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18/12/2012 | FRANCE | N°12LY00907

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 18 décembre 2012, 12LY00907


Vu la requête, enregistrée à la cour le 11 avril 2012, présentée pour M. Erdjan A et Mme Gjuldjan B épouse , domiciliés à ... par Me Borges de Deus Correia, avocat ;

Ils demandent à la Cour:

1°) d'annuler le jugement n° 1104830-1104831, du 9 décembre 2011, par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère, du 19 août 2011, leur refusant la délivrance d'un titre de séjour, les obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant le pays à dest

ination duquel ils seraient reconduits ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les ...

Vu la requête, enregistrée à la cour le 11 avril 2012, présentée pour M. Erdjan A et Mme Gjuldjan B épouse , domiciliés à ... par Me Borges de Deus Correia, avocat ;

Ils demandent à la Cour:

1°) d'annuler le jugement n° 1104830-1104831, du 9 décembre 2011, par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère, du 19 août 2011, leur refusant la délivrance d'un titre de séjour, les obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel ils seraient reconduits ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, à titre principal, de leur délivrer une carte de séjour " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte, de réexaminer leur situation et, dans l'attente, de leur délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, au profit de leur conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Ils soutiennent qu'en l'absence de décision leur refusant la délivrance d'un titre de séjour, le préfet ne pouvait légalement prendre à leur encontre une obligation de quitter le territoire français ; que les décisions leur faisant obligation de quitter le territoire français sont illégales en conséquence de l'illégalité des décisions leur refusant le bénéfice de l'admission provisoire au séjour en tant que demandeurs d'asile ; que ces mêmes décisions portent atteinte à leur droit à un recours effectif au sens de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'enfin, les décisions fixant le pays de destination méconnaissent les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été notifiée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations ;

Vu les décisions du 2 mars 2012, par lesquelles le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme D et l'a refusé à M. A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 novembre 2012 :

- le rapport de M. Moutte, président de chambre ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

1. Considérant que M. et Mme A soutiennent que les premiers juges se sont mépris sur la nature des décisions attaquées en estimant que, par les arrêtés contestés du 19 août 2011, le préfet de l'Isère leur avait refusé la délivrance d'un titre de séjour ; que, toutefois, il ressort des mentions de ces arrêtés que le préfet, après avoir rappelé que les demandes d'asile des intéressés, examinées selon les modalités de la procédure prioritaire, avaient été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, a indiqué que les requérants ne pouvaient dès lors obtenir la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 314-11, 8° ou de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que les refus d'autoriser leur séjour en France et les obligations de quitter le territoire français qui leur étaient opposés ne portaient pas à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée et ne contrevenaient pas aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en outre, le préfet de l'Isère vise dans ces arrêtés les dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lesquelles prévoient que le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour lui a été refusé ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; que, compte tenu de ces mentions non équivoques, le préfet de l'Isère doit être regardé comme ayant refusé à M. et Mme A la délivrance d'un titre de séjour qu'ils sollicitaient en qualité de réfugié, et ce nonobstant la circonstance que le dispositif même des arrêtés attaqués ne mentionne pas expressément l'existence d'un tel refus ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les premiers juges se seraient mépris sur la nature des décisions attaquées doit être écarté ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; /

2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; / 4° Si l'étranger n'a pas demandé le renouvellement de son titre de séjour temporaire et s'est maintenu sur le territoire français à l'expiration de ce titre ; / 5° Si le récépissé de la demande de carte de séjour ou l'autorisation provisoire de séjour qui avait été délivré à l'étranger lui a été retiré ou si le renouvellement de ces documents lui a été refusé. (...) " ;

3. Considérant qu'ainsi qu'il vient d'être exposé, le préfet de l'Isère a bien pris le 19 août 2011 des décisions de refus de titre de séjour à l'égard de M. et Mme A ; qu'ainsi, à la date des arrêtés attaqués, le même jour, ils étaient dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;

4. Considérant que pour contester les décisions du 19 août 2011 leur faisant obligation de quitter le territoire français, M. et Mme A ne peuvent pas utilement exciper de l'illégalité des décisions du 22 mars 2011 par lesquelles le préfet de l'Isère leur avait refusé la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour, dès lors que celles-ci n'ont pas servi de base légale aux premières décisions qui sont fondées sur le refus de titre de séjour ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente Convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles " ; qu'aux termes de l'article L. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'office statue sur les demandes d'asile dont il est saisi. (...) L'office statue par priorité sur les demandes émanant de personnes auxquelles le document provisoire de séjour prévu à l'article L. 742-1 a été refusé ou retiré pour l'un des motifs mentionnés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4, ou qui se sont vu refuser pour l'un de ces motifs le renouvellement de ce document. " ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 742-6 dudit code : " L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office (...) " ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de sa saisine dans le cadre de la procédure prioritaire prévue par l'article L. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides a rejeté, par décisions du 13 mai 2011, les demandes d'asile présentées par M. et Mme A ; que, par suite, ces derniers entraient dans le champ d'application de l'article L. 742-6 du code susmentionné et ne bénéficiaient du droit de se maintenir en France que jusqu'à la notification de cette dernière décision ;

7. Considérant que le droit à un recours effectif n'implique pas que l'étranger qui fait l'objet de la procédure prioritaire prévue à l'article L. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et dispose du droit de contester la décision de rejet qui lui est opposée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides devant la Cour nationale du droit d'asile puisse se maintenir sur le territoire français jusqu'à l'issue de son recours devant cette juridiction ; qu'au demeurant, l'étranger est à même de faire valoir utilement l'ensemble de ses arguments dans le cadre d'une procédure écrite et de se faire représenter à l'audience par un conseil ou par toute autre personne ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les décisions contestées sont contraires aux stipulations de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ; que M. et Mme A ne produisent aucun élément de nature à établir la réalité des risques personnels qu'ils encourraient, selon eux, en cas de retour dans leur pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes ; que leurs conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. et Mme A sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Erdjan A et Mme Gjuldjan B épouse , au préfet de l'Isère et au ministre de l'Intérieur.

Délibéré après l'audience du 27 novembre 2012, à laquelle siégeaient :

M. Moutte, président de chambre,

M. Bézard, président,

M. Zupan, président-assesseur.

Lu en audience publique, le 18 décembre 2012.

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N° 12LY00907


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY00907
Date de la décision : 18/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUTTE
Rapporteur ?: M. Jean-François MOUTTE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : BORGES DE DEUS CORREIA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-12-18;12ly00907 ?
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