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04/12/2012 | FRANCE | N°11LY01893

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 04 décembre 2012, 11LY01893


Vu la requête, enregistrée le 28 juillet 2011, présentée pour la commune de Brindas (Rhône), représentée par son maire ;

La commune de Brindas demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0806175, n° 0806177, n° 0806179 et n° 0806180 du tribunal administratif de Lyon du 26 mai 2011, rectifié par une ordonnance du 14 juin 2011, qui a annulé quatre arrêtés du 8 juillet 2008 par lesquels son maire a refusé de délivrer des permis de construire à Mlle Elise A, M. Georges A, M. Julien A et M. Paul A ;

2°) de rejeter les demandes de Mlle Elise A, M. Georg

es A, agissant en son nom propre et comme ayant-droit de M. Paul A, et M. Julien A dev...

Vu la requête, enregistrée le 28 juillet 2011, présentée pour la commune de Brindas (Rhône), représentée par son maire ;

La commune de Brindas demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0806175, n° 0806177, n° 0806179 et n° 0806180 du tribunal administratif de Lyon du 26 mai 2011, rectifié par une ordonnance du 14 juin 2011, qui a annulé quatre arrêtés du 8 juillet 2008 par lesquels son maire a refusé de délivrer des permis de construire à Mlle Elise A, M. Georges A, M. Julien A et M. Paul A ;

2°) de rejeter les demandes de Mlle Elise A, M. Georges A, agissant en son nom propre et comme ayant-droit de M. Paul A, et M. Julien A devant le tribunal administratif ;

3°) de condamner ces derniers à lui verser une somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune soutient, en premier lieu, que le tribunal a commis une erreur de droit en privant de tout effet l'article L. 111-7 du code de l'urbanisme, qui autorise l'autorité compétente à opposer un sursis à statuer à une demande de permis de construire ; que le tribunal a privé de tout effet les décisions des 27 juin et 31 août 2006, dont la légalité a pourtant été reconnue par un jugement du tribunal du 27 mars 2008, confirmé par un arrêt de la Cour du 22 juin 2010 ; qu'un sursis à statuer légalement opposé à une demande de permis de construire permet ensuite à la collectivité d'opposer les nouvelles règles d'urbanisme ayant justifié cette décision ; qu'en conséquence, c'est à tort que le tribunal a écarté les décisions de sursis à statuer en tant qu'elles méconnaîtraient les dispositions de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme ; qu'en second lieu, en tout état de cause, les conditions d'application de ces dispositions n'étaient pas réunies, dès lors qu'à la date du 15 mai 2008 à laquelle les consorts A ont confirmé leurs demandes de permis, l'annulation des arrêtés du 12 février 2004 n'était pas devenue définitive, l'arrêt de la Cour du 17 janvier 2008 confirmant l'annulation de ces arrêtés ayant fait l'objet d'un pourvoi en cassation ; que la décision de non-admission de ce pourvoi n'est intervenue que le 8 décembre 2008 ; que, contrairement à ce que le tribunal a estimé, il ne lui incombait pas d'informer les consorts A de l'existence d'un pourvoi en cassation ; qu'il appartenait à ces derniers de s'assurer du caractère définitif dudit arrêt du 17 janvier 2008 ; qu'en outre, contrairement à ce que le tribunal a également jugé, le caractère définitif d'un arrêt ne peut intervenir à compter de la date de notification, mais, au mieux, qu'après l'expiration du délai de pourvoi devant le Conseil d'Etat ; que, dans ces conditions, le maire était fondé à appliquer aux demandes les nouvelles dispositions du plan local d'urbanisme ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 20 septembre 2011, présenté pour Mlle Elise A,

M. Georges A, agissant en son nom propre et en qualité d'ayant-droit de son frère Paul A, décédé, et M. Julien A qui demandent à la Cour :

- de rejeter la requête ;

- en application des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative, d'ordonner au maire de la commune de Brindas de faire droit aux demandes de permis de construire ou, à tout le moins, de prendre une nouvelle décision sur ces demandes, à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de cette date ;

- de condamner la commune de Brindas à leur verser :

. une amende pour recours abusif d'un montant de 3 000 euros, au titre de l'article

R. 741-12 du code de justice administrative ;

. à chacun une somme de 3 050 euros au titre de l'article L. 761-1 du même code ;

