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31/03/2015 | FRANCE | N°14LY03282

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 31 mars 2015, 14LY03282


Vu, I, la requête enregistrée le 28 octobre 2014 sous le n° 14LY03282, présentée pour M. A...C..., domicilié..., qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1404624 du 24 septembre 2014 du tribunal administratif de Lyon qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation d'un arrêté du 28 janvier 2014, par lequel le préfet du Rhône a refusé de renouveler l'autorisation provisoire de séjour dont il bénéficiait en vertu de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire frança

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2°) de prononcer l'annulation de l...

Vu, I, la requête enregistrée le 28 octobre 2014 sous le n° 14LY03282, présentée pour M. A...C..., domicilié..., qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1404624 du 24 septembre 2014 du tribunal administratif de Lyon qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation d'un arrêté du 28 janvier 2014, par lequel le préfet du Rhône a refusé de renouveler l'autorisation provisoire de séjour dont il bénéficiait en vertu de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a désigné le pays de destination ;

2°) de prononcer l'annulation de l'arrêté du 28 janvier 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer dans le délai d'un mois l'autorisation de séjour sollicitée, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat à verser à son conseil la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, à charge pour Me B...de renoncer à percevoir le part contributive de l'Etat au financement de l'aide juridictionnelle ;

Le requérant soutient qu'alors que le médecin de l'agence régionale de santé avait estimé qu'il n'existe pas au Kosovo de traitements adaptés à la pathologie de l'enfant Skurta, le préfet, pour s'écarter de cet avis, s'est fondé sur des informations anciennes et non probantes émanant de l'ambassade de France au Kosovo ; que, selon les laboratoires qui les ont mis au point, les médicaments L. Thyroxine et Levothyrox ne sont pas disponibles au Kosovo ; que le préfet n'a pas utilement contredit l'avis du médecin de l'Agence régionale de santé selon lequel l'enfant ne pouvait effectuer sans risque le voyage de retour ; que les dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues ; que plusieurs membres de sa famille sont en séjour régulier en France ; qu'en refusant de renouveler son titre de séjour temporaire, compte tenu de l'état de santé de son enfant, le préfet a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale protégé par l'article 8 de la convention européenne de droits de l'homme et des libertés fondamentales et a méconnu les stipulations des l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Lyon (section administrative appel) en date du 5 novembre 2014 admettant M. A...C...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été notifiée le 8 janvier 2015 au préfet du Rhône, qui n'a pas produit d'observations ;

Vu, II, enregistrée le 28 octobre 2014 sous le n° 14LY03283, la requête présentée pour M. A...C..., domicilié..., qui demande à la cour :

1) de prononcer le sursis à exécution du jugement n° 1404624 du tribunal administratif de Lyon du 24 septembre 2014 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation d'un arrêté du 28 janvier 2014, par lequel le préfet du Rhône a refusé de renouveler l'autorisation provisoire de séjour dont il bénéficiait en vertu de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a désigné le pays de destination ;

2) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler jusqu'à l'intervention de l'arrêt statuant au fond ;

3) de condamner l'Etat à verser à son conseil la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, à charge pour Me B...de renoncer à percevoir le part contributive de l'Etat au financement de l'aide juridictionnelle ;

Le requérant soutient que l'exécution du jugement attaqué est susceptible d'entraîner des conséquences difficilement réparables ; que sa requête au fond soulève des moyens sérieux ; que la décision l'obligeant à quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de celle refusant le séjour ;

Vu le jugement dont le sursis à exécution est demandé ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Lyon (section administrative appel) en date du 5 novembre 2014 admettant M. A...C...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été notifiée le 8 janvier 2015 au préfet du Rhône, qui n'a pas produit d'observations ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 et publiée par décret du 8 octobre 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mars 2015 :

- le rapport de M. Picard, président ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

1. Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre le même jugement ; qu'il a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt ;

