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19/12/2017 | FRANCE | N°15LY03993

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 19 décembre 2017, 15LY03993


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme A... D... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 22 octobre 2012 par laquelle le maire de Valence a exercé le droit de préemption urbain sur un immeuble situé 47 et 47 bis chemin de Ronde, ainsi que la décision implicite de rejet de leur recours gracieux.

Par un jugement n° 1301956 du 29 octobre 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 18 décembre 2015 et u

n mémoire, enregistré le 5 octobre 2017, M. et Mme D..., représentés par la SELARL cabinet C...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme A... D... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 22 octobre 2012 par laquelle le maire de Valence a exercé le droit de préemption urbain sur un immeuble situé 47 et 47 bis chemin de Ronde, ainsi que la décision implicite de rejet de leur recours gracieux.

Par un jugement n° 1301956 du 29 octobre 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 18 décembre 2015 et un mémoire, enregistré le 5 octobre 2017, M. et Mme D..., représentés par la SELARL cabinet Champauzac, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 29 octobre 2015 ;

2°) d'annuler la décision de préemption du 22 octobre 2012 ainsi que la décision de rejet de leur recours gracieux ;

3°) de mettre une somme de 5 000 euros à la charge de la commune de Valence au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la délibération du 31 mars 2008 donnant délégation au maire pour exercer le droit de préemption a été prise irrégulièrement, faute de justification du respect des exigences des articles L. 2121-10 et L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales ;

- la décision attaquée est insuffisamment motivée, dès lors qu'elle ne fait pas apparaître la nature du projet ; cette motivation insuffisante ne saurait être couverte a posteriori, contrairement à ce qu'à jugé le tribunal, qui ne pouvait davantage se référer à l'importance du bien préempté ;

- l'élargissement de la voirie alléguée en défense n'entre pas dans le champ de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme et ne constitue pas un complément indissociable de l'opération de restructuration du site Latour-Maubourg ; ainsi, il ne permet pas de fonder la décision de préemption en litige ;

- la décision en litige est entachée d'erreur d'appréciation dès lors que les parcelles préemptées se trouvent en dehors du périmètre du projet d'aménagement Latour-Maubourg et ne sont intégrées dans aucune étude ; elles ne sont aucunement nécessaires à la réalisation des aménagements projetés, notamment au regard de leur emplacement et de leur très faible superficie ; l'élargissement de la voirie n'est en rien subordonné à leur acquisition puisque les garages se trouvent sur une partie de la chaussée du chemin de Ronde mesurant six mètres de largeur ;

- la mise en oeuvre du droit de préemption ne répond pas à un intérêt général suffisant, dès lors que la commune avait la faculté d'élargir la chaussée sur toute sa longueur à moindre coût d'une autre manière.

Par un mémoire enregistré le 20 septembre 2017 et un mémoire enregistré le 13 octobre 2017 qui n'a pas été communiqué, la commune de Valence, représentée par la SELARL Itinéraires avocats, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge des requérants en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés sont infondés.

La clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 13 octobre 2017 par ordonnance du 22 septembre 2017.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller ;

- les conclusions de Véronique Vaccaro-Planchet, rapporteur public ;

- et les observations de Me C... pour M. et Mme D..., ainsi que celles de Me B... pour la commune de Valence ;

1. Considérant que, par un acte sous seing privé, M. et Mme D... se sont portés acquéreurs, le 1er août 2012, des parcelles cadastrées section AT n° 300 et 502, d'une contenance de 33 m² comprenant deux garages et situées 47 et 47 bis chemin de Ronde à Valence ; qu'à réception de la déclaration d'intention d'aliéner, le maire de Valence a exercé sur ces parcelles le droit de préemption urbain au prix proposé de 15 000 euros ; que M. et Mme D... relèvent appel du jugement du 29 octobre 2015 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande d'annulation de cette décision, ainsi que de la décision rejetant leur recours gracieux ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1 (...). / Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le titulaire du droit de préemption urbain peut légalement exercer ce droit, d'une part, s'il justifie, à la date à laquelle il l'exerce, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date et, d'autre part, s'il fait apparaître la nature de ce projet dans la décision par laquelle il exerce ce droit de préemption ;

3. Considérant, d'une part, que si la décision en litige expose que la "Ville est déjà propriétaire des parcelles voisines aménagées en place de stationnement" et mentionne "la nécessité pour la Ville d'aménager de nouveaux espaces publics dans le cadre de la restructuration du site Latour-Maubourg", elle ne fait pas apparaître, par ces seules mentions, la nature du projet en vue duquel le droit de préemption est exercé ;

4. Considérant, d'autre part, que si la commune de Valence fait valoir en défense que, par délibération du 27 juin 2005, elle a lancé une étude à partir de laquelle elle a élaboré un projet d'aménagement et de réhabilitation du secteur de l'ancienne caserne Latour-Maubourg ayant le caractère d'une opération d'aménagement au sens de l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme et que, par des délibérations des 27 septembre 2010, 15 décembre 2010 et 5 mars 2012, le conseil municipal a approuvé des actions se rapportant à cette opération et, notamment, la création d'un budget annexe pour la réhabilitation et l'aménagement des espaces du site concerné, la décision de préemption contestée ne fait aucunement référence à ces délibérations dont le contenu ne peut ainsi, en tout état de cause, être invoqué pour justifier du respect de l'obligation de faire apparaître, dans une décision de préemption, la nature du projet en vue duquel ce droit est exercé ;

5. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'apparaît, en l'état de l'instruction, également susceptible de fonder l'annulation de la décision attaquée ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme D... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande et à demander l'annulation de ce jugement ainsi que celle de la décision de préemption du 22 octobre 2012 et de la décision implicite de rejet de leur recours gracieux ;

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la commune de Valence demande sur leur fondement au titre de ses frais soit mise à la charge de M. et Mme D..., qui ne sont pas partie perdante dans la présente instance ; qu'il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Valence le versement d'une somme de 2 000 euros aux requérants au titre de ces mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 29 octobre 2015 est annulé.

Article 2 : La décision du 22 octobre 2012 par laquelle le maire de Valence a exercé le droit de préemption urbain sur l'immeuble situé 47 et 47 bis chemin de Ronde ainsi que la décision implicite de rejet du recours gracieux de M. et Mme D..., sont annulées.

Article 3 : La commune de Valence versera la somme de 2 000 euros à M. et Mme D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme D... et à la commune de Valence.

Délibéré après l'audience du 28 novembre 2017 à laquelle siégeaient :

M. Yves Boucher, président de chambre ;

M. Antoine Gille, président-assesseur ;

Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 décembre 2017.

2

N° 15LY03993

fg


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY03993
Date de la décision : 19/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-02-01-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Procédures d'intervention foncière. Préemption et réserves foncières. Droits de préemption. Droit de préemption urbain.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: Mme Bénédicte LORDONNE
Rapporteur public ?: Mme VACCARO-PLANCHET
Avocat(s) : SELARL CABINET CHAMPAUZAC

Origine de la décision
Date de l'import : 26/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-12-19;15ly03993 ?
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