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15/02/2018 | FRANCE | N°16LY00967

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 15 février 2018, 16LY00967


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté en date du 14 juin 2013 par lequel le maire d'Heyrieux a accordé un permis de construire à la société "Les Jardins de l'Europe" pour la création d'un ensemble de huit maisons d'habitations ainsi que la décision rejetant leur recours gracieux, et l'arrêté du 22 juillet 2014 par lequel le maire d'Heyrieux a accordé à la même société un permis de construire modificatif.

Par un jugement n° 1305631-1405560 du 21 ja

nvier 2016, le tribunal administratif de Grenoble a annulé les permis de construire d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté en date du 14 juin 2013 par lequel le maire d'Heyrieux a accordé un permis de construire à la société "Les Jardins de l'Europe" pour la création d'un ensemble de huit maisons d'habitations ainsi que la décision rejetant leur recours gracieux, et l'arrêté du 22 juillet 2014 par lequel le maire d'Heyrieux a accordé à la même société un permis de construire modificatif.

Par un jugement n° 1305631-1405560 du 21 janvier 2016, le tribunal administratif de Grenoble a annulé les permis de construire des 14 juin 2013 et 22 juillet 2014, et mis à la charge de la commune d'Heyrieux la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 18 mars 2016, la SSCV "Les jardins de l'Europe", représentée par le cabinet Léga-Cité, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 21 janvier 2016 ;

2°) de rejeter la demande de M. et Mme A... ou, à titre subsidiaire, de surseoir à statuer sur la demande en application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme afin qu'elle sollicite un permis de construire modificatif ;

3°) de mettre à la charge de M. et Mme A... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal ne pouvait se fonder, pour annuler les permis en litige, sur l'avis émis le 13 mai 2013 par la société Grt Gaz, dès lors que celui-ci évoque une servitude d'utilité publique non opposable, et qu'en tout état de cause, il n'impose pas une distance de 390 mètres entre la canalisation et les constructions projetées ;

- en tout état de cause, il ne s'agissait pas d'un avis négatif, qui aurait été illégal au regard des dispositions de l'arrêté du 4 août 2006 ;

- l'article UB 13 du règlement du plan d'occupation des sols relatif aux opérations de lotissement ou de constructions groupées n'était pas applicable ;

- en tout état de cause, le projet prévoit une superficie d'espaces libres de 725,40 m2, lesquels doivent être regardés comme aménagés pour les jeux de détente ;

- le projet n'a pas modifié l'accès du terrain à la voie publique, de sorte que l'avis de l'autorité gestionnaire de la voie n'était pas requis ;

- si le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 423-53 du code de l'urbanisme devait être retenu, il y aurait lieu de faire application de l'article L. 600-5-1 de ce code en vue de la délivrance d'un permis de construire modificatif.

Par un mémoire en défense enregistré le 2 mai 2016, M. et Mme A..., représentés par Me E..., concluent au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société requérante et de la commune d'Heyrieux la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 28 juin 2016, la commune d'Heyrieux, représentée par la Selarl Cabinet d'avocats Philippe Petit et Associés, conclut à l'annulation du jugement du 21 janvier 2016 et à ce que soit mise à la charge de M. et Mme A... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le projet n'a pas modifié l'accès du terrain à la voie publique, de sorte que l'avis de l'autorité gestionnaire de la voie prévu par les dispositions de l'article R. 423-53 du code de l'urbanisme, n'était pas requis ;

- l'avis émis le 13 mai 2013 par la société Grt Gaz n'excluait pas le maintien du projet, sous réserve du respect de certaines prescriptions, qui ont été suivies par le maire dans l'arrêté délivrant le permis de construire, alors au demeurant que l'arrêté ministériel du 4 août 2006 portant règlement de sécurité des canalisations de gaz ne s'appliquait pas en l'espèce ;

- les dispositions de l'article UB 13 du règlement du plan d'occupation des sols ont été respectées.

Par une ordonnance du 8 septembre 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 10 octobre 2017 en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Par un courrier du 7 décembre 2017, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce qu'était susceptible d'être soulevé d'office le moyen tiré de l'irrecevabilité des conclusions de la commune d'Heyrieux, présentées après l'expiration du délai d'appel.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- l'arrêté du 4 août 2006 portant règlement de sécurité des canalisations de transport de gaz combustibles, d'hydrocarbures liquides ou liquéfiés et de produits chimiques ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Thierry Besse, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, rapporteur public,

- et les observations de Me B... pour la société Les jardins de l'Europe et de Me C... pour la commune d'Heyrieux ;

Et après avoir pris connaissance de la note en délibéré présentée pour la société requérante, enregistrée le 23 janvier 2018 ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité des conclusions de la commune d'Heyrieux ;

1. Considérant que la société "Les jardins de l'Europe" a déposé le 14 mars 2013 une demande de permis de construire valant division en vue de la réalisation de huit maisons individuelles sur un terrain sis à Heyrieux (Isère) ; que le maire de cette commune a accordé le permis sollicité par arrêté du 14 juin 2013 avant de délivrer, le 22 juillet 2014, un permis de construire modificatif portant de huit à sept le nombre de lots à construire ; que M. et Mme A... ont saisi le tribunal administratif de deux demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés ; que la société "Les jardins de l'Europe" relève appel du jugement du 21 janvier 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a fait droit à ces demandes ;

Sur la légalité des permis de construire des 14 juin 2013 et 22 juillet 2014 :

