La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/06/2015 | FRANCE | N°14LY00571

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 19 juin 2015, 14LY00571


Vu la procédure suivante :

L'association Roanne Vivre et Travailler et l'association Les vitrines de Roanne ont demandé à la commission nationale d'aménagement commercial d'annuler la décision de la commission départementale d'aménagement commercial de la Loire du 26 juillet 2013 autorisant la SCI Le Parc Riorges à créer une surface commerciale de 9 949 m² dans la zone ouest de la ZAC des Portes de Riorges II.

Par une décision n° 2038 T - 2040 T du 27 novembre 2013, la commission nationale d'aménagement commercial a annulé cette décision de la commission départeme

ntale d'aménagement commercial.

Par une requête, enregistrée le 25 février...

Vu la procédure suivante :

L'association Roanne Vivre et Travailler et l'association Les vitrines de Roanne ont demandé à la commission nationale d'aménagement commercial d'annuler la décision de la commission départementale d'aménagement commercial de la Loire du 26 juillet 2013 autorisant la SCI Le Parc Riorges à créer une surface commerciale de 9 949 m² dans la zone ouest de la ZAC des Portes de Riorges II.

Par une décision n° 2038 T - 2040 T du 27 novembre 2013, la commission nationale d'aménagement commercial a annulé cette décision de la commission départementale d'aménagement commercial.

Par une requête, enregistrée le 25 février 2014, et deux mémoires enregistrés le 12 décembre 2014, la SCI Le Parc Riorges, représentée par la SELAS Wilhem et associés, demande à la cour :

1°) d'annuler cette décision de la commission nationale d'aménagement commercial du 27 novembre 2013 ;

2°) d'enjoindre à la commission nationale d'aménagement commercial de réexaminer sa demande dans un délai de quatre mois à compter de l'arrêt ;

3°) éventuellement, de surseoir à statuer et poser une question préjudicielle à la cour de justice de l'union européenne ;

4°) de mettre une somme de 5 000 euros à la charge de l'Etat en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision de la commission nationale d'aménagement commercial n'est pas suffisamment motivée dès lors que les éléments retenus sont imprécis et stéréotypés ;

- la décision attaquée indique que le projet se situe entre le centre ville de Riorges et celui de Roanne alors que le projet n'entrainera pas d'effets négatifs sur l'animation de la vie urbaine, l'implantation commerciale pouvant se situer hors du centre ville au regard des objectifs fixés par l'article L. 752-6 du code de commerce et le projet étant situé au sein d'une zone d'activités économiques et correspondant aux orientations du schéma de cohérence territoriale ;

- le rapport n'évoque pas de risque d'atteinte aux commerces de centre ville, les communes ne bénéficient pas actuellement de subventions du FISAC et l'opération " coeur de cité " consiste uniquement à accompagner les commerçants du centre ville durant les travaux du centre ville jusqu'en mai 2013 et n'est pas lié à l'attractivité de ces commerces ;

- en matière de développement durable, le cahier des charges doit être annexé aux baux commerciaux, sera donc opposable aux différentes enseignes, doit seulement être adapté en fonction des éléments techniques qui diffèrent selon les enseignes et le projet bénéficiera de la certification environnementale BREEAM " very good " et les bâtiments respecteront la règlementation thermique RT2012, les ministres concernés ayant émis des avis favorables compte tenu des mesures prises en faveur de l'environnement ;

- le refus de la commission nationale d'aménagement commercial est motivé par la volonté d'assurer une protection du commerce de centre ville ce qui n'est plus permis depuis la loi du 4 août 2000 ;

- la commission nationale d'aménagement commercial ne pouvait lui opposer un refus au motif qu'aucun engagement ferme n'était exprimé en matière de développement durable mais devait lui demander les précisions utiles ;

- le projet répond aux objectifs de la loi puisqu'il aura des effets bénéfiques sur l'animation de la vie urbaine, en luttant contre l'évasion commerciale et en participant au rééquilibrage commercial de l'agglomération, qu'il n'aura pas d'impact sur les flux de circulation, sera desservi par des modes de transport doux et par les transports en commun, que l'intégration du projet dans le paysage a fait l'objet d'une réflexion approfondie et que le projet participe à la protection des consommateurs en améliorant le confort d'achat des habitants de l'agglomération ;

- les dispositions des articles L. 752-1 et suivants du code de commerce sont incompatibles avec le 3° de l'article 10, le 1° de l'article 13 et le 5° de l'article 14 de la directive du 12 décembre 2006 dite directive " services " et l'article 49 du traité sur l'union européenne ;

Par deux mémoires en intervention, enregistrés le 24 mars et le 24 juin 2014, la communauté d'agglomération roannais agglomération, représentée par la Selarl Strat Avocats, conclut, dans le dernier état de ses écritures, au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la SCI Le Parc Riorges en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 25 juin 2014, l'association Les Vitrines de Roanne, représentée par la Selarl Strat Avocats, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la SCI Le Parc Riorges en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.

