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04/12/2012 | FRANCE | N°11LY02479

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 04 décembre 2012, 11LY02479


Vu la requête, enregistrée le 13 octobre 2011, présentée pour M. Mambueni , domicilié chez ... ;

M. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101389 en date du 25 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 novembre 2010 du préfet du Rhône lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et fixé la République démocratique du Congo comme pays à destination duquel cette mesure de police serait exécutée en cas

de refus d'obtempérer ;

2°) d'annuler les décisions attaquées ;

3°) d'enjoindre...

Vu la requête, enregistrée le 13 octobre 2011, présentée pour M. Mambueni , domicilié chez ... ;

M. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101389 en date du 25 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 novembre 2010 du préfet du Rhône lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et fixé la République démocratique du Congo comme pays à destination duquel cette mesure de police serait exécutée en cas de refus d'obtempérer ;

2°) d'annuler les décisions attaquées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative de lui délivrer une carte de séjour temporaire assortie d'un droit au travail sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter d'un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir en application de l'article L. 911-3 du code de justice administrative ;

4°) à titre subsidiaire d'enjoindre au préfet du Rhône en application de l'article L. 912-2 du code de justice administrative de procéder à un nouvel examen de sa situation et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter d'un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir en application de l'article L. 911-3 du code de justice administrative ;

5°) de condamner l'Etat à verser à son conseil la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sous réserve que ce dernier renonce à percevoir le bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

