Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La société civile immobilière de Tanay a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du maire d'Arthaz-Pont-Notre-Dame du 15 octobre 2015 rejetant sa demande de permis d'aménager portant sur un terrain situé route de Pont-Notre-Dame, ensemble l'avis du préfet de la Haute-Savoie du 27 août 2015 émis sur ce projet.
Par un jugement n° 1506578 du 21 septembre 2017, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande et a mis à la charge de la SCI de Tanay la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 20 novembre 2017, la SCI de Tanay, représentée par la Selas Adamas Affaires publiques, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 21 septembre 2017 ;
2°) d'annuler l'avis du préfet de la Haute-Savoie du 27 août 2015 et l'arrêté du maire d'Arthaz-Pont-Notre-Dame du 15 octobre 2015 ;
3°) d'enjoindre au maire d'Arthaz-Pont-Notre-Dame de lui délivrer le permis sollicité ;
4°) de mettre à la charge de la commune d'Arthaz-Pont-Notre-Dame la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le plan local d'urbanisme approuvé en 2011 n'étant pas applicable à la date de la décision en cause, c'est à tort que le tribunal a procédé à une substitution de motifs alors que les conditions d'une telle substitution n'étaient pas remplies ;
- faute d'être localisé en dehors des parties urbanisées de la commune, le projet ne méconnaît pas l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme ;
- le classement en zone agricole du terrain d'assiette du projet par le plan local d'urbanisme approuvé en 2011 procède d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 30 mai 2018, la commune d'Arthaz-Pont-Notre-Dame, représentée par MPC Avocats, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 6 000 euros soit mise à la charge de la requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
La clôture de l'instruction a été fixée au 12 décembre 2018 par une ordonnance du 26 novembre précédent.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Antoine Gille, président ;
- les conclusions de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, rapporteur public ;
- et les observations de Me A... pour la SCI de Tanay ;
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération du 14 juin 2011, le conseil municipal d'Arthaz-Pont-Notre-Dame a approuvé le plan local d'urbanisme (PLU) de la commune. Par un arrêt du 26 mai 2015, la cour administrative d'appel de Lyon a annulé cette délibération. Le 23 juillet 2015, la SCI de Tanay a présenté aux services municipaux une demande de permis d'aménager en vue de la création de 10 lots à bâtir sur un terrain situé au lieu-dit "vers la croix" et classé en zone agricole par le PLU approuvé en 2011 et annulé le 26 mai 2015. En réponse à cette demande et sur avis en ce sens du préfet de la Haute-Savoie du 27 août 2015, le maire d'Arthaz-Pont-Notre-Dame a, le 15 octobre 2015 et sur le fondement des dispositions de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme applicable dans les communes dépourvues de document d'urbanisme, rejeté cette demande au motif que l'opération envisagée n'était pas réalisable du fait de sa localisation en dehors des parties urbanisées de la commune. La SCI de Tanay relève appel du jugement du 21 septembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 octobre 2015 et de l'avis du 27 août 2015.
2. Pour rejeter la demande de la SCI de Tanay, le tribunal administratif a substitué au motif du refus critiqué tiré de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme le motif tiré de ce que la localisation du projet en zone agricole du PLU approuvé le 14 juin 2011 faisait obstacle à ce qu'il soit autorisé.
3. L'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.
4. S'il résulte des dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable à l'espèce que l'annulation pour excès de pouvoir d'un document d'urbanisme a pour effet de remettre en vigueur le document d'urbanisme immédiatement antérieur et, le cas échéant, en l'absence d'un tel document, les règles générales d'urbanisme rendues alors applicables, en particulier celles de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme alors en vigueur, il est constant que, par une décision du 7 juin 2017, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt par lequel la cour administrative d'appel de Lyon avait annulé, d'une part, la délibération du 14 juin 2011 portant approbation du PLU d'Arthaz-Pont-Notre-Dame et, d'autre part, le jugement du 4 juillet 2013 du tribunal administratif de Grenoble rejetant la demande tendant à l'annulation de cette délibération.
5. Compte tenu de ce qui a été dit au point précédent et contrairement à ce que soutient la requérante, le PLU approuvé en 2011 doit être regardé comme n'ayant jamais cessé d'exister et de produire ses effets, et, en particulier, comme étant en vigueur à la date à laquelle le maire d'Arthaz-Pont-Notre-Dame a rejeté la demande de permis d'aménager de la SCI de Tanay.
6. Pour soutenir que les dispositions du PLU approuvé par la délibération du 14 juin 2011 ne sauraient lui être opposées, la SCI de Tanay excipe également de l'illégalité de ce PLU en ce qu'il classe le terrain d'assiette de son projet en zone agricole. Toutefois, si la société requérante fait valoir la localisation de son terrain à proximité de parcelles bâties et sa desserte par la route de Pont-Notre-Dame et les réseaux, ces seules circonstances ne suffisent pas pour considérer que le classement de ce terrain, d'une superficie de plus de 15 000 m², éloigné des pôles urbanisés de la commune, situé au sein d'un espace agricole qui se trouve au sud de l'autoroute A40 et que la notice descriptive du projet présente elle-même comme constitué de parcelles "vouées à l'agriculture", procède d'une erreur manifeste d'appréciation.
7. Il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que le fondement légal du refus de permis d'aménager en litige ne pouvait se trouver dans les dispositions de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme mais devait être recherché dans celles du PLU approuvé en 2011.
8. Alors qu'il n'est pas contesté que le classement en zone agricole de son terrain d'assiette par le PLU approuvé en 2011 faisait obstacle à la réalisation du projet de la société requérante, il résulte de l'instruction que l'autorité municipale aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur le motif tiré de ce classement. En outre, la circonstance que le rétablissement du PLU approuvé en 2011 comme base légale de la décision en litige résulte de l'effet rétroactif qui s'attache en principe aux décisions juridictionnelles prononçant une annulation ne suffit pas pour considérer que, comme le soutient la SCI de Tanay en faisant valoir qu'elle n'était pas partie à l'instance à l'issue de laquelle le PLU d'Arthaz-Pont-Notre-Dame a été rétabli, la substitution de motif qu'elle conteste l'a privée d'une garantie procédurale.
9. Il résulte de ce qui précède que les premiers juges ont pu à bon droit procéder en l'espèce à la substitution de motif critiquée. Par suite, la SCI de Tanay n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
10. Le présent arrêt, qui confirme le rejet des conclusions à fin d'annulation de la SCI de Tanay, n'appelle aucune mesure d'exécution.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il en soit fait application à l'encontre de la commune d'Arthaz-Pont-Notre-Dame, qui n'est pas partie perdante. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCI de Tanay le versement d'une somme de 2 000 euros à la commune d'Arthaz-Pont-Notre-Dame au titre des frais exposés en appel.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société civile immobilière de Tanay est rejetée.
Article 2 : La société civile immobilière de Tanay versera à la commune d'Arthaz-Pont-Notre-Dame la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile immobilière de Tanay, à la commune d'Arthaz-Pont-Notre-Dame et au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Délibéré après l'audience du 8 janvier 2019, à laquelle siégeaient :
M. Antoine Gille, président ;
M. Thierry Besse, premier conseiller ;
Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 janvier 2019.
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 17LY03925
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