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12/04/2018 | FRANCE | N°17LY01787

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 12 avril 2018, 17LY01787


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 29 juin 2016 par lesquelles le préfet de l'Yonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1603254 du 9 mars 2017, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requ

ête enregistrée le 25 avril 2017 et un mémoire enregistré le 2 mars 2018 qui n'a pas été communi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 29 juin 2016 par lesquelles le préfet de l'Yonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1603254 du 9 mars 2017, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 25 avril 2017 et un mémoire enregistré le 2 mars 2018 qui n'a pas été communiqué, Mme D... B..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 9 mars 2017 ;

2°) d'annuler les décisions du préfet de l'Yonne du 29 juin 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Yonne de lui délivrer un titre de séjour mention "vie privée et familiale" et de lui délivrer sous quarante-huit heures un récépissé l'autorisant à travailler ;

4°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise médicale pour déterminer les conséquences sur son état de santé d'un retour dans son pays d'origine ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 1 300 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Elle soutient que :

- l'arrêté du préfet est insuffisamment motivé ;

- le refus de lui délivrer un titre de séjour a été pris au terme d'une procédure irrégulière, le préfet ne justifiant pas avoir demandé l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, ni celui du directeur général de cette agence sur l'existence de circonstances humanitaires exceptionnelles, ni que l'avis du médecin lui a été transmis sous couvert de ce directeur, ce qui l'a privée d'une garantie essentielle de procédure ;

- ce refus méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ou subsidiairement, celles de l'article R. 313-22 qui lui permettent de bénéficier d'une autorisation provisoire de séjour ;

- il méconnaît les articles L. 313-11 7° et l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, eu égard à ses liens en France et à sa situation personnelle ;

- l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours est illégale en conséquence de l'illégalité du refus de séjour et méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de renvoi est illégale en conséquence de l'illégalité des autres décisions et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire enregistré le 21 août 2017, le préfet de l'Yonne, représenté par la SELARL Claisse et associés conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 500 euros soit mise à la charge de la requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 30 juin 2017.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté interministériel du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Christine Psilakis, premier conseiller,

- et les observations de Me C... pour le préfet de l'Yonne ;

1. Considérant que par un jugement du 9 mars 2017, le tribunal administratif de Dijon a rejeté la demande de Mme B..., ressortissante de la République du Congo, tendant à l'annulation des décisions du 29 juin 2016 par lesquelles le préfet de l'Yonne a refusé de renouveler sa carte de séjour temporaire, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée d'office ; que Mme B... relève appel de ce jugement ;

2. Considérant que les décisions par lesquelles le préfet de l'Yonne a refusé à la requérante le renouvellement de sa carte de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français comportent l'énoncé des considérations de droit et de fait, relatives notamment à sa situation personnelle et familiale, sur lesquelles elles se fondent ; que, dès lors, le moyen tiré de ce qu'elles ne seraient pas suffisamment motivées d'un point de vue formel doit être écarté ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, (...) " ; qu'aux termes du troisième alinéa de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable : " Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus en application de cet article R. 313-22 : " (...) le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis (...) / Cet avis est transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé. Celui-ci, s'il estime, sur la base des informations dont il dispose, qu'il y a lieu de prendre en compte des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, transmet au préfet un avis complémentaire motivé. / Par ailleurs, dès lors que l'intéressé porterait à la connaissance du préfet des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, le préfet saisit pour avis le directeur général de l'agence régionale de santé, qui lui communique son avis motivé dans un délai d'un mois. " ;

4. Considérant que s'il ne ressort pas de ses mentions que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé (ARS) du 29 février 2016 aurait été transmis au préfet de l'Yonne sous couvert du directeur général de cette agence, comme le prévoit l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011, il ne ressort pas des pièces du dossier que la requérante se serait prévalue de circonstances humanitaires exceptionnelles, au sens des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, ni que de la situation de l'intéressée faisait apparaître de telles circonstances ; que, dans ces conditions, la transmission directe de l'avis du médecin de l'ARS au préfet, lequel n'était pas tenu de saisir d'office le directeur général de l'agence avant de statuer sur la demande de Mme B..., ne peut être regardée comme ayant, en l'espèce, exercé une influence sur le sens de la décision prise ni comme ayant privé l'intéressée d'une garantie ; que, par suite, les moyens tirés de vices de procédure tenant à la méconnaissance des dispositions de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 doivent être écartés ;

5. Considérant que, dans son avis du 29 février 2016, le médecin de l'ARS indique que l'état de santé de Mme B..., née le 7 février 1952, nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'aucun traitement approprié n'est disponible dans son pays d'origine et qu'il existe une contre-indication médicale momentanée à un voyage vers le pays d'origine, les soins devant être poursuivis pendant six mois en France ; que le préfet de l'Yonne s'est écarté de cet avis en se fondant notamment sur la liste des médicaments enregistrés au Congo pour estimer que des médicaments comportant la même substance active que ceux prescrits à Mme B... pour traiter les multiples pathologies dont elle souffre, ou équivalents à ceux-ci, existent en République du Congo ; qu'il ressort des pièces versées au dossier que la République du Congo dispose d'infrastructures médicales à même d'opérer le suivi pluridisciplinaire de l'intéressée ; que les certificats médicaux produits par Mme B... ne sont pas de nature à remettre en cause les éléments sur lesquels le préfet s'est ainsi fondé pour estimer qu'elle pourrait bénéficier d'un traitement approprié à son état dans son pays d'origine ;

6. Considérant que les moyens selon lesquels les décisions en litige ont été prises en méconnaissance des dispositions du 7 de l'article L 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doivent être écartés par adoption des motifs circonstanciés retenus par les premiers juges ; que les moyens selon lesquels l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour et la décision fixant le pays de renvoi illégale du fait de l'illégalité des autres décisions doivent être écartés par voie de conséquence de ce qui est dit ci-dessus aux points 2 à 6 ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'ordonner une mesure d'expertise, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fins d'injonction et celles tendant à l'application, au bénéfice de son avocat, des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées par voie de conséquence ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la requérante la somme que le préfet de l'Yonne demande au titre des frais exposés par l'Etat ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du préfet de l'Yonne tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Yonne.

Délibéré après l'audience du 13 mars 2018 à laquelle siégeaient :

M. Yves Boucher, président de chambre,

M. Antoine Gille, président-assesseur,

Mme Christine Psilakis, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 avril 2018.

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N° 17LY01787

md


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY01787
Date de la décision : 12/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: Mme Christine PSILAKIS
Rapporteur public ?: Mme VACCARO-PLANCHET
Avocat(s) : FYOT

Origine de la décision
Date de l'import : 24/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-04-12;17ly01787 ?
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