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12/04/2018 | FRANCE | N°15LY02476

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 12 avril 2018, 15LY02476


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. G... B... et M. F... B... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 21 mai 2012 par lequel le maire de la commune de Saint-Bon-Tarentaise a délivré un permis de construire à Mme E... A....

Par jugement n° 1204003 du 23 juin 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 22 juillet 2015, des mémoires enregistrés les 8 et 10 février 2017 et un mémoire enregistré le 1er mars

2018 qui n'a pas été communiqué, MM. B..., représentés par Me C..., demandent à la cour :

1°) d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. G... B... et M. F... B... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 21 mai 2012 par lequel le maire de la commune de Saint-Bon-Tarentaise a délivré un permis de construire à Mme E... A....

Par jugement n° 1204003 du 23 juin 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 22 juillet 2015, des mémoires enregistrés les 8 et 10 février 2017 et un mémoire enregistré le 1er mars 2018 qui n'a pas été communiqué, MM. B..., représentés par Me C..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 23 juin 2015 ;

2°) d'annuler ce permis de construire du 21 mai 2012 ;

3°) de mettre une somme de 5 000 euros à la charge solidaire de la commune de Saint-Bon-Tarentaise et de Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est irrégulier en ce que le tribunal, pour écarter leurs moyens tirés de la méconnaissance des dispositions des articles UC 9 et UC 12 et de l'article 5 des dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme (PLU), a relevé d'office un moyen sans en avoir informé les parties, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ; la décision ayant annulé le PLU n'avait pas été versée aux débats ; les règles générales de la procédure contentieuse interdisent au juge de se fonder sur des pièces qui n'auraient pas été soumises au débat contradictoire ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les articles NC°1, NC°2, NC°3, NC°6 et NC°10 du règlement du plan d'occupation des sols (POS) de 1996 remis en vigueur ainsi que l'article R. 111-4 du code de l'urbanisme alors en vigueur, que la cour pourra examiner par voie d'évocation ;

- il n'y a pas lieu d'écarter la réglementation relative à cette zone dès lors que le classement en zone NCs d'une partie des parcelles d'assiette de la construction en litige répond aux caractéristiques de la zone de l'époque ; à supposer ce classement illégal, seul le document d'urbanisme antérieur, soit le POS de 1983, à l'exclusion des règles générales d'urbanisme, serait applicable ; le projet méconnaît la réglementation de ce POS, similaire à celle édictée en 1996 ;

- l'arrêté attaqué méconnaît l'article UD 12 du POS de 1996.

Par un mémoire enregistré le 9 janvier 2017, la commune nouvelle de Courchevel, substituée à la commune de Saint-Bon-Tarentaise, représentée par la SELAS Adamas affaires publiques, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge des requérants une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges n'ont fait qu'exercer leur office en jugeant que les dispositions du PLU n'étaient pas applicables à l'arrêté en litige et en écartant les moyens des requérants, tirés de sa violation, comme inopérants ; ils n'ont ainsi commis aucune irrégularité ;

- les autres moyens soulevés sont également infondés.

Par un mémoire enregistré le 9 janvier 2017, Mme E... A..., représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge des requérants une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal, constatant le caractère inapplicable de la règle dont la violation était prétendue, en écartant les moyens soulevés comme inopérants, n'a pas soulevé d'office un moyen d'ordre public qui aurait dû être communiqué aux parties en vertu de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ; les requérants ne pouvaient d'ailleurs raisonnablement ignorer l'annulation du PLU dont ils invoquaient la violation ;

- les moyens fondés sur la violation du POS remis en vigueur sont irrecevables dès lors qu'ils n'avaient pas été soulevés devant le tribunal et présentent le caractère de moyens nouveaux dont le juge d'appel ne saurait connaître dans le cadre de l'effet dévolutif ;

- en tout état de cause, les terrains d'assiette du projet, en raison de leurs caractéristiques et de leur environnement, notamment du fait qu'ils sont entourés de terrains déjà construits, ne peuvent plus répondre à la destination de la zone NCs ; leur classement dans cette zone est ainsi entaché d'illégalité par suite d'un changement dans les circonstances de fait, si bien que les moyens tirés de la méconnaissance des articles du règlement de cette zone ne peuvent qu'être écartés ;

- ni les dispositions de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme ni celles de l'article R. 111-5 ne sont méconnues par le projet.

