Vu la requête, enregistrée à la cour le 25 avril 2012, présentée par le C...de l'Isère ;
Le C...de l'Isère demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement nos 1200184-1200618-1200619 du tribunal administratif de Grenoble du 10 avril 2012, en ce qu'il a annulé ses décisions du 7 octobre 2011 par lesquelles, d'une part, il a refusé la délivrance d'un titre de séjour à M. A...D..., lui a fait obligation de quitter le territoire français et a désigné le pays de destination, et d'autre part, il a fait obligation à Mme E...B...épouse D...de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;
2°) de rejeter les demandes présentées par M. D...et Mme B...épouse D...devant le tribunal administratif de Grenoble ;
Il soutient que c'est à tort que les premiers juges ont annulé la décision par laquelle il a refusé la délivrance d'un titre de séjour à M. D...et les décisions subséquentes le concernant et par voie de conséquence la mesure d'éloignement et la décision fixant le pays de destination prises à l'encontre de son épouse, dès lors que M. D...n'a pas déposé de demande de délivrance de titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré par télécopie à la cour le 18 juin 2013 et régularisé le 21 juin 2013, présenté pour M. D...domicilié..., qui conclut au rejet de la requête du C...et à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 1 200 euros, à son profit, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que la délivrance d'une " fiche santé " constitue une demande de titre de séjour et implique la présentation auprès de l'administration d'un dossier complet ;
Vu le mémoire, enregistré par télécopie à la cour le 18 juin 2013 et régularisé le 21 juin 2013, présenté pour Mme B...épouseD..., domiciliée..., qui conclut au rejet de la requête du C...et à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 1 200 euros, à son profit, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, par les mêmes moyens que ceux susvisés ;
Vu les décisions du 26 juin 2012, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. D... et à Mme D... ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 avril 2014 :
- le rapport de M. Riquin, président ;
En ce qui concerne M. D...:
Sur les conclusions aux fins d'annulation du jugement :
1. Considérant qu'aux termes de l'article R. 313-1 dudit code : " L'étranger qui, n'étant pas déjà admis à résider en France, sollicite la délivrance d'une carte de séjour temporaire présente à l'appui de sa demande : 1° Les indications relatives à son état civil et, le cas échéant, à celui de son conjoint et de ses enfants à charge ; / 2° Les documents, mentionnés à l'article R. 211-1, justifiant qu'il est entré régulièrement en France ; / 3° Sauf stipulation contraire d'une convention internationale applicable en France, un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois autre que celui mentionné au 3° de l'article R. 311-3 ; / 4° Un certificat médical délivré dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la santé ; / 5° Trois photographies de face, tête nue, de format 3, 5 x 4, 5 cm, récentes et parfaitement ressemblantes ; / 6° Un justificatif de domicile. " ; qu'aux termes de l'article R. 211-1 du même code : " Un arrêté du ministre chargé de l'immigration détermine la nature des documents prévus au 1° de l'article L. 211-1 sous le couvert desquels les étrangers sont admis à franchir la frontière.(...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne sont pas soumis aux dispositions du 2° de l'article R. 313-1 les étrangers mentionnés à l'article L. 313-4-1, aux 2°, 2° bis, 6° à 11° de l'article L. 313-11, et aux articles L. 313-11-1, L. 313-13, L. 313-14 et L. 316-1. " ; qu'aux termes de l'article R. 313-3 du même code : " Ne sont pas soumis aux dispositions du 3° de l'article R. 313-1 : (...) 2° Les étrangers mentionnés à l'article L. 313-4-1, aux 2°, 2° bis, 6° à 11° de l'article L. 313-11, et aux articles L. 313-11-1, L. 313-13, L. 313-14 et L. 316-1. (...) " ;
2. Considérant que pour annuler la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français opposées à M.D..., de nationalité kosovare, le tribunal administratif de Grenoble a jugé que le C...de l'Isère avait commis une erreur de droit en s'abstenant de répondre à la demande de titre de séjour présentée par M. D...sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que, si le médecin de l'agence régionale de santé a rendu, le 2 septembre 2011, un avis relatif à son état de santé, M. D... n'établit pas avoir présenté une demande de titre de séjour, à la fois complète au regard des pièces nécessaires à son instruction ci-dessus énoncées, et recevable, en qualité d'étranger malade, antérieurement à l'arrêté du 7 octobre 2011 en litige ; que, par suite, le C...de l'Isère est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé ses décisions du 7 octobre 2011 par lesquelles il a refusé à M. D... la délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français pour défaut d'examen de la situation de l'intéressé au regard des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que, par voie de conséquence, la décision fixant le pays de destination ;
