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04/07/2017 | FRANCE | N°17LY00875

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 04 juillet 2017, 17LY00875


Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 28 février 2017 et un mémoire enregistré le 12 juin 2017, la SCI Margo Immobilier, représentée par la SCP Aleo-Lesage, Orain, A..., Leraisnable, d'Artigues, Raitif, demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du maire de la commune de Vinay du 14 février 2017 portant retrait d'un permis de construire tacite valant autorisation d'exploitation commerciale dont elle est bénéficiaire pour un projet comprenant un supermarché de 2490 m², deux boutiques de 30 m² et un "drive" de 135,22 m² accolé au supermarché

, doté de trois pistes d'enlèvement des marchandises ;

2°) de mettre à la charg...

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 28 février 2017 et un mémoire enregistré le 12 juin 2017, la SCI Margo Immobilier, représentée par la SCP Aleo-Lesage, Orain, A..., Leraisnable, d'Artigues, Raitif, demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du maire de la commune de Vinay du 14 février 2017 portant retrait d'un permis de construire tacite valant autorisation d'exploitation commerciale dont elle est bénéficiaire pour un projet comprenant un supermarché de 2490 m², deux boutiques de 30 m² et un "drive" de 135,22 m² accolé au supermarché, doté de trois pistes d'enlèvement des marchandises ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Vinay le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que le permis de construire tacite dont elle s'est trouvée bénéficiaire en l'absence de décision expresse au terme du délai d'instruction fixé à cinq mois, ne pouvait être légalement retiré après l'expiration du délai de trois mois dans lequel une décision de retrait doit être notifiée au bénéficiaire en vertu de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire enregistré le 11 mai 2017, la commune de Vinay, représentée par la SCP Fessler-Jorquera et associés, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la SCI Margo Immobilier au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que le moyen selon lequel le permis tacite ne pouvait être retiré après un délai de trois mois est inopérant, dès lors que le délai de retrait ne fait pas obstacle à la présentation par le préfet d'un recours gracieux qui a pour effet d'interrompre le délai du déféré préfectoral et que la demande de retrait émanant du préfet autorisait le maire à retirer le permis tacite quand bien même le délai de trois mois fixé par l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme serait expiré.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de commerce ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Yves Boucher, président de chambre ;

- les conclusions de M. Jean-Paul Vallecchia, rapporteur public ;

- et les observations de Me A...pour la SCI Margo Immobilier, ainsi que celles de Me B... pour la commune de Vinay ;

1. Considérant que la SCI Margo Immobilier a déposé le 22 avril 2016 en mairie de Vinay une demande de permis de construire pour la réalisation d'un supermarché d'une surface de vente de 2490 m², de deux boutiques de 30 m² et d'un "drive" de 135,22 m² accolé au supermarché comportant trois pistes d'enlèvement ; que, lors du dépôt du dossier de demande, les services de la mairie de Vinay ont délivré au pétitionnaire un récépissé mentionnant un délai d'instruction de trois mois ; que, par lettre du maire de Vinay du 2 mai 2016, ce délai a été porté à cinq mois au motif que le projet est soumis à autorisation d'exploitation commerciale ; que la commission départementale d'aménagement commercial (CDAC) de l'Isère, saisie pour avis, a, dans sa séance du 6 juillet 2016, émis un avis favorable au projet ; que l'établissement public du SCoT de la région urbaine de Grenoble a alors formé un recours contre cet avis devant la commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) avant de s'en désister le 3 octobre 2016 ; que, dans ce contexte, le préfet de l'Isère, ayant constaté qu'une autorisation tacite était née au bénéfice de la SCI Margo Immobilier, a saisi le maire de Vinay, par lettre du 20 décembre 2016, d'un recours gracieux tendant au retrait de ce permis tacite ; que la SCI Margo Immobilier demande l'annulation de l'arrêté du 14 février 2017 par lequel le maire de Vinay a procédé à ce retrait et a opposé un refus à sa demande de permis de construire ;

