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15/11/2016 | FRANCE | N°15LY00410

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 15 novembre 2016, 15LY00410


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 16 décembre 2011 par laquelle le délégué de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) dans le département de la Loire a ordonné le reversement de la subvention qui lui avait été accordée, la décision 19 avril 2012 portant rejet de son recours gracieux, l'avis de sommes à payer en date du 1er octobre 2012 ainsi que le titre exécutoire du 3 octobre 2012 et, enfin, de le décharger de l'obligation de payer la somme de 46 917 euros ré

sultant de ces décisions.

Par un jugement n° 1204399 du 4 novembre 2014, le t...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 16 décembre 2011 par laquelle le délégué de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) dans le département de la Loire a ordonné le reversement de la subvention qui lui avait été accordée, la décision 19 avril 2012 portant rejet de son recours gracieux, l'avis de sommes à payer en date du 1er octobre 2012 ainsi que le titre exécutoire du 3 octobre 2012 et, enfin, de le décharger de l'obligation de payer la somme de 46 917 euros résultant de ces décisions.

Par un jugement n° 1204399 du 4 novembre 2014, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 5 février 2015, M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 4 novembre 2014 ;

2°) d'annuler les décisions contestées et de le décharger de l'obligation de payer la somme de 46 917 euros à l'ANAH ;

3°) de mettre une somme de 2 500 euros à la charge de l'ANAH au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les décisions des 16 décembre 2011 et 19 avril 2012 ne sont pas motivées ;

- elles sont entachées d'une erreur de droit, l'ANAH ayant renoncé à son pouvoir d'appréciation ;

- ce sont des circonstances extérieures à sa volonté, tenant à son état de santé et aux difficultés rencontrées pour obtenir le règlement des loyers, dont il a fait part à l'ANAH, qui l'ont conduit à ne pas communiquer les pièces demandées dans le délai imparti mais seulement lors de l'examen de son recours gracieux ;

- l'ANAH lui a demandé des pièces relatives au lot n° 1, correspondant à la chaufferie bois dont la réalisation n'était pas prévue dans le dossier de demande de subvention ;

- l'avis de sommes à payer et le titre exécutoire n'indiquent pas de façon suffisamment précise les bases de la liquidation, se bornent à reprendre les termes de l'avis de la commission locale et ne prennent pas en compte les raisons pour lesquelles il n'a pu fournir les documents demandés dans les délais impartis ;

- le retrait total de la subvention est disproportionné.

Par un mémoire enregistré le 2 novembre 2015, l'ANAH conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, relative à la motivation des actes administratifs et l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;

- l'arrêté du 2 février 2011 portant approbation du règlement général de l'Agence nationale de l'habitat ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller,

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public,

- et les observations de M. C..., ainsi que celles de Me A...pour l'ANAH.

1. Considérant que, par un jugement du 4 novembre 2014, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de M. C... tendant à l'annulation de la décision du 16 décembre 2011 par laquelle le délégué de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) dans le département de la Loire a ordonné le reversement de la subvention qui lui avait été accordée, de la décision 19 avril 2012 portant rejet de son recours gracieux, de l'avis de sommes à payer en date du 1er octobre 2012 ainsi que du titre exécutoire du 3 octobre 2012 et, enfin, à la décharge de l'obligation de payer la somme de 46 917 euros résultant de ces décisions ; que M. C...relève appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / (...) - retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; (...) " ;

3. Considérant que la décision contestée du 16 décembre 2011 se réfère aux motifs indiqués dans la fiche de calcul qui lui était jointe ; que ce document comporte une rubrique "motif du reversement" qui détaille les différents engagements que M. C...n'a pas respectés ainsi que le mode de calcul de la majoration basée sur l'indice de référence des loyers et le montant total du reversement demandé ; qu'au surplus, la décision du 19 avril 2012 rejetant le recours gracieux de M.C..., qui n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte, rappelle les motifs retenus par la commission locale d'amélioration de l'habitat (CLAH), reprend les arguments développés par l'intéressé à l'appui de son recours gracieux et expose que le recours est rejeté, les documents demandés "n'étant pas parvenus avant la date de forclusion du dossier, soit le 19 juillet 2011" et ayant été produits le 25 février 2012, "soit plus de six mois après la date de forclusion du dossier" ; que, dans ces conditions, le moyen tiré du défaut de motivation du retrait de la subvention doit être écarté ;