2. Considérant que, pour annuler les arrêtés des 14 juin 2013 et 22 juillet 2014, le tribunal administratif de Grenoble a retenu trois moyens, respectivement tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 423-53 du code de l'urbanisme, de la contradiction entre le projet qui a été autorisé et les prescriptions de l'avis émis par Grt Gaz auquel ce permis renvoie, et de la méconnaissance des dispositions de l'article UB 13 du règlement du plan d'occupation des sols (POS) de la commune ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 423-53 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet aurait pour effet la création ou la modification d'un accès à une voie publique dont la gestion ne relève pas de l'autorité compétente pour délivrer le permis, celle-ci consulte l'autorité ou le service gestionnaire de cette voie, sauf lorsque le plan local d'urbanisme ou le document d'urbanisme en tenant lieu réglemente de façon particulière les conditions d'accès à ladite voie. " ; qu'il ressort des pièces du dossier que le projet prévoit la desserte des sept maisons dont la construction est prévue par création d'une voie interne goudronnée de 5 mètres de large, en lieu et place du chemin non revêtu prenant accès sur l'avenue de l'Europe et desservant une exploitation agricole ; qu'il doit, dans ces conditions, être regardé comme entraînant une modification de cet accès à la voie publique justifiant la consultation pour avis du département de l'Isère, gestionnaire de cette voie ; qu'en l'absence d'une telle consultation, dont le défaut est susceptible d'avoir exercé en l'espèce une influence sur le sens de la décision, c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu comme fondé le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 423-53 du code de l'urbanisme ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que, dans son avis du 6 mai 2013, l'entreprise Grt Gaz a relevé que le projet était situé à proximité de la canalisation par transport de gaz à haute pression Etrez-Tersanne et a émis le souhait que les constructions soient éloignées de plus de 390 mètres de cet ouvrage ou, si tel n'était pas le cas, que lui soit transmise une copie du permis de construire qui serait délivré ; que la circonstance que le permis de construire a été délivré sous réserve du respect de cet avis et sans que l'implantation des constructions prévues ne soit pour autant modifiée ne saurait être regardée comme entachant l'autorisation délivrée d'une contradiction dès lors que l'avis du 6 mai 2013 n'excluait pas la délivrance d'un permis de construire en l'état du projet soumis pour avis ; que, par suite, la société requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a retenu le moyen tiré d'une telle contradiction ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article UB 13 du règlement du POS d'Heyrieux : " Toute opération de lotissement ou de constructions groupées à usage d'habitation doit comporter la réalisation d'espaces libres, aménagés pour les jeux de détente. La surface de ces espaces libres sera : soit de 125 mètres carrés par lot ou logement individuel, soit seulement égale à la surface plancher ou ensemble collectif. Toutefois, pour des opérations de moins de 5 logements et pour des opérations jouxtant de grands espaces libres publics, cette surface pourra être réduite avec un minimum absolu 50 m² par lot ou par logement " ; que ni les espaces aménagés pour le cheminement ou le stationnement des véhicules ni les espaces privatifs propres à chacune des maisons faisant l'objet du projet de constructions groupées en litige ne sauraient être regardés comme des espaces libres au sens et pour l'application de ces dispositions ; qu'en vertu de ces dispositions, le projet doit comporter des espaces libres, aménagés pour les jeux de détente d'une superficie minimale de 725,40 m2 égale à la surface de plancher dont la réalisation est prévue ; qu'il ressort des pièces du dossier que les espaces verts et espaces de jeux et de détente non privatifs du projet ne représentent que 575 m2 ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que les dispositions de l'article UB 13 du règlement du POS de la commune ont été méconnues ;

6. Considérant ainsi que, parmi les motifs d'annulation retenus par le jugement attaqué, les motifs tirés de la méconnaissance de l'article R. 423-53 du code de l'urbanisme et de l'article UB 13 du règlement du POS sont fondés ;

7. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu en particulier de la nature du vice relevé au point 5 et de la configuration du terrain d'assiette, et alors d'ailleurs que le projet a déjà fait l'objet d'un permis de construire modificatif, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société "Les jardins de l'Europe" et la commune d'Heyrieux ne sont pas fondées à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé les arrêtés du maire d'Heyrieux des 14 juin 2013 et 22 juillet 2014 portant permis de construire ;

Sur les frais d'instance :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. et Mme A..., qui ne sont pas partie perdante, versent à la société Les jardins de l'Europe et à la commune d'Heyrieux la somme qu'elles demandent au titre des frais non compris dans les dépens qu'elles ont exposés ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société requérante le versement de la somme globale de 2 000 euros à M. et Mme A... au titre des frais non compris dans les dépens qu'ils ont exposés ; qu'il n'y a en revanche pas lieu de mettre de tels frais à la charge de la commune d'Heyrieux ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société "Les jardins de l'Europe" et les conclusions de la commune d'Heyrieux sont rejetées.

Article 2 : La société "Les jardins de l'Europe" versera à M. et Mme A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de M. et Mme A... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société "Les jardins de l'Europe", à M. et Mme D... A... et à la commune d'Heyrieux.

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2018 à laquelle siégeaient :

M. Antoine Gille, président,

M. Thierry Besse, premier conseiller,

Mme Christine Psilakis, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 février 2018.

La République mande et ordonne au préfet de l'Isère en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

Le greffier,

5

N° 16LY00967

md


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY00967
Date de la décision : 15/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03-02-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Légalité interne du permis de construire. Légalité au regard de la réglementation locale. Plans d'aménagement des ZAC.


Composition du Tribunal
Président : M. GILLE
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: Mme VACCARO-PLANCHET
Avocat(s) : LEGA-CITE

Origine de la décision
Date de l'import : 27/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-02-15;16ly00967 ?
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