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15/12/2015 | FRANCE | N°14LY00877

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 15 décembre 2015, 14LY00877


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...a demandé au tribunal administratif de Dijon l'annulation de l'arrêté du maire d'Auxonne en date du 16 novembre 2012 prononçant à son encontre une exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois jours.

Par jugement n° 1300014 du 26 décembre 2013, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 21 mars 2014, M. D...C...demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administ

ratif de Dijon du 26 décembre 2013 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 16 novembre 2012 du maire d'Auxonne ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...a demandé au tribunal administratif de Dijon l'annulation de l'arrêté du maire d'Auxonne en date du 16 novembre 2012 prononçant à son encontre une exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois jours.

Par jugement n° 1300014 du 26 décembre 2013, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 21 mars 2014, M. D...C...demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 26 décembre 2013 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 16 novembre 2012 du maire d'Auxonne ;

3°) d'enjoindre à la commune d'Auxonne de procéder au versement de son traitement correspondant à la période d'exclusion ;

4°) de mettre à la charge de la commune d'Auxonne le versement d'une somme de 500 euros au titre de l'article L.761-1du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la procédure avait été respectée, dès lors que les rapports établis par le directeur adjoint des services techniques et par le directeur des services techniques retraçant les faits qui lui sont reprochés ont été ajoutés au dossier entre les deux entretiens auxquels il a été convoqué, les 4 et 31 octobre 2012 ; ces rapports sont datés du lendemain des faits alors que la commune n'était pas encore en mesure de se positionner sur une éventuelle sanction disciplinaire ;

- la sanction prise à son encontre constitue en réalité une mesure illégale de pénalisation financière, dès lors qu'elle a été mise en application sur des jours où il ne travaillait pas ; il n'appartenait pas à la collectivité de modifier la nature de la sanction en substituant à l'exclusion de trois jours ouvrables celle de trois jours non ouvrés ; une telle sanction ne figure pas au nombre des sanctions limitativement énumérées à l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984, comme en a jugé la cour administrative d'appel de Versailles par un arrêt n° 06VE02674 du 12 juin 2008.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 mai 2014, la commune d'Auxonne, représentée par son maire en exercice, par MeB..., conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. C...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les rapports évoqués par M. C...se trouvaient dans son dossier disciplinaire dès la fin du mois de septembre 2012 ; il en a pris connaissance avant la date fixée pour le premier entretien ; l'irrégularité alléguée ne repose sur aucune preuve ; à supposer même que les rapports relatifs aux faits qui sont reprochés à M. C...n'aient été placés dans son dossier qu'entre le 4 et le 31 octobre, cette circonstance serait sans incidence sur la régularité de la procédure disciplinaire, dès lors que celle-ci a été réouverte le 22 octobre 2012 ; M. C...a pris connaissance de l'intégralité de son dossier avant la date de l'entretien préalable au prononcé de la sanction, le 31 octobre 2012 ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a jugé que le deuxième grief retenu à l'encontre de M.C..., n'était pas de nature à justifier légalement une sanction disciplinaire, dès lors que l'atteinte portée à l'image du service public est constituée ; les autres faits qui lui sont reprochés sont constitutifs de fautes professionnelles ;

- la sanction prononcée figure dans la liste fixée par l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 ; si cette mesure a porté pour l'essentiel sur des jours non travaillés par M. C..., cette circonstance n'entache pas d'illégalité la mesure, dès lors, d'une part, qu'une mesure d'exclusion inférieure à un mois prend en compte des jours calendaires, et non des jours ouvrés et, d'autre part, que les conditions d'exécution d'une sanction sont sans influence sur la légalité de la sanction elle-même ; elle n'a pas modifié la nature de la sanction en choisissant pour son exécution une période comptant pour partie des jours non travaillés ; elle n'a pas fait porter la période d'exclusion en totalité sur des jours ou heures non travaillés ; le choix de la période a été effectué dans l'intérêt du service ; la sanction pécuniaire constitue une conséquence nécessaire de l'exclusion temporaire, nonobstant les jours pendant lesquels elle prend effet ; le choix de la période d'exclusion a été opéré par le maire en sa qualité de responsable de l'organisation du service et non d'autorité disciplinaire.

Par un mémoire complémentaire, enregistré le 17 juillet 2014, M. C...conclut aux mêmes fins que sa requête mais ramène à un euro la somme devant être mise à la charge de la commune d'Auxonne en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il ajoute que :

- il n'a eu connaissance des rapports établis par sa hiérarchie que le 22 octobre 2012 ; ces rapports ne sont pas numérotés ;

- c'est à bon droit que le tribunal administratif a jugé que le deuxième grief retenu contre lui ne justifiait pas une sanction ;

- il n'est pas établi de manière incontestable que le premier grief serait constitutif d'une faute de nature à justifier une sanction, eu égard au fait que les rapports n'ont été portés à sa connaissance que le 22 octobre 2012 ;

- la notion d'exclusion temporaire de fonctions, qui a pour objet d'écarter temporairement un agent du service, implique nécessairement qu'il soit sanctionné dans l'exercice de ses fonctions, c'est-à-dire pendant les périodes travaillées ; il n'a été effectivement éloigné du service que pendant une demi-journée ; le reliquat de deux jours et demi a donc été travaillé.

Par un mémoire complémentaire, enregistré le 28 novembre 2014, la commune d'Auxonne conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux ;

- le décret n° 85-1148 du 24 octobre 1985 modifié relatif à la rémunération des personnels civils et militaires de l'Etat, des personnels des collectivités territoriales et des personnels des établissements publics d'hospitalisation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Peuvrel, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Clément, rapporteur public ;

- et les observations de MeA..., pour la commune d'Auxonne.

