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05/06/2014 | FRANCE | N°11LY24639

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 05 juin 2014, 11LY24639


Vu l'ordonnance par laquelle, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, le président de la Section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué le jugement de l'affaire à la cour ;

Vu le courrier du 10 décembre 2011, enregistré le 15 décembre 2011, présenté par M. D... E..., domicilié..., ainsi que la requête, enregistrée le 14 mai 2012, présentée pour M. E...;

M. E...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902780 du tribunal administratif de Nîmes du 21 octobre 2011 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de

l'arrêté du 14 août 2009 par lequel le maire de la commune d'Avignon a délivré un p...

Vu l'ordonnance par laquelle, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, le président de la Section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué le jugement de l'affaire à la cour ;

Vu le courrier du 10 décembre 2011, enregistré le 15 décembre 2011, présenté par M. D... E..., domicilié..., ainsi que la requête, enregistrée le 14 mai 2012, présentée pour M. E...;

M. E...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902780 du tribunal administratif de Nîmes du 21 octobre 2011 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 août 2009 par lequel le maire de la commune d'Avignon a délivré un permis de construire à M. F...en vue de l'extension d'une maison d'habitation existante ;

2°) d'annuler ce permis de construire ;

3°) de condamner la commune d'Avignon à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. E...soutient que l'extension autorisée par le permis de construire litigieux dépasse la limite maximale de 30 % autorisée par l'article 3 UC 2 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune d'Avignon ; que la majoration de coefficient d'occupation des sols de 20 % autorisée par la délibération du 10 décembre 2008 n'est pas applicable en l'espèce ; qu'en outre, la demande de permis est entachée de fraude, la surface aménageable des combles de l'extension projetée n'ayant pas été déclarée dans la surface hors oeuvre nette ; que cette fraude est par elle-même de nature à entraîner l'illégalité du permis de construire en litige ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 novembre 2012, présenté pour la commune d'Avignon, représentée par son maire, qui demande à la cour :

- de rejeter la requête ;

- de condamner M. E...à lui verser une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune soutient que :

- la requête est irrecevable, M. E...n'ayant pas respecté les formalités de notification prescrites par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- subsidiairement, les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés ;

Vu les mémoires, enregistrés les 9 avril et 31 mai 2013, présentés pour M.E..., tendant aux mêmes fins que précédemment ;

Le requérant soutient, en outre, que :

- il a satisfait aux dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme et sa requête est dès lors recevable ;

- le projet en litige, qui n'est pas implanté à l'alignement de l'avenue des Sources, méconnaît par suite l'article 3 UC 6 du règlement du plan d'occupation des sols ;

- contrairement à ce qu'impose l'article 3 UC 12 du même règlement, ce projet, qui entraîne la création d'un nouveau logement, ne prévoit aucune place de stationnement ;

- dans l'hypothèse dans laquelle la construction projetée serait regardée comme une construction nouvelle, et non comme une simple extension du bâtiment existant, l'article 3 UC 5 du règlement du plan d'occupation des sols s'opposerait au projet, la façade du terrain d'assiette sur la voie principale présentant une longueur inférieure à 25 mètres ;

- l'article 3 UC 6 du même règlement serait également méconnu, dès lors que le projet n'est pas implanté à l'alignement de la voie publique ;

- enfin, les dispositions de l'article 3 UC 7 imposant une implantation d'une limite latérale à l'autre ne seraient de même pas respectées ;

Vu le mémoire, enregistré le 3 juillet 2013, présenté pour M.F..., qui demande à la cour :

- de rejeter la requête ;

- de condamner M. E...à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. F...soutient que :

- M. E...n'ayant pas respecté les formalités de notification prescrites par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, sa requête est dès lors irrecevable ;

- le mémoire qui a été enregistré le 15 décembre 2011 n'a pas été introduit par le ministère d'un avocat ;

- les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés ;

Vu le mémoire, enregistré le 15 juillet 2013, présenté pour la commune d'Avignon, représentée par son maire, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

