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24/01/2017 | FRANCE | N°15LY01167

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 24 janvier 2017, 15LY01167


Vu la procédure suivante :

La SAS Distribution Casino France a demandé à la Commission nationale d'aménagement commercial d'annuler la décision du 30 août 2012 par laquelle la commission départementale d'aménagement commercial de l'Isère avait délivré à la SARL Urbane l'autorisation de créer un supermarché d'une surface de vente de 2 000 m² sur le territoire de la commune de La Côte-Saint-André.

Par une décision n° 1605TR-1610TR du 17 décembre 2014, la Commission nationale d'aménagement commercial a rejeté ce recours et autorisé ce projet.

Par une re

quête enregistrée le 3 avril 2015 et un mémoire enregistré le 4 août 2016, la SAS Distri...

Vu la procédure suivante :

La SAS Distribution Casino France a demandé à la Commission nationale d'aménagement commercial d'annuler la décision du 30 août 2012 par laquelle la commission départementale d'aménagement commercial de l'Isère avait délivré à la SARL Urbane l'autorisation de créer un supermarché d'une surface de vente de 2 000 m² sur le territoire de la commune de La Côte-Saint-André.

Par une décision n° 1605TR-1610TR du 17 décembre 2014, la Commission nationale d'aménagement commercial a rejeté ce recours et autorisé ce projet.

Par une requête enregistrée le 3 avril 2015 et un mémoire enregistré le 4 août 2016, la SAS Distribution Casino France, représentée par la Selarl Concorde Avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler cette décision de la Commission nationale d'aménagement commercial du 17 décembre 2014 ;

2°) de mettre une somme de 3 000 euros à la charge de la SARL Urbane au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- il ne ressort pas des pièces du dossier que l'avis rendu par les ministres chargés de l'urbanisme et de l'environnement en date du 15 décembre 2014 et l'avis rendu par le ministre chargé du commerce en date du 12 décembre 2014 aient été signés par une autorité compétente ;

- le dossier présenté par la SARL Urbane était incomplet dès lors qu'elle n'a fourni aucune information sur les flux futurs, ni sur leur conséquence sur le trafic, que la présentation de la desserte du site par les modes de transports doux est lacunaire, que le dossier ne comporte pas de document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, que le dossier est insuffisant concernant l'analyse des effets du projet en matière de protection de l'environnement et que le dossier n'évoque pas les effets du projet en matière de protection des consommateurs ;

- la zone de chalandise dispose d'un niveau d'équipement alimentaire suffisant et le projet ne répond pas aux besoins et à la satisfaction des consommateurs ;

- le projet ne se justifie pas non plus en termes d'aménagement du territoire dès lors que le supermarché n'entraînera pas d'animation positive pour le centre ville, qu'il aura un impact négatif sur les flux de circulation et qu'il n'est pas desservi par les transports en commun, ni par une piste cyclable, ni par une voie aménagée pour les piétons ;

- le projet ne se justifie pas en termes de développement durable dès lors que la voiture demeurera le moyen d'accès le plus utilisé et les mesures concrètes pour limiter l'impact du projet sur l'environnement sont insuffisantes.

Par des mémoires enregistrés le 5 novembre 2015 et le 14 septembre 2016, la SARL Urbane, représentée par la SCP Bouyssou et associés, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la SAS Distribution Casino France au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est tardive et n'a pas été signée par un avocat ;

- les moyens soulevés par la SAS Distribution Casino France ne sont pas fondés.

La Commission nationale d'aménagement commercial a produit des pièces le 15 juillet 2015.

Par ordonnance du 16 septembre 2016, la clôture de l'instruction, fixée au 15 septembre 2016 par ordonnance du 8 juin 2016, a été reportée au 17 octobre 2016.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Jean-Paul Vallecchia, rapporteur public ;

- et les observations de Me A...pour la SAS Distribution Casino France.

