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13/12/2016 | FRANCE | N°16LY00466

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 13 décembre 2016, 16LY00466


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C...D...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 19 décembre 2014 du préfet du Rhône portant refus de lui délivrer un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et désignation du pays à destination duquel elle pourra être éloignée d'office.

Par un jugement n° 1504409 du 31 décembre 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 10 février 2016, Mme C...D..., r

eprésentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Ly...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C...D...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 19 décembre 2014 du préfet du Rhône portant refus de lui délivrer un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et désignation du pays à destination duquel elle pourra être éloignée d'office.

Par un jugement n° 1504409 du 31 décembre 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 10 février 2016, Mme C...D..., représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 31 décembre 2015 ;

2°) d'annuler les décisions du préfet du Rhône du 19 décembre 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer une carte de séjour mention "vie privée et familiale" dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans les deux jours ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- il n'est pas justifié de la compétence de l'auteur de l'acte et du recueil de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé prévu à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le refus de titre de séjour qui lui a été opposé méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée, alors que le médecin de l'agence régionale de santé a rendu un avis tendant à ce que son séjour soit autorisé, qu'il n'est pas justifié de l'existence d'un traitement en Arménie, qu'il n'est pas établi qu'elle puisse voyager sans risque vers son pays d'origine où aucun suivi médical approprié à son état de santé n'est disponible ;

- la décision prononçant son éloignement méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4 (10°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le refus de séjour et l'obligation de quitter le territoire français contestés ont été pris en violation du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile comme des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense et des mémoires en production de pièces enregistrés les 24 février, 2 juin, 29 septembre et 4 octobre 2016, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme D...ne sont pas fondés.

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle du 12 octobre 2016 rejetant la demande d'aide juridictionnelle de Mme D...ainsi que l'ordonnance du 10 novembre 2016 par laquelle le président de la cour a rejeté le recours de Mme D...contre cette décision.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de M. Gille, président-assesseur.

1. Considérant que Mme C...D..., ressortissante arménienne née le 25 décembre 1989, est entrée au mois de février 2011 en France où sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides du 21 septembre 2011 confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 29 juin 2012 ; que, par arrêté du 19 décembre 2014, le préfet du Rhône a rejeté la demande de carte de séjour présentée par Mme D... au titre de son état de santé sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée d'office à l'expiration de ce délai ; que Mme D...relève appel du jugement du 31 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ;

Sur la légalité de l'arrêté du préfet du Rhône du 19 décembre 2014 :

2. Considérant que, par un arrêté du 28 août 2014 publié au recueil des actes administratifs de la préfecture n° 77 et versé au dossier en appel, le préfet du Rhône a consenti à MmeA..., directrice de la citoyenneté, de l'immigration et de l'intégration, une délégation lui permettant notamment de signer les décisions de la nature de celles qui sont en litige ; que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte doit ainsi être écarté ;

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ;

4. Considérant que le préfet du Rhône a produit en appel l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 14 février 2014 recueilli pour l'instruction de la demande de Mme D... ; que le moyen selon lequel ce médecin n'aurait pas été consulté ainsi que le prévoit l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile manque ainsi en fait ;

5. Considérant que l'arrêté contesté a été pris au vu d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé selon lequel l'état de santé de Mme D...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sans qu'il existe de traitement approprié dans son pays d'origine ; que, pour s'écarter de cet avis, par lequel il n'était pas tenu, le préfet du Rhône a considéré que Mme D...pouvait bénéficier des soins requis par son état de santé en Arménie ; que le préfet du Rhône a versé au dossier, outre les informations d'ordre général fournies par les services de l'ambassade de France en Arménie et par le conseiller santé auprès du directeur général des étrangers en France du ministère de l'intérieur permettant de considérer que les institutions arméniennes sont à même de prendre en charge la majorité des maladies courantes, un courrier émanant du responsable de l'Institut de santé des enfants et des adolescents d'Erevan en date du 10 avril 2013, un rapport de synthèse établi par les autorités suisses ainsi que des éléments précis quant à la disponibilité en Arménie des principes actifs des antidépresseurs, anxiolytiques ou neuroleptiques prescrits à la requérante, de nature à établir que les pathologies d'ordre psychiatrique ou le stress post-traumatique sont susceptibles d'être pris en charge en Arménie ; que les éléments avancés par la requérante, notamment le certificat du docteur Balais, ne sont pas de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le préfet du Rhône quant à l'existence en Arménie d'un traitement approprié à son état de santé ; qu'alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les troubles psychologiques dont souffre Mme D... seraient, comme elle l'allègue en termes généraux, liés à un traumatisme subi en Arménie, et alors que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 14 février 2014 relève qu'elle peut voyager sans risque vers son pays d'origine, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet a fait une inexacte application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en lui refusant la délivrance d'une carte de séjour au titre de son état de santé ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; que, pour soutenir que le refus de titre de séjour qui lui a été opposé porte une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale, MmeD..., qui n'a pas formé de demande sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, fait valoir la présence en France de son père biologique et de ses frères et soeurs, ainsi que la qualité de son intégration ; qu'eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France, la situation de Mme D..., qui a fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement en 2012 et qui ne peut utilement se prévaloir de circonstances postérieures à la décision qu'elle attaque, ne suffisent pas pour considérer que le préfet du Rhône, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français et la fixation du pays de renvoi :

7. Considérant que si la requérante invoque la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui prévoit qu'un étranger " résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé " ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, ce moyen doit être écarté pour les motifs déjà exposés au point 5 ;

8. Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit au point 6, le moyen selon lequel la décision faisant obligation à Mme D...de quitter le territoire français porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale doit être écarté ; que les circonstances dont la requérante fait état ne permettent pas davantage de considérer que la décision critiquée procède d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

9. Considérant que, pour contester la décision désignant le pays de renvoi, Mme D... invoque la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que la violation de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'alors qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet du Rhône a, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, procédé à l'examen de la situation de l'intéressée au regard de ces dispositions, Mme D... ne fait état d'aucun élément précis quant à la nature des risques auxquels elle serait personnellement exposée en cas de retour dans son pays ; que le moyen tiré de la violation de ces stipulations et dispositions doit, par suite, être écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône du 19 décembre 2014 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

11. Considérant que le présent arrêt, qui confirme le rejet des conclusions de Mme D... dirigées contre l'arrêté préfectoral du 18 décembre 2014, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions présentées à cette fin doivent être rejetées ;

Sur les frais d'instance :

12. Considérant que les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur leur fondement et dirigées contre l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 21 novembre 2016, à laquelle siégeaient :

M. Boucher, président de chambre ;

M. Gille, président-assesseur ;

Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 décembre 2016.

2

N° 16LY00466

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY00466
Date de la décision : 13/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: M. Antoine GILLE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : GILLIOEN

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-12-13;16ly00466 ?
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