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14/06/2016 | FRANCE | N°14LY02866

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 14 juin 2016, 14LY02866


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCEA Val de Saône a demandé au tribunal administratif de Lyon la condamnation de la commune de Messimy-sur-Saône à réparer les préjudices résultant pour elle de l'illégalité fautive entachant les deux oppositions à déclaration préalable de son maire en date du 13 août 2011 portant respectivement sur la construction d'une serre agricole et de deux serres d'exposition d'orchidées.

Par un jugement n° 1205997 du 2 juillet 2014, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Pro

cédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 15 septembre 2014...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCEA Val de Saône a demandé au tribunal administratif de Lyon la condamnation de la commune de Messimy-sur-Saône à réparer les préjudices résultant pour elle de l'illégalité fautive entachant les deux oppositions à déclaration préalable de son maire en date du 13 août 2011 portant respectivement sur la construction d'une serre agricole et de deux serres d'exposition d'orchidées.

Par un jugement n° 1205997 du 2 juillet 2014, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 15 septembre 2014 ainsi que les 27 avril, 16 septembre et 9 octobre 2015, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la SCEA Val de Saône demande à la cour, dans le dernier état de ses conclusions :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 2 juillet 2014 ;

2°) de " renvoyer à la compétence principale du juge judiciaire " ;

3°) de juger inexistants les arrêtés de refus du 13 août 2011 ;

4°) de dire que la commune de Messimy-sur-Saône doit réparer ou garantir la réparation des préjudices qu'elle a subis à hauteur de 193 156 euros pour le préjudice économique et financier et de 10 000 euros pour le préjudice moral, avec intérêts au taux légal à compter du 13 octobre 2011 ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Messimy-sur-Saône le paiement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la compétence est principalement judiciaire ;

- le maire ne peut représenter la commune et le conseil de la commune ne peut intervenir pour cette dernière ;

- les oppositions à déclaration du 13 août 2011, qui sont inexistantes, s'analysent comme des actes de retraits de décisions créatrices de droit ; elles sont illégales et fautives ;

- elles ne pouvaient être retirées en application de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme ;

- la procédure contradictoire de l'article 24 de la loi de 2000 s'appliquait ;

- les services de la direction départementale de l'Equipement (DDE) étaient incompétents pour demander la production de pièces manquantes et notifier la prolongation des délais d'instruction ;

- il n'est pas justifié de la réception du courrier du 17 mai 2011 demandant la production de pièces complémentaires ;

- s'agissant de la DP 001 243 11 V0012, aucune notification de demande de pièces n'est survenue ;

- une seule demande ne pouvait pas être envoyée pour deux déclarations préalables ;

- il y avait présomption de dossier complet ;

- toutes les pièces avaient été produites ;

- le chef d'antenne de la DDT n'avait pas de délégation régulière pour suspendre au nom du maire les délais d'instruction ;

- il y a malveillance des autorités et les oppositions contestées sont entachées de discrimination ;

- elle a subi un préjudice économique et financier ;

- le tribunal ne pouvait se fonder sur ses explications orales à l'audience ; le jugement est irrégulier ;

- le préjudice économique et financier est avéré, tant en ce qui concerne l'élevage d'escargots que la production d'orchidées ;

- son préjudice moral est important.

Par des mémoires, enregistrés les 26 novembre 2014 et 11 août 2015, la commune de Messimy-sur-Saône conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SCEA Val de Saône au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- aucun conflit d'intérêt ni malveillance du maire n'est avéré ;

- aucune illégalité fautive n'a été commise ; que, en vertu de la convention du 19 juillet 2007, la DDE pouvait pourvoir aux mesures nécessaires à l'instruction des déclarations préalables ; que le courrier de demande de pièces relatif à la DP 001 243 11 V0012, daté du 17 mai 2011, a été distribué le 19 mai suivant ; en l'absence de production des pièces manquantes, aucune décision implicite de non opposition n'a pu naître ; que le délai d'instruction a été prolongé ; aucun droit acquis n'a pu naître ;

- aucun préjudice certain n'est acquis ;

- le tribunal pouvait prendre en compte les observations orales de la société.

Par une ordonnance du 28 août 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au 18 septembre 2015.

Par une ordonnance du 21 septembre 2015, la clôture de l'instruction a été reportée au 9 octobre 2015.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Picard,

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant le cabinet Philippe Petit et associés, avocat de la commune de Messimy-sur-Saône et celles de M.A..., gérant de la SCEA Val de Saône.

1. Considérant que la SCEA Val de Saône relève appel du jugement du 2 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande de condamnation de la commune de Messimy-sur-Saône à réparer les préjudices qui résulteraient pour elle de l'illégalité fautive entachant les deux oppositions à déclaration préalable de son maire en date du 13 août 2011 portant respectivement sur la construction d'une serre agricole pour l'élevage d'escargots et de deux serres de production d'orchidées ;

2. Considérant qu'en demandant que soit constatée l'inexistence des arrêtés de refus pris par le maire de Messimy-sur-Saône le 13 août 2011, la société requérante a présenté des conclusions nouvelles en appel dès lors qu'elles n'ont pas été soumises au premier juge ; que, par suite, ces conclusions sont irrecevables ;

3. Considérant que, contrairement à ce que soutient la société requérante, le juge administratif est compétent pour connaître de ses conclusions tendant à obtenir réparation des fautes que le maire de Messimy-sur-Saône auraient commises en prenant les décisions contestées, qui mettent en jeu ses pouvoirs de police de l'urbanisme ;