La requête a été communiquée à la commission nationale d'aménagement commercial et à l'association Roanne Vivre et Travailler, qui n'ont pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Vaccaro-Planchet,

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public,

- les observations de MeA..., représentant la Selarl Pascal Wilhelm et associés, avocat de la SCI Le Parc Riorges, et celles de MeB..., représentant la Selarl Strat avocats, avocat de l'association Les vitrines de Roanne et de la communauté d'agglomération Roannais Agglomération.

1. Considérant que, par une décision du 27 novembre 2013, la commission nationale d'aménagement commercial a annulé, à la demande de l'association Roanne Vivre et Travailler et de l'association Les vitrines de Roanne, la décision du 26 juillet 2013 par laquelle la commission départementale d'aménagement commercial de la Loire avait autorisé la SCI Le Parc Riorges à créer une surface commerciale de 9 949 m², comprenant sept cellules commerciales de moins de 300 m² spécialisées en équipement de la personne, de la maison, en culture et loisirs ainsi qu'en services santé-beauté d'une surface de vente totale de 1 529 m² ainsi que dix cellules spécialisées en équipement de la personne, de la maison et en culture-loisirs représentant une surface de vente totale de 8 420 m², dans la zone ouest de la ZAC des Portes de Riorges II ; que la SCI Le Parc Riorges demande l'annulation de cette décision ;

2. Considérant que la communauté d'agglomération Roannais Agglomération, qui exerce des compétences en matière d'action économique, justifie d'un droit auquel la présente décision est susceptible de préjudicier ; que, dans le dernier état de ses écritures, la communauté d'agglomération conclut au rejet de la requête ; que, par suite, son intervention en défense est recevable ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 750-1 du code de commerce : " Les implantations, extensions, transferts d'activités existantes et changements de secteur d'activité d'entreprises commerciales et artisanales doivent répondre aux exigences d'aménagement du territoire, de la protection de l'environnement et de la qualité de l'urbanisme. Ils doivent en particulier contribuer au maintien des activités dans les zones rurales et de montagne ainsi qu'au rééquilibrage des agglomérations par le développement des activités en centre-ville et dans les zones de dynamisation urbaine. Dans le cadre d'une concurrence loyale, ils doivent également contribuer à la modernisation des équipements commerciaux, à leur adaptation à l'évolution des modes de consommation et des techniques de commercialisation, au confort d'achat du consommateur et à l'amélioration des conditions de travail des salariés " ; qu'aux termes de l'article L. 752-6 du même code : " Lorsqu'elle statue sur l'autorisation d'exploitation commerciale visée à l'article L. 752-1, la commission départementale d'aménagement commercial se prononce sur les effets du projet en matière d'aménagement du territoire, de développement durable et de protection des consommateurs. Les critères d'évaluation sont : 1° En matière d'aménagement du territoire : a) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et de montagne ; b) L'effet du projet sur les flux de transport ; c) Les effets découlant des procédures prévues aux articles L. 303-1 du code de la construction et de l'habitation et L. 123-11 du code de l'urbanisme ; 2° En matière de développement durable : a) La qualité environnementale du projet ; b) Son insertion dans les réseaux de transports collectifs " ;

4. Considérant que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi ; qu'il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce ; que, depuis l'entrée en vigueur de la loi du 4 août 2008, la densité d'équipement commercial de la zone de chalandise concernée ne figure plus au nombre de ces critères ;

5. Considérant que, pour admettre les recours dirigés contre la décision de la commission départementale d'aménagement commercial et refuser l'autorisation d'exploitation commerciale sollicitée par la SCI Le Parc Riorges, la commission nationale d'aménagement commercial s'est fondée sur deux motifs, tirés de ce que " la réalisation de cet ensemble commercial, situé entre le centre ville de Riorges et le centre ville de Roanne, ne participera pas de l'animation de la vie urbaine de ces deux communes " et de ce que " aucun engagement ferme du demandeur n'est exprimé puisqu'une partie non négligeable de la maîtrise des consommations énergétiques est laissée à la responsabilité des preneurs sous la forme d'un cahier des charges " ;

