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17/09/2015 | FRANCE | N°14LY02656

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 17 septembre 2015, 14LY02656


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...E...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 9 octobre 2013 par lequel le maire de la commune d'Etalante l'a mis en demeure d'enlever le matériel lui appartenant, entravant la libre circulation sur le chemin communal C 117, dans le délai de huit jours et, dans le dernier état de ses écritures, de surseoir à statuer jusqu'à ce que l'autorité judiciaire se soit prononcée sur son action en revendication de propriété sur la voie en question.

Par un jugement n° 1302

974 du 30 mai 2014, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ainsi q...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...E...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 9 octobre 2013 par lequel le maire de la commune d'Etalante l'a mis en demeure d'enlever le matériel lui appartenant, entravant la libre circulation sur le chemin communal C 117, dans le délai de huit jours et, dans le dernier état de ses écritures, de surseoir à statuer jusqu'à ce que l'autorité judiciaire se soit prononcée sur son action en revendication de propriété sur la voie en question.

Par un jugement n° 1302974 du 30 mai 2014, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ainsi que les conclusions présentées par la commune d'Etalante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 13 août 2014 et 7 avril 2015, ainsi que par un mémoire enregistré le 22 mai 2015, non communiqué, M. B...E..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 30 mai 2014 du tribunal administratif de Dijon ;

2°) à titre principal, d'annuler l'arrêté du maire d'Etalante du 9 octobre 2013 ;

3°) à titre subsidiaire, de surseoir à statuer jusqu'à ce que l'autorité judiciaire se soit prononcée sur son action en revendication de propriété sur la voie en cause, en instance devant le tribunal de grande instance de Dijon ;

4°) de mettre à la charge de la commune d'Etalante une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de rejeter les conclusions de la commune d'Etalante présentées sur le même fondement ;

Il soutient que :

- à titre principal l'arrêté litigieux doit être annulé, dès lors que la commune n'est pas propriétaire du chemin en cause, nonobstant l'existence d'une procédure de classement dans la voirie communale ayant donné lieu à une décision définitive de classement et qu'il justifie, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, être propriétaire de la parcelle E 74 ; en tant que seul propriétaire de cette parcelle incluant l'emprise du chemin litigieux, il était libre de mettre fin au passage de la circulation publique ;

- à titre subsidiaire, si la cour estimait ne pas détenir d'éléments de preuve suffisants, il lui appartiendrait de surseoir à statuer jusqu'à ce que l'autorité judiciaire se soit prononcée sur son action en revendication en instance devant le tribunal de grande instance de Dijon, qui n'est pas dilatoire, dès lors qu'il soulève, à tout le moins, une contestation sérieuse sur la propriété du chemin attaqué dont dépend directement la légalité de l'arrêté attaqué ; c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'il n'apportait pas d'éléments suffisants pour justifier qu'il soit sursis à statuer sur sa demande, au regard des actes et document notariés produits et alors que la commune avait elle-même reconnu antérieurement son absence de propriété sur ce bien, ainsi que le révèlent les courriers de son notaire ;

- la seule mention par l'ingénieur des travaux publics dans le dossier d'enquête publique que les propriétaires des voies publiques devant être incorporées dans le domaine public avaient donné leur accord ne suffit pas, à défaut de transfert de propriété par voie d'acte notarié ou d'acte administratif à valoir titre de propriété ; la circonstance que 30 ans se soient écoulés depuis la décision de classement est inopérante, le droit de propriété étant imprescriptible, tout comme l'action en revendication ; le fait qu'il ait toléré le passage public de véhicules n'a pas d'incidence sur son droit de propriété ;

Par des mémoires en défense enregistrés les 10 novembre 2014, 3 avril 2015 et 5 mai 2015, la commune d'Etalante, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de M. E...une somme de 5 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens.

Elle soutient que :

- la voie en cause a été classée dans la voirie communale par délibération du conseil municipal du 22 septembre 1979 ; la validité de la procédure de classement n'est pas contestée par le requérant et ne l'a pas été à l'époque, le père de l'intéressé était membre du conseil municipal lors du transfert de propriété, l'enquête publique fait état de l'accord de l'ensemble des propriétaires concernés pour le transfert des biens dans le domaine public ; ce chemin visait à éviter les désagréments liés au passage des véhicules au niveau de la ferme en la contournant ; le père du requérant avait consenti au transfert de propriété, conformément à l'article 1101 du code civil ; la contestation de la propriété est récente, plus de 30 ans se sont écoulés sans que sa propriété ne soit contestée ; le tribunal a retenu à juste titre que le chemin faisait partie du domaine public communal ; elle a dû intervenir car il obstruait le domaine public communal ;

