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23/04/2013 | FRANCE | N°12LY02966

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 23 avril 2013, 12LY02966


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 4 décembre 2012 sous le n° 12LY02966, présentée pour M. et Mme B...A..., domiciliés 8 rue de Perthuis à Charnay-lès-Mâcon (71850) par Me Bonnefoy-Claudet ;

M. et Mme A...demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble n° 0902401 du 27 septembre 2012 qui a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 19 janvier 2009, par lequel le maire de Peyrus a refusé, au nom de l'Etat, de leur délivrer un permis de construire ainsi que de la décision du préfet de

la Drôme portant rejet implicite de leur recours hiérarchique ;

2°) d'annuler ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 4 décembre 2012 sous le n° 12LY02966, présentée pour M. et Mme B...A..., domiciliés 8 rue de Perthuis à Charnay-lès-Mâcon (71850) par Me Bonnefoy-Claudet ;

M. et Mme A...demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble n° 0902401 du 27 septembre 2012 qui a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 19 janvier 2009, par lequel le maire de Peyrus a refusé, au nom de l'Etat, de leur délivrer un permis de construire ainsi que de la décision du préfet de la Drôme portant rejet implicite de leur recours hiérarchique ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que la réponse apportée par le jugement attaqué au moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté contesté est elle-même insuffisamment motivée ; que ce jugement est entaché de dénaturation des faits et, là encore, de défaut de motivation en ce qu'il admet le bien fondé du motif de refus de permis de construire fondé sur l'insuffisance du réseau public d'alimentation en eau potable alors qu'il manque en fait, tout comme le motif fondé sur l'insuffisance du réseau d'électricité, quant à lui jugé illégal ; que la motivation du jugement attaqué dans son ensemble est défaillante ; que le tribunal a omis de répondre au moyen tiré du détournement de pouvoir ; que l'arrêté contesté, qui se borne à citer des extraits des articles L. 111-4, L. 111-1-2 et R. 111-14 du code de l'urbanisme, ne satisfait pas aux exigences des articles R. 424-5 et A. 424-4 du même code imposant la motivation des refus de permis de construire ; qu'il ne mentionne pas les circonstances de fait s'opposant au projet, ni les éléments de droit sur lesquels se fonde la référence à une " zone de protection des paysages et des sites " ; que, sur le fond, le maire de Peyrus a fait une inexacte application des articles L. 111-1-2 et R. 111-14 du code de l'urbanisme ; qu'en effet, le terrain d'assiette du projet, situé à une centaine de mètres de l'agglomération sans que le chemin rural n° 21 ne crée de séparation nette, ne peut être regardé comme situé en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune ; qu'il est situé à proximité immédiate de terrains supportant des bâtiments achevés ou en cours de construction, dans un secteur que la commune entend d'ailleurs urbaniser ; que, pour ces mêmes raisons, le projet ne favorise nullement une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels environnants, au sens de l'article R. 111-14 ; qu'il n'existe aucune zone de protection des paysages et des sites ; qu'au demeurant, l'existence d'une telle zone n'avait été mentionnée dans le certificat d'urbanisme du 8 septembre 2008 que pour la parcelle E 179, non pour les parcelles E 180, E 181 et E 182 également comprises dans le terrain d'assiette du projet, de sorte que ce motif de l'arrêté contesté est entaché à la fois d'erreur de fait et d'erreur de droit ; que la falaise dont parlait le préfet devant le tribunal se situe à environ 200 mètres, tandis que de nombreuses constructions ont déjà été autorisées au pied de la colline ; que le motif de refus fondé sur l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme est tout aussi infondé ; que, pour l'application de ce texte, il convient de distinguer entre simple raccordement et travaux d'extensions des réseaux en cause ; que le projet litigieux n'impose aucune extension du réseau d'alimentation en eau potable ; que le courrier de la société Véolia - Compagnie Générale des Eaux produit par la commune comporte une date incohérente et des indications techniques insuffisantes ; que les parcelles E 179, E 180 et E. 181 ne sont pas enclavées, puisque la parcelle E 182 donne sur la voie publique ; que le réseau a du reste été jugé suffisant pour accorder des permis de construire aux propriétaires des parcelles voisines E 356 et E 366 ; qu'il n'y existe aucun problème de pression ;

Vu le jugement attaqué et l'arrêté contesté ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 mars 2013, présenté pour le ministre de l'égalité des territoires et du logement, concluant au rejet de la requête ;

