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08/01/2013 | FRANCE | N°12LY01369

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 08 janvier 2013, 12LY01369


Vu le recours, enregistré au greffe de la cour le 31 mai 2012 sous le n° 12LY01369, présenté par le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie ;

Le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble n° 0801005 du 27 mars 2012 qui, à la demande de l'association " Chambarans sans éolienne industrielle ", de M. I... L..., de M. J... F..., de M. B... C..., de M. H...N..., de M. K... D... et des épouxA..., a annulé l'arrêté, en date du 10 janvier 2

008, par lequel les préfets de la Drôme et de l'Isère ont conjointement créé u...

Vu le recours, enregistré au greffe de la cour le 31 mai 2012 sous le n° 12LY01369, présenté par le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie ;

Le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble n° 0801005 du 27 mars 2012 qui, à la demande de l'association " Chambarans sans éolienne industrielle ", de M. I... L..., de M. J... F..., de M. B... C..., de M. H...N..., de M. K... D... et des épouxA..., a annulé l'arrêté, en date du 10 janvier 2008, par lequel les préfets de la Drôme et de l'Isère ont conjointement créé une zone de développement de l'éolien sur le territoire des communes de Hauterives, Lens-Lestang, Le Grand-Serre et Lentiol ;

2°) de rejeter la demande présentée au tribunal administratif de Grenoble par l'association " Chambarans sans éolienne industrielle " et autres ;

Il soutient que le motif d'annulation fondé sur le caractère prétendument incomplet du dossier de proposition de création de la zone de développement de l'éolien est erroné en droit, dès lors que, s'il appartient au préfet d'apprécier la cohérence départementale des zones de développement de l'éolien, l'article 10-1 de la loi du 10 février 2000 n'impose pas que ce dossier lui-même en justifie ; que le préfet peut se fonder sur des éléments ne figurant pas dans le dossier de proposition ; qu'en tout état de cause, contrairement à ce qu'énonce le jugement attaqué, le projet de zone de développement de l'éolien de Montrigaud est mentionné sur une carte consacrée au cumul des champs de covisibilité, établie à la demande de la direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement de Rhône-Alpes ; que le préfet disposait de l'ensemble des éléments nécessaires pour apprécier la cohérence départementale des zones de développement de l'éolien ; que c'est à tort également que le tribunal a retenu la méconnaissance du principe de participation du public figurant au 4° de l'article L. 110-1 du code de l'environnement ; que cette disposition, à laquelle ne renvoie pas la loi du 10 février 2000, n'est pas applicable à la création d'une zone de développement de l'éolien, laquelle n'est pas un document d'urbanisme, n'emporte pas autorisation de réaliser des travaux, ne préjuge en rien de la délivrance de permis de construire et n'a par elle-même aucune incidence directe sur l'environnement ; qu'en toute hypothèse, la zone de développement litigieuse correspond exactement au parc éolien projeté par la société VSB Energies Nouvelles, dont la demande de permis de construire a donné lieu à une concertation avec le public, au moyen de réunions et d'un comité de suivi, puis à enquête publique ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance, en date du 4 octobre 2012, fixant la clôture de l'instruction, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, au 7 novembre 2012 ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 novembre 2012, présenté pour l'association " Chambarans sans éolienne industrielle ", M. et MmeA..., M.F..., M. L...et M. D..., concluant au rejet de la requête et à la condamnation de l'Etat à leur verser la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que le dossier de proposition était incomplet, comme l'a relevé le tribunal, en ce qu'il ne comportait aucun élément permettant de veiller à la cohérence départementale des zones de développement de l'éolien, notamment aucune carte de covisibilité cumulée avec les parcs éoliens de Beausemblant et de La Motte-de-Galaure, seulement mentionnés, et aucune indication relative à la zone de développement de l'éolien de Thivolet-Montrigaud ; que la note sommaire communiquée le 18 octobre 2007 n'a pu compenser cette carence ; que la seule justification du périmètre de la zone de développement de l'éolien en litige repose sur le projet de parc éolien dont la demande de permis de construire était déjà déposée ; que le principe de participation, qui s'applique en la matière contrairement à ce que soutient le ministre appelant, a été méconnu ; que l'enquête publique menée dans le cadre de l'instruction de la demande de permis de construire susmentionnée ne saurait tenir lieu de participation au titre de la procédure de création de la zone de développement de l'éolien, celle-ci prévoyant une puissance maximale installée supérieure de 50 % ; que les exposants entendent reprendre leurs moyens de première instance, excepté celui tiré de la méconnaissance de l'article R. 124-5 du code de l'environnement ; que les communes limitrophes et la commission départementale de la nature, des paysages et des sites de la Drôme n'ont pu donner un avis éclairé, faute de disposer d'éléments permettant d'apprécier la cohérence départementale des zones de développement de l'éolien ;