Par un mémoire enregistré le 22 septembre 2017, qui n'a pas été communiqué, Mme A... demande à la cour de surseoir à statuer dans l'attente de la décision d'appel sur le litige portant sur la délibération du 17 novembre 2011 ayant approuvé le PLU de la commune.

Elle soutient que la bonne administration de la justice et les principes de sécurité juridique et de stabilité des situations juridiques individuelles justifient qu'il soit sursis à statuer sur la requête des consorts B...jusqu'à ce que la cour se prononce sur la légalité de la délibération du 17 novembre 2011.

Par lettre du 24 novembre 2017, les parties ont été informées de ce que, par un arrêt du 7 novembre 2017, la cour a, d'une part, annulé le jugement du 22 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Grenoble avait annulé la délibération du 17 novembre 2011 ayant approuvé le PLU de la commune de Saint-Bon-Tarentaise et, d'autre part, rejeté les demandes dirigées contre cette délibération.

Par un mémoire enregistré le 4 décembre 2017, MM. B... portent à 6 000 euros le montant de leur demande au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et maintiennent, pour le surplus, leurs conclusions.

Ils font valoir que :

- le jugement qui a opposé l'inapplicabilité du PLU approuvé le 17 novembre 2011 alors que ses dispositions doivent être prises en considération, doit être annulé ;

- l'arrêté attaqué méconnaît l'article 5 des dispositions générales du règlement du PLU dont les dispositions sont similaires à celles de l'article R. 111-5 alinéa 2 du code de l'urbanisme, compte tenu de la dangerosité de l'accès au terrain d'assiette du projet et de sa sortie sur la RD 91 ;

- eu égard au caractère incomplet du dossier au regard des articles R. 431-5 c) et R. 431-6 du code de l'urbanisme, le maire s'est trouvé dans l'impossibilité de vérifier si le coefficient d'emprise au sol prévu à l'article UC 9 du règlement du PLU était ou non respecté ; à supposer le dossier complet, le projet méconnaît ces dispositions ;

- les places de stationnement couvertes ne sont pas représentées dans le dossier de permis de construire, ce qui n'a pas permis au maire de vérifier le respect de l'article UC 12 du règlement du PLU ; le projet en méconnaît les dispositions en ce qu'il ne prévoit pas un nombre suffisant de places de stationnement.

Par un mémoire enregistré le 19 décembre 2017, Mme A... persiste dans ses précédentes écritures et fait valoir que :

- le moyen tiré du caractère incomplet du dossier de permis de construire, qui relève d'une cause juridique distincte de celle sur laquelle la requête introductive est fondée et qui a été soulevé après l'expiration du délai d'appel, est irrecevable ;

- les autres moyens soulevés sont infondés.

Par un mémoire enregistré le 19 décembre 2017, la commune nouvelle de Courchevel persiste dans ses précédentes écritures et fait valoir que :

- les requérants n'ayant pas critiqué le jugement rendu en ce qu'il a rejeté leur moyen tiré du caractère incomplet du dossier de permis de construire, ont seulement soulevé dans le délai d'appel des moyens de légalité interne ; le moyen tiré du caractère incomplet du dossier de permis de construire est par conséquent irrecevable ;

- les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions des articles UC 9 et UC 12 et de l'article 5 des dispositions générales du règlement du PLU sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, rapporteur public ;

- et les observations de Me H... pour la commune nouvelle de Courchevel ;

1. Considérant que par un jugement du 23 juin 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande des consorts B...tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 mai 2012 par lequel le maire de la commune de Saint-Bon-Tarentaise, qui fait partie de la commune nouvelle de Courchevel depuis le 1er janvier 2017, a délivré un permis de construire à Mme A... pour la création d'un chalet d'habitation ; que les consorts B...relèvent appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que, pour rejeter la requête des consorts B...dirigée contre l'arrêté de permis de construire en litige, le tribunal administratif de Grenoble a opposé l'inopérance des moyens tirés de la méconnaissance des articles UC 9 et UC 12 et de l'article 5 des dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) de Saint-Bon-Tarentaise approuvé par une délibération du 17 novembre 2011 qui a été annulée par un jugement de ce tribunal du 22 avril 2014 ; que le tribunal ne pouvait cependant, sans méconnaître le caractère contradictoire de la procédure, statuer sur cette affaire en tirant les conséquences de cette annulation sans que les parties en aient débattu et sans les avoir mis à même de présenter leurs observations sur la légalité du permis de construire attaqué au regard des dispositions du plan d'occupation des sols (POS) ainsi remises en vigueur ; que les requérants sont dès lors fondés à soutenir que le jugement attaqué est ainsi entaché d'une irrégularité et à demander son annulation ;