Il soutient que le jugement attaqué est suffisamment motivé et répond à l'ensemble des moyens soulevés par M. et MmeA... ; que l'arrêté contesté énonce avec une précision suffisante les éléments de fait et de droit qui le fondent, et satisfait ainsi aux exigences de l'article A. 424-4 du code de l'urbanisme ; que le terrain d'assiette du projet, situé dans une zone naturelle boisée, à plusieurs centaines de mètres du centre du bourg de Peyrus, et jouxtant des terrains non bâtis, est en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune au sens de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme ; que les constructions les plus proches se trouvent au-delà du chemin rural n° 21, dans un compartiment distinct ; qu'une construction à cet endroit serait de nature à favoriser une urbanisation incompatible avec la vocation des espaces naturels environnants, et donc contraire aux dispositions de l'article R. 111-14 du code de l'urbanisme ; que le gestionnaire du service de distribution d'eau potable a indiqué, dans le cadre de la demande de certificat d'urbanisme antérieurement présentée par les requérants, qu'il n'est pas techniquement envisageable de réaliser de nouvelles constructions dans ce secteur sans procéder au préalable à d'importants travaux de renforcement du réseau, de sorte que l'article L. 111-4 dudit code a été à bon droit opposé ;

Vu le courrier adressé aux parties le 14 mars 2013, les avisant, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour est susceptible de relever d'office un moyen d'ordre public ;

Vu le mémoire, enregistré le 22 mars 2013, présenté pour le ministre de l'égalité des territoires et du logement, concluant aux mêmes fins que précédemment et sollicitant une substitution de base légale ;

Il soutient que si le refus de permis de construire contesté n'a pu légalement prendre appui sur les articles L. 111-1-2 et R. 111-4 du code de l'urbanisme, la commune de Peyrus étant située en zone de montagne, il peut trouver sa base légale dans les dispositions du III de l'article L. 145-3 du même code, qui interdit les constructions en discontinuité des bourgs, villages, hameaux, et groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants ; que le terrain d'assiette du projet, en effet, ne se trouve pas dans la continuité du bâti existant ;

Vu le mémoire, enregistre le 25 mars 2013, présenté pour M. et MmeA..., concluant aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ;

Ils ajoutent que, la commune de Peyrus étant située en zone de montagne, les motifs de l'arrêté contesté fondés sur les articles L. 111-1-2 et R. 111-14 du code de l'urbanisme procèdent de la méconnaissance du champ d'application de ces dispositions ; que le ministre de l'égalité des territoires et du logement réclame vainement une substitution de base légale, les dispositions de l'article L. 145-3 III du même code ne pouvant faire obstacle au projet ; qu'en effet, le terrain en cause fait partie d'un groupe d'habitations existantes ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 avril 2013 :

- le rapport de M. Zupan, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- et les observations de Me Bonnefoy-Claudet, avocat de M. et Mme A...,

1. Considérant que M. et Mme A...relèvent appel du jugement, en date du 27 septembre 2012, par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur recours pour excès de pouvoir formé contre l'arrêté du maire de Peyrus du 19 janvier 2009, pris au nom de l'Etat, leur refusant un permis de construire en vue de l'édification d'une maison d'habitation et contre la décision du préfet de la Drôme portant rejet implicite de leur recours hiérarchique ;

Sur la régularité du jugement attaqué, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens s'y rapportant :

2. Considérant qu'il ressort des énonciations du jugement attaqué que le tribunal n'a apporté aucune réponse au moyen, qui n'était pas inopérant, tiré du détournement de pouvoir affectant l'arrêté du maire de Peyrus du 19 janvier 2009 ; que ce jugement est dès lors irrégulier et doit être annulé ;

3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. et MmeA... ;

Sur l'intervention de la commune de Peyrus :

4. Considérant que la commune de Peyrus, dont le territoire et les services sont concernés par le projet de M. et MmeA..., justifie à ce titre d'un intérêt lui conférant qualité pour intervenir au soutien de la défense de l'Etat ; que son intervention doit en conséquence être admise ;

Sur la légalité des décisions contestées :

5. Considérant qu'en vertu de l'article R. 424-5 du code de l'urbanisme, " si la décision comporte rejet de la demande (...), elle doit être motivée " ; que l'article A. 424-4 du même code prévoit de même que l'arrêté portant refus de permis de construire " précise les circonstances de droit et de fait qui motivent la décision " ; que l'arrêté contesté mentionne, en visant l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme, que le terrain d'assiette du projet " n'est pas desservi par le réseau public d'électricité ", qu'il " a une desserte en eau potable insuffisante pour alimenter une telle habitation " et que les services compétents ne sont pas en mesure de préciser dans quel délai les travaux d'extension ou de renforcement des réseaux pourront être effectués ; qu'il mentionne ensuite que " le projet est situé dans une zone de protection des paysages et des sites " et que " sa localisation est par conséquent de nature à favoriser une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels environnants " au sens de l'article R. 111-14 du même code ; qu'enfin, il indique que " le projet est situé hors des parties actuellement urbanisées de la commune et (...) ne se rattache pas à l'une des exceptions prévues par l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme " ; que cette motivation satisfait aux exigences des dispositions précitées, alors même que n'y sont précisés ni la nature et l'ampleur des travaux de réseaux nécessaires, ni le régime de protection des sites et paysages applicable au secteur concerné, et que l'environnement du terrain litigieux n'y est pas décrit ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme : " Lorsque, compte tenu de la destination de la construction ou de l'aménagement projeté, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte du projet, le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé si l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'un permis de construire doit être refusé lorsque, d'une part, des travaux d'extension ou de renforcement de la capacité des réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou d'électricité sont nécessaires à la desserte de la construction projetée et, d'autre part, lorsque l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés, après avoir, le cas échéant, accompli les diligences appropriées pour recueillir les informations nécessaires à son appréciation ;

