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08/02/2018 | FRANCE | N°17LY02013

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 08 février 2018, 17LY02013


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner l'Etat à lui verser une somme de 24 000 euros assortie des intérêts en réparation des préjudices que lui ont causé les décisions des 31 janvier 2011 et 13 juillet 2011 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1602036 du 18 avril 2017, le tribunal administratif de Lyon a condamné l'Etat à lui verser la somme de 500 euros assortie des intérêts au taux légal à compte

r du 20 mai 2015.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 17 mai 2017,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner l'Etat à lui verser une somme de 24 000 euros assortie des intérêts en réparation des préjudices que lui ont causé les décisions des 31 janvier 2011 et 13 juillet 2011 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1602036 du 18 avril 2017, le tribunal administratif de Lyon a condamné l'Etat à lui verser la somme de 500 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 mai 2015.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 17 mai 2017, Mme C..., représentée par la Selarl BS2A Bescou et D...Avocats Associés demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 18 avril 2017, en tant qu'il a partiellement rejeté sa demande ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 24 000 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 28 avril 2015 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à charge pour ce dernier de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

- les décisions de refus de séjour des 31 janvier 2011 et 13 juillet 2011 étaient entachées d'une illégalité fautive ;

- elle a perdu une chance de travailler entre les mois de janvier 2011 et janvier 2012, qui a été à l'origine pour elle d'un préjudice qui ne peut être regardé comme éventuel ;

- elle a subi un préjudice du fait de la perte de prestations sociales dont elle devait bénéficier, en vertu des dispositions de l'article L. 512-2 du code de la sécurité sociale ;

- l'ensemble de son préjudice matériel peut être évalué à 12 000 euros ;

- elle a subi un préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence, qui peuvent être évalués à 12 000 euros.

Par un mémoire enregistré le 22 décembre 2017, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête en s'en remettant à ses écritures de première instance.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 20 juin 2017.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Thierry Besse, premier conseiller,

- et les observations de Me A... substituant Me D... pour Mme C... ;

1. Considérant que Mme C..., ressortissante camerounaise, a solllicité le 21 septembre 2010 un titre de séjour à raison de sa situation personnelle et familiale, faisant valoir sa situation de mère de deux enfants nés, pour le premier, au Cameroun en 2005 et, pour le second, en France en 2009, d'une relation avec un compatriote titulaire d'un titre de séjour qu'elle a épousé le 14 août 2010 ; que, par décisions du 31 janvier 2011, le préfet du Rhône a refusé de délivrer à Mme C... le titre de séjour sollicité et l'a obligée à quitter le territoire français ; que, par jugement du 10 mai 2011, le tribunal administratif de Lyon a annulé ces décisions et enjoint au préfet du Rhône de réexaminer la situation de l'intéressée ; que, par décision du 13 juillet 2011, le préfet du Rhône a de nouveau refusé de délivrer un titre de séjour à Mme C... ; que, par jugement du 19 octobre 2011, le tribunal administratif de Lyon a annulé ce refus de séjour et enjoint au préfet du Rhône de délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " à Mme C... ; que Mme C... a demandé la condamnation de l'Etat à l'indemniser du préjudice qu'elle a subi du fait de l'illégalité de ces refus de séjour ; que, par jugement du 18 avril 2017, le tribunal administratif de Lyon a condamné l'Etat à verser à l'intéressée la somme de 500 euros en réparation de son préjudice moral et a rejeté le surplus de sa demande ; que Mme C... relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions ;

Sur la faute de l'Etat :

