Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 juin et 23 juillet 2013, présentés pour la société Félix transports, dont le siège est 23 rue Douaumont à Villeurbanne (69100) ;
La société Félix transports demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1005098 du tribunal administratif de Lyon du 28 mars 2013 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 7 juin 2010 par laquelle le conseil municipal de la commune de Chaponnay (Rhône) a autorisé son maire à procéder à la vente à la société Viallon logistiques de la parcelle cadastrée A 1655 ;
2°) d'annuler cette délibération ;
3°) de condamner la commune de Chaponnay à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La société Félix transports soutient que :
- la délibération litigieuse méconnaît la décision du 9 décembre 2009 par laquelle la commune a préempté la parcelle en cause, cette décision ayant en effet été prise dans le but de lui vendre cette parcelle ;
- ladite décision de préemption constitue dès lors une décision créatrice de droit à son égard, qui ne pouvait être retirée que dans un délai et selon une procédure contradictoire spécifiques ;
- les raisons invoquées par la commune pour écarter sa candidature sont erronées en fait et entachées d'erreur manifeste, dès lors qu'elle n'avait aucune obligation de porter dès le début l'opération de financement de l'acquisition et, qu'en tout état de cause, elle n'a nullement manqué à une telle obligation ;
Vu le jugement et la délibération attaqués ;
Vu le mémoire, enregistré le 18 septembre 2013, présenté pour la société Viallon logistiques, qui demande à la cour :
- de rejeter la requête ;
- d'annuler l'article 2 du jugement attaqué en tant que, par cet article, le tribunal a rejeté les conclusions qu'elle a présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
- au titre de ce même article, de condamner la société Félix transports à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de la procédure de première instance et une somme de 3 000 euros au titre de la procédure d'appel ;
La société Viallon logistiques soutient que :
- la requête n'est pas recevable, dès lors en effet que les indications données par la requérante ne permettent pas d'apprécier l'existence et le statut de la personne morale, ainsi que la qualité à agir de son représentant ;
- subsidiairement, les moyens invoqués par la société requérante ne sont pas fondés ;
- l'équité et la situation économique de la société Félix transports ne permettaient pas au tribunal de ne pas condamner cette société au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu le mémoire, enregistré le 18 septembre 2013, présenté pour la société Viallon emballage, qui demande à la cour :
- de rejeter la requête ;
- d'annuler l'article 2 du jugement attaqué en tant que, par cet article, le tribunal a rejeté les conclusions qu'elle a présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
- au titre de ce même article, de condamner la société Félix transports à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de la procédure de première instance et une somme de 3 000 euros au titre de la procédure d'appel ;
La société Viallon emballage soutient que :
- la requête n'est pas recevable, dès lors en effet que les indications données par la requérante ne permettent pas d'apprécier l'existence et le statut de la personne morale, ainsi que la qualité à agir de son représentant ;
- subsidiairement, les moyens invoqués par la société requérante ne sont pas fondés ;
- l'équité et la situation économique de la société Félix transports ne permettaient pas au tribunal de ne pas condamner cette société au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu le mémoire, enregistré le 26 novembre 2013, présenté pour la commune de Chaponnay, représentée par son maire, qui demande à la cour :
- de rejeter la requête ;
- de condamner la société Félix transports à lui verser une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La commune soutient que les moyens invoqués par la société requérante ne sont pas fondés ;
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 30 octobre 2013, la clôture de l'instruction a été fixée au 27 novembre 2013 ;
Vu le mémoire, enregistré le 27 novembre 2013, présenté pour la société Félix transports, tendant aux mêmes fins que précédemment et, en outre, à la condamnation des sociétés Viallon logistiques et Viallon emballage à lui verser chacune une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La société requérante soutient, en outre, que :
- elle a justifié en première instance de la recevabilité de son recours ;