La commune soutient, en outre, que le mémoire qui a été enregistré le 15 décembre 2011 n'a pas été présenté par le ministère d'un avocat ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 12 décembre 2013, la clôture de l'instruction a été fixée au 6 janvier 2014 ;

En application de l'article R. 613-4 du code de justice administrative, par une ordonnance du 14 mars 2014, l'instruction a été rouverte ;

Vu la décision du 14 janvier 2012 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Marseille (Section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. E...;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 23 mai 2014, présentée pour la commune d'Avignon ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mai 2014 :

- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- les observations de MeC..., représentant la SCP Amiel-Susini, avocat de M. E..., celles de Me A...substituant Me Hequet, avocat de la commune d'Avignon, et en tant qu'avocat de M. F...;

1. Considérant que, par un jugement du 21 octobre 2011, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande de M. E...tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 août 2009 par lequel le maire de la commune d'Avignon a délivré un permis de construire à M. F...en vue de l'extension d'une maison d'habitation existante ; que M. E...relève appel de ce jugement ;

Sur la recevabilité de la requête :

2. Considérant, d'une part, qu'en vertu de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, l'auteur d'un recours dirigé contre un permis de construire ou contre un jugement refusant d'annuler une telle décision doit, à peine d'irrecevabilité de ce recours, notifier dans le délai de quinze jours ce dernier à l'auteur de la décision et à son bénéficiaire ;

3. Considérant, d'autre part, qu'en vertu de l'article 39 du décret susvisé du 19 décembre 1991, lorsqu'une demande d'aide juridictionnelle est adressée au bureau d'aide juridictionnelle avant l'expiration du délai imparti pour le dépôt du recours, ce délai est interrompu ; que selon ces mêmes dispositions : " un nouveau délai court à compter du jour de la réception par l'intéressé de la notification de la décision du bureau d'aide juridictionnelle " ;

4. Considérant qu'en raison des dispositions particulières régissant l'octroi de l'aide juridictionnelle, lesquelles ont pour objet de rendre effectif le principe à valeur constitutionnelle du droit d'exercer un recours, l'irrecevabilité instituée par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ne peut être opposée à un requérant qui a sollicité le bénéfice de cette aide que pour autant que, dans le délai de quinze jours suivant le dépôt de sa requête présentée dans le délai prorogé par sa demande d'aide juridictionnelle, il n'a pas notifié cette requête au titulaire de l'autorisation contestée ainsi qu'à l'autorité administrative qui a délivré cette autorisation ;

5. Considérant qu'il ressort du dossier de première instance que le jugement attaqué a été notifié le 27 octobre 2011 à M. E...; que, si celui-ci a adressé un courrier à la cour le 10 décembre 2011, qui a été enregistré au greffe le 15 décembre 2011, ce courrier, qui avait seulement pour objet d'appuyer la demande d'aide juridictionnelle que M. E...était sur le point de présenter, ne constituait pas une requête ; que, le 20 décembre 2011, dans le délai du recours contentieux, M. E...a présenté une demande d'aide juridictionnelle ; que, par une décision du 12 janvier 2012, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé l'aide juridictionnelle totale à M. E...; que, par un courrier du 28 février 2012, distribué le 29 février 2012, la cour a informé ce dernier que l'avocat désigné pour le représenter devrait présenter un mémoire dans un délai de deux mois ; qu'une copie de ce courrier a également été transmise le 28 février 2012 à cet avocat ; que, toutefois, l'avocat ainsi désigné, puis son successeur, ont indiqué qu'ils n'acceptaient pas d'assurer la défense de M. E...; que le délai de régularisation a été interrompu, à compter de ces refus, pour ne recommencer à courir qu'à compter de la notification de la décision du bureau d'aide juridictionnelle nommant un nouveau conseil ; que cette désignation est intervenue par une décision du 4 avril 2012 du bureau d'aide juridictionnelle ; que le nouveau conseil de M. E...a présenté un mémoire le 14 mai 2012, soit nécessairement dans ledit nouveau délai de deux mois ; que la requête a été notifiée à la commune d'Avignon et à M. F...le 22 mai 2012, dans le délai de 15 jours à compter de ce mémoire imposé par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ; que cette notification n'avait pas à comporter une copie du courrier précité de M. E...du 10 décembre 2011 ; que la circonstance que la requête n'ait pas été notifiée à la SCI Treilles des Sources, à laquelle le permis de construire litigieux a été transféré par un arrêté du 9 décembre 2011, est sans incidence, la notification étant régulièrement accomplie au bénéficiaire de l'autorisation indiqué par l'arrêté litigieux ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la fin de non-recevoir tirée de ce que M. E...n'a pas respecté la formalité de notification de sa requête prescrite par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme doit être écartée ;

