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11/01/2018 | FRANCE | N°17LY00874

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 11 janvier 2018, 17LY00874


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... D... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 8 novembre 2016 par lequel le préfet de la Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé.

Par un jugement n° 1608507 du 23 janvier 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 28 février 2

017, M. A... D... B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... D... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 8 novembre 2016 par lequel le préfet de la Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé.

Par un jugement n° 1608507 du 23 janvier 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 28 février 2017, M. A... D... B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 23 janvier 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Loire du 8 novembre 2016 ;

3°) de faire injonction au préfet de la Loire de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention "vie privée et familiale" dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à charge pour celui-ci de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce qu'il est insuffisamment motivé et en ce qu'il a écarté le moyen par lequel il faisait valoir sa minorité sans qu'ait été mise en oeuvre la procédure de l'article 47 du code civil ;

- l'obligation de quitter le territoire français a été prise par une personne incompétente ;

- cette obligation est insuffisamment motivée ;

- elle a été prise en méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le délai de départ volontaire est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'elle ne lui permet pas d'exercer ses droits pour sa défense dans le cadre de la procédure pénale dont il fait l'objet ;

- il est fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi.

Par un mémoire enregistré le 29 novembre 2017, le préfet de la Loire conclut au rejet de la requête.

Il s'en rapporte à ses écritures de première instance.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 19 avril 2017.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de M. Thierry Besse, premier conseiller ;

1. Considérant que M. B..., ressortissant de la République Démocratique du Congo, est entré en France le 7 septembre 2016 avec sa soeur et son frère ; qu'il s'est présenté aux services de l'aide sociale à l'enfance du département de la Loire en qualité de mineur isolé ; qu'estimant qu'il était majeur, le préfet de la Loire l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours par arrêté du 8 novembre 2016 ; que M. B...relève appel du jugement du 23 janvier 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'en se fondant sur les données issues du fichier Visabio, que ne permettaient pas de contredire les attestations de naissance produites par le requérant, pour estimer que M. B... était majeur, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a suffisamment motivé son jugement ; que l'intéressé n'ayant produit, en première instance, qu'une attestation de naissance délivrée en 2016 par le bourgmestre de Lemba au vu de "documents" non spécifiés, attestation qui ne peut être regardée comme un acte de l'état civil rédigé dans les formes répondant aux prescriptions fixées par la législation de la République démocratique du Congo en la matière, le moyen tiré de ce que le magistrat désigné aurait entaché son jugement d'irrégularité en ne faisant pas jouer le régime de présomption prévu par les dispositions de l'article 47 du code civil ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté ;

Sur la légalité de l'arrêté du 8 novembre 2016 :

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire :

3. Considérant que M. B... réitère en appel, sans les assortir d'éléments nouveaux, ses moyens tirés de l'incompétence du signataire de l'arrêté en litige et de son insuffisante motivation ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment de la fiche Visabio produite par le préfet de la Loire, que M. B...a obtenu un visa au poste consulaire de Kinshasa en faisant état d'une date de naissance le 20 juin 1998 ; que le requérant, qui n'apporte aucune explication sur ce point, a produit devant le préfet puis en première instance une attestation de naissance établie en 2016 qui, ainsi qu'il a été dit au point 2, ne peut être regardée comme un acte d'état civil ; que M. B... produit en appel un jugement supplétif du tribunal pour enfants de Kinshasa en date du 13 décembre 2016 mentionnant qu'il serait né le 20 juin 2002 selon les déclarations faites par son père, que sa soeur avait pourtant déclaré décédé lors de ses entretiens devant les services de l'aide sociale à l'enfance puis lors de son audition par la police ; que ce seul jugement et l'acte de naissance établi par la suite ne peuvent, compte tenu des nombreuses incohérences dans les déclarations de l'intéressé, être regardés comme de nature à remettre en cause la date de naissance déclarée par lui lors de sa demande de visa ; que l'intéressé étant majeur à la date de la décision en litige, il ne peut utilement invoquer la méconnaissance des stipulations citées au point 4 ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B... ne séjournait en France que depuis deux mois à la date de la décision l'obligeant à quitter le territoire français et qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales en République Démocratique du Congo, où réside notamment son père ; que, dans ces conditions, et alors même que son frère mineur a été recueilli par les services de l'aide sociale à l'enfance du département de la Loire, la décision l'obligeant à quitter le territoire français ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise et ne méconnaît pas, dès lors, les stipulations citées au point 6 ;

En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ volontaire :

8. Considérant que la décision fixant à trente jours le délai dont dispose M. B... pour quitter volontairement le territoire ne le prive pas de la possibilité de se défendre dans le cadre de la procédure pénale dont il fait l'objet pour des faits d'usage de faux nom, de tromperie afin d'obtenir un droit et d'usage indu d'un acte de naissance, dès lors qu'il peut se faire représenter et dispose, le cas échéant, de la possibilité de revenir en France sous couvert d'un visa, ; que le moyen tiré de ce que cette décision serait, à cet égard, entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation doit, par suite, être écarté ;

En ce qui concerne la fixation du pays de renvoi :

9. Considérant qu'il résulte de ce qui est dit aux points 3 à 7 que M. B... n'est pas fondé à exciper à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fins d'injonction sous astreinte et celles tendant à ce qu'il soit fait application, au bénéfice de son avocat, des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Loire.

Délibéré après l'audience du 12 décembre 2017 à laquelle siégeaient :

M. Yves Boucher, président de chambre,

M. Antoine Gille, président-assesseur,

M. Thierry Besse, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 janvier 2018.

La République mande et ordonne au ministre l'intérieur et au préfet de la Loire en ce qui les concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

Le greffier,

2

N° 17LY00874

md


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY00874
Date de la décision : 11/01/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: Mme VACCARO-PLANCHET
Avocat(s) : LAWSON- BODY

Origine de la décision
Date de l'import : 16/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-01-11;17ly00874 ?
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