Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. et Mme F... et Catherine B..., M. C... A... et M. F... et Renée D... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir la délibération du 6 novembre 2015 par laquelle le conseil municipal de Marignier a approuvé la modification n° 7 du plan d'occupation des sols (POS) de la commune.
Par un jugement n° 1507978 du 12 octobre 2017, le tribunal administratif de Grenoble a partiellement fait droit à cette demande en annulant la délibération du 6 novembre 2015 seulement en tant qu'elle porte réduction de l'espace boisé classé au lieu-dit Les Cretets.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 13 décembre 2017, M. et Mme F... et Catherine B..., M. C... A... et M. F... et Renée D..., représentés par la SELARL Reflex Droit Public, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 12 octobre 2017 ;
2°) d'annuler totalement la délibération du conseil municipal de Marignier du 6 novembre 2015 ;
3°) de mettre une somme de 4 000 euros à la charge de la commune de Marignier au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la délibération attaquée est illégale au regard des articles L. 2121-10 et L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales, dès lors, d'une part, que le délai de convocation du conseil municipal n'a pas été respecté et qu'il n'est pas justifié que les convocations ont été adressées au domicile des élus qui n'ont pas indiqué une autre adresse et, d'autre part, que le droit à l'information des élus a été méconnu en raison de l'insuffisance de la note explicative de synthèse et de l'absence de transmission aux conseillers du rapport du commissaire enquêteur ;
- les changements effectués, par leurs effets propres ou cumulés, bouleversent l'économie générale du POS, imposant la mise en oeuvre d'une procédure de révision ;
- la suppression des emplacements réservés n° 6 et n° 12 est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire enregistré le 13 mars 2018, la commune de Marignier, représentée par la SELARL Itinéraires Avocats, conclut au rejet de la requête ainsi que, par voie d'appel incident, à la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a annulé partiellement la délibération en litige, et demande qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens de la requête sont infondés ;
- la rectification du document graphique du POS portant sur la représentation de l'espace boisé classé pouvait être légalement opérée par voie de modification ; c'est donc à tort que le tribunal a jugé que la rectification d'une erreur matérielle concernant l'emprise d'un espace boisé classé relevait d'une procédure de révision.
La clôture de l'instruction a été fixée au 5 juin 2018 par ordonnance du 18 mai 2018.
Par courrier du 16 octobre 2018, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour est susceptible de relever d'office l'irrecevabilité des conclusions d'appel incident de la commune de Marignier, en ce qu'elles soulèvent un litige distinct de celui qui fait l'objet de l'appel principal.
La commune de Marignier a produit un mémoire en réponse à ce moyen d'ordre public, enregistré le 22 octobre 2018.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller ;
- les conclusions de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, rapporteur public ;
- et les observations de Me G... pour M. B... et autres, ainsi que celles de Me E... pour la commune de Marignier ;
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération du 6 novembre 2015, le conseil municipal de Marignier a approuvé la modification n° 7 du plan d'occupation des sols (POS) de la commune. M. et Mme B... et autres relèvent appel du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 12 octobre 2017 en ce qu'il n'a fait que partiellement droit à leur demande tendant à l'annulation de cette délibération. Par voie d'appel incident, la commune de Marignier demande l'annulation de ce jugement en tant qu'il a fait partiellement droit à la demande de première instance.
Sur l'appel principal de M. et Mme B... et autres :
En ce qui concerne les modalités de convocation et le droit à l'information des conseillers municipaux :
2. En premier lieu, en vertu des articles L. 2121-10 et L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales, toute convocation du conseil municipal est mentionnée au registre des délibérations, affichée ou publiée et adressée aux membres cinq jours francs au moins avant celui de la réunion, dans les communes qui, comme Marignier, comptent au moins 3 500 habitants. Le procès-verbal de la séance du conseil municipal du 6 novembre 2015, mentionne que les conseillers municipaux ont été convoqués le 30 octobre 2015, soit dans le respect du délai de cinq jours francs prévu par l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales. Si les requérants soutiennent que le courrier de convocation des conseillers municipaux n'a pas été adressé à l'ensemble des élus, en particulier au domicile de ceux qui n'ont pas fait le choix d'une convocation dématérialisée, ils n'assortissent leur allégation d'aucune justification circonstanciée. Pour sa part, la commune produit, outre le courrier de convocation à la séance du 6 novembre 2015, accompagné de l'ordre du jour, des attestations émanant du brigadier-chef de la police municipale et d'un policier municipal certifiant que cette convocation a été remise en main propre à l'un des conseillers municipaux sur son lieu de travail et distribuée au domicile personnel de six autres conseillers municipaux. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'irrégularité de la convocation des conseillers municipaux doit être écarté.
3. En second lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal. ". Cette obligation, qui doit être adaptée à la nature et à l'importance des affaires, doit permettre aux intéressés de disposer d'une information suffisante pour se prononcer en toute connaissance de cause.