Vu le mémoire en intervention volontaire, enregistré le 7 novembre 2012, présenté pour la société VSB Energies Nouvelles, au soutien du recours du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie ;

Elle soutient qu'elle poursuit de longue date un projet de parc éolien dans le secteur considéré et justifie ainsi d'un intérêt à intervenir à l'instance ; que le tribunal a retenu à ...; que le principe général de participation consacré par cette disposition n'a fait l'objet d'aucune disposition particulière concernant la création des zones de développement de l'éolien, ce qui témoigne de la volonté du législateur et du pouvoir réglementaire de ne pas en étendre l'application à cette matière ; que l'article L. 110-1 du code de l'environnement vise uniquement les projets, ce que n'est pas une zone de développement de l'éolien ; que la création d'une telle zone n'entraîne par elle-même aucune conséquence sur l'environnement et n'implique pas nécessairement l'installation d'éoliennes, dont elle ne préjuge en rien ; qu'au demeurant l'impact environnemental des éoliennes est essentiellement positif ; qu'à le supposer applicable, le principe de participation a en l'espèce été respecté, compte tenu des multiples démarches entreprises afin de mettre en oeuvre une concertation en préalable au dépôt des demandes de permis de construire ; que ces demandes, antérieures à la proposition de création de la zone de développement de l'éolien, recouvrent le périmètre de celle-ci, de sorte que la concertation y afférente, spontanément organisée par l'exposante dans un souci de parfaite transparence, vaut nécessairement pour les deux procédures ; qu'ainsi, ont été mis en place un comité de suivi, un journal des éoliennes, une exposition, des réunions publiques ; que plusieurs articles ont paru dans la presse afin de présenter le projet ; que les communes ont elles-mêmes organisé une concertation au moyen de la publicité donnée aux réunions de leurs conseils municipaux évoquant le projet, d'informations diffusées dans leurs bulletins, de visites de sites éoliens ; que l'enquête publique a donné aux habitants une nouvelle occasion de s'exprimer ; que le second motif d'annulation retenu, tiré de ce que le dossier de proposition n'aurait pas permis aux préfets d'apprécier la cohérence départementale des zones de développement de l'éolien, est tout aussi infondé ; qu'en effet, la proposition de zone de développement portée par la communauté de communes du pays de Romans et la demande de permis de construire y afférente n'ont été déposées que postérieurement ; qu'au demeurant, une visite des lieux a été organisée et, par précaution, la direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement a exigé une étude complémentaire relative aux covisibilités, manifestant ainsi, en dépit de la postériorité de cet autre projet éolien, le souci de cohérence départementale imposé par l'article 10-1 de la loi du 10 février 2000 ;

En application de l'article R. 613-4 du code de justice administrative, par une ordonnance du 8 novembre 2012, l'instruction a été rouverte ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 décembre 2012, présenté par le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, concluant aux mêmes fins que le recours, par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'énergie ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 décembre 2012 :

- le rapport de M. Zupan, président ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- et les observations de MeE..., représentant la société d'avocats Fidal, avocat de la société VSB Energies Nouvelles, et celles de MeG..., représentant la SCP Deygas-Perrachon-Bes et associés, avocat de l'association " Chambarans sans éolienne industrielle ", de M.L..., de M.F..., de M. D... et des épouxA... ;

1. Considérant que le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie relève appel du jugement, en date du 27 mars 2012, par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé, à la demande de l'association " Chambarans sans éolienne industrielle ", de M. L..., de M. F..., de M. C..., de M.N..., de M. D...et des épouxA..., l'arrêté conjoint des préfets de la Drôme et de l'Isère du 10 janvier 2008 portant création d'une zone de développement de l'éolien dite " des Terres Blanches ", sur le territoire des communes de Hauterives, Lens-Lestang, Le Grand-Serre et Lentiol ;

Sur l'intervention de la société VSB Energies Nouvelles :

2. Considérant que la société VSB Energies Nouvelles a déposé des demandes de permis de construire en vue de réaliser un parc éolien dans le périmètre de la zone de développement de l'éolien créée par l'arrêté contesté ; qu'elle justifie ainsi d'un intérêt lui conférant qualité pour présenter une intervention volontaire au soutien du recours du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie ; que son intervention dans l'instance 11LY02859 est dès lors recevable ;