4. Considérant qu'en application de l'article 81 du décret du 29 décembre 1962, dont les dispositions sont aujourd'hui reprises par l'article 24 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012, un état exécutoire doit indiquer les bases de la liquidation de la créance ; qu'en application de ce principe, l'ANAH ne peut mettre en recouvrement une somme sans indiquer, soit dans le titre lui même, soit par référence à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur, les bases et les éléments de calcul sur lesquels elle se fonde pour mettre les sommes en cause à la charge du redevable ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la décision de reversement du 16 décembre 2011 était jointe à l'avis de sommes à payer du 1er octobre 2012 et à l'état exécutoire émis le 3 octobre 2012 ; que M. C...ne conteste pas que la fiche comportant les modalités de calcul de la majoration basée sur l'indice de référence des loyers et l'indication du montant total du reversement demandé était jointe à ces envois ; qu'ainsi, ces décisions doivent être regardées comme indiquant les bases de liquidation de la créance et comme permettant à M. C... de les discuter utilement ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'avis de sommes à payer et l'état exécutoire contestés ne seraient pas suffisamment motivés doit être écarté ;

6. Considérant que la seule référence, dans les décisions contestées, à l'avis émis par la commission locale d'amélioration de l'habitat (CLAH) ne saurait suffire à établir que le délégué de l'ANAH aurait renoncé à exercer son pouvoir d'appréciation ou se serait estimé à tort lié par cet avis ; qu'au contraire, il ressort des termes des décisions contestées que l'ANAH a considéré, au vu notamment de cet avis de la CLAH, que les manquements de M. C...impliquaient le retrait de la subvention qui lui avait été accordée et le reversement des sommes perçues ; que, dès lors, le moyen selon lequel les décisions contestées seraient, à cet égard, entachées d'une erreur de droit, doit être écarté ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article R. 321-12 du code de la construction et de l'habitation : " I. - L'agence peut accorder des subventions : / 1° Aux propriétaires ou à tout autre titulaire d'un droit réel conférant l'usage des locaux pour des logements qu'ils donnent à bail ou, dans des conditions fixées par le règlement général de l'agence, qu'ils mettent à disposition d'autrui et qui sont occupés dans les conditions prévues à l'article R. 321-20 ; (...) " ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article R. 321-19 du même code : " Le règlement général de l'agence détermine, pour les différentes catégories de bénéficiaires et d'opérations mentionnés à l'article R. 321-12, les conditions et modalités dans lesquelles le bénéficiaire d'une subvention justifie du commencement, de la réalisation et de l'achèvement de l'opération. / Il fixe le délai dans lequel doit intervenir le commencement de l'opération ainsi que la liste des pièces que le bénéficiaire d'une subvention doit produire pour obtenir son versement et les délais dans lesquels ces pièces doivent être transmises à l'agence. / Il fixe également les critères, conditions et limites dans lesquels ces délais peuvent être prolongés par l'autorité qui a octroyé l'aide, sur demande motivée du bénéficiaire de la subvention, notamment lorsque des circonstances extérieures à la volonté de l'intéressé ont fait obstacle à la réalisation de l'opération. / En cas de non respect de ces délais, éventuellement prolongés, la décision d'octroi de la subvention devient caduque et le bénéficiaire est tenu de rembourser les sommes déjà perçues. " ; qu'aux termes du II de l'article 14 du règlement général de l'Agence nationale de l'habitat : " L'achèvement des travaux doit être justifié par le bénéficiaire de la subvention sous peine de retrait de la décision d'octroi de la subvention et du remboursement des sommes perçues, dans un délai de trois ans (...) à compter de la notification de la décision attributive de subvention. / Sur demande motivée du bénéficiaire de la subvention, une prorogation de ces délais de deux ans maximum peut être accordée par le président de la collectivité délégataire, notamment lorsque des circonstances extérieures à la volonté du demandeur ont fait obstacle à la réalisation des travaux, telles que : un motif d'ordre familial ; une défaillance d'entreprise ; des difficultés importantes d'exécution. " ;