3. Considérant toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'entier litige par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens soulevés par M.D..., tant en première instance qu'en appel ;
Sur la décision de refus de délivrance du titre de séjour :
4. Considérant, en premier lieu, que la décision du 7 octobre 2011 par laquelle le C...de l'Isère a refusé la délivrance d'un titre de séjour à M. D...a été prise en réponse à la demande d'admission au séjour au titre de l'asile présentée par l'intéressé ; que, dès lors que par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile, le statut de réfugié et le bénéfice de la protection subsidiaire avaient été refusés à M.D..., le C...de l'Isère était tenu de refuser à ce dernier la délivrance des titres de séjour prévus à l'article L. 313-13 et au 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans avoir à porter une appréciation sur les faits de l'espèce ; que le C...de l'Isère se trouvant ainsi en situation de compétence liée pour refuser le titre de séjour sollicité, les moyens tirés de l'incompétence de l'auteur de cet acte, du défaut de motivation de cette décision de refus et de l'absence d'examen préalable de sa situation personnelle sont inopérants ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.D..., ressortissant du Kosovo, est entré pour la dernière fois en France, à la date déclarée du 5 mai 2009, accompagné de son épouse et de leurs deux enfants ; que le 3 juin 2009, M. D...a présenté une demande d'asile, rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 26 octobre 2010 et par la Cour nationale du droit d'asile le 3 mai 2011 ; qu'ainsi, à la date de la décision contestée, M. D... résidait depuis deux ans seulement en France où il ne justifie d'aucune insertion particulière ; que, né en 1973, M. D...a passé l'essentiel de son existence dans son pays d'origine où il n'établit pas y être dépourvu d'attaches familiales notamment ; que s'il se prévaut de son état de santé, M. D...n'établit pas, par les pièces médicales produites, que les douleurs cervicales dont il souffre ne peuvent pas être soignées dans son pays d'origine faisant ainsi obstacle à ce qu'il puisse y mener une vie privée et familiale ailleurs, auprès de son épouse et de leurs enfants ; que, dans ces conditions, la décision par laquelle le C...de l'Isère a refusé la délivrance d'un titre de séjour à M. D...ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le moyen ne peut dès lors être que rejeté ; que la décision en litige n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants, regardés comme tels jusqu'à leur majorité légale, dans toutes les décisions les concernant ;
8. Considérant que si M. D...soutient que le C...de l'Isère a méconnu les stipulations précitées de l'article 3 de la convention internationale sur les droits de l'enfant dès lors qu'il sera séparé de ses enfants, rien ne fait obstacle à ce que les enfants de M. et Mme D... accompagnent leurs parents ailleurs qu'en France et notamment dans leur pays d'origine ; que le requérant n'est, par suite, pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué porte une atteinte contraire à l'intérêt supérieur de ses enfants ; que la décision de refus de titre de séjour n'a, dès lors, pas été prise en méconnaissance des stipulations précitées ;
9. Considérant, en dernier lieu, qu'à supposer même que M. D...ait entendu soulever le moyen tiré de la violation des stipulations du préambule et des articles 9-1 et 10 de la convention relative aux droits de l'enfant susvisée, ce moyen qui au demeurant n'est assorti d'aucune précision, est en tout état de cause inopérant dès lors que ces stipulations créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits à l'intéressé ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
10. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) " ;
11. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.D..., de nationalité kosovare, s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour par décision du 7 octobre 2011 ; qu'ainsi, à cette date, il était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le C...peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;
12. Considérant, en deuxième lieu, que la décision de refus de délivrance de titre de séjour n'étant pas illégale, M. D... n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de cette décision à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;
13. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (...) : 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi " ;
