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19/03/2013 | FRANCE | N°12LY02210

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 19 mars 2013, 12LY02210


Vu la requête, enregistrée le 10 août 2012, présentée pour la commune de Domancy (Haute-Savoie), représentée par son maire ;

La commune de Domancy demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902437 du tribunal administratif de Grenoble du 14 juin 2012 qui a annulé l'arrêté du 9 janvier 2009 par lequel son maire a refusé de délivrer un permis d'aménager à M. C...;

2°) de rejeter la demande de M. C...devant le tribunal administratif ;

3°) de condamner M. C...à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justi

ce administrative ;

La commune de Domancy soutient que le maire n'a commis aucune erreur m...

Vu la requête, enregistrée le 10 août 2012, présentée pour la commune de Domancy (Haute-Savoie), représentée par son maire ;

La commune de Domancy demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902437 du tribunal administratif de Grenoble du 14 juin 2012 qui a annulé l'arrêté du 9 janvier 2009 par lequel son maire a refusé de délivrer un permis d'aménager à M. C...;

2°) de rejeter la demande de M. C...devant le tribunal administratif ;

3°) de condamner M. C...à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune de Domancy soutient que le maire n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation en opposant au projet les dispositions des articles R. 111-2 et R. 111-5 du code de l'urbanisme, compte tenu du danger représenté par le débouché sur la route départementale n° 1205 ; que le maire a fait une exacte application de l'article L. 145-3 du même code, le projet se situant dans un secteur encore préservé qui ne peut être regardé comme urbanisé ; que le projet, qui aboutit à une modification de l'accès à la route départementale n° 1205, nécessitait dès lors la consultation du département de la Haute-Savoie, en application de l'article R. 423-53 du code de l'urbanisme ; que le maire ne s'est pas estimé lié par l'avis défavorable rendu le 22 octobre 2008 par le conseil général ; que la circonstance que ce dernier n'ait pas été consulté lors de l'instruction d'un projet voisin est sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué ; qu'enfin, il ne peut être reproché au maire d'avoir précédemment délivré un certificat d'urbanisme positif, celui-ci concernant en effet un projet différent ;

Vu le jugement attaqué ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 12 novembre 2012, la clôture de l'instruction a été fixée au 3 décembre 2012 ;

Vu le mémoire, enregistré le 13 novembre 2012, présenté pour M.C..., qui demande à la cour :

- de rejeter la requête ;

- d'enjoindre au maire de la commune de Domancy de délivrer le permis d'aménager demandé dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou subsidiairement, d'examiner à nouveau sa demande, dans le même délai ;

- de condamner la commune de Domancy à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. C...soutient que le futur lotissement est directement desservi par une voie communale, laquelle présente des caractéristiques suffisantes et permet un accès en toute sécurité ; que la question du débouché de cette voie sur la route départementale n° 1205 relève des conditions générales de circulation, lesquelles ne peuvent fonder un refus de permis ; qu'en tout état de cause, aucun risque pour la sécurité n'existe au niveau de ce débouché ; qu'ainsi, le maire a commis une erreur d'appréciation en opposant au projet les dispositions des articles R. 111-2 et R. 111-5 du code de l'urbanisme ; que le maire a également commis une erreur d'appréciation en fondant le refus de permis sur l'article L. 145-3 du même code, le terrain d'assiette n'étant pas situé dans un secteur préservé du territoire communal et le projet étant bien prévu en continuité d'habitations existantes ; qu'aucun autre motif de refus ne pouvant être opposé au projet, il sollicite de la cour qu'elle enjoigne au maire de délivrer le permis demandé, dans un délai d'un mois, et ceci sous astreinte, compte tenu des circonstances de l'espèce ;

Vu le mémoire, enregistré le 30 novembre 2012, présenté pour la commune de Domancy, représentée par son maire, qui, n'apportant aucun élément nouveau, n'a pas été communiqué ;

En application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, par un courrier du 6 février 2013, les parties ont été informées du fait que la cour envisage de soulever d'office le moyen tiré de l'inapplicabilité des dispositions de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme dans les communes dotées d'un document d'urbanisme, comme celle de Domancy, et, par suite, de l'illégalité du motif de l'arrêté attaqué fondé sur ces dispositions ;

Vu le mémoire, enregistré le 11 février 2013, par lequel M. C...a répondu à cette communication de la cour ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 février 2013 :

- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- et les observations de MeB..., représentant le cabinet Liochon et Duraz, avocat de la commune de Domancy, et celles de MeD..., représentant le cabinet ISEE Avocats, avocat de M. C...;

1. Considérant que, par un jugement du 14 juin 2012, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 9 janvier 2009 par lequel le maire de la commune de Domancy a refusé de délivrer un permis d'aménager à M. C...; que cette commune relève appel de ce jugement ;

Sur la légalité de l'arrêté litigieux :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-1 du code de l'urbanisme : " Les dispositions du présent chapitre sont applicables aux constructions, aménagements, installations et travaux faisant l'objet d'un permis de construire, d'un permis d'aménager ou d'une déclaration préalable ainsi qu'aux autres utilisations du sol régies par le présent code. / Toutefois : / a) Les dispositions des articles R. 111-3, R. 111-5 à 111-14, R. 111-16 à R. 111-20 et R. 111-22 à R. 111-24-2 ne sont pas applicables dans les territoires dotés d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 111-2 du même code : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations " ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 111-5 du même code : " Le projet peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à son importance ou à la destination des constructions ou des aménagements envisagés, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficile la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie. / Il peut également être refusé ou n'être accepté que sous réserve de prescriptions spéciales si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celle des personnes utilisant ces accès. Cette sécurité doit être appréciée compte tenu, notamment, de la position des accès, de leur configuration ainsi que de la nature et de l'intensité du trafic " ;