2. Considérant que Mme C... fait valoir que les deux décisions des 31 janvier et 13 juillet 2011 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour sont, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de Lyon, entachées d'illégalité et que cette illégalité est constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que le tribunal a annulé le refus de séjour du 10 mai 2011 pour défaut d'examen particulier de la situation de Mme C... ; qu'eu égard au motif d'annulation retenu, et alors que la requérante, entrée récemment en France à cette date, ne soutient pas même que cette décision aurait été dépourvue de fondement, il ne résulte pas de l'instruction que le refus de titre de séjour du 31 janvier 2011 a causé un préjudice à la requérante, qui n'établit pas que son droit au séjour à cette date aurait été méconnu ; que, le tribunal administratif de Lyon ayant annulé le refus de titre de séjour en date du 13 juillet 2011 pour méconnaissance du droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale, la responsabilité de l'Etat est, en revanche, engagée à compter de ce deuxième refus ;

Sur le préjudice :

3. Considérant, en premier lieu, que Mme C... soutient avoir été privée d'une chance sérieuse de travailler et de percevoir la rémunération correspondante ; qu'au soutien de sa demande, Mme C... produit une promesse d'embauche en qualité d'employée archiviste établie le 1er septembre 2011, et fait valoir qu'elle a travaillé comme agent d'entretien, au sein d'une autre société, à compter du 13 mars 2012 ; qu'alors que le préfet du Rhône fait valoir que Mme C... pouvait travailler à compter du 9 novembre 2011, date à laquelle il lui a délivré un récépissé de titre de séjour, ces éléments ne permettent toutefois pas d'établir que la requérante disposait d'une chance sérieuse de travailler entre le 13 juillet 2011 et cette dernière date, alors au demeurant que celle-ci a donné naissance à son troisième enfant le 1er septembre 2011 ; que, dans ces conditions, le préjudice invoqué présente un caractère éventuel et ne peut être indemnisé ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que, si Mme C... soutient avoir été privée de prestations familiales et d'aides au logement, il ressort des pièces du dossier, et notamment des éléments communiqués au préfet du Rhône par la Caisse d'allocations familiales du Rhône, que le mari de l'intéressée, qui séjournait régulièrement en France et avec lequel elle résidait, a lui-même perçu pendant la période en cause l'ensemble des allocations et aides auxquelles la famille pouvait prétendre ; que, par suite, Mme C... n'établit pas que les refus de séjour en litige lui ont causé un quelconque préjudice à ce titre ;

5. Considérant, enfin, qu'il résulte de l'instruction qu'entre le 13 juillet 2011 et l'annulation par le tribunal administratif de Lyon du refus de séjour pris à cette date, Mme C... vivait au domicile de son époux, lequel séjournait régulièrement en France et disposait de revenus ; que, dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence subis par l'intéressée du fait de la décision en litige en fixant à 1 000 euros le montant de la réparation due à ce titre ;

Sur le point de départ des intérêts moratoires :

6. Considérant que, contrairement à ce que soutient Mme C... et ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de Lyon, les intérêts au taux légal sur la somme due à la requérante ont couru à compter du 20 mai 2015, date de réception par le préfet du Rhône de sa demande préalable ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C... est seulement fondée à demander que la somme que l'Etat a été condamné à lui payer soit portée à 1 000 euros et à demander, dans cette mesure, la réformation du jugement du tribunal administratif de Lyon ;

Sur les frais d'instance :

8. Considérant que Mme C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 visée ci-dessus ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à ce titre à la charge de l'Etat le versement au conseil de Mme C... de la somme de 1 000 euros, sous réserve de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme que l'Etat a été condamné à payer à Mme C... par l'article 1er du jugement n° 1602036 du 18 avril 2017 est portée à 1 000 euros.

Article 2 : Le jugement n° 1602036 du 18 avril 2017 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à la Selarl BS2A Bescou et D...Avocats Associés la somme de 1 000 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C..., au ministre de l'intérieur et à la Selarl BS2A Bescou et D...Avocats Associés.

Copie en sera notifiée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2018 à laquelle siégeaient :

M. Antoine Gille, président,

M. Thierry Besse, premier conseiller,

Mme Christine Psilakis, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 février 2018.

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N° 17LY02013


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY02013
Date de la décision : 08/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. GILLE
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: Mme VACCARO-PLANCHET
Avocat(s) : SELARL BS2A - BESCOU et SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-02-08;17ly02013 ?
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