- la demande dilatoire de question préjudicielle ne pouvait prospérer dans ces conditions ; le requérant ne peut utilement se prévaloir des initiatives du notaire de la commune, qui étaient personnelles, et qui visaient à obtenir un acte notarié pour rendre opposable aux tiers, par la publicité foncière, le transfert de propriété dans le domaine public de la commune ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le code de la voirie routière ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le décret n° 76-790 du 20 août 1976 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 août 2015 :

- le rapport de Mme Samson-Dye, premier conseiller,

- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public,

- les observations de Me D..., représentant M. E..., et de Me C..., représentant la commune d'Etalante ;

1. Considérant que M. E...relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 octobre 2013 par lequel le maire de la commune d'Etalante l'a mis en demeure d'enlever le matériel lui appartenant, entravant la libre circulation sur le chemin communal C 117, dans le délai de huit jours ;

Sur la légalité de l'arrêté contesté :

2. Considérant que le propriétaire d'une voie privée ouverte à la circulation du public est en droit d'en interdire à tout moment l'usage au public ; que le maire ne peut, sans excéder les pouvoirs qu'il tient de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales, rouvrir une voie privée à la circulation publique en cas d'opposition de son ou ses propriétaires ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la voie située sur la parcelle cadastrée E 74 a été classée dans la voirie communale, après enquête publique, sur le fondement du décret n° 76-790 du 20 août 1976, par délibération du conseil municipal d'Etalante du 22 septembre 1979 ; que, cependant la délibération procédant au classement dans le domaine public routier communal d'un bien qui n'appartient pas à cette collectivité, ne peut avoir pour effet d'en transférer la propriété à la commune ; qu'en l'espèce, le dossier d'enquête publique présentait cette voie comme ayant initialement le statut de voie privée ; que la commune ne produit aucun titre de propriété attestant de ce qu'elle aurait acquis cette portion de la parcelle E 74, pour l'intégralité de laquelle M. E...justifie, au contraire, de sa propriété par la production d'actes notariés du 28 avril 2008 et du 9 février 2011 ; que la commune n'établit pas davantage l'existence d'un accord de volonté sur le transfert de ce bien engageant son propriétaire d'alors, les mentions portées par l'ingénieur divisionnaire avant l'enquête publique selon lesquelles les propriétaires des voies privées auraient donné leur accord à un tel classement étant insuffisantes pour tenir pour établi l'existence d'un contrat, tout comme le fait que le propriétaire d'alors était membre du conseil municipal ; que la commune d'Etalante ne se prévaut pas expressément des dispositions du code civil régissant la prescription acquisitive des biens immobiliers et le dossier ne comporte pas, en toute hypothèse, d'éléments suffisants permettant d'identifier une possession de trente ans continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire, au sens des articles 2272 et 2261 du code civil ; qu'il suit de là qu'au regard des pièces du dossier, et sans qu'il soit besoin de saisir l'autorité judiciaire d'une question préjudicielle en absence de difficulté sérieuse, M. E...doit être regardé comme ayant la qualité de propriétaire de la voie en cause ; que cette voie n'avait, dès lors et, nonobstant la délibération portant classement du 22 septembre 1979, pas la qualité de voie publique, mais celle de voie privée ;

4. Considérant que, dans ces conditions et alors qu'il ressort des pièces du dossier que M. E...s'était, à la date de l'arrêté litigieux, opposé à l'ouverture de cette voie, ainsi que le révèlent les échanges entre son conseil et la commune d'Etalante, la mesure de police le mettant en demeure de supprimer les obstacles qu'il avait installés sur sa propriété pour mettre un terme à la libre circulation sur ce chemin est illégale ; que M. E...est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande ;

Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens :

5. Considérant, en premier lieu, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Cour fasse bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais exposés à l'occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens ; que, dès lors, les conclusions de la commune d'Etalante doivent être rejetées ;

6. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune d'Etalante, partie perdante, le versement au requérant d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1302974 du tribunal administratif de Dijon en date du 30 mai 2014 et l'arrêté du maire d'Etalante en date du 9 octobre 2013 portant mise en demeure à M. E... sont annulés.

Article 2 : La commune d'Etalante versera M. E...une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...E...et à la commune d'Etalante.

Délibéré après l'audience du 27 août 2015, où siégeaient :

- M. Mesmin d'Estienne, président,

- Mme Gondouin, premier conseiller,

- Mme Samson-Dye, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 septembre 2015.

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N° 14LY00768

N° 14LY02656 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY02656
Date de la décision : 17/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Collectivités territoriales - Commune - Attributions - Police - Police de la circulation et du stationnement.

Domaine - Domaine public - Consistance et délimitation.

Voirie - Composition et consistance.


Composition du Tribunal
Président : M. MESMIN d'ESTIENNE
Rapporteur ?: Mme Aline SAMSON DYE
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : CABINET CHATON

Origine de la décision
Date de l'import : 01/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-09-17;14ly02656 ?
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