Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. F... E... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 10 avril 2014 par lequel le maire de la commune de Chamonix-Mont-Blanc a refusé de lui délivrer un permis de construire en vue de la réalisation d'une résidence hôtelière.
Par un jugement n° 1403038 du 2 mars 2017, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et des mémoires en réplique enregistrés le 23 mars 2017, le 18 octobre 2017 et le 14 février 2018, M. C... E..., représenté par l'AARPI Assier et Salaun, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 2 mars 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du maire de Chamonix-Mont-Blanc du 10 avril 2014 portant refus de permis de construire ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Chamonix-Mont-Blanc la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens.
Il soutient que :
- les arrêts de la cour administrative d'appel de Lyon des 22 février et 18 mars 2011 sont entachés de nullité ;
- au bénéfice du certificat d'urbanisme qui lui a été délivré le 31 octobre 2013 et alors que les nouvelles dispositions du PLU n'étaient pas entrées en vigueur lors du dépôt de sa demande de permis de construire, celle-ci devait être instruite sur le fondement du classement de son terrain en zone UCt du PLU ;
- le refus en litige ne cite pas les dispositions de l'article N2 du règlement du PLU sur lequel il se fonde ;
- le terrain d'assiette de son projet ne présente pas de caractère naturel particulier mais les caractéristiques d'une dent creuse urbanisable, et les faits sur lesquels la cour s'est appuyée en 2011 sont erronés s'agissant en particulier de la présence d'une source et d'une coulée verte alors que l'annulation prononcée en 2011 impliquait qu'un nouveau PLU soit élaboré et que le zonage UCt répond aux objectifs que la commune s'était fixés pour l'adoption du PLU.
Par un mémoire en défense enregistré le 15 septembre 2017, la commune de Chamonix-Mont-Blanc, représentée par la SELARL CDMF-Avocats Affaires publiques, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge du requérant en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
La clôture de l'instruction a été fixée au 15 novembre 2018 par une ordonnance du 26 octobre 2018.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Antoine Gille, président-assesseur ;
- les conclusions de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, rapporteur public ;
- et les observations de Me B... pour M. C... E..., ainsi que celles Me A... pour la commune de Chamonix-Mont-Blanc ;
Considérant ce qui suit :
1. M. C... E... a formé une demande de permis de construire en vue de la réalisation d'une résidence hôtelière de cent cinquante-deux chambres ainsi que l'aménagement d'un parc sur un terrain situé, à Chamonix-Mont-Blanc, au lieu-dit Les Mouilles. M. C... E... relève appel du jugement du 2 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Chamonix-Mont-Blanc du 10 avril 2014 refusant de lui délivrer ce permis de construire.
Sur la légalité du refus de permis de construire du 10 avril 2014 :
2. Pour refuser de délivrer le permis de construire sollicité par M. C... E..., le maire de Chamonix-Mont-Blanc s'est fondé sur la circonstance que, compte tenu du classement du terrain d'assiette du projet en zone naturelle N et de son inscription en espace boisé à protéger par délibération du conseil municipal du 13 février 2014, les dispositions de l'article N2 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune ainsi que celles de l'article L. 130-1 alinéa 2 du code de l'urbanisme, qui interdit tout mode d'occupation du sol de nature à compromettre la conservation des espaces boisés classés par un PLU, font obstacle à la réalisation de ce projet.
En ce qui concerne la légalité externe du refus de permis de construire :
3. L'arrêté critiqué fait suffisamment état des circonstances de fait et de droit tirées du classement du terrain par le PLU approuvé le 13 février 2014 et des articles N2 du règlement du PLU et L. 130-1 du code de l'urbanisme qui lui donnent son fondement. La circonstance que la teneur de cet article N2 ne soit pas mentionnée ne permet pas de caractériser en l'espèce un défaut de motivation.