1. Considérant que, par une décision du 17 décembre 2014, la Commission nationale d'aménagement commercial a rejeté le recours de la SAS Distribution Casino France contre la décision du 30 août 2012 par laquelle la commission départementale d'aménagement commercial de l'Isère avait délivré à la SARL Urbane l'autorisation de créer un supermarché d'une surface de vente de 2 000 m² sur le territoire de la commune de La Côte-Saint-André et a autorisé ce projet ; que la SAS Distribution Casino France demande l'annulation de cette décision de la Commission nationale d'aménagement commercial ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 752-51 alors en vigueur du code de commerce : " (...) Le commissaire du Gouvernement recueille les avis des ministres intéressés, qu'il présente à la commission (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la Commission nationale d'aménagement commercial a sollicité l'avis des ministres intéressés ; qu'il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire, ni d'aucun principe, que la Commission nationale d'aménagement commercial soit tenue de justifier que ces avis ont été signés par des personnes habilitées lorsque l'arrêté de délégation a été régulièrement publié ; qu'en l'espèce, l'avis du ministre chargé du commerce est signé par Guillaume Lacroix et celui des ministres chargés de l'environnement et de l'urbanisme est signé par Stéphanie Dupuy-Lyon, respectivement habilités à cet effet par des arrêtés de délégation en date des 19 septembre 2014 et 19 novembre 2013 régulièrement publiés ; que, dès lors, le moyen tiré de l'irrégularité de la décision attaquée au regard de l'article R. 752-51 du code de commerce doit être écarté ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 752-7 du code de commerce : " I. - La demande d'autorisation est accompagnée : / 1° D'un plan indicatif faisant apparaître la surface de vente des commerces ; / 2° Des renseignements suivants : / a) Délimitation de la zone de chalandise du projet, telle que définie à l'article R. 752-8 (...) / II. - La demande est également accompagnée d'une étude destinée à permettre à la commission d'apprécier les effets prévisibles du projet au regard des critères prévus par l'article L. 752-6. Celle-ci comporte les éléments permettant d'apprécier les effets du projet sur : / 1° L'accessibilité de l'offre commerciale ; / 2° Les flux de voitures particulières et de véhicules de livraison ainsi que sur les accès sécurisés à la voie publique ; / 3° La gestion de l'espace ; / 4° Les consommations énergétiques et la pollution ; / 5° Les paysages et les écosystèmes. " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la demande d'autorisation comportait notamment des indications relatives à l'impact du projet sur les flux de voitures particulières et de véhicules de livraison ainsi que la description des dessertes routières ; qu'elle était complète, tant pour ce qui concerne les flux futurs de transport routier, la présentation de la desserte du site par les modes de transports doux, l'insertion du projet par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages et l'analyse des effets du projet en matière de protection de l'environnement, que pour ce qui concerne les effets du projet en matière de protection des consommateurs ; que, dès lors, la SAS Distribution Casino France n'est pas fondée à soutenir que les dispositions de l'article R. 752-7 du code de commerce auraient été méconnues ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 750-1 du code de commerce : " Les implantations, extensions, transferts d'activités existantes et changements de secteur d'activité d'entreprises commerciales et artisanales doivent répondre aux exigences d'aménagement du territoire, de la protection de l'environnement et de la qualité de l'urbanisme. Ils doivent en particulier contribuer au maintien des activités dans les zones rurales et de montagne ainsi qu'au rééquilibrage des agglomérations par le développement des activités en centre-ville et dans les zones de dynamisation urbaine. Dans le cadre d'une concurrence loyale, ils doivent également contribuer à la modernisation des équipements commerciaux, à leur adaptation à l'évolution des modes de consommation et des techniques de commercialisation, au confort d'achat du consommateur et à l'amélioration des conditions de travail des salariés. " ; qu'aux termes de l'article L. 752-6 du même code : " Lorsqu'elle statue sur l'autorisation d'exploitation commerciale visée à l'article L. 752-1, la commission départementale d'aménagement commercial se prononce sur les effets du projet en matière d'aménagement du territoire, de développement durable et de protection des consommateurs. Les critères d'évaluation sont : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et de montagne ; / b) L'effet du projet sur les flux de transport ; / c) Les effets découlant des procédures prévues aux articles L. 303-1 du code de la construction et de l'habitation et L. 123-11 du code de l'urbanisme ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet ; / b) Son insertion dans les réseaux de transports collectifs. " ;

