Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. J... A..., Mme C... E..., M. et Mme K... et Françoise F... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 10 janvier 2013 par lequel le maire de la commune de Chassieu a accordé à la société Prestibat un permis de construire pour la réalisation d'un ensemble immobilier de cinquante et un logements sur un terrain situé 9 rue de la République.
Par un jugement n° 1304364 du 18 juin 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 8 septembre 2015, le 18 juillet 2017 et le 17 août 2017, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, M. A... et autres, représentés par le cabinet d'avocats Rebotier Rossi et associés, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 18 juin 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 10 janvier 2013 par lequel le maire de la commune de Chassieu a accordé à la société Prestibat un permis de construire ;
3°) de rejeter les demandes formulées, tant en première instance qu'en appel, par la société Prestibat au titre de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme ;
4°) de mettre une somme de 3 000 euros à la charge de la commune de Chassieu au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. A... et autres soutiennent que :
- ils justifient d'un intérêt pour agir à l'encontre du permis de construire compte tenu de leur situation de voisins immédiats du projet, de la perte d'ensoleillement et de l'aggravation du trafic qu'il va générer, ainsi que de ses conséquences sur l'activité professionnelle de Mme F... ; la fin de non-recevoir opposée à ce titre ne saurait donc être retenue ;
- leur demande de première instance n'était pas tardive en l'absence d'affichage continu et de visibilité depuis la voie publique ou un espace ouvert au public du panneau d'affichage dont l'emplacement était constitutif d'une manoeuvre ; le délai de recours à couru au plus tôt à la date à laquelle ils en ont pris connaissance, le 18 avril 2013 ;
- le dossier de demande du permis de construire est incomplet en méconnaissance des articles R. 431-8 à R. 431-10 et R. 431-24 du code de l'urbanisme ;
- l'arrêté attaqué a été pris en méconnaissance des dispositions de l'article 3 UA du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) et de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, compte tenu du surcroît de trafic généré sur la rue de la République par le projet et de l'impossibilité pour les services de secours et de lutte contre l'incendie d'accéder notamment au bâtiment C ;
- le tribunal n'a pas correctement apprécié les caractéristiques du tissu environnant du projet, faisant essentiellement apparaître des toitures à deux pans ; que les conditions posées par le paragraphe 11.5 "toitures" de l'article 11 UA du règlement du PLU ne sont pas réunies ;
- le projet litigieux prévoit la présence d'un commerce sans que l'impact des livraisons ou des enlèvements de marchandises sur le domaine public n'ait été étudié par le pétitionnaire, en violation du paragraphe 12.4 de l'article 12 UA du règlement du plan local d'urbanisme ;
- leur recours, recevable et fondé, a été engagé dans des conditions qui n'excèdent pas la défense de leurs intérêts légitimes ; la société Prestibat n'établit ni la réalité ni le montant du prétendu préjudice excessif qu'elle subirait.
Par un mémoire, enregistré le 12 octobre 2015, la société Prestibat, représentée par Me I..., conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de chacun des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la demande de première instance est tardive ;
- les moyens soulevés sont infondés.
Par des mémoires distincts, enregistré le 12 octobre 2015 et le 10 août 2017, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, la société Prestibat, représentée par Me I..., conclut à la condamnation de M. A... et autres au paiement d'une indemnité de 282 081 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme.
Elle soutient que :
- le recours a été introduit dans des conditions qui excèdent les intérêts légitimes des requérants ; la requête est tardive et ne soulève que des moyens sans lien avec les préjudices prétendument subis par les requérants ;
- le recours introduit lui cause un préjudice manifestement excessif compte tenu de l'immobilisation de la trésorerie et de la perte de chance de vendre au prix du marché immobilier en 2013.
Par un mémoire enregistré le 27 novembre 2015 la commune de Chassieu, représentée par la SCP d'avocats Vedesi, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge solidaire des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- la demande de première instance est tardive au regard de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme ;
- les moyens soulevés sont infondés.