- les sociétés Viallon logistiques et Viallon emballage, qui ne sont pas parties à l'instance, ne peuvent dès lors bénéficier d'une condamnation en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, en outre, en tout état de cause, ces sociétés ne subissent aucun frais au titre du présent contentieux, dont le coût est assumé par la commune, et ne peuvent demander une condamnation au titre de la procédure de première instance et au titre de la procédure d'appel ;
En application de l'article R. 613-4 du code de justice administrative, par une ordonnance du 29 novembre 2013, l'instruction a été rouverte ;
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 7 juillet 2014, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 septembre 2014 ;
Vu le mémoire, enregistré le 4 août 2014, présenté pour la société Viallon logistiques, tendant aux mêmes fins que précédemment ;
Vu le mémoire, enregistré le 4 août 2014, présenté pour la société Viallon emballage, tendant aux mêmes fins que précédemment ;
Vu le mémoire, enregistré le 17 septembre 2014, présenté pour la société Félix transports, qui, n'apportant aucun élément nouveau, n'a pas été communiqué ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 9 janvier 2015, présentée pour la société Félix transports ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 janvier 2015 :
- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;
- les observations de Me Xynopoulos, avocat de la Société Félix transports, celles de Me A...représentant le cabinet Léga-Cité, avocat de la commune de Chaponnay, et celles de Me Gaucher, avocat des sociétés Viallon logistiques et Viallon emballage ;
1. Considérant que, par un jugement du 28 mars 2013, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de la société Félix transports tendant à l'annulation de la délibération du 7 juin 2010 par laquelle le conseil municipal de la commune de Chaponnay a autorisé son maire à procéder à la vente à la société Viallon logistiques de la parcelle cadastrée A 1655 ; que la société Félix transports relève appel de ce jugement ; que, par la voie de l'appel incident, les sociétés Viallon logistiques et Viallon emballage demandent à la cour d'annuler l'article 2 du jugement attaqué en tant que, par cet article, le tribunal a rejeté les conclusions qu'elles ont présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Sur les mémoires produits par les sociétés Viallon logistiques et Viallon emballage :
2. Considérant que la requête a été communiquée par la cour à la société Viallon logistiques, bénéficiaire de la vente autorisée par la délibération litigieuse ; qu'en cette qualité, cette société est partie à l'instance, contrairement à ce que soutient la société Félix transports ;
3. Considérant qu'à l'inverse, la requête n'a pas été communiquée à la société Viallon emballage ; que celle-ci a néanmoins produit un mémoire ; qu'elle exerce une activité dans les bâtiments situés sur la parcelle en litige ; qu'elle a donc intérêt au maintien de la délibération contestée ; que son intervention doit, par suite, être admise ;
Sur la légalité de la délibération contestée :
4. Considérant qu'aux termes des dispositions alors applicables de l'article L. 213-11 du code de l'urbanisme : " Les biens acquis par exercice du droit de préemption doivent être utilisés ou aliénés aux fins définies à l'article L. 210-1. L'utilisation ou l'aliénation d'un bien au profit d'une personne privée autre que le concessionnaire d'une opération d'aménagement ou qu'une société d'habitations à loyer modéré doit faire l'objet d'une délibération motivée du conseil municipal (...) " ;
5. Considérant, en premier lieu, que la délibération litigieuse rappelle les motifs pour lesquels le terrain avait été préempté, énonce avec précision la consistance de ce terrain, le prix auquel la commune se propose de le vendre, l'identité de l'acquéreur ainsi que les raisons de la cession ; qu'elle est ainsi suffisamment motivée ;
6. Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de ce que la délibération litigieuse, qui autorise la vente de la parcelle cadastrée A 1655 à la société Viallon logistiques, méconnaît la décision du 9 décembre 2009 par laquelle le maire de la commune de Chaponnay a préempté cette parcelle, doit être écarté par adoption des motifs du tribunal ;
7. Considérant, en troisième lieu, que, même si la décision de préemption du 9 décembre 2009 est motivée par la volonté de la commune de Chaponnay de revendre la parcelle préemptée à la société Félix transports, afin de favoriser le développement de cette dernière et, par suite, de promouvoir l'emploi et l'attractivité de la zone industrielle dans laquelle se situe cette parcelle, la délibération contestée, dont l'objet est différent, n'a pas pour objet ou pour effet de retirer cette décision, même partiellement, en tant que celle-ci prévoit ainsi une revente à la société Félix transports ; qu'en conséquence, le moyen tiré de ce que cette délibération procèderait au retrait irrégulier de cette décision est inopérant ;
