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03/10/2017 | FRANCE | N°16LY03782

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 03 octobre 2017, 16LY03782


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble l'annulation de l'arrêté du 14 janvier 2016 par lequel le préfet de la Drôme l'a obligée à quitter le territoire français sans délai.

Par un jugement n° 1602167 du 2 août 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 17 novembre 2016, Mme B...A..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal admi

nistratif de Grenoble du 2 août 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Drôme du 14 janvier 2016 ;...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble l'annulation de l'arrêté du 14 janvier 2016 par lequel le préfet de la Drôme l'a obligée à quitter le territoire français sans délai.

Par un jugement n° 1602167 du 2 août 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 17 novembre 2016, Mme B...A..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 2 août 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Drôme du 14 janvier 2016 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de renonciation au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

- elle justifie de revenus suffisants au regard du 2° de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense enregistré le 23 décembre 2016, le préfet de la Drôme conclut au rejet de la requête en s'en rapportant à ses écritures de première instance.

Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 12 octobre 2016.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- la directive 2004/38/CE du 29 avril 2004 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 pris pour son application ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de M. Thierry Besse, premier conseiller ;

1. Considérant que MmeA..., ressortissante roumaine née en 1996, a déclaré être entrée en France en juillet 2014 ; que, le 14 janvier 2016, elle a été interpellée par les services de la gendarmerie nationale alors qu'elle se livrait à une activité de prostitution ; que, par l'arrêté attaqué du 14 janvier 2016, le préfet de la Drôme l'a obligée à quitter le territoire français sans délai ;

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative compétente peut, par décision motivée, obliger un ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) à quitter le territoire français lorsqu'elle constate : / 1° Qu'il ne justifie plus d'aucun droit au séjour tel que prévu par les articles L. 121-1, L. 121-3 ou L. 121-4-1 ; (...) ";

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 121-1 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne (...) a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : / 1° S'il exerce une activité professionnelle en France ; / 2° S'il dispose pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 4° de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ; (...) " ; que selon l'article R. 121-4 du même code : " (...) le caractère suffisant des ressources est apprécié en tenant compte de la situation personnelle de l'intéressé. En aucun cas, le montant exigé ne peut excéder le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné au 2° de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles (...) " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté attaqué, Mme A...résidait en France, selon ses déclarations, depuis juillet 2014, avec sa fille née sur le territoire français le 29 mars 2015 ; que la requérante y exerçait une activité professionnelle d'agent de service à temps partiel ; que ses revenus issus de cette activité salariée étaient toutefois nettement inférieurs au montant forfaitaire du revenu de solidarité active fixé pour une personne seule avec un enfant ; que la requérante soutient qu'elle exerçait une activité de prostitution qui lui procurait des revenus mensuels d'un montant de 1 400 euros dont elle a fait état dans le procès-verbal de police lors de son interpellation ; que toutefois, Mme A... ne justifie pas du caractère professionnel de cette activité non déclarée ni du montant des ressources que lui procurait cette activité ; que, par ailleurs, la requérante, qui bénéficie de l'aide médicale d'Etat, ne peut être regardée comme disposant de ressources suffisantes au sens des dispositions précitées du 2° de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour ne pas constituer une charge pour le système d'assistance sociale français ; que, par suite, en faisant obligation à Mme A... de quitter le territoire français sans délai, le préfet de la Drôme n'a pas méconnu les dispositions combinées des articles L. 121-1 et L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ;

6. Considérant que Mme A... fait valoir qu'elle réside en France avec sa fille née sur le territoire français ; qu'elle soutient qu'elle travaille et bénéficie d'aides lui permettant de subvenir aux besoins de sa famille et qu'elle a décidé de cesser l'activité de prostitution ; que toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'intéressée a fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement en 2013, que ses revenus professionnels déclarés sont nettement insuffisants pour subvenir à ses besoins et ceux de sa fille dont elle a la charge, que son insertion professionnelle demeure précaire et que le bail pour son logement et la nouvelle demande de logement dont elle fait état en appel sont postérieurs à l'arrêté contesté ; qu'en outre, il ne ressort des pièces du dossier ni qu'elle serait dépourvue d'attaches familiales en Roumanie où elle a vécu la majeure partie de sa vie ni qu'elle serait dans l'impossibilité de reconstituer sa vie privée et familiale avec sa fille dans ce pays ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, en particulier de la durée et des conditions du séjour de la requérante en France, l'arrêté contesté ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts poursuivis et ne méconnaît donc pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'au regard de la situation de la requérante telle qu'elle est exposée ci-dessus, l'arrêté du préfet de la Drôme, qui n'a ni pour objet ni pour effet de séparer Mme A...de sa fille, ne méconnaît pas davantage les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant à ce qu'il soit fait application, au bénéfice de son avocat, des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A..., et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2017 à laquelle siégeaient :

M. Yves Boucher, président de chambre,

M. Antoine Gille, président-assesseur,

M. Thierry Besse, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 octobre 2017.

2

N° 16LY03782

md


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY03782
Date de la décision : 03/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: Mme VACCARO-PLANCHET
Avocat(s) : LETELLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 10/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-10-03;16ly03782 ?
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