7. Considérant que la société Véolia - Compagnie générale des eaux, gestionnaire du réseau d'adduction d'eau potable, a indiqué au maire de Peyrus, dans le cadre de l'instruction de la demande de certificat d'urbanisme antérieurement présentée par M. et MmeA..., que la pression de ce réseau n'était pas suffisante pour alimenter leurs parcelles cadastrées E 179, E 180 et E 181 ; que si cet avis mentionne à tort la situation d'enclavement desdites parcelles, alors que les requérants sont également propriétaires de la parcelle E 182 bordant le chemin rural n° 21, cette erreur est sans incidence, la maison projetée devant être implantée sur les parcelles E 180 et E 181 ; que l'incohérence de la date qui y est portée, antérieure à celle de la demande de renseignement formulée par le maire, n'en affecte ni la sincérité ni le contenu ; qu'en outre, la société Véolia - Compagnie Générale de Eaux a indiqué, par lettre du 12 juin 2007, que le réseau ne pouvait, en l'état, permettre d'alimenter de nouvelles constructions dans le quartier dit " Le Banc du Conseil " ; que ce courrier, contrairement à ce que soutiennent M. et MmeA..., concerne aussi nécessairement le secteur dans lequel ils ont leur propriété, situé dans le prolongement dudit quartier, en aval de la partie du réseau ainsi évoquée ; qu'en se bornant à faire valoir que des maisons ont été récemment construites dans ce secteur, les requérants n'apportent aucun élément sérieux de nature à remettre en cause ces avis techniques ; qu'il n'est pas contesté, par ailleurs, que le maire de Peyrus était dans l'impossibilité d'indiquer dans quel délai les travaux de renforcement nécessaires pourraient être exécutés ; qu'ainsi, les décisions contestées ne méconnaissent pas, en ce qui concerne le réseau de distribution d'eau potable, les dispositions précitées de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme ;

8. Considérant que l'allégation selon laquelle le maire de Peyrus s'opposerait au projet de M. et Mme A...pour la seule raison qu'ils proviennent d'une autre région n'est corroborée par aucun commencement de preuve ; que le moyen tiré du détournement de pouvoir ne saurait dès lors être accueilli ;

9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, eu égard à la portée du motif de refus fondé sur l'insuffisance du réseau public de distribution d'eau potable, valablement opposé à M. et Mme A...ainsi qu'il vient d'être dit, que le maire de Peyrus et le préfet de la Drôme eussent pris les mêmes décisions en se fondant uniquement sur lui ; que, dans ces conditions, les moyens visant les autres motifs de refus opposés par lesdites décisions, fondés sur les articles L. 111-1-2 et R. 111-14 du code de l'urbanisme ainsi que sur l'absence de desserte du terrain litigieux en électricité sont inutilement invoqués ; que, pour la même raison, il n'est pas besoin pour la cour de se prononcer sur la substitution de motif sollicitée, à titre nécessairement subsidiaire, par le ministre de l'égalité des territoires et du logement sur le fondement de l'article L. 145-3 III du code de l'urbanisme ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Peyrus, que M. et Mme A...ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêté du maire de Peyrus du 19 janvier 2009 leur refusant un permis de construire et de la décision du préfet de la Drôme rejetant leur recours gracieux ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. et Mme A...la somme qu'ils réclament en remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens ; que ces mêmes dispositions font également obstacle aux conclusions de la commune de Peyrus qui n'a pas la qualité de partie ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble n° 0902401 du 27 septembre 2012 est annulé.

Article 2 : L'intervention de la commune de Peyrus est admise.

Article 3 : La demande présentée au tribunal administratif de Grenoble par M. et Mme A...et leurs conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions de la commune de Peyrus tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B...A..., à la commune de Peyrus et au ministre de l'égalité des territoires et du logement.

Délibéré après l'audience du 2 avril 2013, à laquelle siégeaient :

M. Moutte, président de chambre,

M. Bézard, président,

M. Zupan, président-assesseur.

Lu en audience publique, le 23 avril 2013.

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N° 12LY02966

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY02966
Date de la décision : 23/04/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Nature de la décision. Refus du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUTTE
Rapporteur ?: M. David ZUPAN
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : BONNEFOY-CLAUDET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-04-23;12ly02966 ?
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