7. Considérant que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi ; qu'il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet est situé à 1,3 kilomètre environ du centre de la commune, au sein d'un quartier urbanisé et à proximité immédiate de zones d'habitat et d'équipements publics ; qu'il est de nature à limiter l'évasion commerciale vers les agglomérations voisines ; que les axes routiers existants, qui connaissent une circulation variant entre 3 300 et 7 100 véhicules par jour, devraient supporter le trafic supplémentaire de l'ordre de 500 véhicules par jour engendré par le projet ; que le site du projet est situé à 200 mètres environ d'un arrêt desservi par six lignes de bus ; que le fait que ces lignes effectuent seulement entre deux et cinq passages par jour ne suffit pas à établir, compte tenu du caractère rural du secteur et de la taille de la commune, qui compte un peu plus de 4 500 habitants, que le projet ne serait pas suffisamment desservi ; que le site est accessible par les piétons dès lors que l'avenue Hector Berlioz en bordure de laquelle il est implanté est équipée d'un trottoir sur toute sa longueur ; que même à supposer, comme le soutient la société requérante, que l'aménagement prévu d'une piste cyclable ne soit pas certain, cette circonstance ne justifie pas à elle seule le refus de l'autorisation en cause ; que, dès lors la décision de la Commission nationale d'aménagement commercial contestée n'apparaît pas entachée d'une erreur d'appréciation des effets du projet en matière d'aménagement du territoire ;

9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet contribuera à réhabiliter un site sur lequel est implanté un ancien silo à céréales, aujourd'hui désaffecté, mais présentant une importante pollution avec notamment une cuve à fioul enterrée de 30 000 litres et une quantité significative d'amiante, la société Urbane s'engageant à dépolluer le site ; que le projet s'inscrira dans une démarche Haute Qualité Environnementale (HQE) et sera conforme à la norme environnementale RT 2012 ; que le projet s'insérera de façon satisfaisante dans le site choisi ; que, dans ces conditions, la décision de la Commission nationale d'aménagement commercial contestée n'apparaît pas entachée d'une erreur d'appréciation des effets du projet en matière de développement durable ;

10. Considérant que, contrairement à ce que soutient la société requérante, il ressort des pièces du dossier que le magasin alimentaire projeté est susceptible d'améliorer le confort d'achat des consommateurs et de dynamiser l'offre marchande sur la commune et dans la zone de chalandise, sans que la circonstance que la commune de La Cote-Saint-André compte déjà trois magasins à dominante alimentaire représentant une surface de vente totale de 2 750 m² ne permette de remettre en cause ce constat ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la SARL Urbane, que la SAS Distribution Casino France n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision de la Commission nationale d'aménagement commercial du 17 décembre 2014 ;

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la SAS Distribution Casino France demande sur leur fondement soit mise à la charge de la SARL Urbane, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance ; qu'il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce et en application de ces mêmes dispositions, de mettre la somme de 1 500 euros à la charge de la SAS Distribution Casino France au titre des frais exposés par la SARL Urbane et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Distribution Casino France est rejetée.

Article 2 : La SAS Distribution Casino France versera la somme de 1 500 euros à la SARL Urbane au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Distribution Casino France, à la SARL Urbane et à la Commission nationale d'aménagement commercial.

Délibéré après l'audience du 3 janvier 2017, à laquelle siégeaient :

M. Yves Boucher, président de chambre,

M. Antoine Gille, président-assesseur,

Mme Véronique Vaccaro-Planchet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 janvier 2017.

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N° 15LY01167

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