4. La note de synthèse jointe à la convocation pour la séance du 6 novembre 2015 précisait l'objet de la modification n° 7 du POS, ainsi que les motifs qui l'ont justifiée et exposait de manière détaillée le contenu des modifications envisagées apportées au règlement et au document graphique, y compris la suppression d'un indice en zone NAc, contrairement à ce que soutiennent les requérants. Si ceux-ci font valoir que la note de synthèse ne mentionnait pas les observations formulées au cours de l'enquête publique et la synthèse de l'avis du commissaire enquêteur, il n'est pas démontré que les élus municipaux, à qui il était au demeurant loisible de consulter le rapport du commissaire enquêteur ou de solliciter toute précision ou explication complémentaire, ne disposaient pas d'une information adéquate pour pouvoir exercer utilement leur mandat. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisance de la note explicative de synthèse et de la méconnaissance du droit à l'information des conseillers municipaux doit être écarté.
En ce qui concerne la nécessité d'une procédure de révision du POS :
5. En vertu de l'article L. 123-13 alors en vigueur du code de l'urbanisme, une procédure de modification ne peut être engagée qu'à condition qu'il ne soit pas porté atteinte à l'économie générale du POS.
6. Il ressort des pièces du dossier que la modification n° 7 du POS a porté, d'une part, sur la modification du règlement des zones Ub et Uc, en réduisant de 1000 à 800 m² en zone Uc et de 900 à 750 m² en zone Ub, la taille minimale des terrains constructibles et en augmentant la hauteur maximale des constructions de 9 à 10 mètres, d'autre part, sur la suppression des emplacements réservés n°6 et 12 grevant les parcelles n° 90, 92 et 101 pour l'élargissement de la voie communale et la réalisation d'équipements sportifs et socio-culturels et, enfin, sur la suppression pour le secteur NAc de l'indice 8a conditionnant l'urbanisation à une opération d'ensemble visant les parcelles de plus de 8 000 m². Ces modifications ont eu pour objet de favoriser la réalisation de constructions intégrant des logements sociaux, sans affecter le zonage ni la vocation des zones Ub et Uc destinées à accueillir des logements individuels et de petits collectifs. Alors que le secteur NAc s'est progressivement urbanisé, conformément à sa vocation, la suppression de l'indice 8a dans cette zone ne concerne qu'un secteur résiduel de 11 000 m² resté à l'état naturel, comprenant seulement trois parcelles. La suppression des emplacements réservés sur ces parcelles, portant sur une zone très réduite à l'échelle du territoire communal, n'a pas davantage conduit à une modification substantielle des possibilités de construction et d'usage du sol. Dans ces conditions, compte tenu de leur ampleur limitée, les modifications en litige ne peuvent être regardées comme affectant l'économie générale du POS ni, par suite, comme nécessitant une procédure de révision.
En ce qui concerne la suppression des emplacements réservés n° 6 et n° 12 :
7. Les requérants ne contestent pas l'absence de projet de la commune répondant aux impératifs des emplacements réservés n°6 et 12 grevant depuis de nombreuses années les parcelles n° 90, 92 et 101 pour l'élargissement de la voie communale et la réalisation d'équipements sportifs et socio-culturels. En se bornant à soutenir que le projet de réalisation d'un programme de trente logements sociaux sur le tènement grevé de ces emplacements bouleversera le cadre bâti et la vocation pavillonnaire du secteur et y aggravera les conditions de circulation, ils ne font pas état d'éléments de nature à établir que la suppression de ces emplacements réservés procéderait d'une erreur manifeste d'appréciation.
8. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme B... et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.
Sur l'appel incident de la commune :
9. Par la voie de l'appel incident, la commune de Marignier demande, après l'expiration du délai d'appel, l'annulation du jugement attaqué en ce qu'il a annulé la délibération du 6 novembre 2015 en tant qu'elle porte réduction d'un espace boisé classé au lieu-dit Les Cretets. Ces conclusions, qui soulèvent un litige distinct de celui faisant l'objet de l'appel principal, ne sont pas recevables.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que les requérants demandent au titre des frais qu'ils ont exposés soit mise à la charge de la commune de Marignier, qui n'est pas partie perdante. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des requérants le versement d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la commune de Marignier.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme B... et autres est rejetée.
Article 2 : L'appel incident de la commune de Marignier est rejeté.
Article 3 : M. et Mme B..., M. C... A... et M. et Mme D... verseront solidairement à la commune de Marignier une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... B..., premier requérant dénommé, pour l'ensemble des requérants, et à la commune de Marignier.
Délibéré après l'audience du 13 novembre 2018 à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président de chambre,
M. Antoine Gille, président-assesseur,
Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 décembre 2018.
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N° 17LY04221