8. Considérant, en quatrième et dernier lieu, que la délibération litigieuse indique que la société Félix transports n'a pu répondre aux propositions d'acquisition, alors que " la commune devait faire face au plus tard le 9 juin (2010) au paiement du prix du bien préempté " et " ne (pouvait) différer davantage la cession du bâtiment, et assumer trop longtemps le portage financier de l'opération, sans compromettre les équilibres budgétaires ", et, qu'en conséquence, un nouvel acquéreur a été choisi, en l'occurrence la société Viallon logistiques, qui présente un projet susceptible de répondre à l'intérêt communal ;
9. Considérant qu'il est constant que la commune de Chaponnay, qui a préempté la parcelle cadastrée A 1165 en vue de la revendre, n'a jamais envisagé de conserver ce bien ; que les dispositions alors applicables de l'article L. 213-14 du code de l'urbanisme imposaient à la commune de régler au vendeur le prix d'achat de cette parcelle, d'un montant de 2,7 millions d'euros, dans un délai de six mois à compter de la décision de préemption, soit le 9 juin 2010 au plus tard ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des échanges de courriers intervenus entre le notaire de la commune de Chaponnay et celui de la société Félix transports, qu'en raison des garanties sollicitées par cette société, mais aussi de ses difficultés à obtenir un prêt pour le financement de l'opération, aucun accord n'était sérieusement envisagé entre la commune et la société au moment de ladite échéance ; qu'en particulier, dans un courrier du 26 mai 2010 adressé au notaire de la commune de Chaponnay, le notaire de la société Félix transports indique que l'accord des établissements financiers pour le déblocage des fonds nécessitant l'apport de garanties, il serait judicieux que la commune s'engage, en cas de résolution ultérieure de la vente, à rembourser la société à hauteur du prix du marché à la date du remboursement et, au minimum, à hauteur de la valeur d'achat augmentée du coût des travaux engagés sur le terrain ; qu'à l'inverse, la société Viallon logistiques ne posait aucune condition susceptible de retarder l'achat, était en mesure de s'acquitter immédiatement du prix et, par ailleurs, justifiait d'un projet permettant de répondre à l'objectif de la commune, ayant motivé la préemption, de promouvoir l'emploi et l'attractivité de la zone industrielle dans laquelle se situe la parcelle ; que, dans ces conditions, même si la décision de préemption prévoyait initialement une revente à la société Félix transports, en décidant en définitive de vendre le terrain qui a été préempté à la société Viallon logistiques, le conseil municipal de la commune de Chaponnay n'a pas entaché sa décision d'erreur de fait ou d'erreur manifeste d'appréciation ;
10. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par les sociétés Viallon logistiques et Viallon emballage, la société Félix transports n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;
Sur l'appel incident des sociétés Viallon logistiques et Viallon emballage :
11. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en estimant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y avait pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par les sociétés Viallon logistiques et Viallon emballage au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le tribunal ait fait une inexacte application des dispositions de cet article ; que, par suite, l'appel incident de ces sociétés doit être rejeté ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Chaponnay et les sociétés Viallon logistiques et Viallon emballage, qui ne sont pas, dans la présente instance, parties perdantes, soient condamnées à payer à la société Félix transports la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la société requérante le versement d'une somme au bénéfice de la commune de Chaponnay et des sociétés Viallon logistiques et Viallon emballage sur le fondement de ces mêmes dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : L'intervention de la société Viallon emballage est admise.
Article 2 : La requête de la société Félix transports est rejetée.
Article 3: Les conclusions de la commune de Chaponnay et des sociétés Viallon logistiques et Viallon emballage tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4: Le présent arrêt sera notifié à la société Félix transports, à la commune de Chaponnay et aux sociétés Viallon logistiques et Viallon emballage.
Délibéré après l'audience du 6 janvier 2015, à laquelle siégeaient :
M. Picard, président de la formation de jugement,
M. Chenevey, premier conseiller,
Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 27 janvier 2015.
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N° 13LY01579
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