6. Considérant, toutefois, que la loi n'implique pas que le critère de contribution à l'animation de la vie urbaine ne puisse être respecté que par une implantation en centre ville ; qu'il ressort des pièces du dossier que le projet de la SCI Le Parc Riorges est situé au sein d'une ZAC, Les portes de Riorges II, et que le schéma de cohérence territoriale Roannais identifie ce " pôle de Riorges " comme un pôle de développement commercial prioritaire ; que les commerces du centre-ville de Roanne ne bénéficient plus depuis 2012 de subventions du Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (FISAC), dispositif visant à préserver ou développer un tissu d'entreprises de proximité, et que ceux de la commune de Riorges n'en ont bénéficié qu'en 2008 ; que le seul fait que la commune de Roanne a initié un projet de rénovation de son centre-ville, le projet " coeur de cité ", dont les travaux se sont achevés au printemps 2013, ne suffit pas à établir que le projet en litige serait de nature à nuire aux commerces du centre-ville de Roanne ; qu'il ressort au contraire des pièces du dossier, notamment du rapport d'instruction de la commission nationale d'aménagement commercial, que les commerces du centre ville occupent un positionnement différent, moyen et haut de gamme et que la rénovation du centre-ville et le projet en litige présentent des " synergies de nature à améliorer l'attractivité commerciale de l'agglomération de Roanne " ; que, dès lors, la Commission nationale d'aménagement commercial a fait une inexacte application des dispositions précitées en estimant que le projet compromettait l'objectif d'aménagement du territoire ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la SCI Le Parc Riorges s'est engagée dans une démarche de développement durable, en particulier par l'objectif d'une certification environnementale " BREEAM " international, laquelle comprend l'établissement d'un cahier des charges à destination des preneurs ; que le seul fait que ce cahier des charges n'a pas été produit à l'appui du dossier de demande d'autorisation d'exploitation commerciale ne saurait permettre de regarder la SCI comme ne s'engageant pas de façon suffisante, dès lors que les spécificités techniques de ce cahier des charges varieront nécessairement en fonction de l'activité exercée par chaque preneur d'un local commercial et que ce cahier des charges est exigé, encadré et suivi par la certification " BREEAM " ; que dans ces conditions, et alors en outre que le ministre chargé de l'environnement a émis un avis favorable compte tenu de ces éléments, la société requérante est également fondée à soutenir que la commission nationale a fait une inexacte application des dispositions précitées en estimant que le projet compromettait l'objectif de développement durable ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ou de poser une question préjudicielle à la cour de justice de l'union européenne, que la SCI Le Parc Riorges est fondée à demander l'annulation de la décision attaquée ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " ;

10. Considérant que l'annulation de la décision attaquée de la commission nationale d'aménagement commercial implique qu'elle procède à une nouvelle instruction de la demande de la SCI Le Parc Riorges ; qu'en conséquence, il y a lieu d'enjoindre à la commission nationale d'aménagement commercial de procéder à ce réexamen, dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt ;

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par l'association Les Vitrines de Roanne et celle demandée par la communauté d'agglomération soient mises à la charge de la SCI Le Parc Riorges, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance ; qu'il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre la somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat à ce titre ;

DECIDE :

Article 1er : L'intervention de la communauté d'agglomération Roannais Agglomération est admise.

Article 2 : La décision n° 2038 T - 2040 T du 27 novembre 2013 de la commission nationale d'aménagement commercial est annulée.

Article 3 : Il est enjoint à la commission nationale d'aménagement commercial de procéder au réexamen de la demande de la SCI Le Parc Riorges dans un délai de quatre mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 4 : l'Etat versera une somme de 1 500 euros à la SCI Le Parc Riorges au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La demande présentée par l'association les Vitrines de Roanne et celle présentée par la communauté d'agglomération roannais agglomération sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Le Parc Riorges, à l'association Roanne Vivre et Travailler, à l'association Les Vitrines de Roanne, à la communauté d'agglomération Roannais Agglomération et à la commission nationale d'aménagement commercial.

Délibéré après l'audience du 26 mai 2015, à laquelle siégeaient :

M. Riquin, président,

M. Picard, président-assesseur,

Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 juin 2015.

''

''

''

''

1

6

N° 14LY00571

vv


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY00571
Date de la décision : 19/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

14-02-01-05 Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique. Réglementation des activités économiques. Activités soumises à réglementation. Aménagement commercial.


Composition du Tribunal
Président : M. RIQUIN
Rapporteur ?: Mme Véronique VACCARO-PLANCHET
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : SELARL STRAT AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-06-19;14ly00571 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award