M. expose qu'il est entré en France, le 2 mai 2005 pour fuir les menaces dont il faisait l'objet au sein de la République démocratique du Congo ; qu'en décembre 2006, il a sollicité le bénéfice de l'asile politique ; que sa demande a été rejetée par l'Office français de protection pour les réfugiés et apatrides, le 12 avril 2007, puis par la Cour nationale du droit d'asile, le 15 avril 2009 ; qu'il a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire le 24 avril 2009 ; que le 11 mai 2009, il a sollicité le réexamen de sa situation administrative au regard de son état de santé et a obtenu en application de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers un titre de séjour valable du 17 juin 2009 au 16 juin 2010 ; que, le 19 mai 2010, il a sollicité le renouvellement de son titre de séjour ; que, par décision du 15 décembre 2010, le préfet du Rhône a rejeté sa demande de renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et fixé la République démocratique du Congo comme pays de destination ; que par jugement du 25 mai 2011 le tribunal administratif a rejeté sa requête ; qu'il entend former appel contre ce jugement ; que compte tenu de sa demande d'aide juridictionnelle son appel n'est pas tardif ; que s'agissant de la décision portant refus de séjour, celle-ci méconnaît l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que les éléments produits par l'intéressé ne permettaient pas de démontrer que ce dernier ne pouvait prétendre à un accès effectif aux soins dans son pays d'origine ; que le tribunal a admis que son état de santé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que sa pathologie a été décrite par les pièces qu'il produit et confirmée par les professionnels de la santé de 2007 à ce jour, laquelle consiste en un " syndrome post-traumatique ou encore syndrome dépressif important ", que cet état a été constaté par le docteur médecin légiste, auprès du centre hospitalier de Bigorre à Tarbes et un expert judiciaire ; qu'il a poursuivi un traitement à partir de juillet 2007 à Tarbes avec le docteur , psychiatre des hôpitaux ; que, suite à son déménagement à Lyon, il a été pris en charge par le CMP des Basses Barolles et le docteur , psychiatre, et un praticien du centre hospitalier de Saint-Jean de Dieu responsable du CMP de Saint-Genis Laval ; qu'il a sollicité des certificats des docteurs et , médecins agréés par la préfecture ; qu'il ne saurait donc être contesté qu'il est atteint d'un " syndrome anxio-dépressif post-traumatique " majeur ; que les ordonnances produites au dossier corroborent cette pathologie depuis 2007 ; que, toutefois le tribunal a estimé que le requérant ne démontrait pas le lien entre les sévices subis dans le pays d'origine et les troubles décrits ; que cette motivation est surprenante au vu des pièces produites ; que le docteur a admis que les troubles dont il était atteint sont compatibles avec une torture à l'électricité par contention des membres inférieurs et supérieurs (face dorsale, périnée et organes génitaux, membres inférieurs) ; que c'est donc à tort que le tribunal a estimé qu'il n'apportait pas la preuve du lien entre les sévices subis dans son pays d'origine et la pathologie ; que cinq médecins différents dans des villes différentes ont estimé qu'il ne pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine en raison des liens entre sa pathologie et le pays d'origine ; que les médecins ont estimé qu'il ne pouvait retourner dans son pays d'origine ; que le jugement attaqué devra être infirmé ; que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que le requérant ne pouvait bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'administration a commis sur ce point une erreur manifeste d'appréciation ; qu'à l'appui de sa demande il a justifié de son insertion au sein de la société française grâce à la situation régulière dont il a bénéficié initialement ; que la décision attaquée méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il a su s'insérer par le travail à la société française ; qu'il a un bail à son nom et acquitte un loyer ; qu'il n'a plus aucun lien avec sa famille au pays ; qu'il apporte la preuve que sa femme et son enfant avec lesquels il est arrivé en France ont disparu sans laisser d'adresse ; qu'il lui appartient d'élucider cette disparition ; que sa vie familiale n'est plus au Congo ; que l'obligation de quitter le territoire est illégale par voie d'exception d'illégalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé ; que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'avait pas été violé ; qu'il réside habituellement en France depuis 6 ans et que son état de santé nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que l'obligation de quitter le territoire méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le docteur , expert judiciaire près la Cour d'appel de Pau, a fait état de ce que les traumatismes multicentriques dont il fait l'objet sont compatibles avec une torture à l'électricité sur contention des membres supérieurs et inférieurs ; que c'est à tort que le tribunal a estimé que M. ne rapportait pas la preuve du lien entre les sévices subis dans son pays d'origine et de sa pathologie actuelle ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 6 mars 2012, le mémoire en défense présenté pour le préfet du Rhône tendant au rejet de la requête et, en outre, à ce que M. soit condamné à verser à l'Etat la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le préfet du Rhône expose que M. , qui est entré irrégulièrement en France à la date déclarée du 2 mai 2005, n'a pas obtenu le bénéfice de l'asile conventionnel ; qu'il a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire le 24 avril 2009 ; qu'il s'est maintenu en France en situation irrégulière ; que quatre ans après son entrée en France, le 11 mai 2009, il a sollicité un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11-11 ° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet des Hautes-Pyrénées a fait droit à cette demande et lui a délivré un titre de séjour temporaire, mention " vie privée et familiale ", valable du 17 juin 2009 au 16 juin 2010 ; qu'il a sollicité le renouvellement de son titre de séjour le 19 mai 2010 auprès de la préfecture du Rhône ; que le