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19/03/2019 | FRANCE | N°18LY01010

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 19 mars 2019, 18LY01010


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Anthéma a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 3 juin 2016 par lequel le maire de la commune de Firminy a retiré le permis d'aménager tacite qu'elle détenait pour la création de trente-quatre lots à usage d'habitation.

Par un jugement n° 1606008 du 6 février 2018, le tribunal administratif de Lyon a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 14 mars 2018 et un mémoire complémentaire enregistré le 6 décemb

re 2018, la commune de Firminy, représentée par la SELARL BLT Droit public, demande à la cour :

1°) d'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Anthéma a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 3 juin 2016 par lequel le maire de la commune de Firminy a retiré le permis d'aménager tacite qu'elle détenait pour la création de trente-quatre lots à usage d'habitation.

Par un jugement n° 1606008 du 6 février 2018, le tribunal administratif de Lyon a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 14 mars 2018 et un mémoire complémentaire enregistré le 6 décembre 2018, la commune de Firminy, représentée par la SELARL BLT Droit public, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 6 février 2018 ;

2°) de rejeter la demande de la société Anthéma ;

3°) de mettre à la charge de la société Anthéma la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le pétitionnaire n'était titulaire d'aucun permis tacite, n'ayant pas utilement répondu à la demande de pièces complémentaires qui lui avait été adressée ;

- de ce fait, la commune n'était pas tenue de mettre en oeuvre une procédure contradictoire pour retirer un permis tacite ;

- en tout état de cause, la procédure contradictoire a été respectée, la société Anthéma ayant disposé d'un délai suffisant pour présenter ses observations suite à la notification du pli ;

- la société Anthéma n'a été privée d'aucune garantie, ayant toujours refusé en cours d'instruction de produire tout élément ou toute explication ;

- les autres moyens de la société Anthéma sont infondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 octobre 2018, la société Anthéma, représentée par le cabinet Léga-Cité, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 6 000 euros soit mise à la charge de la commune de Firminy au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle était titulaire d'un permis tacite, la commune ne justifiant pas de la notification régulière de la demande de pièces, à laquelle elle a au demeurant répondu le 26 février 2016 ;

- la procédure contradictoire n'a pas été respectée, la décision ayant été prise avant l'expiration du délai qui lui avait été imparti pour présenter ses observations, ce qui l'a effectivement privée d'une garantie ;

- la décision a été prise par une autorité incompétente ;

- les dispositions du 1 de l'article AUc2 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) ne s'appliquent pas aux permis d'aménager ;

- ces dispositions sont au demeurant illégales, en ce qu'elles imposent la production d'une notice dont le code de l'urbanisme ne prévoit pas la production ;

- en tout état de cause, la notice qu'elle avait produite permettait d'apprécier la compatibilité du projet avec l'aménagement d'ensemble de la zone, ainsi que l'imposent les dispositions de l'article AUc2 du règlement du PLU.

La clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 7 janvier 2019 par une ordonnance du 7 décembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Thierry Besse, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, rapporteur public,

- et les observations de Me B... pour la commune de Firminy, ainsi que celles de Me A... pour la société Anthema ;

Considérant ce qui suit :

1. Le 7 décembre 2015, la société Anthéma a déposé à la mairie de Firminy un dossier de demande de permis d'aménager portant sur la réalisation d'un lotissement de trente-quatre lots dans le secteur de La Vaurette. Par arrêté du 3 juin 2016, le maire de Firminy a retiré le permis d'aménager tacite né le 7 mars 2016. Par jugement du 6 février 2018, le tribunal administratif de Lyon a annulé cet arrêté de retrait. La commune de Firminy relève appel de ce jugement.

Sur la nature de la décision du 3 juin 2016 :

2. Aux termes de l'article R. 423-23 du code de l'urbanisme : " Le délai d'instruction de droit commun est de : / (...) c) Trois mois (...) pour les demandes de permis d'aménager. ". Aux termes de l'article R. 423-22 du même code : " Pour l'application de la présente section, le dossier est réputé complet si l'autorité compétente n'a pas, dans le délai d'un mois à compter du dépôt du dossier en mairie, notifié au demandeur ou au déclarant la liste des pièces manquantes dans les conditions prévues par les articles R. 423-38 et R. 423-41. ". L'article R. 423-38 du même code dispose que : " Lorsque le dossier ne comprend pas les pièces exigées en application du présent livre, l'autorité compétente, dans le délai d'un mois à compter de la réception ou du dépôt du dossier à la mairie, adresse au demandeur ou à l'auteur de la déclaration une lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou, dans le cas prévu par l'article R. 423-48, un échange électronique, indiquant, de façon exhaustive, les pièces manquantes. " Aux termes de l'article R. 423-39 du même code : " L'envoi prévu à l'article R. 423-38 précise : / a) Que les pièces manquantes doivent être adressées à la mairie dans le délai de trois mois à compter de sa réception ; / b) Qu'à défaut de production de l'ensemble des pièces manquantes dans ce délai, la demande fera l'objet d'une décision tacite de rejet en cas de demande de permis (...) ; / c) Que le délai d'instruction commencera à courir à compter de la réception des pièces manquantes par la mairie. " Enfin, aux termes de l'article R. 424-1 du même code : " A défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction déterminé comme il est dit à la section IV du chapitre III ci-dessus, le silence gardé par l'autorité compétente vaut, selon les cas : / (...) b) (...) permis d'aménager (...) tacite. (...) ".

