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15/12/2015 | FRANCE | N°14LY01992

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 15 décembre 2015, 14LY01992


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Marc Curot Construction a demandé au tribunal administratif de Dijon la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2005 et 2006.

Par un jugement n° 1100628 du 15 mai 2012, le tribunal administratif de Dijon a fait droit à cette demande.

Par un arrêt n° 12LY01858 du 7 mai 2013, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté le recours formé par le ministre de l'économie et des finances contre ce jugement.>
Par une décision n° 369690 du 17 juin 2014, enregistrée le 25 juin 2014 sous le n° 14LY0...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Marc Curot Construction a demandé au tribunal administratif de Dijon la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2005 et 2006.

Par un jugement n° 1100628 du 15 mai 2012, le tribunal administratif de Dijon a fait droit à cette demande.

Par un arrêt n° 12LY01858 du 7 mai 2013, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté le recours formé par le ministre de l'économie et des finances contre ce jugement.

Par une décision n° 369690 du 17 juin 2014, enregistrée le 25 juin 2014 sous le n° 14LY01992, le Conseil d'Etat, sur la demande du ministre délégué chargé du budget a, d'une part, annulé l'arrêt n° 12LY01858 du 7 mai 2013 de la cour administrative d'appel de Lyon et, d'autre part, renvoyé devant la cour de céans le jugement de cette affaire.

Procédure devant la cour :

Par un recours et un mémoire, enregistrés le 18 juillet 2012 et le 25 juillet 2014, le ministre des finances et des comptes publics, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100628, du 15 mai 2012, par lequel le tribunal administratif de Dijon a déchargé la SAS Marc Curot Construction des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2005 et 2006 ;

2°) de remettre à la charge de la SAS Marc Curot Construction les impositions litigieuses.

Le ministre des finances et des comptes publics soutient que :

- c'est à bon droit que le service a appliqué les dispositions du 3° quater de l'article 1469 du code général des impôts et non celles de l'article 1518 B du même code pour déterminer la valeur locative des biens litigieux, dans la mesure où l'opération réalisée entre la SA et la SAS Marc Curot Construction, à savoir un apport partiel d'actif, est une " cession " au sens de ces dispositions qui doivent, ainsi que les travaux parlementaires ultérieurs l'attestent, être appréciées de façon extensive, et ne se limitent pas à la notion de vente ; le Conseil d'Etat, dans sa décision du 17 juin 2014, a transposé aux apports partiels d'actif les principes dégagés dans ses décisions n° 348681 du 13 février 2013 et n° 355630 et n° 360973 du 7 novembre 2013 selon lesquelles " la notion de cession au sens du droit civil recouvre tous les transferts de propriété consentis entre un cédant et un cessionnaire, effectués à titre gratuit ou à titre onéreux " ;

- le moyen soulevé par la société en première instance tiré de ce qu'avant le 1er janvier 2007, seule une doctrine administrative fondait la primauté des dispositions de l'article 1469 3° quater sur l'article 1518 B n'est pas fondé car la loi de finances pour 2007 n'a fait que clarifier l'articulation entre les dispositions du 3° quater de l'article 1469 et celles de l'article 1518 B, le cas particulier prévu au 3° quater de l'article 1469 du code général des impôts étant, dès avant 2007, applicable à la situation de la SAS Marc Curot Construction, ce qu'a confirmé le Conseil d'Etat dans une décision du 7 novembre 2013 n° 360973.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 octobre 2012, la société Marc Curot Construction conclut au rejet du recours du ministre, à ce que la cour condamne l'administration fiscale à lui verser les intérêts moratoires prévus par l'article L. 208 du livre des procédures fiscales et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Marc Curot Construction soutient qu'avant le 1er janvier 2007, seul l'article 1518 B lui était applicable, aucune hiérarchie n'existant entre cet article et l'article 1469 3°, la primauté de cet article n'ayant été précisée que rétroactivement, par la doctrine administrative, non opposable aux administrés, au moment de l'entrée en vigueur de l'article 33 de la loi de finances 2007.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Besse, rapporteur public.