3. Considérant que M. C...a présenté une demande de permis d'aménager pour diviser en trois lots un terrain, chacun des lots devant supporter une maison d'habitation comportant au maximum deux logements ; que le maire de la commune de Domancy, estimant qu'un danger existe au niveau de l'accès au terrain d'assiette de ce projet, a opposé à ce dernier les dispositions précitées des articles R. 111-2 et R. 111-5 du code de l'urbanisme ;

4. Considérant, d'une part, que la commune de Domancy est dotée d'un plan d'occupation des sols ; que, par suite, en application de l'article R. 111-1 précité du code de l'urbanisme, l'article R. 111-5 du même code n'est pas applicable sur le territoire de cette commune ; qu'en conséquence, le motif de l'arrêté litigieux fondé sur les dispositions de cet article est entaché d'illégalité ;

5. Considérant, d'autre part, que le terrain d'assiette du projet est desservi par la voie dénommée impasse des Marais ; qu'aucun élément ne peut permettre d'établir que cette voie, qui présente une largeur de 5 mètres, aux dires non contestés de M.C..., ne présenterait pas des caractéristiques suffisantes pour permettre d'accéder en toute sécurité à ce terrain, compte tenu du trafic induit par les quelques constructions qu'elle dessert déjà et des besoins propres de l'opération litigieuse ; qu'il ressort des pièces de la demande de permis d'aménager que l'impasse des Marais, qui est constituée des parcelles cadastrées A 950 et A 2536 et appartient audit terrain, débouche directement sur la route départementale n° 1205 ; que la commune n'étaye l'affirmation selon laquelle cette route supporte un trafic routier important par aucun élément de justification ; que la visibilité sur la route départementale depuis cet accès est dégagée des deux côtés, celle-ci étant rectiligne sur plusieurs centaines de mètres à cet endroit ; que, par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'accès à l'impasse des Marais depuis cette route présenterait un danger particulier ; que, dans ces conditions, à supposer même que la vitesse ne soit pas limitée à 50 km/h au droit du terrain d'assiette, le maire a commis une erreur d'appréciation dans l'application de l'article R. 111-2 précité du code de l'urbanisme en opposant au projet les dispositions de cet article ;

6. Considérant, en second lieu, qu'aux termes du III de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme : " Sous réserve de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension limitée des constructions existantes et de la réalisation d'installations ou d'équipements publics incompatibles avec le voisinage des zones habitées, l'urbanisation doit se réaliser en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants (...) " ; que par groupe " de constructions traditionnelles ou d'habitations existants " au sens de ces dispositions, il convient d'entendre un groupe de plusieurs bâtiments qui, bien que ne constituant pas un hameau, se perçoivent, compte tenu de leur implantation les uns par rapport aux autres, notamment de la distance qui les sépare, de leurs caractéristiques et de la configuration particulière des lieux, comme appartenant à un même ensemble ; que pour déterminer si un projet de construction réalise une urbanisation en continuité par rapport à un tel groupe, il convient de rechercher si, par les modalités de son implantation, notamment en termes de distance par rapport aux constructions existantes, ce projet sera perçu comme s'insérant dans l'ensemble existant ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet litigieux fait l'objet d'un classement en zone UB d'habitat individuel au plan d'occupation des sols de la commune de Domancy ; que ce terrain est situé dans un secteur du territoire communal qui est resté en partie à l'état naturel mais dans lequel, néanmoins, on trouve d'assez nombreuses constructions disséminées ; qu'en particulier, le terrain est situé au sud des parcelles construites qui se succèdent, de manière quasiment ininterrompue, le long de la route départementale n° 1205 ; que, quelles que soient leurs futures implantations sur les trois lots, les bâtiments projetés seront au plus distants d'environ 80 mètres des groupes de constructions existants les plus proches ; que, dès lors, contrairement à ce que le maire de la commune de Domancy a estimé, le projet de M.C..., qui s'insèrera dans l'ensemble de constructions existant dans cette partie du territoire communal, ne méconnaît pas les dispositions précitées du III de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme ;

8. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la commune de Domancy n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 9 janvier 2009 par lequel son maire a refusé de délivrer un permis d'aménager à M.C... ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

9. Considérant que, à la suite de l'injonction qui a été prononcée par le tribunal administratif de Grenoble, le maire de la commune de Domancy a statué à nouveau sur la demande de permis d'aménager de M. C...et, par un arrêté du 12 septembre 2012, a rejeté à nouveau cette demande ; que, par suite, les conclusions de M. C...tendant à ce qu'en application des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative, la cour enjoigne au maire de délivrer le permis d'aménager demandé ou, subsidiairement, d'examiner à nouveau sa demande, n'ont pas d'objet et ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M.C..., qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, soit condamné à payer à la commune de Domancy la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de cette commune le versement d'une somme de 1 500 euros au bénéfice de M. C...sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Domancy est rejetée.

Article 2 : La commune de Domancy versera à M. C...une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de M. C...est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Domancy et à M. A...C....

Délibéré à l'issue de l'audience du 26 février 2013, à laquelle siégeaient :

M. Moutte, président,

M. Zupan, président-assesseur,

M. Chenevey, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 mars 2013.

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N° 12LY02210

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY02210
Date de la décision : 19/03/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-02-04 Urbanisme et aménagement du territoire. Procédures d'intervention foncière. Lotissements.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUTTE
Rapporteur ?: M. Jean-Pascal CHENEVEY
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : LIOCHON et DURAZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-03-19;12ly02210 ?
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