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13/11/2012 | FRANCE | N°12LY01243

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 13 novembre 2012, 12LY01243


Vu la requête, enregistrée le 16 mai 2012, présentée pour la commune de Saint-Apollinaire (Côte-d'Or), représentée par son maire ;

La commune de Saint-Apollinaire demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100613 du tribunal administratif de Dijon

du 12 mars 2012 qui a annulé l'arrêté du 15 décembre 2010 par lequel son maire a refusé de délivrer un permis de construire à M. et Mme A ;

2°) de rejeter la demande de M. et Mme A devant le tribunal administratif ;

3°) de condamner ces derniers à lui verser une somme de 1 500 euros au ti

tre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune soutient que, conformém...

Vu la requête, enregistrée le 16 mai 2012, présentée pour la commune de Saint-Apollinaire (Côte-d'Or), représentée par son maire ;

La commune de Saint-Apollinaire demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100613 du tribunal administratif de Dijon

du 12 mars 2012 qui a annulé l'arrêté du 15 décembre 2010 par lequel son maire a refusé de délivrer un permis de construire à M. et Mme A ;

2°) de rejeter la demande de M. et Mme A devant le tribunal administratif ;

3°) de condamner ces derniers à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune soutient que, conformément aux dispositions de l'article L. 123-2 du code de l'urbanisme, l'article UB 2 7° du règlement du plan local d'urbanisme prévoit que l'extension des constructions existantes est limitée à 20 m² de surface hors oeuvre nette, jusqu'au 5 février 2013 ; que, postérieurement à l'entrée en vigueur de ces dispositions du règlement, la construction sur laquelle porte la demande de permis a déjà fait l'objet d'une autorisation, pour la création d'une surface hors oeuvre nette supplémentaire de 27 m² ; que les travaux ont effectivement été réalisés ; que, par suite, en application des dispositions de l'article UB 2 7°, une nouvelle extension n'était pas légalement possible ; qu'en outre, le bâtiment à usage d'entrepôt, dont la demande de permis a pour objet de changer la destination, a été implanté sans autorisation ; que, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, elle a invoqué une substitution de motif, fondée sur le fait que, en raison de l'absence d'existence administrative de ce bâtiment, le changement de destination projeté ne pouvait être autorisé ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 juillet 2012, présenté pour M. et Mme A, qui demandent à la Cour :

- de rejeter la requête ;

- de condamner la commune de Saint-Apollinaire à leur verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. et Mme A soutiennent que la servitude d'urbanisme temporaire instituée en application de l'article L. 123-2 du code de l'urbanisme ne pouvaient leur être opposée, la commune ne disposant, à la date de l'arrêté attaqué, d'aucun projet précis, mais ayant seulement élaboré de simples orientations générales d'aménagement, lesquelles ne peuvent suffire ; que, par ailleurs, en enregistrant la déclaration préalable du 26 août 2008, la commune a admis l'existence de la construction à usage d'entrepôt, dont elle ne peut dès lors aujourd'hui invoquer l'inexistence ; qu'en outre, l'absence d'existence administrative de cette construction ne constitue pas un motif de l'arrêté attaqué ; qu'aucune substitution de motif n'est dès lors possible ;

Vu le mémoire, enregistré le 3 août 2012, présenté pour la commune de Saint-Apollinaire, représentée par son maire, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

La commune soutient, en outre, que le terrain d'assiette du projet litigieux est bien situé dans le périmètre instauré en application des dispositions du a) de l'article L. 123-2 du code de l'urbanisme ; que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'opposabilité de la servitude n'est pas conditionnée par l'existence d'un projet précis, ces dispositions ayant justement pour objet de permettre un gel de l'urbanisation dans l'attente de la définition d'un projet d'aménagement global ; qu'enfin, la construction sur laquelle porte le projet ne peut être régularisée, du fait de la réglementation applicable dans la zone ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 20 août 2012, la clôture de l'instruction a été fixée au 12 septembre 2012 ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 septembre 2012, présenté pour la commune de Saint-Apollinaire, représentée par son maire, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

La commune soutient, en outre, qu'il n'a jamais été contesté que les travaux d'extension autorisés par la décision de non-opposition à la déclaration préalable du 26 août 2008 ont effectivement été réalisés ;

En application de l'article R. 613-4 du code de justice administrative, par une ordonnance du 25 septembre 2012, l'instruction a été rouverte ;

Vu le mémoire, enregistré le 15 octobre 2012, présenté pour M. et Mme A, qui, n'apportant aucun élément nouveau, n'a pas été communiqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 octobre 2012 :

- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- et les observations de Me Bourilhon, représentant CGBG Avocats associés, avocat de la commune de Saint-Appolinaire ;

1. Considérant que, par un jugement du 12 mars 2012, le tribunal administratif de Dijon a annulé l'arrêté du 15 décembre 2010 par lequel le maire de la commune de Saint-Apollinaire a rejeté la demande de permis de construire présentée par M. et Mme A, en vue du changement de destination d'un entrepôt existant en habitation et de la création de 20 m² de surface hors oeuvre nette ; que cette commune relève appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-2 du code de l'urbanisme : " Dans les zones urbaines ou à urbaniser, le plan local d'urbanisme peut instituer des servitudes consistant : / a) A interdire, sous réserve d'une justification particulière, dans un périmètre qu'il délimite et pour une durée au plus de cinq ans dans l'attente de l'approbation par la commune d'un projet d'aménagement global, les constructions ou installations d'une superficie supérieure à un seuil défini par le règlement ; les travaux ayant pour objet l'adaptation, le changement de destination, la réfection ou l'extension limitée des constructions existantes sont toutefois autorisés (...) " ; qu'aux termes du b) de l'article R. 123-12 du même code, les documents graphiques font apparaître, s'il y a lieu, " Les secteurs délimités en application du a) de l'article L. 123-2, en précisant à partir de quelle surface les constructions ou installations sont interdites et la date à laquelle la servitude sera levée " ; qu'enfin, aux termes du 7° de l'article UB 2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Apollinaire : " Dans les périmètres délimités sur le document graphique au titre de l'article L. 123-2 a) du code de l'urbanisme, les constructions ou installations nouvelles et l'extension des constructions existantes sont limitées à 20 m² de surface hors oeuvre nette. Les travaux ayant pour objet l'adaptation, le changement de destination ou la réfection des constructions existantes sont autorisés. Cette disposition est applicable jusqu'au 5 février 2013, date de levée de la servitude " ;

3. Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 123-2 du code de l'urbanisme, la commune de Saint-Apollinaire a délimité, lors de la modification de son plan local d'urbanisme qui a été approuvée par une délibération du 5 février 2008, un périmètre dans lequel s'appliquent les dispositions particulières de l'article UB 2 7° du règlement de ce plan, dans l'attente de l'approbation d'un projet d'aménagement global visant à requalifier le cours de Gray et ses rives bâties ; qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet de M. et Mme A, cadastré AI 632, est inclus dans ce périmètre ; que les dispositions précitées de l'article UB 2 7° du règlement du plan local d'urbanisme sont donc applicables à ce projet, à l'exclusion de toute autre disposition de cet article ; que M. et Mme A ne peuvent utilement faire valoir, pour soutenir que la servitude ainsi instituée par la commune ne serait pas opposable, que l'article R. 123-13 du code de l'urbanisme, relatif aux indications des annexes du plan local d'urbanisme, ne mentionne pas la servitude prévue par l'article L. 123-2 du même code, dès lors que, conformément aux dispositions précitées de l'article R. 123-12, le plan de zonage délimite le périmètre en cause, en précisant que les constructions sont autorisées dans la limite de 20 m² de surface hors oeuvre nette et que la servitude sera levée le 5 février 2013 ; que cette servitude ayant pour objet de limiter l'urbanisation dans ledit périmètre, dans l'attente de la définition d'un projet d'aménagement global, M. et Mme A ne peuvent utilement soutenir que la commune ne justifiait d'aucun projet suffisamment précis à la date de l'arrêté attaqué ; que l'article L. 123-2 précité du code de l'urbanisme autorisait le maire à opposer un refus d'autorisation à la demande, indépendamment de toute éventuelle possibilité de sursis à statuer ;

4. Considérant toutefois qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet portant sur la même construction que le projet litigieux de M. et Mme A, qui a donné lieu le 26 août 2008 à une décision de non-opposition à déclaration préalable de travaux, constitue une construction nouvelle ou l'extension d'une construction existante au sens des dispositions précitées du 7° de l'article UB 2 du règlement du plan local d'urbanisme, ce projet précédent ayant en effet simplement pour objet de fermer un bâtiment existant, en vue de le sécuriser ; qu'ainsi, le maire de la commune de Saint-Apollinaire ne pouvait légalement, pour rejeter la demande de permis de construire en litige, se fonder sur le motif tiré de ce que la limite de 20 m² de surface hors oeuvre nette fixée pour les extensions par ces dispositions ayant déjà été atteinte, du fait de ce précédent projet, aucune nouvelle extension ne pouvait être autorisée pour le même bâtiment ;

5. Considérant que l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué ;

6. Considérant que la commune de Saint-Apollinaire fait valoir, sans être contredite, que le bâtiment à usage d'entrepôt sur lequel porte le projet litigieux a été édifié sans autorisation ; que, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme A, l'enregistrement de la déclaration préalable de travaux du 26 août 2008 ne peut avoir pour effet de régulariser ledit bâtiment, tout comme d'ailleurs l'absence d'opposition à cette déclaration ; que, si le projet porte sur l'ensemble de la construction qui a ainsi été édifiée irrégulièrement, les dispositions précitées de l'article UB 2 7° du règlement du plan local d'urbanisme, qui interdisent les bâtiments de plus de 20 m² de surface hors oeuvre nette, ne peuvent permettre de régulariser cette construction, qui présente une surface hors oeuvre nette de 92 m² ; qu'il résulte de l'instruction que le maire aurait pris la même décision s'il avait entendu initialement se fonder sur ce motif ; qu'il y a lieu, en conséquence, de procéder à la substitution de motif demandée par la commune de Saint-Apollinaire ;

7. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la commune de Saint-Apollinaire est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a annulé l'arrêté du 15 décembre 2010 par lequel son maire a refusé de délivrer un permis de construire à M. et Mme A ; que, par suite, il y a lieu d'annuler ce jugement et de rejeter la demande que ces derniers ont présentée devant le tribunal ;

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Saint-Apollinaire, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, soit condamnée à payer à M. et Mme A la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. et Mme A le versement d'une somme au bénéfice de cette commune sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Dijon du 12 mars 2012 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. et Mme A devant le tribunal administratif de Dijon est rejetée.

Article 3 : Les conclusions des parties tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Appolinaire et à M. et Mme A.

Délibéré à l'issue de l'audience du 23 octobre 2012, à laquelle siégeaient :

M. Moutte, président,

M. Zupan, président-assesseur,

M. Chenevey, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 novembre 2012.

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N° 12LY01243

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY01243
Date de la décision : 13/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Nature de la décision. Refus du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUTTE
Rapporteur ?: M. Jean-Pascal CHENEVEY
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : C.G.B.G - AVOCATS ASSOCIES - COPPI-GRILLON-BROCARD-GIRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-11-13;12ly01243 ?
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