Les consorts A soutiennent, en premier lieu, que la légalité d'une décision de sursis à statuer sur une demande de permis de construire est sans incidence sur la légalité de la décision postérieure de refus opposée à cette même demande ; que, dès lors qu'ils ont confirmé leurs demandes, à la suite de la notification de l'arrêt de la Cour du 17 janvier 2008 confirmant l'annulation des refus de permis de construire des 8 juillet 2003 et 12 février 2004, le maire ne pouvait, sans violer les dispositions de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme, prendre à nouveau quatre refus de permis fondés sur les nouvelles dispositions du plan local d'urbanisme, approuvé en novembre 2007 ; qu'en deuxième lieu, ils n'ont pas été informés du pourvoi en cassation exercé à l'encontre de l'arrêt précité du 17 janvier 2008 et de la décision du Conseil d'Etat du 8 décembre 2008 de non-admission de ce pourvoi ; qu'il ne leur appartenait pas de s'informer de l'existence d'un éventuel pourvoi en cassation ; qu'en conséquence, le délai de six mois prévu par l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme a commencé à courir à compter de la notification, le 20 mars 2008, dudit arrêt du 17 janvier 2008 ; que, dès lors, contrairement à ce que soutient la commune de Brindas, la confirmation de leurs demandes, qui a été effectuée le 15 mai 2008, est bien intervenue dans ce délai ; qu'enfin, en raison du détournement de pouvoir et de l'abus de droit commis par cette commune, ils sollicitent la condamnation de cette dernière à leur verser une amende pour recours abusif ;

Vu le mémoire, enregistré le 20 octobre 2011, présenté pour la commune de Brindas, représentée par son maire, tendant aux mêmes fins que précédemment et, en outre, au rejet des conclusions que les consorts A ont présentées au titre des articles 741-12 et L. 911-1 et suivants du code de justice administrative ;

La commune soutient, en outre, qu'aucun détournement de pouvoir et aucun abus de droit n'ont été commis ; qu'en tout état de cause, les conclusions présentées par une partie sur le fondement des dispositions de l'article R. 741-12 du code de justice administrative sont irrecevables ; que, par ailleurs, en application de l'injonction prononcée par le jugement attaqué, elle a procédé à une nouvelle instruction des demandes de permis de construire des consorts A et de nouvelles décisions ont été prises ; que les conclusions aux fins d'injonction n'ont donc aucun objet et ne pourront qu'être rejetées ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 novembre 2012 :

- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- et les observations de Me Millanvois, représentant CMS Bureau Francis Lefebvre Lyon, avocat de la commune de Brindas, et celles de Me Albisson, avocat de Mlle Elise A et de MM. Julien et Georges A ;

1. Considérant qu'au cours de l'année 2003, Mlle Elise A, M. Georges A,

M. Julien A et M. Paul A, ont déposé chacun une demande de permis de construire, en vue de la construction d'une maison d'habitation sur des terrains situés sur le territoire de la commune de Brindas ; que, par un arrêté du 8 juillet 2003, le maire de cette commune a rejeté la demande de M. Paul A et, par des arrêtés du 12 février 2004, les demandes de Mlle Elise A, M. Georges A et M. Julien A ; que, par un jugement du 16 mars 2006, le tribunal administratif de Lyon a annulé ces refus de permis de construire ; que ce jugement a été confirmé par un arrêt de la Cour du 17 janvier 2008, qui a fait l'objet d'un pourvoi en cassation que le Conseil d'Etat a déclaré non-admis par une décision du 8 décembre 2008 ; qu'entre-temps, le tribunal administratif de Lyon ayant, par son jugement précité du 16 mars 2006, enjoint au maire de prendre de nouvelles décisions sur les quatre demandes de permis de construire des consorts A, par trois arrêtés du 27 juin 2006, le maire a prononcé des sursis à statuer sur les demandes de Mlle Elise A, M. Georges A et M. Julien A, puis, par un arrêté du 31 août 2006, sur celle de M. Paul A ; que, par un jugement du 27 mars 2008, le tribunal a rejeté les demandes que ces derniers ont présentées à l'encontre de ces arrêtés ; que, par un arrêt du 22 juin 2010 devenu définitif, la Cour a confirmé ce jugement ; qu'enfin, les consorts A ayant, après l'arrêt précité de la Cour du 17 janvier 2008, confirmé les demandes de permis de construire, par quatre arrêtés du 8 juillet 2008, le maire de la commune de Brindas, statuant à nouveau sur ces demandes, les a rejetées ; que, par un jugement du 26 mai 2011, rectifié par une ordonnance du 14 juin 2011, le tribunal administratif de Lyon a annulé ces refus de permis de construire ; que cette commune relève appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'un refus opposé à une demande d'autorisation d'occuper ou d'utiliser le sol ou l'opposition à une déclaration de travaux régies par le présent code a fait l'objet d'une annulation juridictionnelle, la demande d'autorisation ou la déclaration confirmée par l'intéressé ne peut faire l'objet d'un nouveau refus ou être assortie de prescriptions spéciales sur le fondement de dispositions d'urbanisme intervenues postérieurement à la date d'intervention de la décision annulée sous réserve que l'annulation soit devenue définitive et que la confirmation de la demande ou de la déclaration soit effectuée dans les six mois suivant la notification de l'annulation au pétitionnaire " ; que la confirmation de la demande de permis de construire prévue par ces dispositions doit intervenir dans le délai de six mois courant à compter de la notification de la décision rendant définitive l'annulation du refus d'autorisation ;

