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05/11/2013 | FRANCE | N°13LY00978

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 05 novembre 2013, 13LY00978


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 18 avril 2013 sous le n° 13LY00978, présentée pour M. B...A..., domicilié ...par Me E... ; M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble n° 1003818 du 26 octobre 2012 qui a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Cluses à lui verser des indemnités d'un montant total de 1 987 880 euros en réparation des conséquences dommageables de la décision, en date du 16 juin 2003, par laquelle son maire a exercé le droit de préemption sur un immeuble dont il s'était

porté acquéreur ;

2°) de condamner la commune de Cluses à lui verser à...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 18 avril 2013 sous le n° 13LY00978, présentée pour M. B...A..., domicilié ...par Me E... ; M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble n° 1003818 du 26 octobre 2012 qui a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Cluses à lui verser des indemnités d'un montant total de 1 987 880 euros en réparation des conséquences dommageables de la décision, en date du 16 juin 2003, par laquelle son maire a exercé le droit de préemption sur un immeuble dont il s'était porté acquéreur ;

2°) de condamner la commune de Cluses à lui verser à ce titre une indemnité de 976 700 euros ;

3°) de condamner la commune de Cluses à lui verser la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que sa requête est recevable, dès lors que la lettre accompagnant la notification du jugement attaqué a omis de prendre en compte le délai supplémentaire dont il dispose du fait qu'il réside à l'étranger ; que l'illégalité de la mesure de préemption a été reconnue par arrêt de la cour du 19 février 2008, devenu définitif ; que l'acquisition projetée est définitivement compromise, la commune ayant depuis lors revendu le bien immobilier en cause ; que le droit à réparation de l'acquéreur évincé est parfaitement admis par la jurisprudence ; que le tribunal a opposé à tort les clauses suspensives contenues dans le compromis de vente, alors qu'elles n'étaient stipulées qu'au profit de l'acquéreur et que la mesure de préemption est intervenue avant l'échéance à compter de laquelle l'une ou l'autre des parties à ce compromis pouvait mettre l'autre partie en demeure de signer l'acte authentique ; que l'exposant a bien été privé de la perte d'une chance de valoriser son patrimoine ; qu'il est justifié, par l'étude d'un expert comptable, d'une perte potentielle de plus-value de 102 700 euros concernant le fonds de commerce, et de 874 000 euros concernant l'immeuble et le terrain ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 23 mai 2013, présenté pour la commune de Cluses, concluant au rejet de la requête et à la condamnation de M. A...à lui verser la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que l'appel de M. A...est tardif, même en tenant compte du délai supplémentaire de distance prévu par les articles R. 421-7 et R. 811-5 du code de justice administrative ; que le jugement, en effet, a été notifié à M. A...au plus tard le 19 novembre 2012 ; que la circonstance qu'il n'a pas réclamé le pli recommandé n'affecte en rien l'opposabilité du délai de recours ; qu'il est indifférent que le courrier de notification du jugement n'ait pas fait mention du délai supplémentaire de distance, aucune disposition ni aucun principe général du droit n'imposant d'y indiquer le délai d'appel ; que les conclusions d'appel de M.A..., présentées au titre de la perte de chance, diffèrent de celles présentées en première instance, où était demandée la réparation d'un préjudice économique lié à la perte d'exploitation du fonds, d'un préjudice immobilier lié à l'impossibilité de valoriser l'immeuble et du préjudice moral ; qu'elles sont donc nouvelles en appel et, par suite, irrecevables ; que le requérant ne rapporte aucunement la preuve d'un préjudice résultant de manière directe et certaine de l'illégalité de la décision de préemption du 16 juin 2003 ; que son projet, compte tenu des conditions suspensives stipulées par le compromis de vente, était loin d'être finalisé ; qu'ainsi, il n'est justifié d'aucune démarche en vue de l'obtention du prêt de 30 000 euros prévu, auquel était en outre subordonnée la résiliation du contrat de location gérance du preneur en place ; qu'il n'a pas davantage été justifié de démarches effectuées en vue de l'obtention d'une licence de débit de boisson de troisième catégorie, elle-même subordonnée à la réalisation de travaux nécessitant la délivrance d'un permis de construire ; que la condition tenant à la reconnaissance, par l'administration, de la conformité du fonds au regard de l'article L. 3335-1 du code de la santé publique n'a pas davantage été remplie et avait peu de chance de l'être, le bâtiment étant notoirement en infraction au regard de ce texte ; qu'au surplus, il n'était pas conforme aux règles d'hygiène et de sécurité ; que le préjudice lié à la perte d'une plus-value n'est pas au nombre de ceux dont peut se prévaloir l'acquéreur évincé, puisqu'il suppose d'être propriétaire du bien ; que la réduction du quantum de l'indemnisation réclamée témoigne du peu de sérieux des prétentions de M. A... ; qu'elles restent 70 fois supérieures au résultat avant impôt dégagé par le fonds de commerce dans ses derniers exercices ; que l'évaluation versée aux débats omet totalement de prendre en compte la non-conformité de ce fonds de commerce aux prescriptions de l'article L. 3335-1 du code de la santé publique ainsi qu'aux règles d'hygiène et de sécurité ;

