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13/11/2012 | FRANCE | N°12LY00871

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 13 novembre 2012, 12LY00871


Vu la requête, enregistrée à la Cour par télécopie le 5 avril 2012 et régularisée le 12 avril 2012, présentée par le préfet de la Haute-Savoie ;

Le préfet de la Haute-Savoie demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1105997, du 2 mars 2012, par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé ses décisions du 24 octobre 2011, refusant de délivrer un titre de séjour à Mme Valbone A, faisant obligation à cette dernière de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destination duquel elle serait reconduite à l

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Vu la requête, enregistrée à la Cour par télécopie le 5 avril 2012 et régularisée le 12 avril 2012, présentée par le préfet de la Haute-Savoie ;

Le préfet de la Haute-Savoie demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1105997, du 2 mars 2012, par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé ses décisions du 24 octobre 2011, refusant de délivrer un titre de séjour à Mme Valbone A, faisant obligation à cette dernière de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expiration de ce délai à défaut pour elle d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite, lui a enjoint de délivrer à Mme Valbone A une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification dudit jugement, et a mis à la charge de l'Etat la somme de mille euros, à verser au conseil de Mme Valbone A, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme Valbone A devant le tribunal administratif ;

Il soutient que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la décision de refus de délivrance de titre de séjour contestée avait méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 23 mai 2012, présenté pour Mme Valbone A par Me Lerein, qui conclut au rejet de la requête et demande à la Cour :

1°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Savoie, en cas d'annulation de la décision de refus pour un motif de fond, de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, ou, en cas d'annulation de la décision de refus pour un motif de forme, sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte, de réexaminer sa situation administrative et, durant cet examen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que la décision de refus de délivrance de titre de séjour avait méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que cette même décision a méconnu les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu les pièces, enregistrées à la Cour le 14 août 2012, présentées pour Mme Valbone A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu la charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne, signée à Nice le 7 décembre 2000 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 octobre 2012 ;

- le rapport de M. Moutte, président ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code, modifié par le décret n° 2011-1049 du 6 septembre 2011 : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. Par dérogation, à Paris, ce médecin est désigné par le préfet de police. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. Quand la commission médicale régionale a été saisie dans les conditions prévues à l'article R. 313-26, l'avis mentionne cette saisine. Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. L'étranger mentionné au 11° de l'article L. 313-11 qui ne remplirait pas la condition de résidence habituelle peut recevoir une autorisation provisoire de séjour renouvelable pendant la durée du traitement. " ;

2. Considérant qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires qui ont précédé l'adoption de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011, dont sont issues les dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 précité, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ;

3. Considérant que Mme A, de nationalité kosovare, a sollicité la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en faisant état des troubles psychiatriques dont elle est atteinte ; que, dans son avis rendu le 20 septembre 2011, le médecin de l'Agence régionale de santé a estimé que l'état de santé de Mme A nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'elle ne pouvait pas avoir accès, dans son pays d'origine, à un traitement approprié à sa pathologie ; que le préfet de la Haute-Savoie, qui n'était pas lié par cet avis consultatif, a refusé, le 24 octobre 2011, de délivrer à Mme A le titre de séjour qu'elle sollicitait, motif pris de ce qu'il ressortait des informations en sa possession que des possibilités de traitement approprié de ses troubles existaient au Kosovo ; que le préfet de la Haute-Savoie produit plusieurs rapports établis par les services de l'ambassade de France au Kosovo à la suite des contacts pris avec les autorités sanitaires locales, aux termes desquels le Kosovo dispose de structures sanitaires psychiatriques aptes à prendre en charge l'affection dont souffre Mme A ; que si cette dernière fait valoir que ses troubles trouvent leur origine dans les événements traumatisants qu'elle a vécus dans son pays d'origine, de sorte qu'elle ne peut pas bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé au Kosovo, son récit n'est étayé par aucun élément probant de nature à en établir la réalité ni, a fortiori, l'existence d'un lien entre ses souffrances psychologiques et les violences alléguées qui ne ressort pas davantage des certificats médicaux produits ; qu'en outre, Mme A, qui ne donne aucune information relative au coût des soins qui lui sont nécessaires ou aux ressources dont elle disposerait au Kosovo pour financer le coût de son traitement, n'établit pas qu'elle ne pourrait pas bénéficier, pour des raisons économiques, des soins qui lui sont nécessaires ; qu'enfin, si le rapport de l'Organisation suisse d'aide aux réfugiés du 1er septembre 2010 dont elle se prévaut indique que les moyens mis en oeuvre au Kosovo pour soigner les troubles psychiatriques sont insuffisants par rapport aux besoins de la population, il ne réfute pas l'existence, d'une part, d'un réseau de prise en charge, d'autre part, d'aides sociales pour financer les soins ; que, dès lors, c'est à tort que les premiers juges ont annulé la décision du préfet de la Haute-Savoie, du 24 octobre 2011, refusant la délivrance d'un titre de séjour à Mme A au motif qu'elle avait méconnu les dispositions du 11 de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, par voie de conséquence, les décisions du même jour faisant obligation à celle-ci de quitter le territoire français et désignant le pays de destination ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme A devant le tribunal administratif de Grenoble et devant la Cour ;

Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

5. Considérant que les décisions contestées ont été signées par M. Jean-François B, secrétaire général de la préfecture de la Haute-Savoie, qui, en vertu d'un arrêté préfectoral du 6 décembre 2010 publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture, disposait d'une délégation à l'effet de signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de l'Etat dans le département de la Haute-Savoie, à l'exception d'actes au nombre desquels ne figurent pas les décisions relatives à la police des étrangers ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée ne peut qu'être écarté ;

6. Considérant qu'il ressort des mentions de la décision en litige que le préfet de la Haute-Savoie a indiqué que la situation particulière de Mme A " ne justifie pas l'intervention d'une mesure gracieuse et dérogatoire favorable à l'intéressée notamment au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " ; que, dès lors, Mme A, qui n'établit pas, au demeurant, avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur un autre fondement que les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'est pas fondée à soutenir que le préfet ne se serait pas prononcé sur son droit au séjour au regard de l'article L. 313-14 susmentionné ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " et qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. (...) " ;

8. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, Mme A ne remplissait pas les conditions pour prétendre à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet de la Haute-Savoie a donc pu régulièrement rejeter la demande de titre de séjour présentée par Mme A sans consulter au préalable la commission du titre de séjour ; que, par suite, la décision de refus de délivrance de titre de séjour n'est pas entachée d'irrégularité sur ce point ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

10. Considérant que Mme A, ressortissante kosovare née le 16 février 1977, est entrée en France le 10 juin 2009 ; que si elle fait valoir qu'elle réside auprès de sa soeur qui séjourne régulièrement en France sous couvert d'une carte de résident de dix ans et soutient que son état de santé justifie qu'elle soit autorisée à demeurer en France, il ne ressort pas des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit précédemment, que le traitement de ses troubles serait indisponible dans son pays d'origine ; que, célibataire et sans enfant, elle est entrée récemment en France à l'âge de trente-deux ans, ayant jusqu'alors toujours vécu dans son pays d'origine où elle n'est pas dépourvue de toute attache familiale ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision contestée n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

11. Considérant qu'eu égard à ce qui vient d'être exposé la décision contestée n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation dans l'appréciation de ses conséquences sur sa vie personnelle ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

12. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux précédemment retenus dans le cadre de l'examen de la légalité du refus de délivrance du titre de séjour, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à exciper, au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision, du 24 octobre 2011, l'obligeant à quitter le territoire français, de l'illégalité de la décision du même jour refusant de lui délivrer un titre de séjour ;

14. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. (...) " ; qu'aux termes de l'article 12, paragraphe 1, de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 : " Les décisions de retour (...) sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles " ;

15. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A, de nationalité kosovare, s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour par décision du 24 octobre 2011 ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, le 24 octobre 2011, elle était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;

16. Considérant, d'autre part, que Mme A, ne peut pas utilement directement se prévaloir de l'article 12 de la directive du 16 décembre 2008 au soutien de son moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre le 24 octobre 2011 dès lors qu'à la date de cet arrêté, ladite directive avait été transposée en droit interne ; que, par ailleurs, la motivation de l'obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique pour respecter les exigences des dispositions sus rappelées de l'article 12 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008, avec les objectifs desquelles les dispositions susmentionnées du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont pas incompatibles ; qu'en l'espèce, l'arrêté en litige vise les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionne que Mme A fait l'objet d'un refus de délivrance de titre de séjour, permettant ainsi de connaître les considérations de droit ayant constitué le fondement de l'obligation de quitter le territoire français ; qu'ainsi, le moyen tiré du défaut de motivation de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté ;

17. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : ( ...) 10º L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé ; (...) " ;

18. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux retenus plus haut dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision de refus de titre de séjour, Mme A n'est pas fondée à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français a méconnu les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

19. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux retenus plus haut dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision de refus de séjour, la mesure d'éloignement prise à l'encontre de Mme A n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa vie personnelle ;

Sur la décision fixant le délai de départ volontaire :

20. Considérant qu'aux termes de l'article 7, relatif au " départ volontaire ", de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 : " 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. Les États membres peuvent prévoir dans leur législation nationale que ce délai n'est accordé qu'à la suite d'une demande du ressortissant concerné d'un pays tiers. Dans ce cas, les États membres informent les ressortissants concernés de pays tiers de la possibilité de présenter une telle demande. / Le délai prévu au premier alinéa n'exclut pas la possibilité, pour les ressortissants concernés de pays tiers, de partir plus tôt. / 2. Si nécessaire, les États membres prolongent le délai de départ volontaire d'une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée de séjour, l'existence d'enfants scolarisés et d'autres liens familiaux et sociaux. (...)" ; que ces dispositions ont été transposées en droit interne, notamment à l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011, qui prévoit, aux termes du II de l'article L. 511-1 dudit code, que " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours " ; que, Mme A, qui ne soutient pas que ces dispositions de droit français sont incompatibles avec celles, précitées, de la directive 2008/115/CE, ne saurait utilement invoquer directement cette directive à l'encontre d'une décision individuelle ;

21. Considérant d'une part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme A ait fait état devant le préfet de la Haute-Savoie, lors du dépôt de sa demande de délivrance de titre de séjour ou, à tout le moins, avant l'édiction de l'arrêté du 24 octobre 2011, de circonstances particulières, propres à justifier qu'un délai de départ volontaire supérieur à trente jours lui soit accordé ; que, par suite, Mme A n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté contesté, qui lui a accordé un délai de départ volontaire d'un mois pour quitter le territoire français, serait entaché d'un défaut d'examen préalable de sa situation ;

22. Considérant, d'autre part, que pour les mêmes motifs, et alors qu'aucune disposition de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'impose à l'autorité préfectorale d'indiquer les motifs pour lesquels elle s'abstient d'user de la faculté qui lui permet, le cas échéant, d'accorder à l'étranger faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français un délai de départ volontaire supérieur à trente jours, Mme A n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté contesté est entaché d'un défaut de motivation sur ce point ;

23. Considérant qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 susvisée : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi nº 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix (...) Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables : (...) 3º Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière " ; qu'il ressort des dispositions du livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire ; que, par suite, Mme A ne peut pas utilement se prévaloir des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, à l'encontre de la décision contestée ;

24. Considérant que Mme A ne peut pas utilement se prévaloir, à l'encontre de la décision contestée, des stipulations de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne qui concernent les mesures prises par les institutions et organes de l'Union européenne ;

25. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que la décision contestée n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation dans l'appréciation de ses conséquences sur sa vie personnelle ;

Sur la décision désignant le pays de destination :

26. Considérant que la décision fixant le pays de destination est régulièrement motivée en droit par le visa des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui prévoient que " l'obligation de quitter le territoire français " fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office " ; que cette décision doit par ailleurs être regardée comme suffisamment motivée en fait par l'indication que l'intéressée est de nationalité kosovare et qu'elle pourra être reconduite d'office à la frontière du pays dont elle a la nationalité ou de tout autre pays où elle établirait être légalement admissible ;

27. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ; que si Mme A, soutient avoir été victime de violence au Kosovo en raison de son concubinage avec un jeune homme d'origine ashkalie, elle n'établit ni la réalité des faits allégués ni l'existence de risques personnels et actuels en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance, par la décision désignant le pays dont elle a la nationalité comme pays de renvoi, des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

28. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de la Haute-Savoie est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé ses décisions du 24 octobre 2011 et mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros ;

29. Considérant que les conclusions de Mme A aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par elle et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1105997 du 2 mars 2012 du tribunal administratif de Grenoble est annulé.

Article 2 : La demande de Mme A devant le tribunal et ses conclusions devant la Cour sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Valbone A et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 23 octobre 2012, à laquelle siégeaient :

M. Moutte, président de chambre,

M. Bézard, président,

M. Zupan, président-assesseur.

Lu en audience publique, le 13 novembre 2012.

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N° 12LY00871

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY00871
Date de la décision : 13/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-02-01 Étrangers. Séjour des étrangers. Autorisation de séjour. Demande de titre de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUTTE
Rapporteur ?: M. Jean-François MOUTTE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : LEREIN FRANCES MERGUY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-11-13;12ly00871 ?
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