Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 11 mars 2013 sous le n° 13LY00621, présentée pour la SARL Sotita, dont le siège est sis Les Chenets à Sainte-Sigolène (43600), représentée par son gérant en exercice, par MeB... ;
La société Sotita demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand n° 1201043 du 27 décembre 2012 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération, en date du 12 avril 2012, par laquelle le conseil municipal de Sainte-Sigolène a approuvé le plan local d'urbanisme de cette commune, en tant qu'elle classe en zone naturelle le secteur des Beaux et la parcelle cadastrée sous la section AO n° 103 ;
2°) d'annuler dans cette mesure ladite délibération ;
3°) de faire injonction à la commune de Sainte-Sigolène, sous astreinte, d'engager une procédure de révision simplifiée du plan local d'urbanisme afin de fixer un nouveau règlement applicable au secteur des Beaux ;
4°) de condamner la commune de Sainte-Sigolène à supporter les dépens et à lui verser la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que le terrain litigieux ne constitue plus une zone humide, du fait des travaux de remblaiement qui y ont été effectués, cela d'ailleurs avec le concours de la commune et dans le but d'y réaliser des constructions ; qu'il se situe en bordure de route, entre un lotissement et deux usines, et est desservi par l'ensemble des réseaux ; que le plan local d'urbanisme devait faire l'objet d'une évaluation environnementale en vertu des articles L. 121-10 et R. 121-14 II du code de l'urbanisme ; que le secteur ne peut être regardé comme présentant un caractère naturel au sens de l'article R. 121-14-32 du même code ; qu'en méconnaissance de l'article R. 123-2, le rapport de présentation aborde de façon imprécise la question des incidences du plan sur l'état initial du site et sur l'environnement, ainsi que celles de la mixité sociale et de l'ouverture à l'urbanisation ;
Vu le jugement attaqué et la délibération contestée ;
Vu l'ordonnance du 2 avril 2013 fixant la clôture de l'instruction, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, au 14 mai 2013 ;
Vu le mémoire, enregistré le 8 avril 2013, présenté pour la commune de Sainte-Sigolène par MeD..., concluant au rejet de la requête et à la condamnation de la société Sotita à lui verser la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que la requête, dépourvue de toute critique du jugement attaqué, est irrecevable ; que le moyen tiré de la prétendue imprécision du rapport de présentation du plan local d'urbanisme n'est pas assorti de précisions suffisantes ; que ce rapport traite de façon complète de l'état initial des lieux, des effets du plan sur l'environnement, de la question de la mixité sociale et des modalités de l'ouverture à l'urbanisation ; que le plan local d'urbanisme contesté n'est pas assujetti à la formalité de l'évaluation environnementale dans la mesure où, d'une part, il ne prévoit aucun des travaux, ouvrages ou aménagements mentionnés à l'article L. 414-4 du code de l'environnement et où, d'autre part, le schéma de cohérence territoriale a lui-même fait l'objet d'une telle évaluation ; que, de plus, la commune n'atteint pas, en superficie et population, les seuils définies par le 2° a) de l'article R. 121-14 du code de l'urbanisme ; que les b) et c) du même article ne sont pas davantage applicables, le plan ne comportant ni la création de zones U ou AU de plus de 200 hectares en secteur agricole ou naturel, ni le projet d'une unité touristique nouvelle ; qu'en tout état de cause, l'absence d'évaluation environnementale n'a exercé aucune incidence sur le classement de la parcelle litigieuse ni privé la requérante d'une garantie ; que la requérante n'établit pas la réalité des travaux de remblaiement allégués ni moins encore la participation de la commune à de tels travaux ; que la parcelle, située dans un talweg, a conservé son caractère humide ; que son classement en zone N répond à une politique globale d'aménagement et d'urbanisation elle-même inscrite dans les dispositions de l'article L. 211-1 du code de l'environnement visant à préserver les zones humides ; qu'il n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 123-8 du code de l'urbanisme, lequel s'applique indifféremment aux terrains équipés ou non ; que le prix auquel la société Sotita a fait l'acquisition de ce terrain est sans incidence sur la légalité de la délibération contestée ; qu'elle y a illégalement réalisé des travaux de busage et de terrassement qui ne font qu'aggraver le risque d'inondation ;
Vu le mémoire, enregistré le 2 mai 2013, présenté pour la société Sotita, concluant aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ;
Elle ajoute qu'en faisant mention des travaux de busage qui ont canalisé le ruisseau, la commune reconnaît elle-même que le terrain est désormais asséché ;
Vu le mémoire, enregistré le 7 mai 2013, présenté pour la commune de Sainte-Sigolène, concluant aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens et qui, dépourvu d'élément nouveau, n'a pas été communiqué ;
