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02/10/2018 | FRANCE | N°18LY01588

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 02 octobre 2018, 18LY01588


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 11 mai 2017 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de quatre-ving-dix jours, et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée.

Par un jugement n° 1704942 du 16 janvier 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

I) Par une requête enregi

strée le 2 mai 2018, Mme B... A..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 11 mai 2017 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de quatre-ving-dix jours, et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée.

Par un jugement n° 1704942 du 16 janvier 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

I) Par une requête enregistrée le 2 mai 2018, Mme B... A..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 16 janvier 2018 ;

2°) d'annuler ces décisions du 11 mai 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une carte de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou, à défaut, de réexaminer sa demande après lui avoir délivré un récépissé de demande de titre de séjour, dans le même délai et sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat de la somme de 1 200 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que la décision refusant de renouveler son titre de séjour étudiant est entachée d'une erreur d'appréciation.

II) Par une requête enregistrée le 12 juin 2018, Mme B... A..., représentée par Me C..., demande à la cour, sur le fondement des dispositions de l'article R. 811-17 du code de justice administrative :

1°) d'ordonner le sursis à l'exécution de ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 16 janvier 2018 ;

2°) d'enjoindre au préfet du Rhône de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat de la somme de 1 200 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Les requêtes ont été communiquées au préfet du Rhône qui n'a pas produit de mémoire.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale dans les deux instances par des décisions du bureau d'aide juridictionnelle des 27 mars et 18 juillet 2018.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Côte d'Ivoire relative à la circulation et au séjour des personnes, signée à Abidjan le 21 septembre 1992 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de M. Thierry Besse, premier conseiller ;

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes susvisées de Mme A... tendent respectivement à l'annulation et à au sursis à exécution du même jugement. Il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet du même arrêt.

Sur la requête n° 18LY01588 :

En ce qui concerne les conclusions à fins d'annulation :

2. MmeA..., de nationalité ivoirienne, née en 1990, est entrée en France le 11 octobre 2009 munie d'un visa long séjour portant la mention "étudiant". Elle a bénéficié de titres de séjour régulièrement renouvelés en cette qualité. Par décisions du 11 mai 2017, le préfet du Rhône a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi à l'expiration de ce délai. Mme A... relève appel du jugement du 16 janvier 2018 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

3. Aux termes de l'article 9 de la convention franco-ivoirienne susvisée : " Les ressortissants de chacun des États contractants désireux de poursuivre des études supérieures ou d'effectuer un stage de formation de niveau supérieur sur le territoire de l'autre État doivent, outre le visa de long séjour prévu à l'article 4, justifier d'une attestation d'inscription ou de préinscription dans l'établissement d'enseignement choisi, ou d'une attestation d'accueil de l'établissement où s'effectue le stage, ainsi que, dans tous les cas, de moyens d'existence suffisants. / Les intéressés reçoivent un titre de séjour temporaire portant la mention " étudiant ". Ce titre de séjour est renouvelé annuellement sur justification de la poursuite effective des études ou du stage et de la possession de moyens d'existence suffisants. / Ces dispositions ne font pas obstacle à la possibilité d'effectuer dans l'autre État d'autres types d'études ou de stages de formation dans les conditions prévues par la législation applicable. ".

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme A..., entrée en France en 2009, a obtenu en 2012 une licence en droit puis a validé en 2014 une première année de master en droit privé des affaires. Elle a ensuite échoué à deux reprises au concours d'entrée au centre régional de formation professionnelle des avocats, ayant été admissible aux épreuves orales la première année mais n'ayant obtenu qu'une moyenne de 7,5 sur 20 la seconde année. Elle s'est inscrite au titre de l'année universitaire 2016/2017 en deuxième année d'un master of business administration, spécialité finance, à l'école de commerce de Lyon, scolarité qu'elle suivait avec sérieux, ainsi qu'il ressort des attestations produites, et qu'elle a d'ailleurs validé peu après la décision en litige. Si elle ne s'est inscrite dans cette filière qu'après avoir en vain tenté de s'inscrire dans deux autres masters à l'orientation plus juridique, cette formation n'apparaît pas pour autant incohérente avec son projet professionnel qui est de travailler dans le secteur du droit des assurances. Dans ces conditions, compte tenu du sérieux dont Mme A... fait preuve dans la poursuite de ses études, de la cohérence de son parcours professionnel et de sa progression, malgré ses deux échecs en 2015 et 2016 au concours d'entrée à l'école des avocats, le préfet du Rhône, en refusant de renouveler son titre de séjour, a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation. Il y a lieu, par suite, d'annuler la décision refusant à Mme A... le renouvellement de sa carte de séjour ainsi que, par voie de conséquence, les décisions l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et fixant le pays de renvoi.

5. Il résulte de ce qui précède que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône du 11 mai 2017.

En ce qui concerne les conclusions à fins d'injonction :

6. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ". Aux termes de l'article L. 911-2 de ce code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. ".

7. Le présent arrêt n'implique pas nécessairement que le préfet délivre un titre de séjour à Mme A... mais seulement qu'il réexamine sa situation, au regard des conditions dans lesquelles elle a poursuivi ses études. Il y a lieu d'enjoindre au préfet du Rhône de procéder à ce réexamen dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, après lui avoir délivré dans un délai de quinze jours une autorisation provisoire de séjour. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution de la requête n° 18LY02145 :

8. Le présent arrêt statuant sur la requête de Mme A... tendant à l'annulation du jugement attaqué, ses conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement se trouvent privées d'objet.

Sur les frais liés au litige :

9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de Mme A... tendant à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme au titre des frais exposés en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 16 janvier 2018 et les décisions du préfet du Rhône du 11 mai 2017 refusant de délivrer un titre de séjour à Mme B... A..., l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et fixant le pays de renvoi sont annulés.

Article 2 : Il est fait injonction au préfet du Rhône de réexaminer la situation de Mme A... dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, après lui avoir délivré une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution de la requête n° 18LY02145.

Article 4 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 11 septembre 2018 à laquelle siégeaient :

M. Yves Boucher, président de chambre,

M. Antoine Gille, président-assesseur,

M. Thierry Besse, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 octobre 2018.

2

N° 18LY01588, 18LY02145

dm


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY01588
Date de la décision : 02/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: Mme VACCARO-PLANCHET
Avocat(s) : PRUDHON

Origine de la décision
Date de l'import : 16/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-10-02;18ly01588 ?
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