Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 13 avril 2018 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé.
Par un jugement n° 1803281 du 16 octobre 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 17 novembre 2018, M. A... B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 16 octobre 2018 ;
2°) d'annuler ces décisions du préfet du Rhône du 13 avril 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le refus de titre de séjour méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- ce refus méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
La requête de M. B... a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Thierry Besse, premier conseiller ;
- et les observations de Me C... pour M. B... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., de nationalité camerounaise, né en 1986, est entré irrégulièrement en France en novembre 2011. Par décisions du 13 avril 2018, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à l'expiration de ce délai. M. B... relève appel du jugement du 16 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
Sur le refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
3. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date du refus en litige, M. B... vivait depuis plus de six années en France, qu'il justifie de plus de quatre années de vie commune avec une compatriote qu'il a épousée le 26 septembre 2014 et qu'ils ont eu ensemble une fille née le 2 juin 2015. Par ailleurs, son épouse est titulaire d'une carte de résident valable dix ans et élève deux autres enfants, dont l'aîné est de nationalité française, le père de l'enfant, qui réside en France, bénéficiant d'un droit de visite et d'hébergement un week-end sur deux et la moitié des vacances scolaires. M. B... justifie ainsi d'une vie familiale stable et ancrée sur le territoire français. Dans ces conditions, et alors même que l'intéressé relève de la procédure de regroupement familial, qu'il n'a pas exécuté une mesure d'éloignement en date du 28 avril 2015, et qu'il a été condamné pour des violences commises au cours d'une rixe à une peine d'emprisonnement avec sursis par un jugement du Tribunal correctionnel de Lyon du 29 janvier 2016, la décision de refus de séjour porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts qu'elle poursuit et méconnaît ainsi l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 13 avril 2018 par laquelle le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et à demander l'annulation de ce refus ainsi que, par voie de conséquence, celle des décisions du même jour l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignant le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé à l'expiration de ce délai.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Le présent arrêt implique nécessairement que le préfet du Rhône délivre à M. B... la carte de séjour temporaire mention "vie privée et familiale" qu'il a sollicitée. Il y a lieu d'impartir au préfet du Rhône un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt pour délivrer cette carte à l'intéressé. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. B....
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 16 octobre 2018 du tribunal administratif de Lyon et les décisions du préfet du Rhône du 13 avril 2018 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Rhône de délivrer à M. B... une carte de séjour temporaire mention "vie privée et familiale" dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. B... la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de la requête sont rejetées pour le surplus.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 9 avril 2019 à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président de chambre,
M. Antoine Gille, président-assesseur,
M. Thierry Besse, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 7 mai 2019.
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N° 18LY04105
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