La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/03/2014 | FRANCE | N°13LY01368

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 11 mars 2014, 13LY01368


Vu la décision n° 337120 du 17 mai 2013, par laquelle le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon n° 07LY02785 du 31 décembre 2009 en tant qu'il rejette le surplus des conclusions de la société Isère développement environnement (IDE) et limite la condamnation de la commune de Renage (Isère) à verser à cette société la somme de 23 611,14 euros, en restitution de la participation financière prévue par l'autorisation de lotir qui lui a été délivrée le 13 février 2001 ;

Vu la requête, initialement enregistrée au greffe de la cour sous

le n° 07LY02785 et désormais enregistrée sous le n° 13LY01368, présentée pou...

Vu la décision n° 337120 du 17 mai 2013, par laquelle le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon n° 07LY02785 du 31 décembre 2009 en tant qu'il rejette le surplus des conclusions de la société Isère développement environnement (IDE) et limite la condamnation de la commune de Renage (Isère) à verser à cette société la somme de 23 611,14 euros, en restitution de la participation financière prévue par l'autorisation de lotir qui lui a été délivrée le 13 février 2001 ;

Vu la requête, initialement enregistrée au greffe de la cour sous le n° 07LY02785 et désormais enregistrée sous le n° 13LY01368, présentée pour la société IDE ;

La société IDE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0404907 du 16 octobre 2007 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande de condamnation de la commune de Renage à lui verser la somme de 129 000 euros, outre intérêts au taux légal majoré de cinq points, en restitution de la participation financière mise à sa charge par l'autorisation de lotir qui lui a été délivrée le 13 février 2001 ;

2°) de condamner la commune de Renage à lui verser :

. cette somme de 129 000 euros, outre intérêts au taux légal majoré de cinq points,

. une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société IDE soutient que, contrairement à ce que le tribunal administratif de Grenoble a estimé, elle est fondée à invoquer les dispositions de l'article L. 332-30 du code de l'urbanisme pour obtenir le remboursement du coût des équipements qui excèdent les seuls besoins du lotissement autorisé par l'arrêté du 13 février 2001 et qui, dès lors, constituent des équipements publics, et non des équipements propres ; que la commune de Renage doit ainsi lui restituer une somme de 129 000 euros, outre les intérêts aux taux légal majoré de cinq points à compter du 25 juin 2004, date de sa réclamation ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 8 janvier 2009, présenté pour la commune de Renage, représentée par son maire, qui demande à la cour :

- de rejeter la requête ;

- de condamner la société IDE à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune de Renage soutient qu'elle n'a pas imposé à la société IDE de réaliser les travaux dont cette société réclame le remboursement ; que la requérante ne peut dès lors invoquer les dispositions de l'article L. 332-30 du code de l'urbanisme ;

Vu le mémoire, enregistré le 23 septembre 2009, présenté pour la société IDE, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 17 décembre 2009, produite pour la société IDE ;

Vu l'ordonnance du 17 juillet 2013 par laquelle, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, la cour, après l'arrêt précité du Conseil d'Etat du 17 mai 2013, a fixé la clôture de l'instruction au 10 septembre 2013 ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 août 2013, présenté pour la société IDE, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 septembre 2009, présenté pour la commune de Renage, représentée par son maire, tendant aux mêmes fins que précédemment, le montant de la somme réclamée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative étant réduit à 2 000 euros et la commune demandant subsidiairement à la cour de surseoir à statuer dans l'attente de la production par la société IDE des justificatifs du coût des travaux dont le remboursement est demandé ;

La commune de Renage soutient, en outre, que la société requérante ne justifie pas des dépenses qu'elle prétend avoir exposées ;

En application de l'article R. 613-4 du code de justice administrative, par une ordonnance du 9 septembre 2013, l'instruction a été rouverte ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 novembre 2013, présenté pour la société IDE, tendant aux mêmes fins que précédemment, le montant de la somme réclamée au titre de l'article L. 761-1 étant portée à 4 500 euros, et, en outre, à la capitalisation des intérêts ;

Vu le mémoire, enregistré le 8 novembre 2013, présenté pour la commune de Renage, représentée par son maire, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

La commune soutient, en outre, que la société IDE, qui est une société commerciale qui récupère la taxe sur la valeur ajoutée, ne peut solliciter une condamnation toute taxes comprises ; que cette société n'a pas demandé devant le tribunal la réparation du préjudice correspondant à la valeur du terrain cédé gratuitement, en vertu de l'autorisation du 13 février 2001 ; que cette demande nouvelle est par suite irrecevable ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 2 décembre 2013, la clôture de l'instruction a été fixée au 18 décembre 2013 ;

La société IDE soutient, en outre, que la question de la valeur du terrain cédé gratuitement a bien été évoquée en première instance ; que cette cession est afférente à la voie elle-même ; que la cause juridique qui fonde cette demande n'est pas distincte ;