En ce qui concerne l'opposabilité du PLU approuvé le 13 février 2014 :
4. Par délibérations des 8 juillet et 14 septembre 2005, le conseil municipal de Chamonix-Mont-Blanc a approuvé un PLU prévoyant notamment le classement des terrains situés au lieu-dit Les Mouilles en différents secteurs urbanisables UCt, 1AUDa et IIAU. Par un jugement n° 0506062 du 25 octobre 2007, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté les conclusions tendant à l'annulation de ce classement formées par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble dénommé "Le bois du Bouchet" et d'autres requérants, en n'annulant les délibérations des 8 juillet et 14 septembre 2005 qu'en tant que celles-ci classaient d'autres terrains en zone d'urbanisation future. Toutefois, par un arrêt n° 08LY00170 du 22 février 2011 rectifié par ordonnance du 18 mars 2011, la cour administrative d'appel de Lyon a censuré ce jugement en faisant notamment droit, d'une part, au moyen des demandeurs selon lequel le classement en secteur urbanisable du site dit des Mouilles était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des caractéristiques de la zone et de la teneur du projet d'aménagement et de développement durables de la commune, et, d'autre part, au moyen selon lequel le classement d'une partie de ces terrains en secteur UCt appelé à recevoir un programme d'hébergement touristique méconnaissait l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme. Par une délibération du 13 février 2014 prise en application du 6° de l'article L. 123-1 alors applicable du code de l'urbanisme en vue de l'exécution de l'arrêt du 22 février 2011, le conseil municipal de Chamonix a approuvé le classement en zone naturelle N et l'inscription en espace boisé classé du terrain d'assiette du projet en litige, classé en 2005 en secteur UCt.
5. Pour contester que le classement de son terrain résultant de la délibération du 13 février 2014 lui soit opposable, M. C... E... se prévaut d'abord du certificat d'urbanisme que le maire de Chamonix-Mont-Blanc lui a délivré le 31 octobre 2013 et faisant mention de la localisation de ce terrain en secteur de zone urbaine UCt. Toutefois, si l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme prévoit notamment que, lorsqu'une demande d'autorisation est déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d'un certificat d'urbanisme, les dispositions d'urbanisme ou les limitations administratives au droit de propriété tels qu'elles existaient à la date du certificat ne peuvent en principe être remises en cause, cet article n'a ni pour objet ni pour effet de conférer au titulaire d'un certificat d'urbanisme un droit acquis au bénéfice de dispositions d'urbanisme mentionnées dans ce certificat dans le cas où celles-ci n'étaient pas légalement applicables à la date à laquelle il a été délivré. Dans ces conditions et alors que la censure du classement des terrains du requérant en secteur UCt par l'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 22 février 2011 rectifié implique que ce classement est réputé n'être jamais intervenu, le moyen doit être écarté.
6. Si M. C... E... fait ensuite valoir que sa demande de permis de construire a été déposée avant le vote de la délibération du 13 février 2014 et sa transmission aux services préfectoraux, cette circonstance est en elle-même sans incidence sur la légalité du refus de permis de construire du 10 avril 2014, qui doit s'apprécier à la date à laquelle ce refus a été pris.
En ce qui concerne les autres moyens :
7. Alors que la tierce-opposition formée par M. C... E... à l'encontre de cette décision a d'ailleurs été rejetée, le respect de la chose jugée par la cour administrative d'appel dans son arrêt du 22 février 2011 rectifié fait obstacle à ce que celle-ci accueille le moyen de la requête selon lequel cet arrêt serait irrégulier pour avoir fait droit à une requête tardive ou celui selon lequel les terrains en cause auraient dû être classés en secteur urbanisable, qui ne sont pas compatibles avec les motifs qui sont le support nécessaire de la décision de la cour du 22 février 2011.
8. Il résulte de ce qui précède que M. C... E..., qui ne saurait utilement se prévaloir du préjudice que lui cause l'impossibilité de mener son projet, n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il en soit fait application à l'encontre de la commune de Chamonix-Mont-Blanc, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du requérant le versement d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la commune de Chamonix-Mont-Blanc.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C... E... est rejetée.
Article 2 : M. C... E... versera à la commune de Chamonix-Mont-Blanc la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... E... et à la commune de Chamonix-Mont-Blanc.
Délibéré après l'audience du 27 novembre 2018, à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président de chambre ;
M. Antoine Gille, président-assesseur ;
Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 20 décembre 2018.
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N° 17LY01186
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