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11/07/2014 | FRANCE | N°14LY00738

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 11 juillet 2014, 14LY00738


Vu la requête, enregistrée le 10 mars 2014, présentée par le préfet de la Savoie, qui demande à la cour d'annuler l'ordonnance n° 1400709 du 28 février 2014 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la suspension de l'arrêté du 30 octobre 2013 du maire de la commune de Val d'Isère accordant à M. D...C...un permis de construire un chalet au lieu-dit " Le Bosset " ;

Le préfet soutient qu'une partie importante du bâtiment projeté se situe en zone N du plan de prévention des risques naturels ; que le classement

du terrain d'assiette du projet en zone N par le plan de prévention des ri...

Vu la requête, enregistrée le 10 mars 2014, présentée par le préfet de la Savoie, qui demande à la cour d'annuler l'ordonnance n° 1400709 du 28 février 2014 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la suspension de l'arrêté du 30 octobre 2013 du maire de la commune de Val d'Isère accordant à M. D...C...un permis de construire un chalet au lieu-dit " Le Bosset " ;

Le préfet soutient qu'une partie importante du bâtiment projeté se situe en zone N du plan de prévention des risques naturels ; que le classement du terrain d'assiette du projet en zone N par le plan de prévention des risques naturels est justifié et implique son inconstructibilité ; que le nouveau plan de prévention des risques de la commune, approuvé le 21 novembre 2013 a modifié les contours de la zone N de sorte que le projet se trouverait aujourd'hui presqu'en totalité en zone N ;

Vu l'ordonnance et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 avril 2014, présenté pour la commune de Val d'Isère, représentée par son maire en exercice, qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune de Val d'Isère fait valoir que le texte du recours gracieux du préfet n'a pas été notifié à M.C... ; que le permis de construire comporte des prescriptions spéciales pour les parties du bâtiment exposées aux risques d'avalanches ; que le classement d'une partie de la parcelle en zone rouge est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et que la carte du plan de prévention des risques ne vise qu'un aléa moyen ; que rien n'impose que les terrains non urbanisés exposés à un risque moyen soient inconstructibles ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 mai 2014, présenté pour M. D...C..., domicilié..., qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. C...fait valoir que le préfet ne lui a pas adressé le texte de son recours gracieux ; que, selon la carte de zonage, le terrain d'assiette du projet est situé en zone bleue et non en zone rouge du plan de prévention des risques ; que le terrain est exposé à un risque modéré d'avalanche ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 juin 2014, présenté par le préfet de la Savoie, qui conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Il ajoute que son recours gracieux a été notifié au bénéficiaire du permis attaqué ; que le plan de prévention des risques naturels atteste que le terrain d'assiette du projet est également soumis à un risque de chute de blocs ;

Vu les notes en délibéré, enregistrées le 8 et le 10 juillet 2014, présentées pour la commune de Val d'Isère ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 10 juillet 2014, présentée pour M.C... ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 juillet 2014 :

- le rapport de Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- et les observations de MeB..., représentant la Selarl Adamas affaires publiques, avocat de la commune de Val d'Isère et de MeA..., représentant le cabinet CDMF, avocat de M. C... ;

1. Considérant que, par une ordonnance du 28 février 2014, le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande du préfet de la Savoie tendant à la suspension de l'arrêté du 30 octobre 2013 par lequel le maire de la commune de Val d'Isère a accordé à M. D...C...un permis de construire un chalet comportant cinq logements sur la parcelle cadastrée section AC n° 170 au lieu-dit " Le Bosset " ; que le préfet de la Savoie relève appel de ce jugement ;

Sur la recevabilité de la demande de suspension présentée par le préfet de la Savoie devant le tribunal administratif de Grenoble :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre (...) d'un permis de construire (...) le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. (...) L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif. La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours. La notification du recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux. " ;

