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12/04/2016 | FRANCE | N°14LY02683

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 12 avril 2016, 14LY02683


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...D...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté, en date du 27 janvier 2014, par lequel le préfet de la Haute-Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français, et a désigné le pays à destination duquel elle serait reconduite en cas d'exécution forcée de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n°1400977, en date du 4 juillet 2014, le tribunal administratif de tribunal administratif de Grenoble a annulé l'ar

rêté du 27 janvier 2014 et condamné l'Etat au versement de 1 000 euros au titre de l'a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...D...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté, en date du 27 janvier 2014, par lequel le préfet de la Haute-Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français, et a désigné le pays à destination duquel elle serait reconduite en cas d'exécution forcée de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n°1400977, en date du 4 juillet 2014, le tribunal administratif de tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 27 janvier 2014 et condamné l'Etat au versement de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 août 2014, le préfet de la Haute-Savoie demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 4 juillet 2014.

Le préfet soutient que :

- à titre principal, c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté en se bornant à prendre acte de la nouvelle promesse d'embauche fournie par l'intéressée dans sa requête introductive d'instance ; ce faisant le tribunal administratif de Grenoble a entaché son jugement d'une erreur manifeste d'appréciation, ; la seconde promesse d'embauche, à la supposer authentique, n'a jamais été portée à sa connaissance ; il peut donc difficilement lui être reproché d'avoir commis une erreur de fait ; outre la situation de l'emploi, il a examiné les autres conditions pour l'admettre au séjour au titre de la vie privée et familiale ou en qualité de salariée ; il n'a été commis aucune erreur manifeste d'appréciation ; l'intéressée ne remplissait aucun des critères au regard de l'ancienneté de son séjour en France qui doit être d'au moins dix ans, de ses attaches personnelles et familiales sur le territoire français ou de son insertion dans la société française ;

- à titre subsidiaire, le signataire de l'arrêté était compétent ; l'arrêté n'a méconnu ni les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; l'arrêté litigieux n'a pas été pris en méconnaissance de l'article L. 313-10 1° ni de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 décembre 2014, Mme B..., représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- à titre principal, l'appel du préfet de la Haute-Savoie est irrecevable pour tardiveté ; que le jugement lui a été notifié le 18 juillet 2014 et que son appel n'a été enregistré au greffe de la cour que le 19 août 2014 ;

- à titre subsidiaire, l'arrêté litigieux a porté une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale en méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est intégrée socialement, professionnellement, elle dispose d'une promesse d'embauche en contrat à durée indéterminée et elle est en lien avec sa soeur, conjointe de français, présente sur le territoire français, et les deux enfants de celle-ci ; le préfet n'a pas tenu compte de l'accord franco-sénégalais relatif à la gestion concertée des flux migratoires du 23 septembre 2006 et de son avenant du 25 février 2008 entré en vigueur le 1er août 2009 (publié au Journal Officiel du 1er septembre 2009) qui prévoit, ainsi que l'a souligné la circulaire n° NOR IMI/M/09/00083/C du ministère de l'immigration du 15 janvier 2010, en son article 4.2 que le ressortissant sénégalais en situation irrégulière en France peut bénéficier d'une admission exceptionnelle au séjour se traduisant par la délivrance soit d'une carte de séjour portant la mention " salarié " s'il exerce l'un des métiers de la liste dans les mêmes conditions que celles prévues au 1. ci-dessus et dispose d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail, soit d'une carte de séjour mention " vie privée et familiale " s'il justifie de motifs humanitaires ou exceptionnels ; au nombre des métiers ouverts aux ressortissants sénégalais sans que ne puisse leur être opposée la situation de l'emploi, figure le métier d'employé de ménage à domicile ; il est incontestable que cette nouvelle proposition d'emploi avait été portée à la connaissance du préfet nonobstant le fait que l'arrêté attaqué ne vise que la première promesse d'embauche, Mme B...ayant régulièrement complété son dossier jusqu'au 13 janvier 2014, date de la décision attaquée ; cette promesse d'embauche est d'ailleurs antérieure à l'arrêté attaqué ; en première instance, le préfet n'avait pas contesté l'affirmation selon laquelle il en avait été destinataire ; ce n'est qu'au vu de la décision du tribunal administratif de Grenoble que le préfet indique n'avoir pas eu connaissance de ce document ; or, il est manifeste que le nouvel emploi proposé n'a fait l'objet d'aucune étude sérieuse de la part du préfet qui n'a nullement tenu compte de l'accord franco-sénégalais.