Vu le mémoire, enregistré le 9 décembre 2013, présenté pour la société IDE, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 février 2014 :

- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- et les observations de Me A...représentant la Selas Adamas affaires publiques, avocat de la société Isère développement environnement (IDE), et celles de Me C...représentant la Selarl Ligas-Raymond-A... -Favet, avocat de la commune de Renage ;

1. Considérant que, par un arrêté du 13 février 2001, le maire de la commune de Renage a délivré une autorisation à la société Isère Développement Environnement (IDE) pour la création d'un lotissement de quatre lots, dénommé " Le Clos des Vergers " ; que, conformément au programme des travaux annexé à cet arrêté, cette société a réalisé, à ses frais, des travaux d'équipement et de viabilité, consistant notamment en la création d'une voie de desserte, dénommée " voie A ", l'installation de poteaux d'éclairage public le long de cette voie et la pose sous cette dernière d'un collecteur pour les eaux usées ; qu'estimant que ces équipements excédent les besoins propres du lotissement, la société IDE a demandé à la commune de Renage, par un courrier du 24 juin 2004, de lui rembourser la somme de 129 000 euros, correspondant au coût de leur réalisation ; qu'après le rejet implicite opposé à cette demande par la commune, la société a saisi le tribunal administratif de Grenoble d'une demande de condamnation de cette dernière à lui rembourser ladite somme de 129 000 euros, outre les intérêts au taux légal majoré de cinq points ; que, par un jugement du 16 octobre 2007, le tribunal a rejeté cette demande ; que la société IDE a relevé appel de ce jugement ; que, par un arrêt du 31 décembre 2009, la cour, après avoir annulé le jugement du tribunal administratif de Grenoble, n'a que partiellement fait droit aux conclusions de la société IDE, en limitant la condamnation de la commune de Renage à la somme de 23 611,14 euros, outre intérêts au taux légal majoré de cinq points ; que la société IDE s'est pourvue en cassation contre cet arrêt, en tant qu'il a limité le montant de la restitution à cette somme ; que la commune de Renage a formé un pourvoi incident à l'encontre du même arrêt, en tant qu'il a reconnu le droit à répétition de la société IDE ; que, par une décision du 17 mai 2013, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt du 31 décembre 2009 en tant qu'il rejette le surplus des conclusions de la société IDE et limite à ladite somme de 23 611,14 euros le montant de la condamnation de la commune de Renage, a rejeté le pourvoi incident de cette dernière et a renvoyé, dans la mesure de la cassation ainsi prononcée, l'affaire à la cour ;

2. Considérant que la société IDE a versé au dossier un extrait du registre du commerce et des sociétés qui établit l'existence légale de cette société ; que la circonstance que cette dernière n'aurait plus aucune activité effective est sans incidence ; que la fin de non-recevoir que la commune de Renage a soulevée devant le tribunal administratif de Grenoble ne peut, dès lors, qu'être écartée ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 332-30 du code de l'urbanisme : " Les taxes et contributions de toute nature qui sont obtenues ou imposées en violation des dispositions des articles L. 311-4 et L. 332-6 sont réputées sans cause ; les sommes versées ou celles qui correspondent au coût de prestations fournies sont sujettes à répétition. L'action en répétition se prescrit par cinq ans à compter du dernier versement ou de l'obtention des prestations indûment exigées. / (...) Les sommes à rembourser (...) portent intérêt au taux légal majoré de cinq points. " ; qu'aux termes de l'article L. 332-6 du même code : " Les bénéficiaires d'autorisations de construire ne peuvent être tenus que des obligations suivantes : / (...) 3° La réalisation des équipements propres mentionnés à l'article L. 332-15 / (...) " ; qu'enfin ce dernier article prévoit que : " L'autorité qui délivre l'autorisation de construire, d'aménager, ou de lotir exige, en tant que de besoin, du bénéficiaire de celle-ci la réalisation et le financement de tous travaux nécessaires à la viabilité et à l'équipement de la construction, du terrain aménagé ou du lotissement, notamment en ce qui concerne la voirie, l'alimentation en eau, gaz et électricité, les réseaux de télécommunication, l'évacuation et le traitement des eaux et matières usées, l'éclairage, les aires de stationnement, les espaces collectifs, les aires de jeux et les espaces plantés. / (...) " ; qu'il résulte des dispositions de ces deux derniers articles que seul peut être mis à la charge du bénéficiaire d'une autorisation de lotir le coût des équipements propres à son lotissement ; que dès lors que des équipements excèdent, par leurs caractéristiques et leurs dimensions, les seuls besoins constatés et simultanés d'un ou, le cas échéant, plusieurs lotissements et ne peuvent, par suite, être regardés comme des équipements propres au sens de l'article L. 332-15, leur coût ne peut être, même pour partie, supporté par le lotisseur ;