2. Considérant que M. A...C..., ressortissant kosovar né en 1986 à Mitrovica (ex-République fédérative socialiste de Yougoslavie), est entré en France, selon ses déclarations, en novembre 2008, accompagné de son épouse, Mme E...D...et de leurs 5 enfants ; qu'un sixième enfant, Skurta, est né en France en avril 2010 ; que, par un arrêté du 28 janvier 2014, le préfet du Rhône a refusé de renouveler l'autorisation provisoire de séjour dont il bénéficiait en vertu de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en qualité d'accompagnant de Skurta, atteint d'une maladie endocrinienne grave, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a désigné le pays de destination ; que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de M. C...tendant à l'annulation de cet arrêté ; que, par deux requêtes distinctes, l'intéressé a relevé appel de ce jugement et en a demandé le sursis à exécution ;

3. Considérant que selon l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour peut être délivrée à l'un des parents étranger de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313- 11, sous réserve qu'il justifie résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. / L'autorisation provisoire de séjour mentionnée au premier alinéa, qui ne peut être d'une durée supérieure à six mois, est délivrée par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...), dans les conditions prévues au 11° de l'article L. 313-11 (...) " ; que cette dernière disposition intéresse " l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire (...) " ; que l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 susvisé prévoit que, au vu d'un " rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : / - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; / - la durée prévisible du traitement. Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis est transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé. (...) " ;

4. Considérant que, dans son avis rendu le 9 septembre 2013, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé de Skurta nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'il n'existait pas de traitement approprié dans son pays d'origine, que les soins nécessaires, qui présentent un caractère de longue durée, devaient être poursuivis pendant 12 mois et que cet enfant ne pouvait voyager sans risque vers son pays d'origine ;

5. Considérant que si l'intéressé fait valoir que le traitement de l'enfant, constitué de L. Thyroxine, ne serait pas disponible sous forme de gouttes au Kosovo, il ressort des pièces du dossier, et notamment de la liste des médicaments actualisée du 2 décembre 2014 de l'agence de médicaments du Kosovo, que ce produit existe dans ce pays, rien dans les pièces fournies ne permettant d'affirmer que son administration à des enfants, autrement que sous forme de gouttes, serait absolument impossible et que, de ce fait, Skurta ne pourrait bénéficier du moindre traitement approprié au Kosovo ; que, toutefois, le préfet, qui devait s'en assurer, n'apporte aucun élément qui permettrait de remettre en cause l'appréciation portée par le médecin de l'agence régionale de santé sur l'impossibilité pour Skurta de voyager sans risque vers le Kosovo ; qu'il n'est ni allégué ni établi que M. C...ne résiderait pas habituellement en France avec son enfant ni qu'il ne subviendrait pas à son entretien ou à son éducation ; que, dans ces conditions, le préfet ne pouvait pas, sans méconnaître les dispositions précitées de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, refuser à M. C...l'autorisation de séjourner à ce titre sur le territoire ; qu'il est ainsi fondé à demander l'annulation du refus de séjour qui lui a été opposé mais également, par voie de conséquence, l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français dont il a fait l'objet et de la décision fixant le pays de destination ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé " ;

8. Considérant que, eu égard au motif retenu, il y a lieu d'enjoindre au préfet du Rhône de délivrer à l'intéressé, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, l'autorisation provisoire de séjour prévue à l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

9. Considérant que le présent arrêt statuant sur la requête tendant à l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Lyon du 24 septembre 2014, les conclusions de M. C...tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont sans objet ;

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que l'avocat de M. C...renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée, de mettre à la charge de l'Etat le paiement à celui-ci, sur le fondement des mêmes dispositions combinées avec celles de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, une somme de 1 000 euros ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution présentées par M.C....

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon du 24 septembre 2014 est annulé.

Article 3 : L'arrêté du préfet du Rhône du 28 janvier 2014 est annulé.

Article 4 : Il est enjoint au préfet du Rhône de délivrer à M. C...une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 5 : L'Etat versera à l'avocat de M. C...une somme de 1 000 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 10 mars 2015, à laquelle siégeaient :

M. Picard, president de la formation de jugement,

M. Chenevey, premier conseiller,

Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 31 mars 2015.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY03282
Date de la décision : 31/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: M. Vincent-Marie PICARD
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : MATARI

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-03-31;14ly03282 ?
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