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20/12/2018 | FRANCE | N°18LY01442

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 20 décembre 2018, 18LY01442


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 15 janvier 2018 par lesquelles le préfet de l'Ain lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans et a fixé le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé.

Par un jugement n° 1800228 du 18 janvier 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administrat

if de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 15 janvier 2018 par lesquelles le préfet de l'Ain lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans et a fixé le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé.

Par un jugement n° 1800228 du 18 janvier 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 19 avril 2018, M. D... C..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon du 18 janvier 2018, en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'interdiction de retour sur le territoire français ;

2°) d'annuler la décision du préfet du 15 janvier 2018 portant interdiction de retour ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Ain de procéder à l'effacement de son inscription dans le fichier du système d'information Schengen ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans n'a pas été précédée d'un examen effectif de sa situation familiale et est insuffisamment motivée ;

- elle viole le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- eu égard à ses conséquences, elle viole l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle viole l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par une décision du 27 mars 2018, le bureau d'aide juridictionnelle a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle de M. C....

Par un mémoire, enregistré le 16 juillet 2018, le préfet de l'Ain conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller ;

- les observations de Me B... pour M. C... ;

Et après avoir pris connaissance de la note en délibéré produite pour M. C..., enregistrée le 27 novembre 2018 ;

Considérant ce qui suit :

1. M. D... C... relève appel du jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon du 18 janvier 2018, en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans prononcée à son encontre par le préfet de l'Ain par décision du 15 janvier 2018.

Sur la légalité de l'interdiction de retour :

2. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de l'article 27 de la loi du 7 mars 2016, en vigueur depuis le 1er novembre 2016 : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (....). La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (....) " ;

3. Il résulte de ces dispositions, que, lorsque le préfet prend, à l'encontre d'un étranger, une décision portant obligation de quitter le territoire français sans lui accorder de délai de départ volontaire, ou lorsque l'étranger n'a pas respecté le délai qui lui était imparti pour satisfaire à cette obligation, il appartient au préfet d'assortir sa décision d'une interdiction de retour sur le territoire français, sauf dans le cas où des circonstances humanitaires y feraient obstacle. Seule la durée de cette interdiction de retour doit être appréciée au regard des quatre critères énumérés au III de l'article L. 511-1, à savoir la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, la nature et l'ancienneté de ses liens avec la France, l'existence ou non d'une précédente mesure d'éloignement et, le cas échéant, la menace pour l'ordre public que constitue sa présence sur le territoire.

4. M. C..., qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, ne justifie d'aucune circonstance humanitaire susceptible de faire obstacle à ce qu'une décision d'interdiction de retour sur le territoire français soit prononcée à son encontre.

5. Il ressort de la décision en litige, qui expose de manière suffisante les motifs de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, que, pour fixer à vingt-quatre mois la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français prononcée à l'encontre de M. C..., le préfet de l'Ain s'est notamment fondé sur le fait que l'intéressé avait fait l'objet de deux précédentes mesures d'éloignement et sur les éléments propres à la situation familiale de M. C..., ce qui révèle qu'il a été procédé à un examen particulier de la situation du requérant.

6. Pour soutenir que la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français prononcée à son encontre serait entachée d'une erreur d'appréciation, le requérant se prévaut notamment de la présence en France, outre de sa soeur en situation régulière, de ses parents, lesquels n'ont toutefois pas vocation à y demeurer de manière durable. M. C... fait également valoir, au titre des conséquences d'une telle décision, que le signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen le séparerait de sa compagne pour une durée d'au moins deux ans. Toutefois, si cette compagne, ressortissante bulgare, réside en Allemagne depuis 2013 selon les écritures du préfet, le requérant n'établit pas que sa relation avec elle serait antérieure à son entrée en France en septembre 2014, ni que l'intéressée, qui aurait récemment entamé, au mois de septembre 2017, une formation en Allemagne pour devenir infirmière, ne pourrait poursuivre cette formation en Albanie où le couple s'est marié postérieurement à la décision attaquée. Dans ces conditions et compte tenu du caractère provisoire de l'interdiction de retour, le moyen de M. C... tiré du caractère disproportionné porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui garantit à toute personne un tel droit, doit être écarté.

7. Le moyen selon lequel le requérant serait exposé à des risques de mauvais traitements en Albanie en méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'appui des conclusions dirigées contre une décision d'interdiction de retour sur le territoire qui ne fixe pas, par elle même, le pays à destination duquel l'étranger peut être éloigné.

8. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté les conclusions de sa demande dirigées contre la décision du préfet de l'Ain portant interdiction de retour sur le territoire français.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Le présent arrêt confirme le rejet des conclusions du requérant. Il n'implique dès lors aucune mesure d'exécution.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il en soit fait application à l'encontre de l'Etat, qui n'est pas partie perdante.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Ain.

Délibéré après l'audience du 27 novembre 2018, à laquelle siégeaient :

M. Yves Boucher, président de chambre,

M. Antoine Gille, président-assesseur,

Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 décembre 2018.

2

N° 18LY01442

md


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY01442
Date de la décision : 20/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: Mme Bénédicte LORDONNE
Rapporteur public ?: Mme VACCARO-PLANCHET
Avocat(s) : FRERY

Origine de la décision
Date de l'import : 15/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-12-20;18ly01442 ?
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