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03/05/2018 | FRANCE | N°17LY02997

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 03 mai 2018, 17LY02997


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 11 avril 2017 par lesquelles le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a désigné le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé et a interdit son retour sur le territoire français pendant une durée de trois ans.

Par un jugement n° 1702588 du 27 juillet 2017, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande

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Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 2 août 2017, M. C... B......

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 11 avril 2017 par lesquelles le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a désigné le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé et a interdit son retour sur le territoire français pendant une durée de trois ans.

Par un jugement n° 1702588 du 27 juillet 2017, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 2 août 2017, M. C... B..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 27 juillet 2017 ;

2°) d'annuler les décisions du préfet de la Drôme du 11 avril 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Drôme de lui délivrer sans délai une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler et, dans le délai de trois mois, un titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué a été pris par une autorité incompétente ;

- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- le refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont il remplit toutes les conditions ; en particulier, la condition d'âge doit être examinée à la date du dépôt du dossier de demande, s'agissant d'un réexamen ;

- le refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du même code ;

- le refus de lui accorder un délai de départ volontaire et l'interdiction de retour ne répondent pas aux exigences légales ;

- l'interdiction de retour est excessivement sévère.

Par un mémoire enregistré le 2 novembre 2017, le préfet de la Drôme conclut au rejet de la requête.

Il s'en rapporte à ses écritures de première instance.

Par une décision du 5 septembre 2017, le bureau d'aide juridictionnelle a rejeté la demande d'aide juridictionnelle de M. B....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller ;

- et les observations de Me A... pour M. B... ;

1. Considérant que M. B... relève appel du jugement du 27 juillet 2017 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 11 avril 2017 par lesquelles le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a désigné le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé et a interdit son retour sur le territoire français pendant une durée de trois ans ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'il y a lieu d'écarter le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision en litige par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue au 1° de l'article L. 313-10 portant la mention "salarié" ou la mention "travailleur temporaire" peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigé. " ;

4. Considérant que M. B..., né le 7 septembre 1996, ressortissant de la République de Guinée, est entré en France, selon ses déclarations, en septembre 2013, alors qu'il était âgé de seize ans, et a été pris en charge par l'aide sociale à l'enfance ; que, par un arrêté du 27 janvier 2015, dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Grenoble du 24 avril 2015, le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions citées au point 3 et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français ; que, le 21 avril 2015, M. B...s'est présenté à la préfecture de la Drôme, accompagné de son avocat, pour déposer une nouvelle demande de titre de séjour sur ce même fondement, en se prévalant de ce qu'il remplissait désormais la condition tenant au suivi, depuis plus de six mois, d'une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle ; qu'il a été refusé à M. B... l'enregistrement de cette demande de titre de séjour au motif qu'il faisait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ; que, par une ordonnance du 28 avril 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a enjoint au préfet d'enregistrer cette nouvelle demande de titre de séjour ; que M. B..., qui s'est présenté en préfecture de la Drôme le 7 mai 2015 pour y déposer sa demande de titre de séjour, s'est vu notifier le même jour un refus ; que, par un jugement du 9 septembre 2015, le tribunal administratif a annulé ce refus et les décisions subséquentes, au motif que le préfet, en méconnaissance de l'injonction prononcée par le juge des référés, n'avait pas procédé à l'enregistrement de la demande de M. B... et ne lui avait pas permis de faire état d'éléments nouveaux ; que, par un arrêté du 28 septembre 2015, le préfet de la Drôme a de nouveau refusé de délivrer un titre de séjour au requérant, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire pour une durée de trois ans ; que M. B... a exercé un recours contre cet arrêté qui a été rejeté par un jugement du 25 janvier 2016 du tribunal administratif de Grenoble confirmé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 28 juin 2016 ; que le préfet de la Drôme a alors convoqué M. B... en janvier 2017 pour mettre à jour son dossier relativement à sa demande de titre de séjour présentée sur le fondement de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 11 avril 2017 le préfet de la Drôme a refusé à l'intéressé la délivrance d'un tel titre de séjour, a assorti ce refus de décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai et interdiction de retour pour une durée de trois ans ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, contrairement à ce que soutient le requérant, la décision en litige n'a pas été prise en réponse à sa demande présentée le 21 avril 2015, réitérée le 7 mai 2015, dans l'année suivant son dix-huitième anniversaire, à laquelle il a finalement été répondu le 28 septembre 2015 par un refus validé définitivement par la juridiction administrative ; qu'en réexaminant spontanément la situation de M. B..., le préfet de la Drôme ne pouvait que constater que M. B..., désormais âgé de plus de dix-neuf ans, ne pouvait plus se prévaloir des dispositions citées au point 3 ; qu'en conséquence, le moyen tiré de la violation de ces dispositions doit être écarté ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ;

7. Considérant qu'en se bornant à faire état de son insertion au sein de la société française, M. B... ne démontre pas que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne procédant pas à la régularisation de sa situation au titre des dispositions citées au point 6 ;

8. Considérant, en quatrième lieu, que si M. B..., entré en France trois ans et demi avant l'intervention de la décision attaquée, a été pris en charge en qualité de mineur isolé et a obtenu un CAP de peintre en bâtiment, cette circonstance ne suffit pas à établir, alors qu'il ne démontre pas être dépourvu de toute attache dans son pays d'origine, que la décision attaquée serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation ;

Sur la légalité des décisions refusant un délai de départ volontaire et portant interdiction de retour sur le territoire français :

9. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile°: " (...) l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) " ; qu'aux termes du III du même article : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) " ;

10. Considérant, d'une part, que M. B..., qui a fait l'objet de deux mesures d'éloignement, en janvier 2015 et en septembre 2015, dont la légalité a été confirmée par le tribunal administratif de Grenoble et la cour, et qu'il n'a pas exécutées, entrait dans un des cas permettant, sauf circonstance particulière, de présumer établi le risque qu'il se soustraie à la mesure d'éloignement ; que le requérant n'invoque l'existence d'aucune circonstance particulière faisant obstacle à cette présomption ; qu'ainsi, le préfet de la Drôme n'a pas fait une inexacte application des dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile citées au point précédent en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire ;

11. Considérant, d'autre part, que M. B..., entré en France en 2013, célibataire et sans charge de famille, a déjà fait l'objet de deux mesures d'éloignement qu'il n'a pas exécutées ; qu'alors même que sa présence sur le territoire français ne représente aucune menace pour l'ordre public, le requérant, qui ne justifie d'aucune circonstance humanitaire faisant obstacle à ce qu'une interdiction de retour sur le territoire soit prononcée à son encontre, n'est pas fondé à soutenir que l'interdiction prononcée en l'espèce serait, notamment quant à sa durée, entachée d'une erreur d'appréciation ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à ce qu'il soit fait application au bénéfice de son avocat des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 27 mars 2018 à laquelle siégeaient :

M. Yves Boucher, président de chambre,

M. Antoine Gille, président-assesseur ,

Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 mai 2018.

2

N° 17LY02997

fg


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY02997
Date de la décision : 03/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: Mme Bénédicte LORDONNE
Rapporteur public ?: Mme VACCARO-PLANCHET
Avocat(s) : JEAN-YVES BRET -PATRICK BERAS

Origine de la décision
Date de l'import : 22/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-05-03;17ly02997 ?
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