Par ordonnance du 19 juillet 2017, la clôture de l'instruction initialement fixée au 18 juillet 2017 a été reportée au 18 août 2017.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, rapporteur public,
- et les observations de Me B... pour M. A... et autres, celles de Me D... substituant Me I... pour la société Prestibat, ainsi que celles de Me G... pour la commune de Chassieu ;
1. Considérant que, par un arrêté du 10 janvier 2013, le maire de la commune de Chassieu a délivré à la société Prestibat un permis de construire un ensemble immobilier de quatre bâtiments comportant cinquante et un logements sur une parcelle située 9 rue de la République à Chassieu ; que M. A... et autres relèvent appel du jugement du 18 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté ; que la société Prestibat, dont les conclusions tendant à l'application de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme ont été rejetées par les premiers juges, présente sur ce fondement des conclusions tendant à la condamnation des requérants à lui verser une indemnité de 263 424 euros ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par les intimées à la demande de première instance :
2. Considérant qu'en vertu de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, le délai pour former un recours contentieux contre une décision administrative est fixé à deux mois à partir de la notification ou de la publication de cette décision ; qu'aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre (lisibles de la voie publique ou des espaces ouverts au public pendant toute la durée du chantier) d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15. " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 424-15 : " Mention du permis explicite ou tacite ou de la déclaration préalable doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article A. 424-18 : " Le panneau d'affichage doit être installé de telle sorte que les renseignements qu'il contient demeurent.lisibles de la voie publique ou des espaces ouverts au public pendant toute la durée du chantier " ; que s'il incombe au bénéficiaire d'un permis de construire de justifier qu'il a bien accompli les formalités d'affichage prescrites par ces dispositions, la continuité de l'affichage doit s'apprécier au regard de l'ensemble des pièces du dossier ;
3. Considérant, d'une part, que le pétitionnaire a produit devant le tribunal un constat d'huissier dressé le 25 janvier 2013, constatant la présence d'un panneau d'affichage en bordure du terrain d'assiette du projet ; que ce panneau était toujours présent le 7 mai 2013, date à laquelle il s'est à nouveau rendu sur les lieux, selon ses constatations consignées dans un second procès-verbal ; qu'en se bornant à renvoyer à leur courrier du 8 mai 2013 adressé à la société Prestibat aux termes duquel ils déclarent n'avoir pas vu le panneau d'affichage, les requérants n'apportent aucun élément probant de nature à faire douter de la continuité de cet affichage, lequel doit, dès lors, être regardé comme établi ;
4. Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des énonciations des constats d'huissier cités au point 3 confirmées par les photographies qui y sont jointes et qui ne sont pas utilement contredites par les indications portées sur le constat d'huissier du 23 avril 2013 et les photographies dont se prévalent les requérants, que le panneau d'affichage en litige, contrairement à ce que soutiennent M. A... et autres, était visible depuis la chaussée de la rue de la République et lisible depuis le dégagement formant en partie un parking pour la clientèle du commerce de M. et Mme H... et sur lequel se trouve une pompe à fioul ; que la circonstance que cette zone fait l'objet d'un balisage par une chaîne depuis le mois de décembre 2014 est par elle-même sans incidence sur la régularité de l'affichage en débat, dès lors que cette zone constituait à la date de cet affichage un espace ouvert au public au sens des dispositions précitées de l'article A. 424-18 du code de l'urbanisme ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le choix de l'emplacement de ce panneau procèderait d'une manoeuvre visant à priver d'effet les mesures de publicité prévues par les dispositions précitées du code de l'urbanisme ;
5. Considérant que, dans ces conditions, le délai de recours de deux mois pour contester le permis de construire du 10 janvier 2013, a couru au plus tard à compter du 25 janvier 2013 ; que les conclusions de la demande de M. A... et autres tendant à l'annulation de ce permis de construire, enregistrées au greffe du tribunal administratif de Lyon le 18 juin 2013 étaient par suite tardives et comme telles irrecevables ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande ;
Sur les conclusions de la société Prestibat tendant à l'application de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme :
7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme : " Lorsque le droit de former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager est mis en oeuvre dans des conditions qui excèdent la défense des intérêts légitimes du requérant et qui causent un préjudice excessif au bénéficiaire du permis, celui-ci peut demander, par un mémoire distinct, au juge administratif saisi du recours de condamner l'auteur de celui-ci à lui allouer des dommages et intérêts. La demande peut être présentée pour la première fois en appel. " ;
8. Considérant qu'eu égard à la situation des requérants qui sont propriétaires de terrains situés à proximité du terrain d'assiette du permis de construire délivré à la société Prestibat et à la nature du projet de construction en litige, l'action, y compris en appel, de M. A... et autres ne peut être regardée comme excédant la défense de leurs intérêts légitimes ; que les conclusions indemnitaires présentées par la société Prestibat sur le fondement des dispositions précitées doivent, dès lors, être rejetées ;
Sur les frais d'instance :
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les sommes que les requérants demandent sur leur fondement au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens soient mises à la charge de la commune de Chassieu, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance ;
10. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu en revanche de faire application de ces mêmes dispositions et de mettre à la charge de M. A... et autres, solidairement, le versement d'une somme de 2 000 euros à la société Prestibat d'une part, et à la commune de Chassieu, d'autre part, au titre des frais exposés par elles ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... et autres est rejetée.
Article 2 : M. A..., Mme E... et M. et Mme F... verseront solidairement à la société Prestibat, d'une part, et à la commune de Chassieu, d'autre part, une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions présentées par la société Prestibat au titre de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. J... A..., à Mme C... E..., à M. et Mme K...F..., à la commune de Chassieu et à la société Prestibat.
Délibéré après l'audience du 24 octobre 2017 à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président de chambre,
M. Antoine Gille, président-assesseur,
Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 21 novembre 2017.
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N° 15LY03059
mg