4. Considérant qu'en rejetant, par sa décision susvisée du 17 mai 2013, le pourvoi incident formé par la commune de Renage à l'encontre de l'arrêt précité de la cour

du 31 décembre 2009, le Conseil d'Etat a confirmé cet arrêt en tant qu'il a reconnu un droit à répétition à la société IDE, la " voie A " du lotissement et ses équipements annexes, tels que les poteaux d'éclairage, ainsi que le collecteur installé sous cette voie, constituant des équipements publics, et non de simples équipements propres au lotissement ; qu'il résulte de ce qui a été dit plus haut que la société IDE est fondée à demander le remboursement de l'intégralité des sommes qu'elles a exposées pour la réalisation de ces ouvrages ;

5. Considérant que le préjudice lié au fait que la société IDE a dû acquérir un terrain afin de réaliser la " voie A " du lotissement a été invoquée en première instance et la cour, dans son arrêt du 31 décembre 2009, a pris en compte le fait qu'une cession de terrain a été imposée à cette société pour déterminer le montant du préjudice indemnisable de cette dernière ; que, par suite, en tout état de cause, la commune de Renage n'est pas fondée à soutenir que la réparation du préjudice correspondant à la valeur du terrain cédé gratuitement, en vertu de l'autorisation du 13 février 2001, constitue une demande nouvelle en appel ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment le détail des travaux afférents à la voie A et aux réseaux associés et du récapitulatif du 8 août 2013 établi par le bureau de géomètres-experts AGATE, que le montant des travaux de construction de cette voie, de ses équipements annexes et du collecteur associé s'établit au montant de 48 094,17 euros hors taxe ; que la commune de Renage, qui ne conteste pas le fait que les travaux ont bien été réalisés, n'apporte aucun élément pour contester sérieusement ce montant ; que, de même, il n'est pas sérieusement contesté que, comme l'indique ce récapitulatif, le maître d'oeuvre des travaux, le cabinet Eybert, a perçu une somme de 3 847,53 euros hors taxe, correspondant à 8 % du coût hors taxe des travaux ;

7. Considérant qu'il est constant que, comme le prévoyait l'autorisation

du 13 février 2001, la société IDE a dû céder une surface de terrain de 397 m² pour la réalisation de la " voie A " ; que la cession ainsi imposée est indissociable de la réalisation de cette voie, qui constitue un équipement public ; que, toutefois, si cette société invoque le fait qu'elle a dû céder un terrain de 950 m² pour acquérir auprès de M. et MmeB..., par échange, le terrain nécessaire à cette réalisation, il n'est pas démontré que celle-ci imposait nécessairement l'échange d'une telle surface ; que ladite autorisation, qui reprend l'évaluation du service des domaines, mentionne que la valeur de la superficie de 397 m² de terrain est de 31 760 francs, soit 4 841,78 euros ;

8. Considérant que la société requérante ne démontre pas qu'elle n'est pas susceptible de déduire ou de se faire rembourser la taxe sur la valeur ajoutée ; que la condamnation prononcée ne peut dès lors être assortie du montant de cette taxe ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la somme que la commune de Renage a été condamnée à payer à la société IDE par l'arrêt de la cour du 31 décembre 2009 doit être portée de 23 611,14 euros à 56 783,48 euros ; qu'en application des dispositions précitées de l'article L. 332-30 du code de l'urbanisme, cette somme portera intérêt au taux légal majoré de cinq points à compter du 25 juin 2004, date de réception en mairie de la réclamation préalable de la société IDE ; que cette dernière a présenté des conclusions à fin de capitalisation des intérêts le 5 novembre 2013 ; qu'à cette date, il était dû plus d'une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande à cette date et à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société IDE, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, soit condamnée à payer à la commune de Renage la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de cette commune le versement d'une somme de 1 500 euros au bénéfice de cette société sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La commune de Renage est condamnée à verser à la Société IDE la somme de 56 783,48 euros, qui portera intérêt au taux légal majoré de cinq points à compter du 25 juin 2004. Les intérêts porteront eux-mêmes intérêts à compter du 5 novembre 2013 et à chaque échéance annuelle.

Article 2 : La commune de Renage versera à la société IDE une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la Société Isère développement environnement (IDE) et à la commune de Renage.

Délibéré après l'audience du 18 février 2014, à laquelle siégeaient :

M. Riquin, président de chambre,

M. Picard, président-assesseur,

M. Chenevey, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 mars 2014.

''

''

''

''

1

2

N° 13LY01368

mg


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY01368
Date de la décision : 11/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

68-02-04 Urbanisme et aménagement du territoire. Procédures d'intervention foncière. Lotissements.


Composition du Tribunal
Président : M. RIQUIN
Rapporteur ?: M. Jean-Pascal CHENEVEY
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : PETIT JEAN-MARC

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-03-11;13ly01368 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award