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19/12/2017 | FRANCE | N°16LY01621

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 19 décembre 2017, 16LY01621


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme B...ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 22 novembre 2013 par lequel le maire de la commune de Tulette leur a interdit d'installer une éolienne domestique dans le jardin de leur propriété.

Par un jugement n° 1400406 du 15 mars 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 12 mai et 8 septembre 2016, M. et Mme B..., représentés par la SELARL BSV,

demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 15 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme B...ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 22 novembre 2013 par lequel le maire de la commune de Tulette leur a interdit d'installer une éolienne domestique dans le jardin de leur propriété.

Par un jugement n° 1400406 du 15 mars 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 12 mai et 8 septembre 2016, M. et Mme B..., représentés par la SELARL BSV, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 15 mars 2016 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté du 22 novembre 2013 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Tulette une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la décision en litige est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'erreur de droit en ce que le maire ne peut leur opposer l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme puisque leur éolienne domestique, d'une hauteur inférieure à 8 m, n'est soumise à aucune formalité au titre de ce code ;

- elle est entachée d'erreur d'appréciation en ce que l'atteinte portée à la sécurité publique évoquée n'existe pas, la commune n'apportant aucune preuve du danger créé par l'installation de cette éolienne domestique ;

- elle est entachée de détournement de pouvoir.

Par un mémoire en défense enregistré le 6 septembre 2016, la commune de Tulette, représentée par la SELARL Jean-Michel et SophieC..., conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. et Mme B...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- M. et Mme B...n'ont pas intérêt à agir puisqu'ils n'ont pas fait de recours à l'encontre du refus opposé à une demande antérieure de permis de construire pour l'installation d'une éolienne domestique ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Christine Psilakis, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, rapporteur public,

- et les observations de Me A... pour M. et MmeB..., ainsi que celles de Me C... pour la commune de Tulette ;

1. Considérant que M. et Mme B... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 22 novembre 2013 par lequel le maire de la commune de Tulette leur a interdit l'installation d'une éolienne domestique sur leur terrain cadastré section H n° 497 et 498 d'une superficie de 700 m² situé dans le lotissement les Garriguettes en zone UD du plan d'occupation des sols de la commune ; que, par un jugement du 15 mars 2016, le tribunal a rejeté cette demande ; que M. et Mme B...relèvent appel de ce jugement et demandent à la cour l'annulation de cet arrêté ;

Sur l'intérêt à agir de M. et Mme B... :

2. Considérant que la décision contestée a le caractère d'une mesure de police administrative interdisant à M. et Mme B... d'installer une éolienne domestique sur leur propriété pour des motifs de sécurité publique ; que les requérants ont intérêt à agir à l'encontre de cette décision alors même qu'ils n'ont pas contesté un refus du 8 février 2011 opposé à une demande antérieure de permis de construire portant sur une éolienne plus haute ;

Sur la légalité de l'arrêté en date du 26 novembre 2011 :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2212-1 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est chargé, sous le contrôle administratif du représentant de l'Etat, de la police municipale (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 2212-2 du même code : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : (...) / 5° Le soin de prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et les fléaux calamiteux (...) " ;

4. Considérant que si le maire est chargé par les dispositions citées au point 3 du maintien de l'ordre et de la sécurité publics dans la commune, il doit concilier l'accomplissement de sa mission avec le respect des libertés garanties par les lois ; qu'il en résulte que la mesure de police que le maire d'une commune édicte en vue d'interdire l'installation, sur un terrain privé, d'un équipement qui n'est soumis à aucune formalité d'autorisation ou de déclaration, notamment au titre du code de l'urbanisme, doit être adaptée, nécessaire et proportionnée au regard des seules nécessités de l'ordre et la sécurité publics, telles qu'elles découlent des circonstances de temps et de lieu, et compte tenu des exigences qu'implique la libre jouissance de la propriété privée ; qu'il ne lui appartient pas de se fonder sur d'autres considérations, les restrictions apportées aux libertés devant par ailleurs être justifiées par des risques avérés d'atteinte à l'ordre et la sécurité publics ;

5. Considérant que M. et Mme B... ont initialement installé une éolienne domestique de plus de 12 m sur leur propriété ; que suite à une mise en demeure de déposer cet équipement et à un refus de permis de construire opposé par le préfet le 8 février 2011, les intéressés ont fait sectionner le mât de l'éolienne afin que sa hauteur soit conforme aux dispositions du règlement du plan d'occupation des sols et que son installation ne requière aucune autorisation ou déclaration préalable au titre du code de l'urbanisme ; que le 22 novembre 2013, le maire de Tulette, informé par les époux B...de leur intention de mettre en place l'éolienne ainsi modifiée, leur a notifié une interdiction de procéder à cette installation ;

6. Considérant que pour justifier cette interdiction, le maire de Tulette se borne à faire état de risques pour la sécurité publique ; que les requérants se prévalent de l'attestation de conformité de l'ouvrage délivrée par la société Weole le 24 août 2011 complétée de la mention "Attestation confirmée après réduction du mât par SIV Entreprise professionnelle conventionnelle" apposée le 15 septembre 2011 ; que, dans ces conditions, le maire n'établit pas l'absence de fiabilité de l'éolienne après modification de son mât ; que, dans les circonstances de l'espèce, la mesure d'interdiction ne peut ainsi être regardée comme proportionnée aux nécessités de la sécurité publique ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme B... sont fondés à soutenir que, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande d'annulation de la décision du 22 novembre 2013 ;

Sur les frais d'instance :

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la commune de Tulette demande au titre des frais qu'elle a exposés soit mise à la charge de M. et Mme B..., qui ne sont pas, dans la présente instance, partie perdante ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de la commune de Tulette le versement d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. et Mme B... ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 15 mars 2016 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du maire de Tulette du 22 novembre 2013 est annulé.

Article 3 : La commune de Tulette versera à M. et Mme B... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... et à la commune de Tulette.

Délibéré après l'audience du 28 novembre 2017 à laquelle siégeaient :

M. Yves Boucher, président de chambre ;

M. Antoine Gille, président-assesseur ;

Mme Christine Psilakis, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 décembre 2017.

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N° 16LY01621

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY01621
Date de la décision : 19/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-03-06 Police. Étendue des pouvoirs de police. Police générale et police spéciale.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: Mme Christine PSILAKIS
Rapporteur public ?: Mme VACCARO-PLANCHET
Avocat(s) : BSV BELLIN SABATIER VOLPATO

Origine de la décision
Date de l'import : 26/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-12-19;16ly01621 ?
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