4. Considérant que le jugement attaqué est notamment motivé par référence aux éléments que la société Val de Saône a exprimés oralement lors de l'audience ; que pour regrettable que soit la mention, dans le jugement, de ces éléments, il ne résulte pas de l'instruction que, pour juger qu'aucun préjudice économique et financier n'était avéré, le tribunal aurait retenu des circonstances de fait ou de droit qui n'avaient pas déjà été présentées par les parties au cours de l'instruction écrite ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que, faute de respecter le caractère écrit de la procédure, le jugement attaqué serait irrégulier ne peut qu'être écarté ;

5. Considérant qu'aux termes de L'article L. 2132-1 du code général des collectivités territoriales : " Sous réserve des dispositions du 16° de l'article L. 2122-22, le conseil municipal délibère sur les actions à intenter au nom de la commune " ; qu'aux termes de l'article L. 2132-2 du même code : " Le maire, en vertu de la délibération du conseil municipal, représente la commune en justice " ; qu'aux termes de l'article L. 2122-22 du même code : " Le maire peut, en outre, par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat : (...) 16° D'intenter au nom de la commune les actions en justice ou de défendre la commune dans les actions intentées contre elle, dans les cas définis par le conseil municipal (...) " ; que l'article L. 2122-26 de ce même code prévoit que : " Dans le cas où les intérêts du maire se trouvent en opposition avec ceux de la commune, le conseil municipal désigne un autre de ses membres pour représenter la commune, soit en justice, soit dans les contrats. " ;

6. Considérant que, en l'espèce, par délibération du 11 avril 2014, le conseil municipal de Messimy-sur-Saône a habilité son maire à défendre la commune dans les instances intentées contre elle et précisé que cette délégation était consentie tant en demande qu'en défense et devant toutes les juridictions ; qu'il n'est fait état d'aucune circonstance précise qui ferait obstacle à ce que le maire, ainsi habilité, assure la défense des intérêts de la commune devant la cour ; que rien ne justifie donc que, pour ce motif, les mémoires produits par cette dernière soient écartés des débats ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article R. 431-2 du code de justice administrative : " Les requêtes et les mémoires doivent, à peine d'irrecevabilité, être présentés soit par un avocat, soit par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, lorsque les conclusions de la demande tendent au paiement d'une somme d'argent, à la décharge ou à la réduction de sommes dont le paiement est réclamé au requérant ou à la solution d'un litige né d'un contrat. La signature des requêtes et mémoires par l'un de ces mandataires vaut constitution et élection de domicile chez lui. " ;

8. Considérant qu'il résulte de ces dispositions et de l'ensemble des textes les régissant que les avocats à la cour, en particulier, ont qualité, devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, pour représenter les parties et signer en leur nom les requêtes et les mémoires sans avoir à justifier du mandat par lequel ils sont saisis par leur client ; que, par suite, la société requérante, qui ne remet pas sérieusement en cause l'existence du mandat dont bénéficie le conseil de la commune dans la présente instance, n'est pas davantage fondée à demander que, pour ce motif, soient écartés les mémoires en défense présentés pour cette dernière ;

9. Considérant que le préjudice d'exploitation qui résulterait pour la société requérante de l'impossibilité d'améliorer la productivité de l'élevage d'escargots, d'assurer l'hivernage de plantes exotiques et de produire des orchidées, alors que le projet de serres n'a, en particulier, reçu aucun commencement d'exécution, est purement hypothétique ; que le préjudice financier, qui tiendrait à l'absence de valorisation de son fonds, et dont la teneur précise n'est pas déterminée, n'est pas plus certain ;

10. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la société requérante jouirait d'une réputation particulière dans les domaines de l'héliciculture et de la production de plantes exotiques, à laquelle les décisions litigieuses auraient spécialement porté atteinte ; que si, plus généralement, elle fait état d'un contexte général qui lui serait défavorable et qui tiendrait en particulier à des " relations tendues " avec les maire successifs de la commune de Messimy-sur-Saône, elle ne justifie d'aucun préjudice moral auquel l'auraient exposée ces mêmes décisions ;

11. Considérant que par suite, et même en admettant que les oppositions à déclaration préalable du 13 août 2011 seraient irrégulières, sa demande d'indemnisation ne peut qu'être rejetée ;

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la SCEA Val de Saône, qui a la qualité de partie perdante dans la présente instance, bénéficie d'une somme au titre des frais exposés par elle à l'occasion du litige ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCEA Val de Saône le paiement à la commune de Messimy-sur-Saône d'une somme de 1 500 euros sur ce même fondement ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SCEA Val de Saône est rejetée.

Article 2 : La SCEA Val de Saône versera à la commune de Messimy-sur-Saône une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCEA Val de Saône et à la commune de Messimy-sur-Saône.

Délibéré après l'audience du 24 mai 2016, à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de la formation de jugement,

M. Lévy Ben Cheton, premier conseiller,

Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 juin 2016.

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N° 14LY02866

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY02866
Date de la décision : 14/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics - Services de l'urbanisme.

Urbanisme et aménagement du territoire - Autorisations d`utilisation des sols diverses.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: M. Vincent-Marie PICARD
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : DONCE - BEROUJON

Origine de la décision
Date de l'import : 28/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-06-14;14ly02866 ?
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