Sur le fond :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 10-1 de la loi susvisée du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, dans sa rédaction applicable au litige : " Les zones de développement de l'éolien sont définies par le préfet du département en fonction de leur potentiel éolien, des possibilités de raccordement aux réseaux électriques et de la protection des paysages, des monuments historiques et des sites remarquables et protégés. Elles sont proposées par la ou les communes dont tout ou partie du territoire est compris dans le périmètre proposé ou par un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, sous réserve de l'accord de la ou des communes membres dont tout ou partie du territoire est compris dans le périmètre proposé. / La proposition de zones de développement de l'éolien en précise le périmètre et définit la puissance installée minimale et maximale des installations produisant de l'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent pouvant bénéficier, dans ce périmètre, des dispositions de l'article 10. Elle est accompagnée d'éléments facilitant l'appréciation de l'intérêt du projet au regard du potentiel éolien, des possibilités de raccordement aux réseaux électriques et de la protection des paysages, des monuments historiques et des sites remarquables et protégés. / La décision du préfet du département intervient sur la base de la proposition dans un délai maximal de six mois à compter de la réception de celle-ci, après avis de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites et des communes limitrophes à celles dont tout ou partie du territoire est compris dans la zone de développement de l'éolien. Ces avis sont réputés favorables faute de réponse dans un délai de trois mois suivant la transmission de la demande par le préfet. Le préfet veille à la cohérence départementale des zones de développement de l'éolien et au regroupement des installations afin de protéger les paysages. / Les zones de développement de l'éolien s'imposent au schéma régional éolien défini au I de l'article L. 553-4 du code de l'environnement " ;

4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'un arrêté portant création d'une zone de développement de l'éolien a pour objet la définition d'un périmètre privilégié par les autorités publiques pour l'implantation des éoliennes ; qu'il repose sur une appréciation comparative et globale, à l'échelle d'un vaste territoire, des regroupements qu'il convient de favoriser dans le but notamment de respecter les paysages et les sites remarquables et protégés ; qu'eu égard à cet objet, contrairement à ce que soutient le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, le 4° du II de l'article L. 110-1 du code de l'environnement, qui consacre " le principe de participation, selon lequel (...) le public est associé au processus d'élaboration des projets ayant une incidence importante sur l'environnement ou l'aménagement du territoire " est applicable à la procédure de création d'une zone de développement de l'éolien ;

5. Considérant que le dossier de proposition de création de la zone de développement des terres Blanches, constitué par les quatre communes concernées, mentionne la création d'un comité de suivi, la diffusion d'une brochure, une information régulière dans les bulletins municipaux et la mise en place d'une exposition ; que, cependant, ces différents procédés de concertation ont été mis en oeuvre à l'occasion d'un projet spécifique de parc éolien élaboré par la société VSB Energies Nouvelles, et en seule référence à ce projet ; que si le périmètre de la zone de développement de l'éolien litigieuse, qui a d'ailleurs sa finalité propre ainsi qu'il vient d'être rappelé, a été déterminé en fonction de la localisation des 13 éoliennes projetées, il ne ressort pas des pièces du dossier, alors que sa puissance maximale autorisée est supérieure de 50 % à celle cumulée de ces 13 éoliennes, qu'il interdirait la réalisation d'autres projets de même nature susceptibles d'accroître sensiblement l'impact, notamment paysager, des seules installations ainsi présentées au public ; que, dans ces circonstances, ni les procédés de concertation susmentionnés, ni l'enquête publique réalisée dans le cadre de l'instruction des demandes de permis de construire de la société VSB Energies Nouvelles n'ont pu satisfaire à l'exigence de participation imposée par le II de l'article L. 110-1 du code de l'environnement ; que cette irrégularité, qui a privé le public d'une modalité d'information et d'expression garantie par la loi, revêt le caractère d'un vice substantiel à bon droit relevé par les premiers juges ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur le bien-fondé de l'autre motif d'annulation retenu le jugement attaqué, que le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté des préfets de la Drôme et de l'Isère du 10 janvier 2008 ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à verser à l'association " Chambarans sans éolienne industrielle ", à M. L..., à M. F..., à M. D...et aux époux A...la somme globale de 1 200 euros qu'ils réclament en remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : L'intervention de la société VSB Energies Nouvelles est admise.

Article 2 : Le recours du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie est rejeté.

Article 3 : L'Etat versera à l'association " Chambarans sans éolienne industrielle ", à M. L..., à M. F..., à M. D...et aux épouxA..., en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme globale de 1 200 euros.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, à l'association " Chambarans sans éolienne industrielle ", à M. I... L..., à M. J... F..., à M. B... C..., à M. H...N..., à M. K...D..., à M. et Mme M... A...et à la société VSB Energies Nouvelles. Copie en sera adressée aux communes de Hauterives, Lens-Lestang, Le Grand-Serre et Lentiol.

Délibéré après l'audience du 11 décembre 2012, à laquelle siégeaient :

M. Zupan, président de la formation de jugement,

M. Bézard, président,

M. Chenevey, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 janvier 2013.

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N° 12LY01369

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY01369
Date de la décision : 08/01/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Energie.

Nature et environnement.


Composition du Tribunal
Président : M. ZUPAN
Rapporteur ?: M. David ZUPAN
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : SCP DEYGAS-PERRACHON-BES et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-01-08;12ly01369 ?
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