Vu le mémoire présenté pour la société Sotita le 31 mai 2013, après la clôture de l'instruction ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juillet 2013 :
- le rapport de M. Zupan, président-assesseur ;
- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;
- et les observations de MeC..., représentant le CJA Public Chavent-D..., avocat de la commune de Sainte-Sigolène ;
1. Considérant que la société Sotita relève appel du jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 27 décembre 2012 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation partielle de la délibération, en date du 12 avril 2012, par laquelle le conseil municipal de Sainte-Sigolène a approuvé le plan local d'urbanisme de cette commune, en tant qu'elle classe en zone naturelle le secteur des Beaux et plus particulièrement la parcelle AO 103 - désormais AO n° 942 et n° 943 -, lui appartenant ;
Sur la légalité de la délibération contestée :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 121-10 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " Font l'objet d'une évaluation environnementale dans les conditions prévues par la présente section : (...) 4° Les plans locaux d'urbanisme susceptibles d'avoir des effets notables sur l'environnement compte tenu de la superficie du territoire auxquels ils s'appliquent, de la nature et de l'importance des travaux et aménagements qu'ils autorisent et de la sensibilité du milieu dans lequel ceux-ci doivent être réalisés. / Sauf dans le cas où elle ne prévoit que des changements mineurs, la révision de ces documents donne lieu soit à une nouvelle évaluation environnementale, soit à une actualisation de l'évaluation environnementale réalisée lors de leur élaboration " ; que l'article R. 121-14 du même code dispose : " II. - Font également l'objet d'une évaluation environnementale : 1° Les plans locaux d'urbanisme qui permettent la réalisation de travaux, ouvrages ou aménagements mentionnés à l'article L. 414-4 du code de l'environnement ; 2° Lorsque les territoires concernés ne sont pas couverts par un schéma de cohérence territoriale ayant fait l'objet d'une évaluation environnementale dans les conditions de la présente section : a) Les plans locaux d'urbanisme relatifs à un territoire d'une superficie supérieure ou égale à 5 000 hectares et comprenant une population supérieure ou égale à 10 000 habitants ; b) Les plans locaux d'urbanisme qui prévoient la création, dans des secteurs agricoles ou naturels, de zones U ou AU d'une superficie totale supérieure à 200 hectares ; c) Les plans locaux d'urbanisme des communes situées en zone de montagne qui prévoient la réalisation d'unités touristiques nouvelles soumises à l'autorisation du préfet coordonnateur de massif . (...) " ; que la société Sotita ne soutient pas que le plan local d'urbanisme en litige permettrait la réalisation de travaux, ouvrages ou aménagements entrant dans les prévisions de l'article L. 414-4 du code de l'environnement ; qu'il ressort par ailleurs des pièces du dossier, d'une part, que le territoire de la commune de Sainte-Sigolène est couvert par le schéma de cohérence territoriale du pays de la Jeune A...et ses rivières, approuvé le 4 décembre 2008, qui comporte une évaluation environnementale, d'autre part, en tout état de cause, que le plan local d'urbanisme contesté, relatif à un territoire dont la population et la superficie n'atteignent pas les seuils fixés par l'article R. 121-14, ne prévoit ni la réalisation d'une unité touristique nouvelle, ni le classement de secteurs agricoles ou naturels en zones urbaines ou à urbaniser représentant plus de 200 hectares ; que le moyen tiré du défaut d'évaluation environnementale a donc été à bon droit écarté comme inopérant par les premiers juges ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 123-2 du code de l'urbanisme : " Le rapport de présentation : (...) 2° Analyse l'état initial de l'environnement, présente une analyse de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers et justifie les objectifs de modération de cette consommation et de lutte contre l'étalement urbain arrêtés dans le projet d'aménagement et de développement. (...) ; 3° Explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durable et, le cas échéant, les orientations d'aménagement et de programmation ; il expose les motifs de la délimitation des zones. (...) ; 4° Evalue les incidences des orientations du plan sur l'environnement et expose la manière dont le plan prend en compte le souci de sa préservation et de sa mise en valeur " ; que la société Sotita fait valoir que le rapport de présentation " aborde de façon imprécise la question des incidences du plan sur le site initial et sur l'environnement ", mais s'abstient elle-même de préciser en quoi ce rapport, qui comporte, conformément aux dispositions précitées, un chapitre consacré à l'évaluation de ses incidences sur l'environnement, serait à cet égard incomplet ; que, contrairement à ce qu'elle soutient, ce même document évoque les enjeux de la mixité sociale, de la diversité de l'habitat et du développement de l'offre de logements sociaux figurant d'ailleurs au nombre des objectifs du plan local d'urbanisme, et justifie, secteur par secteur, les choix retenus en matière de développement de l'urbanisation ; qu'il a ainsi été satisfait aux exigences de l'article R. 123-2 du code de l'urbanisme ;
