Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 11 juillet 2018 par lequel le préfet du Rhône lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.
Par un jugement n° 1805144 du 16 juillet 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 26 juillet 2018, M. A... C..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 16 juillet 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Rhône du 11 juillet 2018 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'obligation de quitter le territoire français qui lui est opposée porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et à l'intérêt supérieur de son enfant, en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- le refus de lui accorder un délai de départ volontaire méconnaît les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'interdiction qui lui est faite de revenir sur le territoire français est excessive dans son principe comme dans sa durée au regard des critères posés au III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire enregistré le 26 février 2019, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.
Il soutient que la requête de M. C... n'est pas fondée.
La clôture de l'instruction a été fixée au 15 mars 2019 par une ordonnance du 25 février précédent.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de M. Antoine Gille, président-assesseur ;
Considérant ce qui suit :
1. Ressortissant comorien né en 1987, M. C... a fait l'objet d'un arrêté du préfet du Rhône du 11 juillet 2018 lui faisant obligation de quitter sans délai le territoire français, fixant le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office et prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. M. C... relève appel du jugement du 16 juillet 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ;
3. Pour demander l'annulation de l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire français, M. C... fait valoir qu'il contribue à l'éducation et à l'entretien de son fils français El Yasse, né au mois de janvier 2013 de sa relation avec Mme B..., au sens en particulier des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, ni la production d'attestations peu circonstanciées et de quatre virements bancaires intervenus au cours des années 2015 et 2016 ni la demande adressée au juge aux affaires familiales en vue de régulariser un droit de visite ne suffisent en l'espèce à établir une contribution régulière à l'entretien de cet enfant de la part du requérant, qui est célibataire et père de trois autres enfants mineurs résidant hors du territoire métropolitain où il n'est entré lui-même qu'au mois d'octobre 2015 et où il a fait l'objet d'une décision du préfet de la Haute-Vienne du 24 mars 2017, demeurée inexécutée, lui faisant obligation de quitter le territoire. Dans ces conditions et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision faisant obligation à M. C... de quitter le territoire français ne porte pas au droit de celui-ci au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts poursuivis et ne méconnaît donc pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Cette décision ne peut davantage être regardée comme portant à l'intérêt de l'enfant de M. C... une atteinte contraire à l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ni comme étant entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant.
Sur le refus d'accorder un délai de départ volontaire :
4. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification pour rejoindre le pays dont il possède la nationalité ou tout autre pays non membre de l'Union européenne ou avec lequel ne s'applique pas l'acquis de Schengen où il est légalement admissible. / (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; / (...) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 (...). ".
5. Il est constant que M. C..., ainsi que l'a relevé le premier juge, n'a pas déféré à l'obligation de quitter le territoire français dont le préfet de la Haute-Vienne a assorti le refus de titre de séjour qu'il lui a opposé par un arrêté du 24 mars 2017 et que le requérant a contesté sans succès devant le tribunal administratif de Limoges. Dans ces conditions et alors que les circonstances rappelées ci-dessus ne suffisent pas à caractériser une situation particulière au sens de ce texte, le préfet du Rhône a pu se fonder légalement sur les dispositions précitées du d) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour décider de ne pas accorder de délai de départ volontaire à M. C....
Sur l'interdiction de retour sur le territoire français :
6. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".
7. Pour contester l'arrêté du préfet du Rhône du 11 juillet 2018 en tant qu'il porte interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an, M. C... fait valoir qu'il est père d'un enfant français, que la décision en cause déploiera ses effets dans l'ensemble de l'espace Schengen et qu'il est présent depuis 2015 en France, où il a entrepris des démarches en vue de la régularisation de sa situation administrative. Eu égard à ce qui a été dit au point 3, alors que le requérant ne conteste pas la présence hors du territoire métropolitain de trois de ses enfants et n'a pas déféré à l'obligation de quitter le territoire dont il a fait l'objet le 24 mars 2017 après le rejet de sa demande de titre de séjour, les circonstances dont il fait état ne suffisent pas pour considérer que l'interdiction de retour d'un an qu'il conteste n'est pas justifiée légalement dans son principe ou sa durée, ou que cette décision porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales une atteinte disproportionnée au regard des buts qu'elle poursuit.
8. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il en soit fait application à l'encontre de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 26 mars 2019, à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président ;
M. Antoine Gille, président-assesseur ;
M. Thierry Besse, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 16 avril 2019.
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N° 18LY02926
mg