3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par les consorts B...devant le tribunal administratif de Grenoble ;

Sur la légalité du permis de construire du 21 mai 2012 :

4. Considérant qu'aux termes de l'article UC 9 du règlement du PLU de Saint-Bon-Tarentaise : " Le coefficient d'emprise au sol est de 0,25 " ; qu'en vertu du point 16 de l'article 9 des dispositions générales de ce même document, l'emprise au sol " correspond à la surface hors oeuvre brute édifiée au sol " ; qu'enfin aux termes de l'article R. 420-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " L'emprise au sol (...) est la projection verticale du volume de la construction, tous débords et surplombs inclus. " ;

5. Considérant que l'emprise au sol s'entend ainsi, en principe, comme la projection verticale du volume de la construction, tous débords et surplombs inclus, en l'absence de prescriptions particulières sur ce point dans le document d'urbanisme ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le permis de construire en litige autorise la construction d'un chalet comportant deux logements sur des parcelles cadastrées section C n° 1233 p et 895 ; qu'il ressort des pièces du dossier et des indications non contredites de la commune, que la superficie du terrain d'assiette du projet située en zone UCr et qui doit inclure la partie "d" de la parcelle 1233 p, représente 787,50 m², ce qui autorise une emprise au sol de 196,87 m² ; qu'après prise en compte de la partie de l'emprise du chalet existant située sur la parcelle 1233 p dont le projet prévoit le maintien et qui, compte tenu des bow-windows entourant le corps principal du bâtiment, représente une emprise d'un peu plus de 58 m² selon le plan du géomètre consulté par Mme A..., le coefficient d'emprise de 0,25 fixé à l'article UC 9 cité au point 4 autorise une emprise au sol résiduelle de 138,15 m² pour la réalisation du projet faisant l'objet du permis de construire en litige ; qu'il ressort des pièces cotées PCM12 du dossier de demande, notamment du plan de masse, du plan de masse d'ensemble et du plan de masse d'implantation du bâtiment, ainsi que des plans en coupe PCM13 et d'élévation PCM15, qu'en incluant les débords de toiture, les balcons et autres éléments en saillie, qui devaient être pris en compte pour déterminer l'emprise de la construction au sens et pour l'application de l'article UC 9 du règlement du PLU de Saint-Bon-Tarentaise à défaut de prescriptions particulières sur ce point, l'emprise au sol de la construction autorisée est, ainsi que le soutiennent les requérants, supérieure à cette limite ;

7. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen soulevé par les consorts B...ne paraît susceptible, en l'état du dossier, de fonder l'annulation du permis de construire en litige ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les consorts B...sont fondés à demander l'annulation de l'arrêté du 21 mai 2012 par lequel le maire de Saint-Bon-Tarentaise a délivré un permis de construire à Mme A... ;

Sur les frais liés au litige :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions que la commune nouvelle de Courchevel et Mme A... présentent sur leur fondement à l'encontre des consorts B..., qui ne sont pas partie perdante dans la présente instance ; qu'en application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune nouvelle de Courchevel et de Mme A..., chacune, le versement aux requérants d'une somme de 2 000 euros au titre des frais qu'ils ont exposés ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 23 juin 2015 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du maire de Saint-Bon-Tarentaise du 21 mai 2012 portant délivrance d'un permis de construire à Mme A... est annulé.

Article 3 : La commune nouvelle de Courchevel, d'une part, et Mme A..., d'autre part, verseront chacune aux consorts B... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... B..., à M. F... B..., à la commune nouvelle de Courchevel et à Mme E...A....

Copie en sera adressée pour information au procureur de la République près le tribunal de grande instance d'Albertville.

Délibéré après l'audience du 13 mars 2018 à laquelle siégeaient :

M. Yves Boucher, président de chambre ;

M. Antoine Gille, président-assesseur ;

Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 avril 2018.

2

N° 15LY02476

md


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY02476
Date de la décision : 12/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: Mme Bénédicte LORDONNE
Rapporteur public ?: Mme VACCARO-PLANCHET
Avocat(s) : GROLEE

Origine de la décision
Date de l'import : 24/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-04-12;15ly02476 ?
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