4. Considérant que, selon l'article R. 123-8 du code de l'urbanisme, " peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : a) Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; b) Soit de l'existence d'une exploitation forestière. ; c) Soit de leur caractère d'espaces naturels. (...) / Les dispositions des trois alinéas précédents ne s'appliquent pas dans les secteurs bénéficiant des transferts de coefficient d'occupation des sols mentionnés à l'article L. 123-4 " ; qu'il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction ; que leur appréciation sur ces différents points, et notamment quant au classement d'un terrain en zone naturelle inconstructible en application de l'article R. 123-8 du code de l'urbanisme, ne peut être censurée par le juge administratif que dans le cas où elle se révèle entachée d'une erreur manifeste ou s'appuie sur des faits matériellement inexacts ;
5. Considérant que si le secteur dans lequel se situe le terrain de la société Sotita, au lieudit " Les Beaux ", est relativement proche du centre ville et entouré de quartiers pavillonnaires, il est lui-même dépourvu de constructions et correspond à un talweg exposé aux ruissellements ; que la requérante ne démontre pas, par la production de quatre attestations peu circonstanciées évoquant le déversement de matériaux de déblais sur le terrain en cause, que la géomorphologie de ce dernier en aurait été substantiellement modifiée et qu'il ne présenterait plus le caractère d'une zone humide ; que ce caractère est au contraire corroboré par le plan de géomètre qu'elle a elle-même versé aux débats et par les constatations du commissaire-enquêteur, lequel a relevé la présence de joncs ; que, dans ces circonstances, le classement de ce secteur en zone naturelle se révèle conforme au parti d'aménagement retenu, en lui-même non contesté, consistant à préserver les talwegs et les zones humides, dans le but, à la fois, de maintenir la biodiversité caractéristique de ces milieux et de limiter, dans un environnement déjà gagné par l'urbanisation, l'imperméabilisation des sols en conservant les réceptacles naturels du ruissellement des eaux pluviales ; qu'ainsi, alors même que le terrain de la société Sotita était antérieurement inscrit par le plan d'occupation des sols en zone urbaine, qu'il est desservi par l'ensemble des réseaux publics indispensables, que le ruisseau qui le traverse est canalisé et qu'il n'a jamais subi d'inondation, ledit classement ne peut être regardé comme procédant d'une erreur manifeste d'appréciation ; que ne saurait davantage, par elle-même, caractériser une telle illégalité la circonstance, au demeurant critiquée de manière imprécise, que les auteurs du plan local d'urbanisme n'ont pas prévu, dans le secteur litigieux, des transferts de coefficient d'occupation des sols, suivant les modalités définies par l'article L. 123-4 du code de l'urbanisme ; que la société requérante, par ailleurs, ne peut utilement faire état, pour contester la légalité de la délibération litigieuse, de la circonstance qu'elle a acquis la parcelle AO 103 au prix d'un terrain à bâtir et subit, du fait de son classement en zone naturelle, un important préjudice financier ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Sainte-Sigolène, que la société Sotita n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions en injonction :
7. Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de la société Sotita, n'implique aucune mesure d'exécution au sens des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative ; que les conclusions présentées à ce titre ne peuvent dès lors qu'être rejetées ;
Sur les dépens :
8. Considérant qu'en vertu de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts (...). / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties " ; qu'il y a lieu de laisser à la société Sotita, partie perdante, la charge de la contribution pour l'aide juridique qu'elle a acquittée lors de l'introduction de sa requête ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Sainte-Sigolène, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à la société Sotita la somme qu'elle réclame en remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au même titre par la commune de Sainte-Sigolène ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Sotita est rejetée.
Article 2 : Les dépens de l'instance sont maintenus à la charge de la société Sotita.
Article 3 : Les conclusions de la commune de Sainte-Sigolène tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Sotita et à la commune de Sainte-Sigolène.
Délibéré après l'audience du 2 juillet 2013, à laquelle siégeaient :
M. Moutte, président de chambre,
M. Bézard, président,
M. Zupan, président-assesseur.
Lu en audience publique, le 12 juillet 2013.
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N° 13LY00621
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