7. Considérant que, si la commune d'Avignon et M. F...font également valoir que la requête est irrecevable à défaut d'avoir été présentée par le ministère d'un avocat, il résulte de ce qui précède que cette fin de non-recevoir manque en fait ;

Sur la recevabilité de la demande devant le tribunal :

8. Considérant que la fin de non-recevoir soulevée en première instance tirée de ce que la décision attaquée n'a pas été produite manque en fait, M. E...ayant produit l'arrêté litigieux en annexe du mémoire qui a été enregistré au greffe du tribunal le 8 avril 2010 ;

Sur la légalité de l'arrêté litigieux :

9. Considérant que le projet litigieux de M. F...est présenté dans la demande de permis de construire comme constituant une extension d'une construction existante située sur le terrain d'assiette de ce projet ; que, toutefois, pour apprécier la légalité du permis de construire en litige, il appartient à la cour de s'attacher, non à la qualification donnée au projet par M. F..., mais à la nature de la construction telle qu'elle ressort des pièces fournies à l'appui de la demande de permis ; qu'il ressort de ces pièces que le projet, qui a pour objet de créer " un logement parental indépendant ", ne constitue pas un espace complémentaire de la construction existante, avec laquelle il ne communique pas et dont il est fonctionnellement indépendant, même s'il est accolé à cette construction ; que ce projet, compte tenu de ses caractéristiques, constitue ainsi en réalité une construction nouvelle, et non une extension d'un bâtiment existant ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article 3 UC 5 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune d'Avignon : " Les terrains devant recevoir une construction neuve doivent présenter sur la voie principale une façade d'au moins 25 mètres. " ; qu'il est constant que, comme la notice contenue dans la demande de permis le mentionne d'ailleurs elle-même, la partie du terrain d'assiette du projet litigieux donnant sur l'avenue des Sources, laquelle constitue la voie principale au sens de ces dispositions, présente une longueur inférieure à la distance d'au moins 25 mètres qu'imposent ces dernières ; que M. E...est dès lors fondé à soutenir que l'article 3 UC 5 interdit toute construction nouvelle sur ce terrain ;

11. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'apparaît, en l'état de l'instruction, également susceptible de fonder l'annulation du permis attaqué ;

12. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. E...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 14 août 2009 par lequel le maire de la commune d'Avignon a délivré un permis de construire à M. F...; qu'en conséquence, il y a lieu d'annuler ce jugement, ainsi que cet arrêté ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M.E..., qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, soit condamné à payer à la commune d'Avignon et à M. F...la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de cette commune le versement d'une somme de 1 500 euros au bénéfice de M. E...sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 21 octobre 2011 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 14 août 2009 par lequel le maire de la commune d'Avignon a délivré un permis de construire à M. F...est annulé.

Article 3 : La commune d'Avignon versera à M. E...une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la commune d'Avignon et de M. F...tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...E..., à la commune d'Avignon, à M. B...F..., et à la société Treilles de Sources. Copie en sera transmise au procureur de la République près le Tribunal de grande instance d'Avignon en application de l'article R. 751-11 du code de justice administrative.

Délibéré à l'issue de l'audience du 13 mai 2014, à laquelle siégeaient :

M. Riquin, président de chambre,

M. Picard, président-assesseur,

M. Chenevey, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 juin 2014.

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N° 11LY24639

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY24639
Date de la décision : 05/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Légalité interne du permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. RIQUIN
Rapporteur ?: M. Jean-Pascal CHENEVEY
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : BAZIN-CLAUZADE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-06-05;11ly24639 ?
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