9. Considérant que les subventions conditionnelles ainsi accordées par l'ANAH ne créent de droits au profit de leurs bénéficiaires que pour autant que ceux-ci justifient, après l'achèvement des travaux, que les conditions imposées lors de l'attribution de l'aide se trouvent effectivement réalisées ; que si les bénéficiaires de ces subventions sont placés vis-à-vis de cet établissement public dans une situation réglementaire et non contractuelle, cette situation ne fait pas obstacle à ce qu'ils puissent, le cas échéant, invoquer un cas de force majeure ayant rendu impossible l'exécution des engagements auxquels était subordonné le versement de l'aide financière de l'agence ;

10. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le délai de trois ans initialement imparti à M. C...pour réaliser les travaux projetés et fournir les justificatifs à l'ANAH a été prorogé d'un an pour arriver à échéance le 19 juillet 2011 ; que l'ANAH a décidé, par les décisions contestées, de procéder au retrait de la subvention et d'ordonner le reversement des sommes perçues au motif que le délai de production des pièces demandées, en particulier les justificatifs de fin de travaux, de ressources des locataires et du niveau de performance énergétique des logements, avait été dépassé de plus de six mois, M. C...n'ayant produit ces documents que le 25 février 2012 ;

11. Considérant que M. C...soutient que la chaudière à bois, qui a été installée tardivement et pour la construction de laquelle il n'a produit les justificatifs que le 25 février 2012, n'était pas prévue dans la demande de subvention initiale ; que, toutefois, il ne ressort pas des motifs de la décision de retrait contestée qu'elle serait fondée sur l'absence de réalisation de cette chaudière ; qu'en tout état de cause, si l'estimation des travaux figurant dans le dossier de demande de subvention ne faisait pas apparaître de montant pour la chaudière bois mais uniquement un lot 14 portant sur un "chauffage fuel (variante en attente de la construction de la chaufferie collective au bois pour l'ensemble de la copropriété)", la description du projet telle qu'elle figure dans le dossier de demande de subvention précise qu'"est envisagée la construction d'une chaufferie bois et d'un appentis à la place des bâtiments F et G démolis" ; qu'ainsi, la réalisation de la chaudière à bois était prévue et intégrée au projet soumis à l'ANAH, qui a décidé d'attribuer une subvention à M. C..." au vu du projet présenté " , ainsi que cela ressort de la décision d'attribution du 19 juillet 2007 ;

12. Considérant que M. C...n'a pas présenté de demande de nouvelle prorogation du délai au regard de circonstances extérieures à sa volonté ; que s'il invoque son état de santé et des difficultés rencontrées avec les locataires, il n'apporte aucun élément de nature à établir que son hospitalisation, puis son arrêt de travail durant les premiers mois de 2011 auraient fait obstacle à ce qu'il adresse à l'ANAH les pièces demandées, en particulier les factures afférentes aux travaux de réalisation de la chaufferie et le diagnostic énergétique, et ne produit aucun élément établissant qu'il aurait effectué des démarches pour obtenir les déclarations de revenus de ses locataires ; qu'ainsi, ces circonstances ne sauraient caractériser des événements relevant de la force majeure, seule susceptible de rendre impossible l'exécution des engagements auxquels était subordonné le versement de l'aide financière de l'agence ;

13. Considérant que si le requérant fait valoir que le retrait de la subvention est disproportionné, il ressort des dispositions précitées de l'article R. 321-19 du code de la construction et de l'habitation qu'en cas de non respect des délais prévus, éventuellement prolongés, la décision d'octroi de la subvention devient caduque et le bénéficiaire est tenu de rembourser les sommes déjà perçues ; que, par suite, et malgré l'état de santé de M. C...et les difficultés rencontrées avec les locataires qu'il invoque, l'ANAH a pu légalement retirer la subvention accordée ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

15. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que M. C...demande au titre de ses frais non compris dans les dépens soit mise à la charge de l'ANAH, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions que l'ANAH présente au même titre ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l'ANAH tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et à l'Agence nationale de l'habitat.

Délibéré après l'audience du 18 octobre 2016 à laquelle siégeaient :

M. Boucher, président de chambre,

M. Gille, président assesseur,

Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 novembre 2016.

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2

N° 15LY00410

md


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY00410
Date de la décision : 15/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

38-03-03-01 Logement. Aides financières au logement. Amélioration de l'habitat. Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: Mme Véronique VACCARO-PLANCHET
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : SARL ENVIRONNEMENT DROIT PUBLIC

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-11-15;15ly00410 ?
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