14. Considérant qu'en se bornant à produire des pièces médicales relatives à une intervention chirurgicale datant de 2010, une prescription de médicaments et de massages de 2011 ainsi qu'un certificat médical établi le 19 mars 2012 par un médecin généraliste faisant état de ce qu'il souffre d'une névralgie cervicale, M. D... n'établit pas que son état de santé nécessite des soins dont le défaut pourrait entraîner pour sa santé des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni qu'il ne pourrait pas bénéficier de soins dans son pays d'origine ; que, par suite, M. D...n'est pas fondé à soutenir qu'en décidant de l'obliger à quitter le territoire français, le C...de l'Isère a méconnu les dispositions précitées ;
Sur la décision désignant le pays de destination :
15. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;
16. Considérant que M. D...n'établit pas, par les pièces qu'il produit, qu'il ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé au Kosovo ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination serait, pour ce motif, contraire aux stipulations et dispositions précitées ne peut qu'être écarté ;
17. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le C...de l'Isère est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé ses décisions du 7 octobre 2011, refusant la délivrance d'un titre de séjour à M.D..., l'obligeant à quitter le territoire français et désignant le pays à destination duquel il pourrait être éloignée d'office à l'issue du délai de départ volontaire ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente affaire, quelque somme que ce soit au profit de M. D..., au titre des frais exposés par en appel et non compris dans les dépens ;
En ce qui concerne Mme D...:
Sur les conclusions aux fins d'annulation du jugement :
18. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
19. Considérant que pour annuler l'obligation de quitter le territoire français du 7 octobre 2011 faite à MmeD..., le tribunal administratif de Grenoble a jugé qu'eu égard à l'annulation des décisions portant refus de délivrance du titre de séjour et obligation de quitter le territoire français à l'encontre de son époux, la mesure d'éloignement prise à son encontre avait vocation à la séparer de M. D...et portait ainsi une atteinte disproportionnée au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier et eu égard à ce qui précède, que l'obligation de quitter le territoire français faite à Mme D... n'a pas vocation à séparer l'intéressée de son époux dès lors que ce dernier fait également l'objet d'une mesure d'éloignement ; que rien ne fait donc obstacle à ce que les époux D... reconstituent ailleurs qu'en France et notamment dans leur pays d'origine la cellule familiale ; que, par suite, le C...de l'Isère est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'obligation de quitter le territoire français du 7 octobre 2011 faite à l'encontre de Mme D...et par voie de conséquence la décision du même jour fixant le pays de destination ;
20. Considérant toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens soulevés par MmeD..., tant en première instance qu'en appel ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
S'agissant de l'exception d'illégalité du refus de délivrance du titre de séjour :
21. Considérant, en premier lieu, que la décision du 7 octobre 2011 par laquelle le C...de l'Isère a refusé la délivrance d'un titre de séjour à Mme D...a été prise en réponse à la demande d'admission au séjour au titre de l'asile présentée par l'intéressée ; que, dès lors que par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile, le statut de réfugié et le bénéfice de la protection subsidiaire avaient été refusés à MmeD..., le C...de l'Isère était tenu de refuser à cette dernière la délivrance des titres de séjour prévus à l'article L. 313-13 et au 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans avoir à porter une appréciation sur les faits de l'espèce ; que le C...de l'Isère se trouvant ainsi en situation de compétence liée pour refuser le titre de séjour sollicité, les moyens tirés de l'incompétence de l'auteur de cet acte, du défaut de motivation de cette décision de refus et de l'absence d'examen préalable de sa situation personnelle sont inopérants ;
22. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que Mme D..., ressortissante du Kosovo, est entrée en France, à la date déclarée du 5 mai 2009, accompagnée de son époux et de leurs deux enfants ; que le 3 juin 2009, Mme D...a présenté une demande d'asile, rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 26 octobre 2010 et par la Cour nationale du droit d'asile le 3 mai 2011 ; qu'ainsi, à la date de la décision contestée, Mme D... résidait depuis deux ans seulement en France où elle ne justifie d'aucune insertion particulière ; que, née en 1977, Mme D...a passé l'essentiel de son existence dans son pays d'origine où elle n'établit pas y être dépourvue d'attaches familiales notamment ; que comme il a été dit précédemment, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de son époux ferait obstacle à ce que ce dernier accompagne Mme D..., ailleurs qu'en France et notamment au Kosovo, pour reconstituer la cellule familiale ; que, dans ces conditions, la décision par laquelle le C...de l'Isère a refusé la délivrance d'un titre de séjour à Mme D... ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le moyen ne peut dès lors être que rejeté ; que la décision en litige n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
23. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants, regardés comme tels jusqu'à leur majorité légale, dans toutes les décisions les concernant ;
24. Considérant que si Mme D...soutient que le C...de l'Isère a méconnu les stipulations précitées de l'article 3 de la convention internationale sur les droits de l'enfant dès lors qu'elle sera séparée de ses enfants, rien ne fait obstacle à ce que les enfants de M. et Mme D... accompagnent leurs parents ailleurs qu'en France et notamment dans leur pays d'origine ; que la requérante n'est, par suite, pas fondée à soutenir que l'arrêté attaqué porte une atteinte contraire à l'intérêt supérieur de ses enfants ; que la décision de refus de titre de séjour n'a, dès lors, pas été prise en méconnaissance des stipulations précitées ;
25. Considérant, en quatrième lieu, qu'à supposer même que Mme D...ait entendu soulever le moyen tiré de la violation des stipulations du préambule et des articles 9-1 et 10 de la convention relative aux droits de l'enfant susvisée, ce moyen qui au demeurant n'est assorti d'aucune précision, est en tout état de cause inopérant dès lors que ces stipulations créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits à l'intéressée ;
S'agissant des autres moyens :
26. Considérant, en premier lieu, que la décision de refus de délivrance de titre de séjour n'étant pas illégale, Mme D...n'est pas fondée à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de cette décision à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;
27. Considérant, en deuxième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux qui ont été énoncés ci-dessus dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés ;
28. Considérant, en dernier lieu, que comme il a été dit précédemment, rien ne fait obstacle à ce que les enfants de Mme D...accompagnent leurs parents ailleurs qu'en France et notamment dans leur pays d'origine ; que, par suite, l'obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre de M. D...n'a pas méconnu l'intérêt supérieur de ses enfants au sens des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
29. Considérant que, compte tenu de ce qui précède, la décision faisant à Mme D...obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'illégalité ; que, dès lors, Mme D... n'est pas fondée à soulever, par voie d'exception, l'illégalité desdites décisions à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi ;
30. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le C...de l'Isère est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé ses décisions du 7 octobre 2011, obligeant Mme D...à quitter le territoire français et désignant le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée d'office à l'issue du délai de départ volontaire ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente affaire, quelque somme que ce soit au profit de MmeD..., au titre des frais exposés par elle en appel et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement nos 1200184-1200618-1200619 du 10 avril 2012 du tribunal administratif de Grenoble est annulé en ce qu'il a annulé les décisions par lesquelles le C...de l'Isère a, d'une part, refusé la délivrance d'un titre de séjour à M.D..., lui a fait obligation de quitter le territoire français et a désigné le pays de destination, et d'autre part, fait obligation à Mme D...de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.
Article 2 : La demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif de Grenoble et dirigée contre les décisions prises par le C...de l'Isère à son encontre le 7 octobre 2011, est rejetée.
Article 3 : La demande présentée par Mme D...devant le tribunal administratif de Grenoble et dirigée contre les décisions prises par le C...de l'Isère à son encontre le 7 octobre 2011, est rejetée.
Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par M. et Mme D...devant la cour est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D...et Mme E...B...épouseD..., au C...de l'Isère et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 8 avril 2014, à laquelle siégeaient :
M. Riquin, président de la 1ère chambre,
M. Picard, président-assesseur,
M. Chenevey, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 mai 2014.
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N° 12LY01033
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