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet est soumis à autorisation d'exploitation commerciale au sens de l'article L. 752-1 du code de commerce, le permis de construire tient lieu d'autorisation dès lors que la demande de permis a fait l'objet d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 423-19 du même code : " Le délai d'instruction court à compter de la réception en mairie d'un dossier complet. " ; que le c) de l'article R. 423-23 du même code fixe à trois mois le délai d'instruction de droit commun pour les permis de construire autres que ceux portant sur une maison individuelle ; qu'en vertu du e) de l'article R. 423-25, le délai d'instruction prévu par le c) de l'article R. 423-23 est majoré de deux mois lorsque le permis porte sur un projet soumis à autorisation d'exploitation commerciale au sens de l'article L. 752-1 du code de commerce ; que selon l'article R. 423-36-1 du code de l'urbanisme, lorsque la délivrance du permis est subordonnée à un avis favorable de la CNAC, saisie, en application du I de l'article L. 752-17 du code de commerce, d'un recours contre l'avis de la CDAC, le délai d'instruction est prolongé de cinq mois ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 423-44 du code de l'urbanisme : " Lorsque le délai d'instruction fait l'objet d'une prolongation exceptionnelle en application des articles R. 423-34 à R. 423-37, cette prolongation doit être notifiée au demandeur avant l'expiration du délai d'instruction initialement fixé en application de l'article R. 423-23, le cas échéant majoré en application des articles R. 423-24 à R. 423-33 " ;

3. Considérant que le délai d'instruction de la demande de permis de construire de la SCI Margo Immobilier a commencé à courir le 22 avril 2016, date à laquelle il lui a été remis un récépissé mentionnant un délai d'instruction de trois mois en application de l'article R. 423-23 du code de l'urbanisme ; que, par lettre du 6 mai 2016, ce délai a été majoré de deux mois en application du e) de l'article R. 423-25 du même code ; que ce délai d'instruction, ainsi porté à cinq mois, n'a pas fait l'objet, après saisine de la CNAC d'un recours contre l'avis favorable de la CDAC, de la prolongation exceptionnelle de cinq mois qui doit être notifiée au demandeur avant son expiration, en vertu de l'article R. 423-44 du code de l'urbanisme ; qu'il suit de là que la SCI Margo s'est trouvée bénéficiaire d'un permis de construire tacite le 22 septembre 2016 ;

4. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme : " La décision de non-opposition à une déclaration préalable ou le permis de construire ou d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peuvent être retirés que s'ils sont illégaux et dans le délai de trois mois suivant la date de ces décisions. Passé ce délai, la décision de non-opposition et le permis ne peuvent être retirés que sur demande expresse de leur bénéficiaire. " ;

5. Considérant que si, comme le soutient la commune de Vinay, ces dispositions n'ont ni pour objet ni pour effet de faire obstacle à ce que le préfet forme un recours gracieux jusqu'à l'expiration du délai dont il dispose pour déférer un permis de construire à la juridiction administrative en application de l'article L 2131-6 du code général des collectivités territoriales, il n'en résulte pas pour autant que le maire puisse, lorsqu'il est saisi d'un tel recours gracieux, procéder légalement au retrait du permis de construire après l'expiration du délai de trois mois fixé par ces mêmes dispositions et à l'issue duquel l'autorisation ne peut être retirée que sur demande expresse de son bénéficiaire ; qu'il suit de là que le maire de Vinay, alors même qu'il avait été saisi d'un recours gracieux formé dans le délai par le préfet de l'Isère contre le permis de construire délivré tacitement le 22 septembre 2016 à la SCI Margo Immobilier, ne pouvait, sans méconnaître l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme, procéder au retrait de ce permis tacite par un arrêté pris le 14 février 2017, plus de trois mois après la naissance de ce permis ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SCI Margo Immobilier est fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 14 février 2017 par lequel le maire de Vinay a procédé au retrait de son permis de construire tacite et a rejeté sa demande de permis ;

7. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de la commune de Vinay le versement d'une somme de 2 000 euros à la SCI Margo Immobilier au titre des frais non compris dans les dépens ; que ces mêmes dispositions font obstacle à ce que la somme que la commune de Vinay demande au même titre soit mise à la charge de la SCI Margo Immobilier qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante ;

DECIDE

Article 1er : L'arrêté du maire de Vinay du 14 février 2017 est annulé.

Article 2 : La commune de Vinay versera à la SCI Margo Immobilier une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Vinay tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Margo Immobilier, à la commune de Vinay, au ministre de l'économie et des finances et au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 20 juin 2017 à laquelle siégeaient :

M. Yves Boucher, président de chambre ;

M. Antoine Gille, président-assesseur ;

Mme Véronique Vaccaro-Planchet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 juillet 2017.

2

N° 17LY00875

md


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY00875
Date de la décision : 04/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-02-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Procédures d'intervention foncière. Préemption et réserves foncières. Droits de préemption.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: M. Yves BOUCHER
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : SCP FESSLER et JORQUERA ET ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-07-04;17ly00875 ?
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