Par une ordonnance du 14 août 2015 la clôture de l'instruction a été fixée au 2 septembre 2015, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal relatif à la gestion concertée des flux migratoire, signé à Dakar le 23 septembre 2006, et l'avenant à cet accord, signé à Dakar le 25 février 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Terrade,

- les conclusions de M. Besse, rapporteur public.

1. Considérant que Mme C...D...B..., ressortissante sénégalaise née le 29 août 1976, est entrée en France le 16 juillet 2008 sous couvert d'un visa C délivré par les autorités consulaires portugaises à Dakar pour l'espace Schengen pour une période de quatre-vingt-dix jours ; qu'à l'expiration de la période de validité de son visa, l'intéressée s'est maintenue sur le territoire français ; qu'elle a sollicité, le 19 décembre 2012, une admission exceptionnelle au séjour en se prévalant notamment d'une promesse d'embauche en qualité de responsable de projet ; que par un arrêté du 27 janvier 2014, le préfet de la Haute-Savoie a rejeté sa demande, assortissant sa décision de refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois en fixant le pays de destination ; que, par un jugement du 4 juillet 2014, le tribunal administratif de Grenoble a accueilli sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté en retenant l'erreur de fait ; que, par la présente requête, le préfet de la Haute-Savoie relève appel de ce jugement ;

Sur l'appel principal :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée en défense :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 776-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicable, en particulier, aux décisions portant obligation de quitter le territoire français, à celles relatives au séjour notifiées avec les décisions portant obligation de quitter le territoire français et aux décisions fixant le pays de renvoi : " Le délai d'appel est d'un mois. Il court à compter du jour où le jugement a été notifié à la partie intéressée. (...) " ; que le délai d'appel d'un mois ouvert par l'article R. 776-9 précité du code susvisé à l'encontre d'un jugement statuant sur un arrêté préfectoral refusant la délivrance d'un titre de séjour et obligeant l'étranger à quitter le territoire français en fixant le pays de destination de la reconduite d'office est un délai franc ; que, par suite, le jugement attaqué du tribunal administratif de Grenoble ayant été notifié aux services préfectoraux le 18 juillet 2014, l'appel du préfet de la Haute Savoie enregistré au greffe de la cour administrative d'appel le 19 août 2014 était recevable ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée en défense, à titre principal, ne peut qu'être écartée ;

En ce qui concerne le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif de Grenoble :

3. Considérant que pour annuler l'arrêté du 27 janvier 2014 du préfet de la Haute-Savoie refusant à Mme B...un titre de séjour, le tribunal administratif de Grenoble a estimé que cette décision, ne faisant référence qu'à la première promesse d'embauche en tant que responsable de projet au sein de la société RWO SARL présentée par Mme B...au soutien de sa demande et non à la seconde, en tant qu'aide ménagère et garde d'enfants à domicile en date du 11 décembre 2013, dont la production par l'intéressée ne serait selon les premiers juges pas contestée, était entachée d'erreur de fait, alors que cette dernière activité figure dans la liste annexée à l'accord franco-sénégalais des métiers ouverts aux ressortissants sénégalais ; que, toutefois, en appel, le préfet de la Haute-Savoie, qui n'avait pas défendu en première instance, soutient que cette seconde promesse d'embauche n'a jamais été portée à sa connaissance et n'a été produite pour la première fois par Mme B...que devant le tribunal administratif de Grenoble au soutien de sa requête introductive d'instance ; que, par conséquent, dans la décision attaquée, il ne s'est prononcé que sur la première promesse d'embauche dont il avait été saisi ; que, dans ces conditions, le préfet de la Haute-Savoie est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble s'est fondé sur une erreur de fait, moyen d'ailleurs non soulevé, pour annuler son arrêté du 27 janvier 2014 ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme B... devant le tribunal administratif de Grenoble et en appel ;