3. Si l'illégalité d'une demande tendant à la production d'une pièce qui ne peut être requise est de nature à entacher d'illégalité un refus tacite de permis né dans les conditions prévues par l'article R. 423-39 du code de l'urbanisme, elle ne saurait avoir pour effet de rendre le pétitionnaire titulaire d'un permis tacite.

4. Alors que, par courrier du 12 mai 2016, la commune de Firminy avait indiqué à la société Anthéma qu'elle bénéficiait depuis le 7 mars 2016 d'un permis tacite et que le maire a entendu, selon les termes mêmes de l'arrêté en litige, retirer ce permis tacite, la commune de Firminy soutient, pour la première fois en appel, que l'arrêté du 3 juin 2016 constitue non un retrait du permis d'aménager tacite dont bénéficiait la société Anthéma, mais un refus de délivrer le permis d'aménager qu'elle sollicitait.

5. Par un courrier daté du 30 décembre 2015 et envoyé le 4 janvier 2016, qui comprenait les mentions exigées à l'article R. 432-39 du code de l'urbanisme, la commune de Firminy a demandé à la société Anthéma de compléter son dossier de demande, déposé le 7 décembre 2015, en produisant la notice justificative de la compatibilité de l'opération avec l'aménagement de la totalité de la zone requise par les dispositions de l'article AUc2 du règlement du PLU. Il ressort suffisamment des pièces du dossier, et notamment des mentions figurant sur l'avis de réception du pli recommandé contenant la demande de pièces complémentaires signé par le représentant de la société Anthéma, même si elles ne font pas apparaître la date de distribution de ce pli, que celui-ci a été reçu au plus tard le 6 janvier 2016, date que porte le tampon apposé sur cet avis lors de son retour en mairie. La demande de pièces complémentaires a ainsi été notifiée dans le délai d'un mois prévu par les dispositions précitées de l'article R. 423-22 du code de l'urbanisme. Par courrier du 26 février 2016, la société Anthéma a répondu à la demande en indiquant, d'une part, que la pièce dont la production était demandée ne pouvait être légalement exigée et, d'autre part, que la notice architecturale jointe à la demande comportait des éléments justifiant du respect par le projet des orientations d'aménagement définies par le PLU. En l'absence de production de la pièce demandée, quand bien même celle-ci pourrait ne pas être requise, la société Anthéma ne pouvait être titulaire d'un permis tacite né du silence gardé par la commune, alors au demeurant que la commune de Firminy, par courrier du 3 mars 2016, a relevé que la société Anthéma n'avait pas produit la pièce manquante. Dans ces conditions, la décision du 3 juin 2016 en litige doit être regardée non comme le retrait d'un permis d'aménager tacite, mais comme un refus de permis d'aménager exprès venant se substituer au rejet tacite de la demande de la société Anthéma. Par suite, c'est à tort que les premiers juges ont annulé l'arrêté du 3 juin 2016 au motif que le retrait du permis tacite n'avait pas été précédé d'une procédure contradictoire régulière.

6. Il appartient toutefois à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Anthéma.

Sur la légalité du refus de permis d'aménager :

7. Aux termes de l'article AUc2 du règlement du PLU de la commune de Firminy : " 1 - Les constructions doivent s'inscrire dans une opération d'ensemble, qui soit compatible avec un aménagement cohérent de la totalité de la zone ; une notice justificative de la compatibilité de l'opération avec l'aménagement de la totalité de la zone devra être établie avant toute demande d'autorisation ; (...) ". Il n'appartient pas aux auteurs des règlements d'urbanisme d'imposer des formalités autres que celles que prévoient les dispositions législatives et réglementaires.

8. Ainsi que le soutient la société Anthéma, les dispositions précitées du règlement du PLU de la commune de Firminy prévoient la production par le pétitionnaire d'une notice qui n'est prévue par aucune disposition législative ou réglementaire, étant distincte de la notice prévue par les dispositions de l'article R. 441-3 du code de l'urbanisme, laquelle avait au demeurant été produite par la société Anthéma à l'appui de sa demande. En se fondant, pour refuser de délivrer le permis d'aménager sollicité, sur l'absence de production de la notice prévue par les dispositions illégales de son PLU, le maire de Firminy a entaché son refus d'une illégalité.

9. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'apparaît, en l'état du dossier soumis à la cour, susceptible de fonder l'annulation de la délibération en litige.

10. Il résulte de ce qui précède que la commune de Firminy n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté de son maire du 3 juin 2016.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la commune de Firminy demande au titre des frais qu'elle a exposés soit mise à la charge de la société Anthéma, qui n'est pas partie perdante. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Firminy la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la société Anthéma.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Firminy est rejetée.

Article 2 : La commune de Firminy versera à la société Anthéma la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Firminy et à la société Anthéma.

Délibéré après l'audience du 22 février 2019 à laquelle siégeaient :

M. Yves Boucher, président de chambre,

M. Antoine Gille, président-assesseur,

M. Thierry Besse, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 mars 2019.

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N° 18LY01010

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY01010
Date de la décision : 19/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-02-01-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Nature de la décision. Octroi du permis. Permis tacite. Existence ou absence d'un permis tacite.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: Mme VACCARO-PLANCHET
Avocat(s) : SCP BLT DROIT PUBLIC

Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-03-19;18ly01010 ?
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