Vu l'ordonnance du 20 août 2013 prise en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, fixant au 6 septembre 2013 la date de clôture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 octobre 2013 :

- le rapport de M. Picard, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- les observations de MeD..., représentant la SelarlE..., avocat de M.A..., et celles de MeC..., représentant la SCP Lamy et Associés, avocat de la commune de Cluses ;

1. Considérant que M. A...relève appel du jugement, en date du 26 octobre 2012, par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Cluses à lui verser des indemnités d'un montant total de 1 987 880 euros en réparation des conséquences dommageables de la décision de son maire du 16 juin 2003 exerçant le droit de préemption urbain sur un ensemble immobilier dont il s'était porté acquéreur, ladite décision ayant été annulée par arrêt de la cour n° 07LY01062 du 19 février 2008, devenu définitif ; qu'il ramène ses prétentions indemnitaires, en cause d'appel, à 976 000 euros correspondant à la perte d'une chance de réaliser une plus-value sur la cession de cet ensemble immobilier lui-même et du fonds de commerce qui y était installé, en l'occurrence un hôtel-restaurant ;

2. Considérant que ni l'article R. 751-5 du code de justice administrative, qui définit le contenu du courrier de notification des décisions rendues par les tribunaux administratifs, ni les articles R. 811-5 et suivants du même code, régissant le délai d'appel et les conditions dans lesquelles il est rendu opposable, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire, non plus qu'aucun principe général du droit, n'impose de faire figurer dans ce courrier l'indication du délai d'appel de droit commun, ni, en tout état de cause, d'y mentionner, cas par cas, les prolongations éventuelles et de durée variable dont pourraient bénéficier certains requérants à raison de l'éloignement de leur lieu de résidence ; qu'il s'ensuit que, lorsqu'un tel courrier comporte néanmoins l'indication d'un délai, l'erreur dont cette mention est éventuellement entachée ne saurait par elle-même faire obstacle au déclenchement du délai d'appel, l'appelant devant seulement bénéficier, dans l'hypothèse où le délai ainsi indiqué est plus long que ne le prévoient en réalité les textes, de ce délai erroné dès lors substitué au délai réglementaire ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que le jugement attaqué a été notifié à M. A...à l'adresse indiquée dans ses écritures, située en Suisse, par une lettre recommandée datée du 31 octobre 2012 et qui a été retournée au tribunal le 19 novembre 2012 suivant avec la mention " non réclamé " ; que la circonstance, par hypothèse demeurée inconnue de M.A..., que ce courrier mentionne le délai d'appel de deux mois prévu par l'article R. 811-2 du code de justice administrative, sans faire état du délai supplémentaire de distance prévu de deux mois prévu par les articles R. 421-7 et R. 811-5 du même code, n'a pu empêcher, ainsi qu'il a été dit, le déclenchement du délai d'appel porté à quatre mois ; qu'en l'absence d'indication, sur le pli retourné au tribunal par la poste helvétique, de la date à laquelle il a été présenté au domicile de M. A...et a fait l'objet d'un avis de passage, il y a lieu de considérer, au bénéfice de l'intéressé, que ce délai a couru seulement à compter du 19 novembre 2012 ; qu'il était ainsi expiré lorsque, le 18 avril 2013, la requête est parvenue au greffe de la cour et y a été enregistrée ; que ladite requête est dès lors tardive et, par suite, irrecevable ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande ;

5. Considérant enfin, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Cluses, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à M. A...la somme qu'il réclame en remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées sur le même fondement par la commune de Cluses ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Cluses tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et à la commune de Cluses.

Délibéré après l'audience du 8 octobre 2013, à laquelle siégeaient :

M. Riquin, président de chambre,

M. Bézard, président,

M. Picard, président-assesseur.

Lu en audience publique, le 5 novembre 2013.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY00978
Date de la décision : 05/11/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics - Services de l'urbanisme.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Contentieux de la responsabilité (voir : Responsabilité de la puissance publique).


Composition du Tribunal
Président : M. RIQUIN
Rapporteur ?: M. Vincent-Marie PICARD
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : SELARL TOUSSET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-11-05;13ly00978 ?
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