3. Considérant que, par un courrier du 10 décembre 2013, reçu par M. C...le 13 décembre suivant, le préfet de la Savoie a notifié le recours gracieux du même jour qu'il a formé auprès du maire de la commune de Val d'Isère à l'encontre du permis litigieux ; que M. C... se plaint de ce que ce courrier n'était pas accompagné d'une copie du recours gracieux ; que, cependant, selon les termes mêmes de ce courrier, une copie du recours gracieux figurait en pièce jointe, qui se présentait, selon le préfet, sous la forme d'une feuille recto verso, l'original étant constitué de deux feuilles ; que, dans ces conditions, et alors que M. C... ne soutient pas avoir demandé communication au préfet de la pièce jointe, prétendument manquante, le seul fait que le tarif d'affranchissement du pli préfectoral serait insuffisant ne saurait permettre de démontrer que ce dernier ne contenait pas une copie du texte du recours gracieux ; que, dès lors, le recours gracieux formé par le préfet à l'encontre de l'arrêté attaqué a eu pour effet de conserver le délai de recours contentieux ; que, par suite, le déféré formé par le préfet de la Savoie contre le permis en cause, qui a été enregistré au greffe du tribunal le 12 février 2014, n'était pas tardif ; qu'en conséquence, et contrairement à ce que soutient M. C..., la demande de suspension de ce permis, dont le préfet a saisi le tribunal le même jour, était recevable ;

Sur le bien-fondé de la demande de suspension :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 554-1 du code de justice administrative : " Les demandes de suspension assortissant les requêtes du représentant de l'Etat dirigées contre les actes des communes sont régies par le 3e alinéa de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales (...). " ; que cet alinéa dispose qu'il est fait droit à la demande de suspension du représentant de l'Etat "si l'un des moyens invoqués paraît, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'acte attaqué." ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'une grande partie de la construction projetée est implantée sur un terrain situé en zone N du plan de prévention des risques naturels alors en vigueur, approuvé le 27 avril 2006, où les constructions nouvelles ne sont pas autorisées ;

6. Considérant que la carte des aléas jointe à ce plan place la parcelle en cause dans un secteur affecté d'un aléa moyen d'avalanche ; qu'il ressort, par ailleurs, des pièces produites par le préfet en appel, notamment un extrait du plan de prévention des risques, que ce terrain est également exposé à un risque peu fréquent de chutes de blocs de pierres, mais d'intensité moyenne ou très forte ; que, dans ce contexte, et alors même que la note technique d'un expert neige-avalanche produite par la commune de Val d'Isère indique que le classement en zone inconstructible du terrain en cause ne trouverait pas de justification au regard du risque d'avalanche, le classement d'une partie du terrain d'assiette du projet en zone N du plan ne procède pas, en l'état de l'instruction, d'une erreur manifeste d'appréciation ;

7. Considérant qu'il apparaît ainsi que, compte tenu de ce qui précède, le permis de construire déféré autorise une construction dont le terrain d'assiette se trouve en partie inclus dans un secteur inconstructible ; que dans ces conditions, le moyen tiré de ce que ce permis a été délivré en méconnaissance du plan de prévention des risques naturels, paraît, en l'état de l'instruction, de nature à créer un doute sérieux quant à sa légalité ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de la Savoie est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ; que ces dispositions font obstacle à ce que la somme demandée par la commune de Val d'Isère et celle demandée par M. C...au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens soient mises à la charge de l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance ;

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 1400709 du 28 février 2014 du juge des référés du tribunal administratif de Grenoble est annulée.

Article 2 : L'arrêté du maire de la commune de Val d'Isère du 30 octobre 2013 est suspendu jusqu'à ce que le tribunal administratif de Grenoble ait sur le déféré du préfet de la Savoie tendant à l'annulation de ce permis de construire.

Article 3 : Les conclusions de M. C...et celles de la commune de Val d'Isère tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre du logement et de l'égalité des territoires, à la commune de Val d'Isère et à M. D...C....

Copie en sera adressée au préfet de la Savoie.

Délibéré après l'audience du 8 juillet 2014, à laquelle siégeaient :

M. Picard, président,

M. Chenevey, premier conseiller,

Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 juillet 2014.

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N° 14LY00738

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY00738
Date de la décision : 11/07/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Collectivités territoriales - Dispositions générales - Contrôle de la légalité des actes des autorités locales - Déféré assorti d'une demande de sursis à exécution.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Nature de la décision - Octroi du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: Mme Véronique VACCARO-PLANCHET
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : CDMF-AVOCATS AFFAIRES PUBLIQUES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-07-11;14ly00738 ?
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