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

5. Considérant que Mme B... soutient que le préfet de la Haute Savoie n'a pas tenu compte des termes de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006 qui prévoit la délivrance soit d'une carte de séjour portant la mention " salarié " à un ressortissant sénégalais s'il exerce l'un des métiers figurant dans la liste annexée à l'accord, soit d'une carte de séjour " vie privée et familiale " lorsqu'il justifie de motifs humanitaires ou exceptionnels, en renvoyant à la législation française ; qu'il ressort de la lecture de la décision attaquée, que, saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour, le préfet a examiné la situation de MmeB..., d'une part, au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et d'autre part, à l'aune des dispositions de l'article L. 313-10 du même code ;

6. Considérant que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers et aux conditions de délivrance de ces titres s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du même code, " sous réserve des conventions internationales " ; qu'en ce qui concerne les ressortissants sénégalais, s'appliquent les stipulations de la convention du 1er août 1995 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal relative à la circulation et au séjour des personnes ainsi que celles de l'accord du 23 septembre 2006 relatif à la gestion concertée des flux migratoires, telles que modifiées par un avenant signé le 25 février 2008 ;

7. Considérant que si aux termes du paragraphe 4.2 de l'article 4 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006, dans sa rédaction issue du point 31 de l'article 3 de l'avenant du 25 février 2008, entré en vigueur le 1er août 2009 : " Un ressortissant sénégalais en situation irrégulière en France peut bénéficier, en application de la législation française, d'une admission exceptionnelle au séjour se traduisant par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant : / soit la mention "salarié" s'il exerce l'un des métiers mentionnés dans la liste figurant en annexe IV de l'Accord et dispose d'une proposition de contrat de travail. / soit la mention "vie privée et familiale" s'il justifie de motifs humanitaires ou exceptionnels. ", les stipulations précitées, renvoyant à la législation française en matière d'admission exceptionnelle au séjour des ressortissants sénégalais en situation irrégulière, rendent applicables à ces ressortissants les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que dès lors, saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour par un ressortissant sénégalais en situation irrégulière, le préfet est conduit, par l'effet de l'accord du 23 septembre 2006 modifié, à faire application des dispositions de l'article L. 313-14 du code ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 " ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'en estimant que MmeB..., par la seule production d'un contrat de travail, ne justifiait d'aucun motif exceptionnel, ni d'aucune considération humanitaire, et qu'elle ne pouvait dès lors prétendre à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code, qui lui sont applicables, le préfet de la Haute-Savoie n'a entaché sa décision ni d'erreur de droit, ni d'erreur manifeste d'appréciation ;