1. Considérant que M.C..., adjoint technique territorial de 2ème classe depuis le 1er décembre 1996 auprès de la commune d'Auxonne, a fait l'objet d'une exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois jours prononcée par arrêté du maire d'Auxonne pris le 16 novembre 2012 ; que le tribunal administratif de Dijon, par jugement du 26 décembre 2013, a rejeté la demande de M. C...tendant à l'annulation de cet arrêté et à ce qu'il soit enjoint au maire de lui verser son traitement correspondant à la période d'exclusion ; que M. C...relève appel de ce jugement ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 18 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 : " Le dossier du fonctionnaire doit comporter toutes les pièces intéressant la situation administrative de l'intéressé, enregistrées, numérotées et classées sans discontinuité. (...) " ; qu'aux termes de l'article 19 du même texte : " Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité investie du pouvoir de nomination. Le fonctionnaire à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes et à l'assistance de défenseurs de son choix. (...) " ;

3. Considérant que M. C...reconnaît lui-même avoir pris connaissance le 22 octobre 2012, soit avant l'entretien préalable au prononcé de la sanction, qui s'est déroulé le 31 octobre 2012, du contenu des rapports, établis respectivement le 15 novembre 2011 par le directeur des services techniques et les 21 février et 12 juillet 2012 par le directeur des services techniques adjoint, faisant état de manquements pour lesquels une sanction disciplinaire était demandée ; que, par suite, et alors que M. C...n'établit pas, en tout état de cause, que ces rapports n'auraient pas été numérotés, il n'est pas fondé à soutenir que la mesure d'exclusion temporaire de fonctions a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que les rapports mentionnés précédemment n'aient été portés à la connaissance de M.C..., dans le cadre de l'engagement d'une procédure disciplinaire, que le 22 octobre 2012, n'est, par elle-même, de nature ni à faire peser un doute sur la matérialité des faits reprochés à M.C..., ni à permettre de mettre en cause leur caractère fautif ;

5. Considérant, en troisième lieu, que la sanction est d'abord motivée par le fait qu'à deux reprises, les 14 novembre 2011 et 20 février 2012, M.C..., chargé d'assurer le ramassage des ordures ménagères le matin et de vider le camion à l'ouverture de la déchetterie, à 14 heures, a, après cet horaire, fait une pause d'une vingtaine de minutes chez des particuliers et en est ressorti avec leur poubelle ; qu'il est, en outre, reproché à M. C...d'avoir procédé à des travaux de peinture sur des potelets en se tenant assis sur une chaise d'enfant et d'avoir, ainsi, par l'adoption d'une posture inadéquate, porté atteinte à l'image du service public ; que, contrairement à ce qu'allègue la commune d'Auxonne, c'est à bon droit, par des motifs qu'il y a lieu d'adopter, que les premiers juges ont considéré que ce second grief n'était pas de nature à justifier légalement une exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois jours ;

6. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté contesté : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : Premier groupe : l'avertissement ; le blâme ; l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours ; Deuxième groupe : l'abaissement d'échelon ; l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quatre à quinze jours ; Troisième groupe : la rétrogradation ; l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans ; Quatrième groupe : la mise à la retraite d'office ; la révocation. (...) L'exclusion temporaire de fonctions, qui est privative de toute rémunération, peut être assortie d'un sursis total ou partiel. (...) " ;

7. Considérant que l'arrêté contesté prévoit, en son article 2, que la sanction "s'appliquera les vendredi 11, samedi 12 et dimanche 13 janvier 2013" et, en son article 3, que, pendant cette durée, une retenue de 3/30ème est opérée sur la rémunération de l'intéressé ; que la règle du trentième indivisible n'étant pas applicable aux retenues sur traitement pour absence de service fait des agents des collectivités territoriales, la retenue opérée par la commune d'Auxonne sur le traitement de M. C...devait être proportionnelle à la durée de l'absence de service fait ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. C...était en congé hebdomadaire les samedi et dimanche et ne travaillait le vendredi que jusqu'à 11h30 ; que, dans ces circonstances, la privation de traitement ne pouvait être supérieure à 1/60ème de son traitement mensuel ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 16 novembre 2012 en tant qu'il fixe la retenue opérée sur son traitement à plus de 1/60ème ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Considérant que l'exécution du présent arrêt implique que la commune d'Auxonne restitue à M. C...les 5/60èmes de son traitement retenus à tort ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre à la commune d'Auxonne de procéder à cette restitution dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

10. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C...la somme que la commune d'Auxonne demande au titre de ses frais non compris dans les dépens, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que les conclusions de M. C...tendant à ce qu'une somme d'un euro symbolique soit mise à la charge de la commune d'Auxonne à ce titre doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : L'article 3 de l'arrêté du 16 novembre 2012 du maire de la commune d'Auxonne est annulé en tant qu'il fixe la retenue opérée sur le traitement de M. C...à plus de 1/60ème.

Article 2 : Il est enjoint à la commune d'Auxonne de restituer à M. C...5/60èmes de son traitement au titre de la retenue opérée pour la période du 11 au 13 janvier 2013, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Dijon du 26 décembre 2013 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Auxonne et à M. D...C....

Délibéré après l'audience du 17 novembre 2015, à laquelle siégeaient :

M. Boucher, président de chambre ;

Mme Dèche, premier conseiller ;

Mme Peuvrel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 décembre 2015.

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N° 14LY00877


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY00877
Date de la décision : 15/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-04 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Sanctions.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: Mme Nathalie PEUVREL
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : CABINET CHATON

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-12-15;14ly00877 ?
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