médecin inspecteur de la santé publique a été saisi ; que, dans son avis du 7 juillet 2010, celui-ci indique que l'état de santé du demandeur nécessitait une prise en charge médicale ; que le défaut de prise en charge pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'au vu des informations disponibles, il pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et qu'il pouvait voyager vers son pays d'origine sur le plan sanitaire ; que, par décision du 15 novembre 2010, le préfet du Rhône a donc refusé le renouvellement de son titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français ; que le tribunal administratif, par jugement du 25 mai 2011 a rejeté sa requête ; que M. a formé appel contre ce jugement ; que s'agissant de la décision portant refus de titre de séjour, le préfet n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation concernant sa situation médicale ; que le tribunal a écarté ce moyen en indiquant que M. ne justifiait pas de la réalité des sévices qu'il avait subis et qu'il a invoqués pour être à l'origine de la dégradation de son état de santé physique et mental ; que, si M. reproche au tribunal, devant la Cour, de ne pas s'être prononcé sur le caractère inaccessible dans son pays d'origine d'un traitement adapté à ses troubles psychologiques, et si les certificats médicaux produits convergent sur l'existence d'un " syndrome dépressif post-traumatique " et d'une " lombalgie chronique " et sur le traitement à administrer (anti-dépresseurs et anxiolytiques), ils sont néanmoins rédigés en termes généraux sur l'absence de soins et traitements adaptés en République démocratique du Congo ainsi que sur le risque d'aggravation de son état de santé en cas de retour dans son pays ; qu'il n'apporte pas d'éléments déterminants sur l'insuffisance des autorités congolaises dans la fourniture des médicaments adaptés à la pathologie en cause, lesquels peuvent être des génériques ; qu'il n'est pas démontré que les structures psychiatriques du pays seraient inadaptées ou que l'offre de soins ne serait pas accessible en la matière, eu égard au coût des soins envisagés et des modes de prise en charge adaptés à la situation de l'intéressé ; que le requérant ne justifie pas être dépourvu de ressources ou que les membres de sa famille restés au Congo ne seraient pas en mesure de lui venir en aide du point de vu financier ; qu'en ce qui concerne les risques encourus, en cas de retour dans le pays d'origine le récit de M. n'a pas été validé par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ; que le lien entre la dégradation de son état de santé et les sévices et tortures subis dans son pays d'origine n'est pas établi ; qu'ainsi aucun élément du dossier ne permet de remettre en cause l'appréciation du médecin inspecteur de la santé publique ; que le moyen tiré de la violation de l'article L. 313-11 11°du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ; que l'article L. 313-11 7° n'a pas été méconnu ; que l'intéressé n'établit pas avoir déposé une demande sur ce fondement ; que le préfet a relevé dans ses écritures qu'il n'appartenait pas à l'administration d'envisager d'office si l'intéressé entrait dans le champ d'application de ces dispositions ; que ce moyen repris devant la Cour devra être écarté ; qu'en confirmant que le préfet n'était pas tenu d'examiner ce fondement le tribunal n'a pas entaché son jugement d'erreur de droit ; qu'en tout état de cause, il ne justifiait pas de liens personnels et familiaux suffisamment anciens et stables et de l'absence de liens dans son pays d'origine ; que, s'agissant de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il ne justifie pas avoir des liens privés et familiaux dans le département du Rhône ; que, s'il justifie avoir travaillé entre 2007 et 2009, il ne produit aucune promesse d'embauche récente ; que le fait de disposer d'un logement personnel et de payer un loyer et de s'investir comme bénévole dans les Restos du Coeur n'est pas suffisant pour considérer qu'il a le centre de ses intérêts privés désormais exclusivement en France ; qu'il a conservé des attaches en République démocratique du Congo où vivent ses parents, quatre de ses enfants et six de ses frères et soeurs ; que lors du renouvellement de sa demande de titre il a déclaré être célibataire ; qu'il reste imprécis sur les conditions de disparition de son épouse et de leur fille ; qu'il n'établit pas que les membres de sa famille auraient quitté le Congo ; qu'à cet égard le témoignage produit n'est pas sérieux ; que M. ayant vécu en République démocratique du Congo jusqu'à l'âge de 33 ans et ayant exercé le métier de mécanicien et d'agent de change, il a nécessairement conservé des attaches sociales et culturelles très fortes dans ce pays ; que dans ces conditions, en prenant la décision attaquée, le préfet du Rhône n'a pas porté au droit de M. au respect de sa vie privée et familiale d'atteinte disproportionnée ; qu'ainsi l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'a pas été méconnu ; qu'en ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français l'exception d'illégalité invoquée concernant le refus de titre de séjour ne peut être accueillie ; que l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'a pas été méconnu en l'espèce ; que les pièces produites par l'intéressé ne sont pas de nature à remettre en cause l'avis du médecin inspecteur de la santé publique ; que s'agissant de la décision fixant le pays de destination, l'exception d'illégalité concernant le refus de titre de séjour ne saurait prospérer ; que l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'ont pas été méconnus en l'espèce ; que l'intéressé n'établit pas être exposé à des risques pesant sur sa personne en cas de retour dans son pays d'origine ; que son récit n'a pas été retenu par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ; que les pièces produites devant la Cour à savoir un mandat de comparution du 28 octobre 2006, un avis de recherche daté du 4 juin 2008 ne présentent pas des garanties d'authenticité ; qu'on ne peut que s'interroger sur les faits qui lui sont reprochés ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 23 août 2011 accordant le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 novembre 2012 :