1. Considérant que la société anonyme (SA) Marc Curot Construction a procédé à l'apport de sa branche complète d'activité " bâtiments-travaux publics " à la SAS Marc Curot Construction, créée à cet effet le 6 juin 2003 et dont la SA est l'unique associée par un traité d'apport partiel d'actif en date du 26 mai 2004 ; que, pour l'établissement de la taxe professionnelle due au titre des années 2005 et 2006, la SAS Marc Curot Construction, faisant application des dispositions de l'article 1518 B du code général des impôts, a déterminé le prix de revient des immobilisations ayant fait l'objet de l'apport partiel d'actif à hauteur de 80 % de leur montant avant l'opération ; qu'à la suite d'une vérification de comptabilité, l'administration a remis en cause la valeur locative ainsi déclarée au motif qu'en application des dispositions du 3° quater de l'article 1469 du même code le prix de revient des biens cédés entre entreprises liées doit être maintenu à sa valeur antérieure à la cession lorsque ces biens sont rattachés au même établissement avant et après ladite cession ; que, par jugement n° 1100628 du 15 mai 2012, confirmé par un arrêt du 7 mai 2013 de la cour administrative de Lyon, le tribunal administratif de Dijon a déchargé la SAS Marc Curot Construction des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles elle a été ainsi assujettie au titre des années 2005 et 2006 ; que, par la décision susvisée du 17 juin 2014 le Conseil d'Etat a annulé ledit arrêt et a renvoyé l'affaire à la cour de céans ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1467 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " La taxe professionnelle a pour base : 1° Dans le cas des contribuables autres que ceux visés au 2° : a. la valeur locative, telle qu'elle est définie aux articles 1469, 1518 A et 1518 B, des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de celles qui ont été détruites ou cédées au cours de la même période (...) " ; qu'aux termes du 3° quater de l'article 1469 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Le prix de revient d'un bien cédé n'est pas modifié lorsque ce bien est rattaché au même établissement avant et après la cession et lorsque, directement ou indirectement : a. l'entreprise cessionnaire contrôle l'entreprise cédante ou est contrôlée par elle ; b. ou ces deux entreprises sont contrôlées par la même entreprise " ; qu'aux termes de l'article 1518 B du même code, dans sa rédaction alors applicable : " A compter du 1er janvier 1980, la valeur locative des immobilisations corporelles acquises à la suite d'apports, de scissions, de fusions de sociétés ou de cessions d'établissements réalisés à partir du 1er janvier 1976 ne peut être inférieure aux deux tiers de la valeur locative retenue l'année précédant l'apport, la scission, la fusion ou la cession. Les dispositions du premier alinéa s'appliquent aux seules immobilisations corporelles directement concernées par l'opération d'apport, de scission, de fusion ou de cession, dont la valeur locative a été retenue au titre de l'année précédant l'opération (...) Pour les opérations mentionnées au premier alinéa réalisées à compter du 1er janvier 1992, la valeur locative des immobilisations corporelles ne peut être inférieure aux quatre cinquièmes de son montant avant l'opération (...) Les dispositions du présent article s'appliquent distinctement aux trois catégories d'immobilisations suivantes : terrains, constructions, équipements et biens mobiliers " ;

3. Considérant qu'il résulte des termes mêmes des dispositions précitées du 3° quater de l'article 1469 du code général des impôts que les cessions de biens qu'elles visent s'entendent des seuls transferts de propriété consentis entre un cédant et un cessionnaire ; que ces dispositions, dont les termes renvoient à une opération définie et régie par le droit civil, ne sauraient s'entendre comme incluant toutes autres opérations qui, sans constituer des " cessions " proprement dites, ont pour conséquence une mutation patrimoniale ;

4. Considérant, cependant, que la notion de cession au sens du droit civil recouvre tous les transferts de propriété consentis entre un cédant et un cessionnaire, effectués à titre gratuit ou à titre onéreux ; que l'opération par laquelle une société apporte une partie de ses éléments d'actif à une autre société en échange de titres de cette dernière doit être regardée comme une cession à titre onéreux au sens du droit civil ; que l'apport partiel d'actif réalisé par la SA Marc Curot Construction à la SAS Marc Curot Construction entre ainsi dans le champ d'application des dispositions du 3° quater de l'article 1469 du code général des impôts ; que, dès lors, le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon s'est fondé sur la circonstance que l'apport partiel d'actif de la SA Marc Curot Construction à la SAS Marc Curot Construction ne constituait pas une cession au sens des dispositions du 3° quater de l'article 1469 du code général des impôts pour décharger cette SAS des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles elle avait été assujettie au titre des années 2005 et 2006 ainsi que de l'intérêt de retard correspondant ;

5. Considérant qu'il appartient, toutefois, à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner le moyen soulevé par la SAS Marc Curot Construction devant le tribunal administratif de Dijon et devant la cour ;

6. Considérant que la SAS Marc Curot Construction soutient que le

3° quater de l'article 1469 du code général des impôts ne pouvait lui être opposé qu'à compter du 1er janvier 2007, date à laquelle est entré en vigueur l'article 33 de la loi de finances pour 2007 du 21 décembre 2006 qui a précisé, à l'article 1518 B du code général des impôts que celui-ci s'applique " sans préjudice des dispositions du 3° quater de l'article 1469 " et que la primauté de cet article n'a été précisée que rétroactivement, par la doctrine administrative, non opposable aux administrés, au moment de l'entrée en vigueur de l'article 33 de la loi de finances pour 2007 ; que, toutefois, avant même cette modification, compte tenu de leurs rédactions respectives, les dispositions du 3° quater de l'article 1469 du code général des impôts pouvaient s'appliquer à des contribuables entrant dans le champ d'application des dispositions de l'article 1518 B du code général des impôts, lesquelles, prévoyant seulement un montant plancher pour déterminer la valeur locative d'un bien, ne faisaient pas obstacle à l'application du 3° quater de l'article 1469 de ce code ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre des finances et des comptes publics est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a déchargé la SAS Marc Curot Construction des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle mises à sa charge au titre des années 2005 et 2006 ; que, par suite, ce jugement doit être annulé et les impositions litigieuses doivent être remises à la charge de la SAS Marc Curot Construction ; que les conclusions, formées par voie d'appel incident, par la SAS Marc Curot Construction tendant au versement d'intérêts moratoires, ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées, ainsi que les conclusions qu'elle présente tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1100628 en date du 15 mai 2012 du tribunal administratif de Dijon est annulé.

Article 2 : Les cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles la SAS Marc Curot Construction a été assujettie au titre des années 2005 et 2006 sont remises à sa charge.

Article 3 : Les conclusions présentées par la SAS Marc Curot Construction sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des finances et des comptes publics et à la SAS Marc Curot Construction.

Délibéré après l'audience du 24 novembre 2015 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Terrade, premier conseiller,

Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 décembre 2015.

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N° 14LY01992


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY01992
Date de la décision : 15/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-03-04-04 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances. Taxe professionnelle. Assiette.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : JURISTES ASSOCIES B.F.C

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-12-15;14ly01992 ?
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