3. Considérant que la confirmation des demandes de permis de construire que les consorts A ont présentées au cours de l'année 2003 est intervenue le 15 mai 2008 ; qu'à cette date, l'annulation des refus de permis de construire des 8 juillet 2003 et 12 février 2004 n'était pas encore devenue définitive, la commune de Brindas ayant formé un pourvoi en cassation à l'encontre de l'arrêt de la Cour du 17 janvier 2008 confirmant l'annulation de ces refus de permis résultant du jugement du 16 mars 2006 du tribunal administratif de Lyon ; que, par suite, indépendamment du fait que ce pourvoi a en définitive été déclaré non-admis par le Conseil d'Etat et des conditions dans lesquelles la décision de non-admission a pu être notifiée aux consorts A, ladite confirmation des demandes de permis ne peut être regardée comme étant intervenue dans des conditions conformes à l'article L. 600-2 précité du code de l'urbanisme ; qu'en conséquence, les consorts A ne peuvent se prévaloir des dispositions de cet article pour soutenir que, dès lors que le plan local d'urbanisme n'a été adopté que par une délibération du 5 novembre 2007 postérieure aux dates des refus de permis de construire annulés, le maire de la commune de Brindas ne pouvait légalement se fonder sur les dispositions de l'article Aa 1 du règlement de ce plan ; qu'il s'ensuit que cette commune est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a estimé qu'en se fondant sur ces dispositions, qui interdisent la construction des maisons d'habitation en secteur Aa, son maire a commis une erreur de droit ;

4. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les consorts A en première instance ;

5. Considérant, en premier lieu, que les consorts A excipent de l'illégalité de la délibération du 5 novembre 2007 par laquelle le conseil municipal de la commune de Brindas a adopté le plan local d'urbanisme ;

6. Considérant, d'une part, que l'un des enjeux de l'adoption du plan local d'urbanisme était, pour les secteurs en limite de l'urbanisation, de renforcer l'agriculture en la préservant de cette dernière, et, pour ce faire, de reclasser certaines anciennes zones NB du plan d'occupation des sols en secteur Aa ; qu'en se bornant à sommairement faire valoir qu'aucun élément n'est susceptible de justifier un changement de zonage, sans apporter aucune précision à l'appui de cette affirmation, les consorts A n'établissent pas qu'en procédant au classement en secteur Aa des terrains d'assiette des projets, antérieurement classés en zone NB au plan d'occupation des sols, le conseil municipal a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

7. Considérant, d'autre part, qu'aucun élément n'est susceptible de démontrer que le classement des terrains d'assiette des projets litigieux en secteur Aa au plan local d'urbanisme ne procéderait pas d'un motif d'urbanisme et aurait eu pour véritable objectif de faire échec à ces projets ;

8. Considérant, en second lieu, que, comme indiqué précédemment, le maire de la commune de Brindas a pu légalement opposer aux projets litigieux les dispositions de l'article Aa 1 du règlement du plan local d'urbanisme, qui interdisent la construction des maisons d'habitation en secteur Aa ; que, dès lors, les moyens tirés du détournement de pouvoir et de l'abus de droit qui entacheraient les arrêtés attaqués ne peuvent qu'être écartés ;

9. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la commune de Brindas est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 26 mai 2011, rectifié par une ordonnance du 14 juin 2011, le tribunal administratif de Lyon a annulé les arrêtés du 8 juillet 2008 par lesquels son maire a refusé de délivrer des permis de construire à Mlle Elise A, M. Georges A, M. Julien A et M. Paul A ; qu'il y a lieu d'annuler ce jugement et cette ordonnance et de rejeter les demandes présentées devant le tribunal ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

10. Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution au titre des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, en conséquence, de rejeter les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par les consorts A ;

Sur les conclusions des intimés tendant à ce qu'une amende soit infligée à la commune de Brindas :

11. Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 3000 euros " ; que la faculté prévue par cette disposition constituant un pouvoir propre du juge, les conclusions des intimés tendant à ce que la commune de Brindas soit condamnée à une telle amende ne sont pas recevables ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Brindas, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, soit condamnée à payer aux consorts A la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge des intimés le versement d'une somme au bénéfice de cette commune sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 26 mai 2011, rectifié par une ordonnance du 14 juin 2011, est annulé.

Article 2 : Les demandes présentées devant le tribunal administratif de Lyon par Mlle Elise A, M. Georges A, agissant en son nom propre et en qualité d'ayant-droit de M. Paul A, et M. Julien A sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Brindas, à Mlle Elise A, à M. Julien A et à M. Georges A, agissant en son nom propre et en qualité d'ayant-droit de M. Paul A.

Délibéré à l'issue de l'audience du 13 novembre 2012, à laquelle siégeaient :

M. Moutte, président,

M. Zupan, président-assesseur,

M. Chenevey, premier conseiller.

Prononcé en audience publique, le 4 décembre 2012.

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N° 11LY01893

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY01893
Date de la décision : 04/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Nature de la décision. Refus du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUTTE
Rapporteur ?: M. Jean-Pascal CHENEVEY
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS ALBISSON-NIEF-CROSET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-12-04;11ly01893 ?
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