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29/03/2016 | FRANCE | N°15LY01320

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 29 mars 2016, 15LY01320


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté en date du 4 décembre 2014 par lequel le préfet de la Haute-Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français.

Par un jugement n° 1500026 du 19 mars 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête n° 15LY01320 enregistrée le 20 avril 2015, M.B..., représenté par MeA..., demande à l

a cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1500026 du 19 mars 2015, du tribunal administratif de Greno...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté en date du 4 décembre 2014 par lequel le préfet de la Haute-Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français.

Par un jugement n° 1500026 du 19 mars 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête n° 15LY01320 enregistrée le 20 avril 2015, M.B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1500026 du 19 mars 2015, du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté contesté du 4 décembre 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Savoie, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un mois ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. B...soutient :

- que le refus de titre de séjour contesté méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il ne pourra bénéficier, au Kosovo des soins que son état de santé nécessite ;

- que cette décision méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;

- qu'elle est en outre entachée d'erreur manifeste d'appréciation, des circonstances humanitaires exceptionnelles, au sens de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, justifiant en l'espèce que le préfet lui délivre le titre sollicité alors même qu'existerait dans son pays les traitements appropriés ;

- qu'elle est également entachée d'un vice de procédure, la commission du titre de séjour n'ayant pas été consultée, en méconnaissance de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- que l'obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article L. 511-4-10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 mai 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Lévy Ben Cheton, premier conseiller.

1. Considérant que M.B..., ressortissant kosovar né en 1955, est entré en France le 21 décembre 2009 ; que si sa demande d'asile a été rejetée le 19 mai 2010 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis le 4 juin 2012 par la Cour nationale du droit d'asile, lui furent cependant délivrées deux cartes de séjour temporaire en qualité d'étranger malade, valables du 22 mai 2012 au 21 mai 2013 puis du 2 septembre 2013 au ler septembre 2014 ; que toutefois, par un arrêté du 4 décembre 2014, pris au vu de l'avis formulé le 16 septembre 2014 par le médecin de l'agence régionale de santé, le préfet de la Haute-Savoie rejeta sa demande tendant au renouvellement de ce titre de séjour, et assortit cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et d'une décision fixant le pays de destination ; que M. B...relève appel du jugement du 19 mars 2015, par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande dirigée contre ces décisions ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ;

3. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ;

4. Considérant que sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;

5. Considérant que le médecin de l'agence régionale de santé a estimé, le 16 septembre 2014, que l'état de santé de M. B...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'un traitement approprié existe dans le pays dont il est originaire, vers lequel il peut voyager sans risques ;

6. Considérant qu'afin de contester cette appréciation, M.B..., qui a été victime d'un infarctus du myocarde en juin 2009, se borne à reprendre l'argumentation générale qu'il avait développée en première instance, selon laquelle les équipements disponibles au Kosovo ne permettraient ni un suivi par coronarographie ni une éventuelle intervention chirurgicale cardiaque ; qu'il n'établit toutefois nullement la réalité de ces allégations, alors d'ailleurs que le suivi dont il est l'objet est d'ordre exclusivement médicamenteux, par la seule production d'extraits de rapports établis en 2009 et 2010, soit antérieurs de plus de quatre ans à la décision attaquée, et d'un rapport de 2013 relatif à la prise en charge de l'insuffisance rénale, pathologie dont il ne dit pas être atteint ; qu'enfin, M. B...ne saurait utilement se prévaloir des conditions économiques d'accès aux soins, lesquelles sont étrangères aux prévisions des dispositions qu'il invoque ; qu'il résulte de ce qui précède qu'en estimant qu'il pouvait bénéficier d'un traitement approprié à sa pathologie dans son pays d'origine et qu'en conséquence, il n'entrait pas dans le cas prévu au 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de la Haute-Savoie n'a pas méconnu ces dispositions ;

7. Considérant que M. B...ne fait état d'aucun élément spécifique susceptible de caractériser une circonstance humanitaire exceptionnelle ; que la décision contestée n'est par conséquent entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation, au regard notamment de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

9. Considérant que M. B...est entré en France à l'âge de 54 ans après avoir toujours vécu dans son pays, où réside l'ensemble de sa famille, et notamment son épouse et leurs enfants ; qu'à la date de la décision contestée, il ne résidait que depuis moins de cinq ans en France, où il n'avait été admis à séjourner que temporairement, compte-tenu de son état de santé ; que, dans ces conditions, la décision contestée ne porte pas, eu égard aux buts qu'elle poursuit, une atteinte disproportionnée au droit de M. B...au respect de sa vie privée et familiale ; que dès lors, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté, ainsi qu'en tout état de cause, celui tiré d'une méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que M. B...n'étant pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de police n'était pas tenu, en application de l'article L. 312-2 du même code, de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande et n'a pas, dès lors, entaché la décision contestée d'un vice de procédure ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des

étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...)." ;

12. Considérant que M. B...pouvant, ainsi qu'il a été dit plus haut, bénéficier d'un traitement approprié au Kosovo, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M.B..., qui ne formule aucun moyen spécifiquement dirigé contre les décisions du même jour déterminant le délai de départ volontaire qui lui est imparti et fixant le pays de renvoi, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 8 mars 2016, à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de la formation de jugement,

M. Lévy Ben Cheton, premier conseiller,

Mme Vaccaro-Plancher, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 mars 2016.

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N° 15LY01320

mg


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY01320
Date de la décision : 29/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: M. Laurent LEVY BEN CHETON
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : BLANC

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-03-29;15ly01320 ?
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