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18/06/2013 | FRANCE | N°12LY02846

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 18 juin 2013, 12LY02846


Vu la requête, enregistrée le 22 novembre 2012, présentée pour M. E...D...A..., domicilié..., par Me Debbache, avocat au barreau de Lyon ;

Il demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202888 du 26 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 25 janvier 2012 par laquelle le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français en fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision

;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer la carte de séjour demandée sous ...

Vu la requête, enregistrée le 22 novembre 2012, présentée pour M. E...D...A..., domicilié..., par Me Debbache, avocat au barreau de Lyon ;

Il demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202888 du 26 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 25 janvier 2012 par laquelle le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français en fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer la carte de séjour demandée sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou à titre subsidiaire de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la décision de refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ; que le préfet aurait dû saisir la commission du titre de séjour ; que la décision est entachée de deux erreurs de fait ; que le refus est aussi entaché d'une erreur de droit au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la décision de refus méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du même code et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle méconnaît également l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ; qu'elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que l'obligation de quitter le territoire français a été prise par une personne n'ayant pas compétence ; qu'elle est illégale du fait de l'illégalité affectant le refus de titre de séjour invoquée par voie d'exception ; que le préfet n'a pas procédé à un examen distinct ; que l'obligation méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du même code et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle méconnaît également l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ; qu'elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que la décision fixant le pays de destination n'est pas motivée ; qu'elle est illégale du fait de l'illégalité affectant le refus de titre de séjour invoquée par voie d'exception ; que le préfet a commis une erreur de droit en s'estimant lié par la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; que cette décision méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet n'a pas laissé un délai de départ volontaire suffisant ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 mai 2013 :

- le rapport de M. Moutte, président ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

Sur les conclusions en annulation du refus de séjour :

1. Considérant que la décision de refus de titre de séjour attaquée comporte un énoncé suffisamment précis des éléments de droit et de fait qui la fondent tant au regard du rejet de la demande présentée en qualité de salarié que s'agissant de la vie privée et familiale du requérant ;

2. Considérant que si le préfet a estimé que le requérant avait indiqué être entré en France irrégulièrement en 2005 sans toutefois le justifier, il n'a pas pour autant pris en compte une durée de séjour inférieure à celle mentionnée par l'intéressé dès lors qu'il a aussi visé le rejet de sa demande d'asile déposée en 2005 ; qu'en faisant état de l'absence de qualification particulière et d'expérience professionnelle préalable pour un emploi de coffreur, le préfet n'a pas non plus commis d'erreur de fait même si le requérant a produit une déclaration d'une école privée de construction civile de Luanda précisant qu'il avait fréquenté l'enseignement de base de coffrage dans ladite école du 6 décembre 1993 au 31 mars 1994 ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;

4. Considérant qu'en présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 313-14, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention "vie privée et familiale" répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié" ou "travailleur temporaire", dans l'hypothèse où l'admission exceptionnelle à la carte de séjour temporaire portant la mention "salarié" ou "travailleur temporaire" est sollicitée pour exercer une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national ; que même s'il est établi en France depuis 2005 et dispose d'une promesse d'embauche, en estimant que la situation du requérant ne relève pas de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens de l'article L. 313-14, le préfet du Rhône n'a commis ni erreur de droit, ni erreur manifeste d'appréciation ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

6. Considérant que M. D...A..., ressortissant angolais né en 1970, fait valoir qu'il réside en France depuis 2005 où vit également sa concubine de nationalité congolaise titulaire d'une carte de résident en qualité de réfugiée, qui a donné naissance à un enfant le 14 octobre 2010 ainsi que sa propre fille scolarisée en France ; que, toutefois il ressort des pièces du dossier, notamment de l'attestation de sa concubine, MmeC..., que la vie commune du couple n'a été effective qu'après le refus de séjour ; que la fille du requérant n'est pas en situation régulière en France ; que dans ces conditions, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'ainsi, le préfet en refusant de délivrer un titre de séjour à M. D... A...n'a pas méconnu le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'eu égard aux mêmes éléments invoqués par le requérant, le refus de titre de séjour n'est pas non plus entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

7. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant susvisée: " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ;

8. Considérant qu'en se bornant à faire valoir la qualité de réfugiée de MmeC..., M. D...A...n'établit l'existence d'aucun obstacle à la reconstitution, en Angola, de sa cellule familiale ; que, la décision refusant au requérant un titre de séjour n'a pas méconnu les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " et qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par le préfet (...) lorsque celui-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. " ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet n'est tenu de saisir la commission que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues par les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; qu'eu égard à ce qui précède, M. D... A...n'étant pas en droit de se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions, le préfet du Rhône n'était pas tenu, en application de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande de titre ;

Sur les conclusions en annulation de l'obligation de quitter le territoire :

10. Considérant que la décision litigieuse a été signée par MmeB..., directrice de la citoyenneté, de l'immigration et de l'intégration de la préfecture du Rhône, titulaire d'une délégation de signature du préfet du Rhône accordée par arrêté du 6 janvier 2012, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture et produite devant le tribunal, à l'effet de signer tous les actes établis par la direction dont elle a la charge, au nombre desquels figurent les mesures d'éloignement ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision attaquée manque en fait ;

11. Considérant que, compte tenu de ce qui vient d'être exposé, le moyen tiré par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour doit être écarté ;

12. Considérant qu'il ressort de la motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire que, contrairement à ce qui est allégué, l'administration a procédé à un examen particulier de la situation du requérant ;

13. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés, la décision obligeant l'intéressé à quitter le territoire ne méconnaît pas les articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, L. 311-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 3 de la convention de New-York sur les droits de l'enfant et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur les conclusions en annulation de la décision fixant le pays de destination :

14. Considérant que, compte tenu de ce qui vient d'être exposé, le moyen tiré par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour doit être écarté ;

15. Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " et que ce dernier texte énonce que " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;

16. Considérant que la circonstance que le préfet n'ait pas indiqué dans la décision attaquée d'élément de fait sur l'absence de risque encouru par le requérant d'être exposé à des traitements inhumains ou dégradants ne constitue pas une insuffisance de motivation ; qu'il ne ressort pas de la motivation que le préfet se soit cru lié et ainsi ait commis l'erreur de droit alléguée ;

17. Considérant que, si le requérant soutient que sa vie serait menacée en Angola, il n'établit pas la réalité des risques pesant sur lui en cas de retour dans ce pays ; que, dès lors, la décision litigieuse n'a violé ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur les conclusions en annulation de la décision de délai de départ volontaire :

18. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. - Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. (...) " ; que même si le requérant réside en France depuis plusieurs années et y a un enfant, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en ne laissant qu'un délai de départ volontaire de trente jours ;

19. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D...A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête M. D...A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...D...A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 21 mai 2013 à laquelle siégeaient :

M. Moutte, président de la 1ère chambre,

M. Bézard, président,

M. Zupan, président assesseur.

Lu en audience publique, le 18 juin 2013.

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N° 12LY02846

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY02846
Date de la décision : 18/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUTTE
Rapporteur ?: M. Jean-François MOUTTE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : DEBBACHE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-06-18;12ly02846 ?
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