enfant de la requérante une atteinte contraire à l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ni comme étant entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ou des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoyant qu'une carte de séjour temporaire peut être délivrée à un étranger pour des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels qu'il fait valoir.

5. Lorsqu'il envisage de refuser un titre mentionné à l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est, en vertu de l'article R. 312-2 de ce code, tenu de saisir la commission du titre de séjour que du cas des étrangers qui remplissent effectivement l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée la délivrance d'un tel titre. Il résulte des motifs qui précèdent que Mme A... ne remplit pas ces conditions. Par suite, le moyen tiré de ce que le refus de séjour en litige aurait dû être précédé de la consultation de la commission du titre de séjour doit être écarté.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

6. Compte tenu de ce qui a été dit aux points 2 à 5, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que l'illégalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé entraîne par voie de conséquence l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.

7. Pour les motifs exposés aux points 3 et 4, la requérante n'est pas fondée à invoquer les dispositions du 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui font obstacle à ce qu'une obligation de quitter le territoire français soit prononcée à l'encontre d'un parent d'enfant français, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou celles de l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, ni une erreur manifeste d'appréciation de sa situation.

En ce qui concerne la fixation du délai de départ volontaire :

8. Si, en vertu du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'étranger dispose, pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, d'un délai de trente jours, les dispositions de cet article prévoient que l'autorité administrative " peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas ". Alors que la seule circonstance que le préfet de l'Yonne a visé les dispositions du I et non du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'affecte pas la légalité de sa décision, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait, dans les circonstances de l'espèce, commis une erreur manifeste d'appréciation en n'accordant pas à titre exceptionnel à Mme A... un délai de départ supérieur à trente jours.

9. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Sa requête doit, dès lors, être rejetée ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles qu'elle présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Yonne.

Délibéré après l'audience du 11 juin 2019 à laquelle siégeaient :

M. Yves Boucher, président de chambre,

M. Antoine Gille, président-assesseur,

Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 juillet 2019.

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N° 18LY04409

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY04409
Date de la décision : 02/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: M. Antoine GILLE
Rapporteur public ?: Mme VACCARO-PLANCHET
Avocat(s) : POIDEVIN

Origine de la décision
Date de l'import : 16/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-07-02;18ly04409 ?
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