9. Considérant que le préfet de la Haute-Savoie a également examiné la demande de titre de séjour en qualité de " salarié " de Mme B...sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, ce faisant, il n'a pas examiné sa situation au regard des stipulations de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006, dans sa rédaction issue du point 1 de l'article 2 de l'avenant du 25 février 2008, entré en vigueur le 1er août 2009 qui stipule en son paragraphe 321 de l'article 3 que : " La carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", d'une durée de douze mois renouvelable ou celle portant la mention " travailleur temporaire " sont délivrées, sans que soit prise en compte la situation de l'emploi, au ressortissant sénégalais titulaire d'un contrat de travail visé par l'Autorité française compétente, pour exercer une activité salariée dans l'un des métiers énumérés à l'annexe IV.(...) Les ressortissants sénégalais peuvent travailler dans tous les secteurs s'ils bénéficient d'un contrat de travail. Pour faciliter leur orientation, la France s'engage à porter à leur connaissance une liste d'emplois disponibles (Annexe IV). (...) " ; que toutefois le sous-paragraphe 321 précité de l'article 3 de l'accord de 2006 ne peut être regardé comme régissant la délivrance des titres de séjour en qualité de salarié et n'a pas remis en cause l'article 13 de la convention du 1er août 1995 qui renvoie aux législations des deux Etats pour la délivrance des titres de séjour mais s'est borné à prévoir une liste de métiers pour lesquels la situation de l'emploi en France ne pouvait être opposée aux ressortissants sénégalais, demandeurs d'un titre de séjour comme travailleurs salariés ; qu'ainsi, c'est à bon droit que le préfet a examiné la situation de Mme B...au regard des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : / 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. / Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2. / La carte porte la mention "salarié" lorsque l'activité est exercée pour une durée supérieure ou égale à douze mois. Elle porte la mention "travailleur temporaire" lorsque l'activité est exercée pour une durée déterminée inférieure à douze mois. (...) " ;

11. Considérant qu'il ressort des mentions de l'arrêté en litige, que, pour refuser à Mme B... la délivrance d'une carte de séjour temporaire en qualité de salariée sur le fondement des dispositions précitées du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de la Haute-Savoie s'est fondé sur la circonstance que l'intéressée n'était pas titulaire du visa de long séjour requis par l'article L. 311-7 du même code pour introduire une demande de titre de séjour en qualité de " salarié ", qu'elle était également dépourvue de contrat de travail visé favorablement par les services du ministre chargé de l'emploi conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail et à celles de l'article L. 313-10 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en outre, saisi d'une promesse d'embauche pour un emploi ne figurant pas dans la liste de l'annexe IV de l'accord franco-sénégalais, le préfet de la Haute-Savoie pouvait lui opposer la situation de l'emploi dans le département ; que si ce raisonnement ne peut être opposé pour la seconde promesse d'embauche, qui même non produite au préfet, est antérieure à la décision attaquée, le motif tiré de l'absence de visa long séjour était suffisant pour justifier le refus de titre de séjour ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté ;

12. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ";

13. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...indique séjourner en France depuis juillet 2008, fait valoir qu'elle a des liens affectifs très forts avec sa soeur et les enfants de cette dernière dont elle s'occupe, et qu'elle a tissé de nombreux liens d'amitié sur le territoire français ; que toutefois, elle a vécu au Sénégal jusqu'à l'âge de 32 ans, alors que son père et les autres membres de sa fratrie y résident toujours ; qu'elle est célibataire et sans enfant, vivant désormais séparée selon ses propres dires du ressortissant suisse avec lequel elle entretenait une relation de concubinage en France ; que, dans ces conditions, et malgré la durée non contestée de séjour en France de six ans et demi à la date de la décision, le refus de séjour n'a pas porté au droit de Mme B...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à le supposer opérant compte tenu du fondement de la demande faite au préfet, doit être écarté ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Haute-Savoie est fondé à demander l'annulation du jugement en date du 4 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 27 janvier 2014 ;

15. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante verse à Mme B...une somme au titre des frais exposés en cours d'instance et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n°1400977, en date du 4 juillet 2014 du tribunal administratif de Grenoble est annulé.

Article 2 : La demande et les conclusions de Mme B...sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...et au ministre de l'intérieur. Copie du présent arrêt sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 22 mars 2016 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Mear, président-assesseur,

Mme Terrade, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 avril 2016.

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N° 14LY02683


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY02683
Date de la décision : 12/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Textes applicables - Conventions internationales.

Étrangers - Séjour des étrangers - Autorisation de séjour - Régularisation.

Étrangers - Emploi des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle TERRADE
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : BLANC

Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-04-12;14ly02683 ?
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