- le rapport de M. Bézard, président ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- et les observations de Me Matari, avocat de M. ;

1. Considérant que, par jugement du 25 mai 2011, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la requête de M. , ressortissant de la République démocratique du Congo, qui tendait à l'annulation de la décision du préfet du Rhône du 15 novembre 2010 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, décision assortie d'une obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel cette mesure de police serait exécutée, à défaut pour l'intéressé d'obtempérer à l'injonction qui lui était faite ; que M. relève appel de ce jugement ;

Sur la légalité de la décision attaquée en tant qu'elle porte refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de la santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé(...) " ;

3. Considérant que, si l'avis émis le 7 juillet 2010 par le médecin inspecteur de la santé publique, sur lequel le préfet du Rhône s'est fondé pour prendre sa décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour à M. en application de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile reconnaît que l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge, dont le défaut est susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ledit avis estime, par ailleurs, qu'au vu des informations disponibles il peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que la preuve contraire n'est pas apportée par M. , qui produit plusieurs certificats médicaux selon lesquels, le " syndrome dépressif post-traumatique majeur " dont il est atteint serait en lien direct avec les sévices dont il aurait été victime dans son pays d'origine, lesquels s'opposeraient à la poursuite d'un traitement adapté à son état de santé, dès lors qu'aucun lien n'est formellement établi entre sa pathologie et les mauvais traitements qu'il allègue avoir subis dans son pays d'origine qui n'ont, d'ailleurs, pas été retenus par les instances spécialisées qui ont examiné sa demande d'asile ; que, dans ces conditions, M. , qui n'a produit devant la Cour aucun élément nouveau, n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Rhône a méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit ; (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ; et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

5. Considérant que, si M. n'établit pas avoir présenté également une demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Rhône qui dans la décision attaquée relève que l'intéressé n'entre dans aucun des autres cas d'attribution d'un titre de séjour en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a toutefois examiné sa situation au regard des dispositions précitées ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. , entré irrégulièrement en France à la date déclarée du 2 mai 2005, accompagné de son épouse et de leur fille n'a plus de nouvelles de ces dernières depuis le 1er février 2009 ; que, s'il fait valoir qu'il a tissé des liens sociaux dans le cadre d'une activité bénévole au sein d'une association caritative alors qu'il résidait dans le département des Hautes-Pyrénées, il ne justifie pas avoir noué des liens sociaux stables et intenses en France depuis son installation dans le département du Rhône, alors qu'il est constant que quatre de ses enfants et six de ses frères et soeurs résident en République démocratique du Congo où ils sont à même de lui apporter un soutien moral et matériel ; qu'ainsi le préfet du Rhône n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 7° et porté au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé une atteinte disproportionnée au regard des dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité de la décision attaquée en tant qu'elle porte obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant que la décision opposant un refus de délivrance de titre de séjour à M. n'étant pas entachée d'illégalité ainsi qu'il vient d'être dit ci-dessus, l'exception d'illégalité de cette dernière décision invoquée pour soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français est elle-même entachée d'illégalité ne peut qu'être rejetée ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre (...) ; 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi " (...) ;

9. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés, les moyens invoqués par M. tirés de son état de santé et du respect de sa vie privée et familiale, ne sont pas de nature à établir qu'il ne pourrait faire l'objet, sur ce fondement de l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales d'une mesure lui faisant obligation de quitter le territoire français ; que ces moyens ne peuvent, en conséquence, qu'être écartés ; que le préfet du Rhône n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de cette mesure sur sa situation personnelle ;

Sur la légalité de la décision attaquée en tant qu'elle fixe le pays à destination duquel le requérant doit être renvoyé :

10. Considérant, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;

11. Considérant que la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour à M. ainsi que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français n'étant pas entachées d'illégalité comme il vient d'être dit ci-dessus, l'exception d'illégalité de ces décisions invoquées à l'encontre de la décision fixant le pays à destination duquel il sera reconduit en cas de refus d'obtempérer, ne peut être accueillie ;

12. Considérant que si M. impute le syndrome anxio-dépressif dont il souffre aux sévices dont il allègue avoir été victime dans son pays d'origine, les certificats médicaux qu'il produit ne sont basés que sur ses propres déclarations et n'établissent pas le lien entre ces sévices et sa pathologie ; que son récit n'a pas davantage convaincu les instances spécialisées qui ont examiné sa demande d'asile ; qu'ainsi il ne justifie pas qu'il serait pour ce motif, privé d'un traitement approprié en cas de retour dans son pays d'origine ; que par suite, il n'est pas fondé à soutenir qu'il serait exposé à des traitements prohibés par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour en République démocratique du Congo ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

14. Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; qu'il s'ensuit que les conclusions aux fins d'injonction présentées par M. ne peuvent être accueillies ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

15. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que M. , qui succombe dans l'instance, puisse obtenir le bénéfice de ces dispositions ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions du préfet du Rhône tendant à la condamnation de l'intéressé sur le même fondement ;

DECIDE :

Article 1er : La requête n° 11LY02479 de M. est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du préfet du Rhône tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Mambueni , au préfet du Rhône et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 13 novembre 2012, à laquelle siégeaient :

M. Moutte, président de chambre,

M. Bézard, président,

M. Zupan, président-assesseur.

Lu en audience publique, le 4 décembre 2012.

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N° 11LY02479

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY02479
Date de la décision : 04/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUTTE
Rapporteur ?: M. Alain BEZARD
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : MATARI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-12-04;11ly02479 ?
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